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Vice-Versa - Tome 2
Le Titre
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Quatre Ans, Mais Veut Déjà Dominer Le Monde
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Le Titre
Mer 24 Juil 2024 - 12:56
Vice-Versa - Tome 2
Ecrit Par Jittirain



Carte D'identité

Pays D'origine : Thaïlande

Traduction : Johanne
Correction : Amelyma

Nombre De Chapitres : 15 Chapitres

Status : En Cours

Soutenir l'auteur : MEB


Tome 1 - Tome 2

Résumé

Il est si près de devenir assistant coloriste dans la maison de production de ses rêves.

Mais Talay se noie dans la mer et se réveille dans le corps de Tess.

C’est un homme du même âge avec une vie plutôt frivole.

De plus, il se rend compte qu’il est dans “un univers parallèle”.

Qui peut accepter cela ? La seule chose à faire est de trouver un moyen de rentrer chez lui !

Un jour, une lumière brille à travers l’obscurité de son cœur.

Il rencontre Puwadol, un infirmier de son univers.

Cet homme gentil lui dit que, pour rentrer chez lui, il doit trouver quelqu’un.

Cette personne doit venir du même univers et partager le même destin.

S’il trouve cette personne, il y aura un signe indiquant que cette personne est son “portoloin” (comme dans Harry Potter).

Peu importe ses efforts, personne n’est susceptible d’être cette personne.

Un jour, il tombe par hasard sur un annuaire d’école primaire.

À l’intérieur se trouve une photo de Tess entourant de son bras une personne apparemment proche de lui…

Pakorn Uea-angkun serait-il son portoloin ?

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Johanne
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Fantastic Team
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Johanne
Sam 7 Sep 2024 - 17:38



Chapitre 12
MINT
Les êtres humains commettent régulièrement des actes embarrassants au cours d'une même journée. Ce n'est pas du tout étrange. Il faut juste passer à autre chose. Mais comment sauver les apparences alors qu'il me dévisage comme ça ?

Il a fait semblant de dormir. Meeeerde.

Qu'est-ce que je fais ? Je fais semblant d'être ivre comme les deux autres ? Est-ce que je fais semblant de parler en dormant ? Je réfléchis et je me dis que la deuxième solution est la bonne, alors je m'allonge à côté de lui et je commence à jouer la comédie sans honte.

— Oh, ah... um... zzzzz.

Bien que mon comportement soit amusant, je ne veux plus réfléchir. Je suis sûr que je ne l'oublierai jamais, même après vingt ans.

— J'aime beaucoup ton humour.

Je ne réponds pas à la taquinerie et garde les yeux fermés jusqu'à ce que l'un de nous deux soit à bout de patience.

— Talay... Ne fais pas l'idiot

Le murmure à mon oreille me fait craquer. Je résous le problème en simulant un bâillement avant de me redresser pour faire face au fauteur de troubles. Il s'assoit en même temps que moi avec un sourire satisfait. Honnêtement, c'est le sourire que je déteste le plus.

— Oh, tu ne dors pas ? Je suis confus.

Avec mon faux air innocent, je me gratte le cou pour cacher l'embarras.

— Je ne pouvais pas dormir parce que j'ai entendu ta voix près de mon oreille.

— %^&*($#!@*%)+%$@

Acculé, je parle une langue étrangère pour changer de sujet.

— Oui, c'est exactement ce que j'ai entendu. Qu'est-ce que tu as dit tout à l'heure, d'ailleurs ?

Je ne sais pas si Tun est sérieux ou non. Je suppose qu'il n'a pas pu entendre clairement mon marmonnement. Avec cette conclusion, je me sens soulagé.

— Rien. Va dormir. Je te promets de ne pas faire de bruit.

— Je n'ai plus sommeil.

— Moi non plus.

Je suis bien réveillé à cause de l'incident récent.

— Restons debout, alors.

Je ne décline pas sa proposition. Nous glissons nos fesses pour nous appuyer sur le canapé, puis nous regardons les deux copains ronfler bruyamment.

— On ne s’est pas parlé depuis un moment.

Deux mois. Cela semble court, mais aussi long. Quoi qu'il en soit, les changements dans mon entourage me donnent l'impression que cela fait bien longtemps que Tun et moi n'avons pas parlé.

— Comment tu vas ? Je t'ai rendu visite au café, mais on m'a dit que tu avais démissionné.

— Oui, je m'ennuyais, alors j'ai démissionné pour vivre aux crochets des parents de Pakorn.

On dirait qu'il plaisante, mais son regard est sérieux.

— Super.

Je voudrais vomir sur sa pelouse.

— Tu n'as pas besoin d'avoir l'air si impressionné. Tes yeux sont étincelants.

— Peu importe.

S'il est capable de s'entêter à interpréter mon air agacé de manière positive, qu'il en soit ainsi.

— Et toi ? Comment tu vas ? demande Tun.

Ce n'est pas la meilleure idée de me plaindre de la dureté de la vie et de la solitude. Pour protéger mon image, je lui raconte la version fantaisiste de ma vie.

— J'ai été très occupé. J'ai dû discuter d'un film avec M. Villeneuve.

— Qui ?

Il penche la tête en signe de confusion. En voyant son air perplexe, je ne peux m'empêcher de rire dans ma tête.

— Denis Villeneuve, un réalisateur. Tu le connais ? Il m'a appelé pour me consulter sur Dune Part II.

— Je le connais. Mais il existe dans cet univers ?

— Oui.

— Je ne te crois pas. Prouve-le.

— Garde le secret, d'accord ? Ne le dis à personne.

Je tends mon téléphone avant de le retirer rapidement. L'écran n'affiche rien d'autre que des icônes d'applications colorées, mais mes talents en matière d'excuse me permettront d'éviter d'être démasqué. "Sicario, Arrival, Prisoners..."

— Tu as colorisé ces films ?

— Non. Je les ai tous regardés. J'étais le spectateur.

Tun secoue la tête en entendant ça.

— Tu ne peux pas faire des blagues comme ça si tu n'es pas un putain d'idiot.

— Je suis aussi idiot que toi.

Nous rions tous les deux et nous nous sentons plus à l'aise l'un avec l'autre.

Il y a une chose que je ressens, c'est que peu importe la durée de notre séparation, nous ne serons jamais des étrangers lorsque nous nous retrouverons.

— Talay.

— Quoi ?

— Talay.

— Quoi ?

— Tes bêtises m'ont manqué.

— Hein ?!

— Tes blagues nulles m'ont manqué. Ton rire m'a manqué. Ça m'a manqué de parler de choses stupides mais divertissantes avec toi. Maintenant que tu es là, j'ai l'impression d'avoir perdu mon temps, poursuit Tun en marquant une pause.

— ...

Bientôt, j'entends la phrase suivante.

— J'aurais dû venir te voir il y a longtemps.

J'ai eu la même pensée. Je regrette encore d'avoir enduré la solitude pendant deux mois. Bien que j'aie rencontré tant de gens pendant cette période et que je n'aie pas eu de répit dans mes nombreuses missions, rien ne m'a autant apaisé que de le voir.

Nous pouvons nous voir pour discuter de tout et de rien. De n'importe quoi. Et cela suffit.

Ce sont ces pensées que j'ai envie de lui dire, mais je n'arrive pas à dire un mot. Je laisse le temps s'écouler lentement. Nous restons longtemps silencieux. Enfin, j'ai une réponse...

C'est la seule réponse qui décrit ce que je ressens.

— Moi aussi.


La décision de se séparer et de repartir à zéro a conduit Friend Credits à déménager de leurs appartements. La solution pour les retrouvailles avec un budget limité est donc de louer un endroit moins cher. Nous avions l'habitude de travailler chez Au ou Up, mais maintenant c'est la maison de Pakorn qui est notre lieu de travail.

Heureusement, la famille nous accueille et est prête à nous aider. Nous n'avons pas à nous soucier de la nourriture pendant que nous écrivons un scénario.

Après une semaine passée à préparer le nécessaire et à chercher un endroit à louer, nous sommes tous prêts à commencer à travailler.

— Allez. Nous nous sommes gavés. Il est temps de travailler.

Up applaudit pour rassembler tout le monde sur la pelouse, en portant notre matériel de travail. Travailler sur une natte sous un arbre est plutôt agréable.

— Si vous avez de bonnes, d'excellentes idées, levez-vous.

Nous plaçons un très vieux tableau blanc au milieu, avec Up comme scripteur.

— Moi d'abord.

Au lève la main. Il se lèche les lèvres en faisant défiler sa tablette.

— Vas-y, mec.

— Je veux écrire une anti-intrigue. J'en ai marre de nos scénarios habituels. C'est encore mieux de changer de genre, de passer de la romance à l'horreur. C'est un défi.

Voyant que tout le monde l'écoute attentivement, Au explique plus en détail.

— Mon idée approximative est un personnage qui chasse les fantômes alors qu'il est lui-même un fantôme !

— Approuvé ! Comme c'est excitant ! s'enthousiasme Tun.

Up s'oppose tout de suite.

— Tun, espèce de voyou, réfléchis d'abord avant de le complimenter.

— C'est tellement cliché.

Je secoue la tête, relativement d'accord avec Up. Il y a beaucoup de films avec cette intrigue dans mon univers.

— Ce n'est pas tout, insiste Au, qui n'abandonne pas. Il y a un double rebondissement. Après avoir découvert qu'il est un fantôme, il se rend compte qu'il possède quelqu'un.

J'ai mal à la tête...

J'ai envie d'enfoncer mes orteils dans mes narines et de mourir.

— N'oublie pas de prendre en compte le budget pour le maquillage et les images de synthèse. On va être foutus.

En plus de ne pas être d'accord avec son idée démesurée, je mentionne le budget de production.

— Si vous n'aimez pas, très bien, alors, marmonne le propriétaire de l'idée, comme s'il maudissait quelqu'un.

Je ne sais pas s'il s'adresse à ceux qui ne sont pas d'accord ou aux esprits qui nous entourent.

— C'est mon tour, dit Up avec un visage confiant. Je veux faire une adaptation cinématographique de BOY. C'est l'histoire d'un garçon qui peut voyager dans le temps, ce qui provoque des catastrophes à chaque fois, résume-t-il, n'ayant pas reçu de réponse de la part de ses amis.

— Ça ne vous intéresse pas ?

— Non.

— D'accord.

Nous réfléchissons de toutes nos forces pendant une heure, mais nous n'avons toujours pas d'idée décente pour faire un film. Nous ne nous précipitons pas pour autant. Nous allons continuer à présenter nos idées parce qu'on ne peut pas simplement écrire un film comme ça. Il faut penser au résultat final : S'il attirera et captivera les spectateurs ou non.

— Hé.

Tun me tapote le bras et me chuchote à l'oreille alors que les deux copains se concentrent sur la sélection d'une intrigue parmi d'innombrables idées.

— Quoi ?

— J'ai lu le scénario de mon dernier film, mais je suis mort avant le tournage.

— Vraiment ? demandé-je, en jetant un coup d'œil aux copains scénaristes devant moi.

Nous sommes assis assez loin l'un de l'autre, donc je suis sûr qu'ils n'entendront rien qu'ils ne soient pas censés entendre.

— Oui, ça raconte l'histoire de deux amis qui se retrouvent une fois par an à une fête de retrouvailles.

Tout en parlant, Tun se penche plus près et baisse progressivement la voix. Chaque mouvement est naturel. Je suis le seul à ne pas pouvoir me concentrer.

C'est probablement l'odeur familière de son corps. L'odeur de son shampoing de la douche du matin, de sa crème de douche, du lait et des biscuits de sa mère, ou je ne sais quoi encore. Tout me fait perdre pied.

— Tu m'écoutes ?

— Oh, vas-y.

Il me tape sur l'épaule pour me ramener à la réalité. Une fois que je me suis ressaisi, je réalise qu'il ne fait presque plus qu'un avec moi.

— Tu peux te reculer un peu ?

Au lieu d'obtempérer. Tun reste dans la même position.

— Je dois élever la voix si je m'éloigne. Tu m'écoutes ou pas ?

— D'accord, alors.

— Les personnages principaux se rencontrent lors d'une fête de retrouvailles. Leur relation progresse rapidement et ils emménagent ensemble peu de temps après. Le tournant des événements est que la protagoniste féminine disparaît un jour sans raison. Le protagoniste masculin a beau essayer de la retrouver, il n'y parvient pas.

— Que se passe-t-il ensuite ? Allez, donne m'en plus.

— Il rencontre une femme à une fête de retrouvailles l'année suivante. Même si son apparence, sa personnalité et ses préférences diffèrent de celles du personnage principal, elle connaît son secret que seul notre protagoniste féminine connaît.

Le début est passionnant et l'histoire est pleine de suspense. C'est intéressant. Mais...

— Comment ça se termine ? Dis-moi.

Donne-moi une surprise. J'aimerais un grand rebondissement.

— Je n'ai pas lu jusqu'à la fin.

— Oh, oh, ah...

Les mots me manquent. La voilà, la surprise que j'attendais. Rendez-moi ces deux minutes !

— Qu'est-ce que vous faites ensemble ?

Ooh !

La voix d'Au nous fait sursauter. Nous nous écartons l'un de l'autre, inévitablement, et c'est moi qui me braque en le niant.

— Rien.

— Tu as de bonnes idées ?

— Pas encore, répond Tun.

Il déplace son regard et écrit quelque chose sur la tablette pour éviter le regard suspicieux d'Au. Je veux lui demander s'il est vraiment acteur. Ce n'est pas du tout un jeu d'acteur fluide.

— Le problème, c'est qu'on a eu des tas d'idées. Rien ne sonne bien. Rien ne fonctionne. Je pense que nous n'avons pas d'autre choix que d'utiliser cette intrigue.

— Qu'est-ce que c'est, Au ? Je suis curieux, dit Up.

— Préparez-vous à rougir.

Je déteste tellement leurs voix et leurs yeux enjoués, mais j'attends patiemment de l'entendre.

— L'histoire de deux meilleurs amis qui tombent amoureux sans s'en rendre compte.

— C'est plus cliché que les précédents.

Une myriade de films racontent des histoires d'amour entre meilleurs amis. Quelle que soit la créativité de la narration, elle ne peut jamais être extraordinaire.

— Attends, écoute d'abord, Tess. C'est peut-être un cliché, mais la scène romantique est à couper le souffle. Tu veux en savoir plus ?

— Tu es allé si loin.

— Dans cette scène, l'acteur principal est ivre et s'endort. La femme, encore éveillée, saisit l'occasion de fixer son visage, poursuit Au avec passion, en jouant dramatiquement chaque mouvement. C'est un mystère de savoir ce qui lui arrive. C'est peut-être l'amour débordant dans sa poitrine qui la pousse à énumérer les points positifs de l'homme... un par un. Il ouvre alors les yeux et la fixe pour montrer qu'il a tout entendu.

— Eeeeeek, je rougis, Au. Ça ne te dit rien ?

Up tape plusieurs fois sur le bras de Au tandis que je me fige.

Putain ! Ils l'ont vu ? Je croyais qu'ils dormaient.

Qu'est-ce que je fais ? Mes pensées s'emballent et ce qui s'est passé hier soir se rejoue dans ma tête. Je ne peux même pas regarder Tun.

Comment Tun a-t-il interprété mon geste ?

Admiration platonique ?

Romantique ?

Juste une personne idiote qui a tant de temps libre pour faire des choses stupides ?

Quoi qu'il en soit, je ne peux pas deviner ce qu'il pense.

— Je reviens tout de suite.

— Hé ! Où tu vas, Tess ?

Incapable de penser à autre chose qu'à courir, je me précipite dans la salle de bain et plonge ma tête dans le lavabo pour me débarrasser de l'embarras.


“Signes de l'amour”


Je tape dans la barre de recherche et j'hésite avant de cliquer sur Entrée.

Je ne sais pas si Qoogle peut me fournir la réponse. Si je demandais à un adolescent, il me demanderait s'il existe une réponse précise à cette question. C'est plus fort que moi. En tant que personne qui n'a jamais été amoureuse depuis longtemps, c'est tout ce que je peux faire.

— Salut...

Avant que je ne lise l'information, la porte est poussée avec la voix horrifiante de Kita, mon colocataire.

— Pourquoi tu es à la maison aussi tôt aujourd'hui ? demandé-je, en fermant l'ordinateur portable d'une main.

Personne ne doit savoir que je fais ce genre de choses.

— Tu ne m'as pas rejoint. Je m'ennuyais, putain.

Je lis sur son visage que la fête n'a pas été aussi divertissante qu'elle aurait dû l'être.

— Tu t'ennuyais même avec Fuse ?

— C'est le pire. Ce voyou fou amoureux emmenait sa copine partout avec lui. Il n'a pas fait attention à son ami.

En entendant sa plainte, je me dis que c'est le bon moment. Je vais profiter de la situation pour lui poser des questions sur l'amour. Au moins, j'obtiendrai un autre point de vue de l'un des êtres humains qui sont tombés amoureux très souvent dans le monde.

— Pourquoi tu ne te trouves pas une petite amie ?

— Tu es bizarre. Tu m'as poussé à rompre avec ma petite amie.

Kita se débarrasse de ses chaussures et entre à grands pas dans la maison pour s'asseoir sur le canapé avec un visage sérieux.

— Tu comprends qu'un homme beau et riche qui a le don de causer des ennuis aux autres comme moi est super populaire ? Je ne peux pas choisir avec qui je sors.

Pourquoi je dois fréquenter un homme narcissique comme lui ? Il a même fait de son défaut un atout.

— Comment tu décides quand tu choisis ?

— Demande-toi. Tu as toujours choisi les bonnes.

Ça a l'air sarcastique. D'après mon expérience des ex de Tess, c'était autre chose. Ce n'est pas qu'elles étaient horribles. Je pense que c'est Tess qui était le problème.

— Je veux tes conseils parce que j'ai toujours tout gâché.

— Oh, mon dieeeeeeu.

Kita passe sa main sur sa poitrine de façon si théâtrale que j'ai envie de lui botter le cul.

— Puisque Thattawa, un homme aux innombrables expériences amoureuses de piètre qualité, a besoin de mes conseils, je vais lui en donner.

— Ouais. Viens-en au fait.

Il est le meilleur pour raconter des conneries.

— Choisis avec ton cœur. Si tu aimes cette personne, sors avec elle.

— C'est ça le problème. Comment je sais que j'aime quelqu'un ? À quel stade ?

La question semble stupide. Je n'ai pas vraiment d'expérience.

— Comment se fait-il que tu sois nul en amour ces derniers temps ?

— Je crois que je ne connais rien à l'amour.

— Tes paroles sont aussi ridicules que les dialogues du film de Pakorn, soupire-t-il.

Qui devrait être triste en ce moment, Pakorn ou moi ?

— Pour moi, si je veux cette personne dans ma vie, j'appelle ça de l'amour.

— C'est tout ?

— Ne réfléchis pas trop. Ne complique pas les choses. Si tu veux te débarrasser de quelqu'un dans ta vie, c'est que tu ne l'aimes plus.

— Oh, c'est comme le fait que je veuille me débarrasser de toi ?

— Whoa, c'est plus que de l'amour entre nous, Tess. Notre relation est prédestinée.

C'est vrai, je suis destiné à rembourser mon péché. Je ne sais même pas combien de problèmes cet ami va causer dans le futur.

— Tu as des sentiments pour qui ?

— Personne.

J'écarte la question. Qui aurait cru qu'on m'interrogerait après cette conversation ?

— Ne crois pas que je n'en ai pas la moindre idée.

Kita me fixe intensément. Plus il s'approche de moi, plus je me sens nerveux. J'essaie de le repousser.

— Tu n'as aucune idée.

— Je sais. C'est cette personne qui est venue ici un jour.

Il insiste fermement et s'apprête à ajouter quelque chose, mais je lui ferme rapidement la bouche avec ma main. Je ne sais pas pourquoi, mais je ne veux pas entendre le nom de cette personne.

— La ferme ! Ne le dis pas. Ne...

Kita m'arrache la main, n'écoutant pas.

— De quoi tu as peur, Tess ? De la réponse ?

Probablement, mais ce n'est pas parce que je ne peux pas accepter cette personne.

J'ai juste peur d'affronter quelque chose d'inconnu comme l'amour.

— Tu n'as pas à avoir peur de le regretter plus tard.

— …

— Ce dont tu devrais avoir peur, c'est de le perdre.


J'ai arrêté de chercher quoi que ce soit sur l'amour dans le moteur de recherche. J'ai arrêté de me poser la question encore et encore jusqu'à en perdre le sommeil. J'ai décidé de faire la paix avec ça en me disant que je saurai quand les sentiments seront indéniables.

Les jours ont passé. La gêne que j'avais lorsque j'étais avec le groupe de Friend Credits a disparu. Je peux maintenant les regarder en face et ils n'en parlent plus jamais.

Aujourd'hui, c'est la même chose que les autres jours. Nous avons toujours du mal à démarrer. Au et Up ne sont pas encore là. Comme toujours, j'arrive tôt pour prendre le petit déjeuner que prépare la mère de Pakorn afin de recharger mon énergie. Ensuite, je m'installe à la table du balcon avec Tun pour réfléchir à une idée de nouveau scénario. Le père, de bonne humeur, siffle en lavant sa vieille voiture pour égayer l'atmosphère.

— À qui elle appartient ?

— C'est la voiture préférée de mon père.

Je secoue la tête et montre du doigt.

— Non, je veux dire l'autre.

Le spectacle familier se répète inlassablement. Le quotidien du propriétaire de la maison se résume à quelques activités. L'une d'entre elles consiste à laver la voiture européenne vieille de plusieurs décennies. Cependant, la question qui me vient à l'esprit concerne le bus laissé sous le grand arbre. Comment se fait-il qu'il n'ait pas été entretenu mais ruiné par toutes ces crottes d'oiseaux ?

— Il appartenait à son ami lorsqu'il travaillait sur un plateau de tournage. L'ami était à court d'argent, alors il le lui a vendu à bas prix, m'explique Tun.

— Et il l'a laissé là ?

J'ai déjà vu des camionnettes de production, mais ça c'est un véritable bus. Il est petit, avec une capacité d'une quinzaine de personnes. Il a une allure vintage malgré sa couleur d'origine sale.

— Il ne sert à rien, il est lent comme une tortue.

— Vends-le alors, lui proposé-je.

Si personne n'achète son scénario, il peut se faire de l'argent avec ça.

— Nous avons estimé le prix. Il n'en vaut pas la peine. Il vaut mieux l'exposer comme ça.

Ce n'est pas une exposition. Il s'agit de toilettes pour oiseaux.

— Il y a moyen d'en faire un meilleur usage.

Laissez-moi réfléchir. Je suis le genre de personne qui aime utiliser et tirer le meilleur parti de tout. Le vieux bus n'est pas un problème.

— J'ai une idée.

Elle me vient à l'esprit après avoir réfléchi.

— Ne me la suggère pas.

Son geste fait vraiment tressaillir mon poing. Il me tourne le dos.

— Écoute-moi bieeeen.

Je secoue agressivement son corps pour attirer son attention.

— Puisque Friend Credits n'a pas de bureau, nous pouvons convertir le bus en studio.

— Hein ?

Le grand type se retourne brusquement.

— Comme c'est un bus, il peut se déplacer, non ? Si nous sommes à court d'idées, nous pouvons rouler à la recherche d'inspiration.

Il y a bien des maison-bus, mais un studio-bus, c'est autre chose. C'est époustouflant.

— Je vais te le dessiner.

Je prends une feuille de papier et un crayon des mains de Tun pour dessiner avec enthousiasme l'image que j'ai en tête.

— Nous garderons le siège du conducteur et celui d'à côté.

Je commence par un carré, la forme du bus.

— Les sièges passagers à l'arrière seront enlevés, puis nous installerons des tables et des chaises près des fenêtres. Nous installerons un tableau blanc ici et des étagères pour les livres et les DVD ici. Cet espace est réservé aux plantes.

L'image que j'ai en tête est fantastique, mais la feuille de papier ne montre que des cercles et un enchevêtrement de lignes au crayon qui ne ressemblent en rien à une décoration d'intérieur.

— Ton croquis est nul.

C'est là qu'intervient son insolence. Est-ce la personne dont je suis tombé amoureux ?

— C'est aussi nul que ton écriture.

— Et les toilettes ? demande-t-il, tout en faisant mine de ne pas être d'accord avec l'idée.

Ce bref instant gonfle mon cœur vide.

Qu'elles soient petites ou grandes, stupides ou importantes, mes pensées retiennent toujours son attention. Il ne peut tout simplement pas réagir normalement comme il le fait avec les autres, alors il devient insolent comme d'habitude.

— Tu as déjà entendu parler des toilettes publiques, M. l'acteur ?

Il secoue la tête. Je ne peux m'empêcher de lui faire deux pichenettes sur le front.

— Le bus est si petit, et pourtant tu es si exigeant.

— Si nous ne construisons pas de toilettes, pourquoi pas un mini-frigo ? Au cas où nous aurions faim.

— C'est ton argent. Fais ce que tu veux.

— Quoi ? C'est moi qui paie la conversion ?

Pourquoi a-t-il l'air d'attendre beaucoup de ma réponse ? Le bus appartient à sa famille. S'il est transformé en studio, il appartiendra à l'équipe de scénaristes. Qu'est-ce que cela a à voir avec moi ? Mais lorsque je croise son regard, je n'arrive pas à exprimer franchement mes pensées. Tout ce que je peux dire, c'est...

— Nous paierons tous.

— Intéressant.

— Je te déteste.

Pourquoi est-ce que je perds toujours contre Tun ?

— Je pense que nous devrions laisser un espace pour faire pousser des plantes afin de nous rafraîchir l'esprit.

— Tu veux faire pousser des plantes ?

— Oui. Peut-être quelque chose de petit comme un cactus. Peu importe le genre. Juste un petit coin de nature pendant que vous travaillez.

— D'autres suggestions ?

— La couleur est un peu démodée. Peignons-le.

J'ai vu beaucoup de bus vintage de couleur crème. Si nous l'égayons pour qu'il corresponde à l'atmosphère agréable de la maison où il est garé, il sera parfait.

— Je pense que le vert menthe fera l'affaire.

— Menthe...

La voix de Tun s'interrompt.

— Vous êtes d'accord, monsieur.

— Comme vous l'entendez, monsieur.

Je l'ai appelé “monsieur” en plaisantant et il m'a répondu immédiatement.

— Hé, les gars sont là.

Sans perdre de temps, je m'élance vers les potes, Au et Up, qui transportent le matériel de travail et plusieurs canettes de bière pour s'installer sous l'arbre. En fait, nous avons fixé notre heure de travail à onze heures. Ces deux-là sont arrivés après midi. Quelle assiduité !

Quelques minutes après une discussion, nous sommes tous d'accord pour transformer le bus en notre studio de rêve.

Nous commençons par faire vérifier le moteur et par engager un architecte d'intérieur pour aménager l'intérieur du bus comme nous le souhaitons. Sans perdre de temps, nous essayons de trouver une idée pour un nouveau scénario.

Toutes mes économies sont consacrées à la réparation du vieux bus. Comme les rêves de mes amis sont importants, je les aide à couvrir certaines dépenses. Malheureusement, je suis dans le corps d'un fils de famille riche dont les dépenses sont strictement contrôlées. Je peux demander ce que je veux, mais la famille doit savoir si j'achète quelque chose de cher.

Je sors donc tous les bahts de mon portefeuille et j'en emprunte à Kita et à Fuse. Les gars cassent même leur porte-monnaie pour compter les pièces. Enfin, des semaines de dur labeur s'achèvent.

... Le studio-bus est terminé.

— Je suis très excité. C'est le nouveau studio de Friend Credits.

Le bus a été conduit jusqu'à la pelouse, flanqué d'une table et de chaises blanches pour la fête à venir.


Quels que soient les festivals, les moments de bonheur ou les luttes, ils ne manquent jamais une occasion de boire. Tun est plus sérieux, comme d'habitude.

— J'ai failli oublier. J'ai un cadeau pour célébrer notre nouveau lieu de travail.

— Montre-moooooiii, s'exclame Up avec enthousiasme.

Le fils du propriétaire de la maison apporte un pot de fleurs pour nous le montrer.

— J'ai regardé dans mon carnet d'atelier. L'instructeur a dit que cette plante avait une signification. Elle représente l'amour et la bonne volonté.

Le carnet doit être celui de Pakorn. Je me souviens qu'il a participé à un atelier sur les plantes afin d'obtenir les informations nécessaires à l'écriture du scénario.

— Comment ça s'appelle ? demande Up.

Nos regards se croisent sur la plante qui a quelques feuilles dans le pot.

— Un arbre à trompettes roses. En fait, je veux que Tess s'en occupe.

Tun sourit, mais j'ai une question.

— Quelle est sa taille adulte ?

— On dit qu'il mesure entre huit et vingt-cinq mètres.

Putain de merde ! Mes oreilles bourdonnent.

— Pourquoi planter un arbre de vingt-cinq mètres de haut dans un bus ? Tu te fous de moi ?

— Tu pourras le couper quand il sera grand, Tess, argumente-t-il. Tu ne serais pas content de te réveiller un jour et de voir des fleurs roses s'épanouir ?

— Espérons que je survivrai jusqu'à ce jour. Combien d'années faut-il pour qu'il fleurisse ?

Ce que je voulais dire, c'était un cactus ou un petit arbre mignon placé près de la fenêtre. Je ne m'attendais pas à devoir m'occuper d'un arbre à trompettes roses d'une hauteur de vingt-cinq mètres à l'âge adulte. Wahhhhhhh.

— Pas besoin de pleurer de joie.

— Est-ce que j'ai l'air heureux ?

Peu importe. Comme il l'a déjà mis en pot, nous pouvons l'utiliser pour décorer le bus pendant qu'il est encore petit. Quand il sera grand, nous le planterons dans le sol. Bon sang...

J'aimerais pouvoir remonter le temps. Je n'aurais pas parlé d'une plante près de la fenêtre.

— D'accord, Friend Credits a maintenant une plante porte-bonheur. Il est temps de faire une visite du studio ! Cela fait tellement longtemps que j'attends de pouvoir le filmer que je me sens fatigué, dit Au en s'étirant.

C'est maintenant l'heure de la visite du studio par Talay et la bande.

Ce bus est entièrement équipé. Si nous en avons assez de travailler à l'intérieur, nous pouvons nous installer à la table ronde blanche que les parents de Tun ont préparée pour nous. Si nous avons le syndrome de la page blanche, nous pouvons démarrer le moteur et partir. Il n'y a rien de mieux que cela.

— Cette table est la mienne. Elle est près du réfrigérateur.

Au entre en premier, suivi de Up.

— Je prends celle-ci, alors. Vous pouvez vous disputer le reste.

— Qu'est-ce que j'ai à voir avec ça ? demandé-je d'un air confus.

— Tu fais partie de notre équipe, Tess. Même si tu ne peux pas nous aider à écrire des scénarios, ton visage endormi suffit à nous divertir.

Up me complimente-t-il ou m'insulte-t-il ? J'ai l'air un peu inutile. Malgré tout, je suis heureux d'être accepté par mes amis.

— Je suis touché. Merci.

Hic...

— Arrête de faire semblant de pleurer.

Merde, il sait. Je pensais que c'était fluide.

Enfin, quelqu'un comme Talay a un studio pour travailler comme les autres. Si je ne sais pas quoi écrire, je peux apporter mon ordinateur portable pour m'entraîner à l'étalonnage que je n'ai pas fait depuis si longtemps.

Comme Au et Up adorent leurs tables près des fenêtres, je me dirige vers l'arrière du bus, vers la table intégrée. Après m'être assis et avoir ajusté la chaise, Tun s'approche de moi avec une couverture aux couleurs douces.

— Pour toi.

J'avoue que je suis trop confus pour l'accepter, mais il reste là, à la tendre comme ça.

— Utilise-la pour te couvrir quand il fait froid.

Cela me semble familier. On dirait une scène de roman.

— Et toi ?

— J'en ai une.

Il soulève une autre couverture. Le motif du dessin animé est plus mignon que le mien.

— Merci.

Il m'a donné une plante et une couverture. En y réfléchissant bien, on pourrait croire qu'il a des sentiments pour moi. Eh bien, honnêtement, mon cœur a déjà fondu quand il a souri.

— Les gars ont pris les tables à l'avant. Il n'en reste qu'une à côté de toi.

Il s'assoit sur sa chaise et caresse la texture de la table en bois. Il regarde tranquillement par la fenêtre, comme s'il était plongé dans ses pensées.

— À quoi tu penses ?

— Au scénario que je veux écrire.

— Tu es vraiment sérieux !

— Je pense à ce que Pakorn ferait.

Sa voix est à peine audible. Elle est si douce... que nous sommes les seuls à l'entendre.

Je me demande pourquoi Tun en parle toujours quand les autres sont là. Cela ne veut-il pas dire que nous devons nous rapprocher et parler en chuchotant ?

— Pakorn aime les films d'amour.

Je ne le connais que depuis peu, mais je peux dire quel genre d'intrigue le passionne.

— Je suis d'accord. Comment ce serait de continuer à faire ce que Pakorn aime ? Comment ce serait de croire en lui ? demande Tun.

Faire un film d'amour.

Je n'ai peut-être pas l'expérience de l'amour, mais je crois que je peux m'investir dans ces histoires après avoir appris et compris l'amour.

— Que penses-tu d'écrire notre histoire ? C'est super fantaisiste.

— Haha.

Je me fends d'un rire sec face à son idée saugrenue. Sans se gêner, il reprend.

— Un homme arrive dans un pays étranger. Il est seul et perdu, alors il a besoin de quelqu'un pour l'aider à se sentir mieux.

Je ne comprends pas pourquoi il me regarde si gentiment en parlant. Et qui est l'homme seul ? Est-ce moi ou lui ? Au fond de moi, je suis curieux. Mais je n'ose pas demander.

— Talay, tu sais comment ça se termine ?

— Comment ?

— Ils tombent amoureux.

Je manque de m'étouffer avec ma salive et je réponds avec incrédulité.

— Qu'est-ce que tu as dit ?

— Si nous faisons un film d'amour, peu importe comment il se termine, l'amour va forcément se produire, n'est-ce pas ?

J'ai oublié que nous parlions de films. Je pensais qu'il parlait de nous.

Est-ce que quelqu'un sait à quel point j'essaie de garder mon sérieux quand mon cœur palpite dangereusement ?

— Et s'ils ne se rencontraient pas d'une manière inimaginable ? Et s'ils se rencontraient simplement un jour normal ?

Dans un monde normal, je me demande s'il serait possible que notre rencontre aboutisse finalement à l'amour.

Il m'écoute et sort un papier. Il écrit quelque chose de presque indéchiffrable, mais la détermination se lit sur son visage.

Tun présente l'histoire d'une femme seule dans un pays étranger qui trouve un rendez-vous sur une application. Lorsqu'elle rencontre l'homme, il n'est pas le genre de personne qui l'impressionne. C'est un étranger qui présente des traits qu'elle n'aime pas, et il en va de même pour lui. Ils finissent par ne pas se choisir ce jour-là !

— En quoi cela ressemble-t-il à notre situation ?

Je pointe du doigt la phrase “Ils ne se choisissent pas”.

— Parce que je ne suis pas ton genre, répond immédiatement Tun.

— J'ai dit ça ?

— Je suis ton genre, alors ?

Je presse mes lèvres l'une contre l'autre. Je reste silencieux et le laisse continuer à me poser des questions.

— Qu'est-ce que tu aimes chez moi ?

— Je ne sais pas.

— C'est facile de répondre. Nous nous sommes rencontrés et avons appris à nous connaître. Tu sortirais avec moi ?

— Je te retourne la question. Tu le ferais, toi ?

— …

Contre-attaqué, Tun se tait. Vous voyez ? Il a dit que c'était facile de répondre, mais il n'a pas pu le dire.

Je suis sûr d'une chose. Une personne gentille et généreuse qui voit la valeur de chacun ne blessera jamais les sentiments des autres en les rejetant. Il choisit de rester silencieux, et c'est clair qu'il ne me choisira jamais.

Et ma réponse ?

— Les enfants, descendez prendre une photo en guise de souvenir.

La voix du père de Tun interrompt le fil de mes pensées. Quelques secondes plus tard, le bus s'ébranle sous les pas d'Au et d'Up qui descendent du bus comme le leur a demandé l'homme plus âgé.

— Allons-y.

J'observe le large dos pendant un moment et je le suis.

Tout le monde se rassemble sur la pelouse. À notre gauche, il y a un panneau en bois “Friend Credits Studio”. Le bus couleur menthe est derrière nous, en toile de fond.

— Qu'est-ce qu'on dit pour que la photo soit belle ?

— Un arbre à trompettes roses, suggère le fils du propriétaire de la maison.

— D'accord. Son père lève l'appareil photo pour nous photographier.

Je me souviens encore des photos de Minimalist et d'O.U.R. Studio. Je n'arrive pas à croire que je fais partie de Friend Credits aujourd'hui.

— Rapprochez-vous les uns des autres. Tess était presque hors du cadre.

Pendant que mon cerveau traite toutes les informations, Tun, comme d'habitude, me rapproche le bras. Je ne peux m'empêcher de jeter un coup d'œil à son profil en silence.

Les souvenirs défilent dans mon esprit sans discontinuer. Depuis le jour où nous nous sommes rencontrés, les jours où nous avons passé du temps ensemble, les jours où nous avons ri et pleuré, et les jours où mon cœur s'est emballé rien qu'en voyant son sourire tantôt enjoué, tantôt doux.

— Dites “arbre à trompettes roses” ensemble.

Je repense aux paroles de Tun, qui a dit que les personnages principaux ne s'étaient pas choisis lorsqu'ils se sont rencontrés pour la première fois. C'est ce que je pensais. Mais avec le temps, j'ai appris qu'il est possible qu'un sentiment change.

Si leur vie est un film à l'eau de rose, l'amour est inévitable.

Et cela ne me dérange pas d'avoir un amour non partagé.

C'est ce dont parlait Kita, n'est-ce pas ? Si je le veux dans ma vie, c'est de l'amour.

— Arbre à trompette rose...

CLICK !

Hum...

Je crois que je suis tombé amoureux de lui pour de vrai.


Tun m'a conduit à l'université pour un examen final dans la voiture bien-aimée de son père, et l'examen s'est bien passé. J'espère qu'une fois la note obtenue, je pourrai accomplir une autre mission, à savoir obtenir le certificat de fin d'études pour Tess.

— Hé, Dol.

— Tu venais rarement, et puis tu as pratiquement disparu. Si je ne t'avais pas appelé, tu m'aurais oublié.

— C'est absurde. J'avais un examen.

J'avais l'habitude de manger régulièrement avec Dol, mais nous nous voyions peu car j'étais occupé. Lorsqu'il m'a appelé cette fois-ci, j'ai accepté l'invitation et je suis sorti rapidement pour le voir.

— Tu as obtenu ton diplôme, n'est-ce pas ? Félicitations. Tu ne diras plus jamais que tu veux mourir.

Regardez-le. Laisse-moi m'excuser de t'avoir appelé pour me plaindre que je ne voulais plus étudier.

— Ugh... Je me suis un peu plaint. Si je n'ai pas un F, alors je serai diplômé.

— Tun n'est pas là ? Je voulais l'inviter.

— Il était occupé avec l'équipe de scénaristes, alors je ne lui ai pas demandé.

Dol acquiesce et me fait glisser le menu, le visage plus stressé que jamais.

— Comment ça va ?

— Bien.

— Il y a quelque chose d'important aujourd'hui ? Tu ne m'as pas invité à sortir parce que je te manquais, n'est-ce pas ?

— Commande d'abord ton repas. Nous parlerons après avoir mangé.

— Comme tu veux.

Je ne demande rien de plus car je commence à avoir faim. Je commande de délicieux plats à engloutir, puis nous avons une conversation importante. Je pense que ce doit être l'une des raisons pour lesquelles Dol a l'air inquiet.

— Je vais aller droit au but. D'abord, Tun ne répond pas aux appels de Pang. Elle a dit que si un jour Credit Cards...

— Friend Credits.

Il ne manquera pas l'occasion de faire une mauvaise blague.

— Oui, c'est vrai. Si Tun et ses amis veulent faire un autre film, ils peuvent en parler à Pang. Elle pourra peut-être les conseiller.

— C'est gentil de sa part. Wahhh.

— Le dernier film a fait un flop. Elle est probablement désolée.

J'ai mal au cœur. J'ai envie de pleurer et de me lamenter pour le film de mes amis pendant deux heures.

— C'est le bon moment. Nous travaillons secrètement sur un nouveau scénario. Pang était une actrice professionnelle. Je pense qu'elle sera d'une grande aide.

— C'est bien. Si Tun ne répond pas à son appel, tu essaieras de la contacter, d'accord ?

— Bien sûr. J'ai son numéro.

— C'était la première chose. Il y a une autre chose que je n'ai pas mentionné dans le groupe. Il n'y a que Jubjang et moi qui sommes au courant, dit l'infirmier en prenant une bouchée de son repas.

Cette fois, ses yeux vacillent visiblement.

— J'ai d'abord pensé à garder le secret, de peur que tout le monde s'inquiète. Mais je pense que tu dois savoir.

— Pourquoi moi ?

Il y a beaucoup de membres. Dol et Jubjang ne sont pas plus proches de moi que des autres.

— Parmi nous, tu es le plus impatient de rentrer chez toi. Je veux te rappeler de te dépêcher.

— Qu'est-ce qui s'est passé ?

— Hier, M... est mort.

Le nom de ma connaissance résonne dans ma tête.

Bien que je ne fréquente guère le groupe, le visage de l'homme qui parlait et partageait nos encouragements il y a quelques mois est bien présent dans mon esprit.

Mon cœur s'effondre.

— Il...

J'ai des hypothèses. L'une d'entre elles est qu'il a mis fin à sa vie comme la précédente. Mais Dol me corrige.

— Non. Il semble que celui qui était dans son corps dans l'autre univers soit mort, alors...

— J'ai compris.

Je coupe court. Parfois, je déteste le destin qui ne nous laisse pas le choix.

J'assemble lentement ma cuillère et ma fourchette. La nourriture devant moi n'a plus l'air appétissante, comme si le seul bonheur de mon cœur s'était évaporé.


Cela fait plusieurs jours que je n'ai pas bien dormi. La raison principale est que je n'arrive pas à contrôler mes pensées et mes émotions.

La perte d'un membre du groupe m'a profondément affectée, et je ne sais pas si je dois en parler à Tun. J'ai peur qu'il soit inquiet comme moi. Après y avoir réfléchi, je ne lui dirai pas tout de suite. Je trouverai le bon moment pour lui en parler.

— Talay, j'ai un peu modifié l'intrigue. Tu peux la relire ?

La voix grave me ramène à la réalité. Il me tend son cahier préféré.

Je ne sais pas s'il a du talent ou s'il est tombé amoureux de l'écriture de scénarios. Il a passé plusieurs jours à travailler de toutes ses forces dessus. Je lis les paragraphes et visualise tout à travers les lettres, puis je lève les yeux et affiche un sourire fier.

— J'aime bien. C'est sympa.

— C'est vrai ? Montrons-le à Au et Up. S'ils l'approuvent, nous pourrons en faire un scénario.

— D'accord.

J'aimerais pouvoir me débarrasser de mes soucis et me concentrer sur le présent. Au diable le futur. Au diable le destin. Je veux courir après cette étendue derrière notre bus-studio.

— J'aime bien. Mais tu en penses quoi si l'homme mystérieux a un secret et qu'on ajoute une situation qui éveille les soupçons ?

Up propose d'autres idées après avoir lu la terrible écriture de Tun.

— Mince. Un scénario avec un mystère qui crée du suspense. C'est notre style. En plus, c'est un lien avec la société. Une fois, j'étais tellement seul que j'ai essayé de trouver un rendez-vous sur une application.

— Comment se fait-il que je n'en ai jamais entendu parler, Au ?

— Ça ne te regarde pas.

Les deux amis se jettent un regard noir. Au change d'humeur et poursuit avec enthousiasme.

— Le style est similaire à celui de Long Distance sur certains points. Si nous tirons les leçons des critiques de la dernière fois, ce sera mieux.

L'espoir brille dans ses yeux. Nous réfléchissons pendant des heures dans le studio jusqu'à ce que nous arrivions à la conclusion que nous allons développer cette histoire jusqu'au bout.

— Enfin ! Merci, Tun. Je suis gonflé à bloc.

Up jette son crayon sur la table et s'étire après que nous ayons conclu.

— C'est l'idée de Tess.

Tun me montre du doigt. Je m'empresse de répondre.

— Non, c'est celle de Tun.

— Ouais, qui que ce soit. Je vous aime les gars. Faites-moi un câlin.

— J'espère qu'il aura du succès et qu'il rapportera un milliard. Cette fois, j'écrirai et je jetterai un sort aux spectateurs en même temps.

Au devrait arrêter d'écrire et cultiver la magie noire.

Quand cesseront-ils de penser à gagner un milliard ! Ils ne retiennent jamais la leçon. C'est déjà difficile d'écrire un scénario qui ne sera pas critiqué négativement.

— Faisons la fête.

Ces deux-là sortent du bus en courant. Je sais sans aucun doute qu'ils vont chercher de l'alcool et déclarer la fin de la journée.

L'emploi du temps quotidien de Friend Credits a un schéma. Nous travaillons une demi-journée et nous nous reposons une demi-journée. Je pense qu'il faudra des années pour finir d'écrire ce scénario, et je ne sais pas si je serai là jusqu'à ce jour.

— C'est la première fois...

La voix grave rompt le bref silence.

— Quoi ?

— C'est la première fois que quelqu'un est enthousiasmé par mon idée.

Depuis que Tun a rejoint l'équipe des scénaristes, personne n'a jamais approuvé son idée. Cette fois, c'est différent. Il se sent un peu fier d'être accepté.

— Personne ne s'enthousiasmait pour toi quand tu étais un acteur célèbre ?

— Ce n'est pas pareil.

— Nous avons de la chance de les avoir rencontrés. Tu veux toujours retourner dans notre univers ? ne puis-je m'empêcher de demander.

— Bien sûr.

— Oui.

Nous pensons toujours la même chose. Peu importe à quel point cet univers est merveilleux, il ne pourra jamais remplacer ce que nous sommes vraiment.

DING~

La sonnette nous informe de l'arrivée de quelqu'un. J'ai contacté Pang l'autre jour et je lui ai parlé des difficultés rencontrées par l'équipe de scénaristes. Comme elle avait déjà souhaité nous aider, elle s'est portée volontaire pour nous soutenir et nous donner des conseils.

J'ai décidé de l'inviter au studio aujourd'hui pour la présenter à la bande. Je n'ai prévenu personne à l'avance.

— Je reviens tout de suite.

Je cours jusqu'à la porte. Quand je vois le visage familier, j'ouvre rapidement la porte et je la laisse entrer.

— C'était difficile de trouver cet endroit ?

— Pas du tout. La maison de Tun est jolie et ombragée, me complimente Pang.

Elle traverse la pelouse pour se rendre au studio de Friend Credits.

Les deux copains, Au et Up, ont l'air confus lorsque Tun sort du bus à grandes enjambées. Il ne dit rien. Je la leur présente dans le silence.

— Les gars, c'est ma senior du lycée.

C'est parti. Elle est plutôt ma senior dans l'autre univers.

— Pang est professeur de yoga et ah... coach d'acteurs. Elle est douée pour beaucoup de choses.

— Enchanté de vous rencontreeeer.

Leurs salutations et leurs expressions joyeuses me font pousser un soupir de soulagement. J'ai de la chance qu'ils ne me reprochent pas d'avoir amené une étrangère.

La propriétaire du corps de Pang est en fait Fern, mais nous avons convenu de l'appeler Pang. Comme elle n'est pas une célébrité et que peu de gens la connaissent, il y a peu de chances qu'elle soit démasquée. Si nous pouvons lui permettre de reprendre son corps d'origine lorsque l'occasion se présentera, le groupe et moi-même serons plus qu'heureux de le faire.

— Lui, c'est Au. Et celui-là, c'est Up.

— Enchanté de vous rencontrer.

— Wah, tu es si gentille.

Mes amis ont l'air de délirer. Elle a juste souri. Quand a-t-elle été gentille avec vous ?

— Hey, Pang. Ça fait un moment.

Tun parle enfin après être resté silencieux pendant un certain temps.

— Vous vous connaissez ?

La question vient avec une expression suspicieuse de la part d'Au.

— Elle est la senior de Tess. Bien sûr, je la connais.

— D'accord. Tess m'a dit que vous écriviez un scénario de film. J'ai lu de nombreux scénarios auparavant et j'ai été coach d'acteurs pour des stagiaires pendant des années, donc je comprends les émotions des personnages dans une certaine mesure. Si vous avez des questions, n'hésitez pas à les poser.

— Wowww, tu es une bénédiction.

— J'ai oublié. J'ai acheté des snacks.

Elle soulève les sacs aux couleurs douces. Les deux copains la regardaient déjà avec des yeux admiratifs, et maintenant ils sont encore plus impressionnés.

— Tu es si gentille...

— Pourquoi tu ne m'as pas dit que tu l'avais invitée ? chuchote Tun en se penchant.

— Ça s’est fait à la dernière minute.

Je lui tapote l'épaule et je commence à boire de l'alcool en plein jour.


Nous nous sommes mis d'accord pour écrire une romance de satire sociale avec un soupçon de suspicion envers le protagoniste. Sur ce, nous présentons l'idée à Cheewin pour lui demander son avis, puis nous l'envoyons à Dream, le producteur du dernier film, pour qu'il l'étudie. Rapidement, nous recevons une réponse nous indiquant que l'idée est intéressante. Nous pouvons donc passer à l'écriture.

Les jours deviennent des semaines. Les semaines deviennent des mois...

Pang est une habituée de la maison et elle est aimée des parents de Tun. C'est aussi une sœur bienveillante pour nous, qui nous donne de bons conseils sur le scénario. Au moins, quelqu'un qui comprend le fonctionnement du monde et qui a vécu beaucoup de choses a une meilleure vision de l'humanité que des hommes d'une vingtaine d'années comme nous.

— Hé, dit Tun à Pang.

Son geste me surprend.

— Je t'ai dit de m'appeler correctement.

Pang a l'air d'en avoir marre.

— Désolé. Je veux ton avis sur cette partie.

— Laisse-moi jeter un coup d'œil.

Il lui tend l'ordinateur portable. Elle lit tranquillement. Pour ne pas la distraire, je fais semblant de taper quelque chose d'insignifiant.

Je suis vraiment dégoûté qu'Au et Up soient partis chercher des informations nécessaires à l'extérieur et qu'ils ne m'aient pas emmené avec eux. Nous avons dû nous installer tous les trois à la table en bois sur la pelouse pour discuter du scénario. Curieusement, la proximité de ces amis du même milieu me donne l'impression qu'on m'a volé quelque chose. Pire, je me sens exclu.

Sérieusement, ils n'ont pas besoin de moi ici.

— Je pense que, par nature, le personnage ne ferait pas ça.

— Qu'est-ce qu'il ferait ?

Tun penche la tête. Elle ne dit rien et cligne des yeux.

— Tu te moques de moi.

— Comment ? Je ne fais que cligner des yeux.

Les deux se mettent bientôt à rire. Je ris avec eux, comme si j'étais programmé pour maintenir une bonne ambiance. Plus je les observe, plus ils ont l'air parfaits ensemble.

Chaque geste, chaque mot, et même le rire naturel. Je n'ai pas senti de lien particulier entre Tun et Pang lorsqu'ils se sont rencontrés pour la première fois. Mais aujourd'hui, je ne peux nier que Tun a trouvé son portoloin.

Personne ne peut prévoir l'avenir. Il pourra peut-être rentrer chez lui un jour.

Un jour, je pourrais rester seul ici.

Un jour... je pourrais mourir avant de rentrer chez moi, comme certains membres du groupe.

Je n'ai jamais pensé qu'au moment où l'étranger est entré dans le bar de Pong, il a fait d'un homme désespéré un homme prêt à se battre. Il m'a fait apprendre et sortir de ma zone de confort pour affronter de nouvelles choses. Il m'a fait connaître l'amour et en faire l'expérience... juste pour me rendre compte que mes sentiments n'étaient pas réciproques.

Quand il rentrera chez lui, que ce soit dans cet univers ou dans le nôtre, nous ne nous reverrons plus jamais.

— Tess.

— …

— Tess.

— Oui ?

Après avoir été plongé dans mes pensées et avoir perdu la notion du temps, je suis ramené à la réalité par la douce voix de Pang.

— Je m'en vais.

Je me lève d'un bond et lui dis brièvement au revoir, en terminant par un “à plus tard”, même si je n'en ai pas vraiment envie.

Je regarde la silhouette délicate s'éloigner jusqu'à ce qu'elle soit hors de vue. Un instant plus tard, je tourne mon regard vers le grand ami qui se trouve à côté de moi.

— Qu'est-ce qui ne va pas ? Tu as l'air stressé.

— Rien. Je n'ai pas assez dormi.

L'excuse dite, je prépare mes affaires pour partir plus tôt, mais quelqu'un m'attrape le poignet.

— Je peux te parler de quelque chose ?

— C'est important ? demandé-je en fronçant les sourcils.

— Assieds-toi d'abord.

Il s'installe sur la chaise, les jambes croisées, sans attendre mon refus, et s'allume tranquillement une cigarette. Ses manières sont totalement différentes de celles qu'il avait lorsqu'il était avec Pang. Je suppose qu'il ne s'agit pas de quelque chose d'agréable, étant donné que je ne l'ai vu se défouler avec des rouleaux de nicotine qu'à quelques reprises.

— J'ai besoin de tes conseils.

— A propos de quoi ?

— Pang.

Mon cœur bat la chamade. Mes mains tremblent soudainement lorsque j'entends le nom sortir de sa bouche.

— Qu'est-ce qu'il y a à propos d'elle ?

— Tu te souviens quand on l'a rencontrée pour la première fois ? Je t'ai dit que je sentais qu'elle était spéciale.

L'air est rempli de fumée blanche, mais elle ne parvient pas à masquer l'inquiétude qui se lit sur son visage.

J'avale ma salive et j'arrange mes mots dans ma tête pendant un moment.

— Oui. Je t'ai dit des tas de fois qu'elle était celle que tu cherchais.

— Talay.

Il prononce mon nom d'origine et me regarde en silence.

— J'avoue qu'à chaque fois que tu m'as dit de l'appeler ou de la rencontrer pour prouver certaines spéculations ridicules, je ne l'ai jamais fait.

— ...

— Mais maintenant que nous nous sommes vus plus souvent, c'est clair pour moi.

Tun fait une pause, prolongeant le silence qui m'agite. Je ne sais pas de quel sentiment il s'agit. Je n'arrive pas à trouver la réponse.

— Qu'est-ce que tu essaies de dire ?

— Je pense que... Pang est vraiment celle que je cherchais.

Si la supposition s'avère correcte, je devrais être heureux pour lui, n'est-ce pas ? Mais pourquoi la tristesse est-elle l'une de mes émotions mitigées ?

J'ai cru un jour qu'elle était celle qu'il lui fallait. Je me suis convaincu qu'elle était la bonne.

Mais maintenant, j'espère une autre issue. J'aurais l'air égoïste si je disais cela.

— Bien. Félicitations, mec.

— Tu crois ? demande Tun.

Qu'est-ce que je peux dire d'autre ?

Je ne peux que le féliciter.

— … Ouais.


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Johanne
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Johanne
Sam 7 Sep 2024 - 17:38



Chapitre 13
SUNSET GOLD
— Tu n'as pas le moral ces derniers temps. Tu es à court d'argent ?

Kita exprime son inquiétude et sa curiosité dès qu'il sort du dressing. Il est doué pour remarquer mes expressions, et je n'arrive pas du tout à cacher le stress refoulé sur mon visage.

— Non. Je suis juste un peu inquiet.

— Ton père te laisse faire ce que tu veux après ton diplôme. Tu n'as pas besoin de trouver un travail tout de suite. Pourquoi t'inquiéter ?

Je referme le magazine dans mes mains et le remets à sa place pour qu'il soit facile à trouver. Je me décale un peu pour laisser de la place sur le lit au grand type.

Je sais que Kita n'est pas le meilleur pour donner des conseils. Mais après avoir vécu avec lui pendant un certain temps, j'ai découvert qu'il savait écouter. Encore une fois, j'ai envie de lui dire ce que je ressens vraiment.

— Tu t'es déjà... senti possessif envers un de tes amis ?

— Non. Plus ces voyous sont loin, mieux c'est, répond Kita sans hésiter.

— Sois sérieux.

— Dis-moi ce qui s'est passé.

Chaque fois que la tête de Kita touche l'oreiller le soir, il joue au téléphone pendant environ une demi-heure avant de s'endormir. Mais ce soir, il jette son téléphone sur la table de nuit pour m'accorder toute son attention.

— Tu es possessif avec moi ? Nous avons dormi côte à côte toutes les nuits. Ce n'est pas suffisant ?

Il est toujours aussi imbu de sa personne. Je n'aurais pas dû le complimenter dans mon esprit.

— Je vais dormir.

J'arrête de lui poser des questions, agacé.

— Hé, allez. Pourquoi tu t'énerves facilement ces derniers temps ?

Une fois que je me suis allongé avec irritation, Kita secoue violemment mon corps.

— Tu ne pourras pas dormir même si la lumière est éteinte. Dis-moi ce qui te préoccupe.

Je me retourne sur le côté pour faire face à Kita. Voyant son regard sérieux, je me redresse pour continuer notre conversation.

Kita et Jo ont beaucoup de choses en commun. Ils sont enjoués et idiots. Mais lorsqu'ils sont sérieux à propos de quelque chose, ils sont extrêmement sérieux. Il en va de même pour leur sympathie. Ils se fichent éperdument des autres. Mais lorsqu'il s'agit de leurs meilleurs amis, ils sont totalement différents. C'est l'une des raisons pour lesquelles je n'ai pas peur de me mettre à nu devant eux.

— Je me sens bizarre. J'étais très proche de cet ami. Mais ensuite, quelqu'un s'est joint à notre groupe et s'est bien entendu avec lui. Je ne savais pas comment agir.

Je suis mal à l'aise et j'ai peur...

Je me contredis. C'est moi qui ai invité Pang dans le groupe. En plus de sa personnalité adorable et amicale et de ses conseils professionnels, elle pourrait être la personne que Tun recherchait. S'ils peuvent retourner dans l'autre univers, c'est une bonne chose, non ?

Pourquoi n'ai-je pas la gentillesse d'être heureux pour eux ?

— Tu as déjà ressenti ça ? demande Kita après avoir écouté.

— Quand j'étais jeune, je crois. Je ne m'en souviens pas. Cela fait tellement longtemps que je n'arrive pas à croire que je me sens à nouveau comme ça à vingt-trois ans.

— Quand on est proche de quelqu'un ou qu'on l'aime et que quelqu'un d'autre détourne son attention de nous, n'est-il pas normal de se sentir bouleversé ?

— Comment je fais face à la situation ?

— Accepte tes propres sentiments. Ton ami est une personne. Tu n'as pas le droit de le forcer à ne s'intéresser qu'à toi.

— C'est vrai.

Nous avons nos propres vies. J'ai besoin de me le répéter pour arrêter d'être égoïste.

— Tess.

— Hmm ?

J'entends son doux soupir.

— Tu crois à la hiérarchisation des priorités ?

Quand je croise le regard de Kita, je vois clairement la sévérité de son visage.

— Un peu comme... si tu es sa priorité, il te choisira.

— Qu'est-ce que c'est que ces sages paroles !

— Ne le dis à personne. Une fois, j'ai beaucoup aimé quelqu'un, mais elle ne m'a jamais choisi. Jamais...

Son visage s'assombrit.

— Tu veux un mouchoir ?

— C'est bon. Ta taie d'oreiller fera l'affaire.

Il m'attaque avec sa blague nulle quand on est en train de s'émouvoir. Il loge chez moi et a le culot d'abîmer mes affaires. Connard.

— Tu as dit qu'elle ne t'avait jamais choisi. C'est parce que tu l'as forcée ?

— Non. Je ne l'ai jamais forcée à me choisir ou à choisir quelqu'un d'autre. C'est la pensée que j'avais en tête et que j'utilisais pour me dire si je devais continuer ou abandonner. Ce n'est pas facile de couper les ponts avec un ami, mais au moins tu sauras à quel point il tient à toi. Comme ça, tu ne t'attacheras pas trop.

— Merci pour le conseil.

Même si je ne sais pas si je serai capable de le faire.

— De toute façon, avant de quitter cette personne, combien de fois tu t'es autorisé à ne pas être choisi ? Je vais l'adapter.

Kita lève deux doigts.

— Deux ? Pas beaucoup de fois, alors.

— Non. Vingt !

— Merde, tu n'as pas appris ta leçon.

— Mon cœur espérait qu'elle me regarderait un jour.

Il va bientôt devenir émotif et pleurer. J'arrête de lui demander pour qu'il ne se sente pas blessé.

Incroyablement, Kita, l'homme confiant qui utilise son visage comme étui de téléphone, qui a une fortune à dépenser, qui s'occupe bien des gens, a été rejeté si souvent qu'il en est devenu déprimé.

— Et toi, Tess ? Combien de chances tu vas lui donner ?

— Trois.

— Pourquoi trois ?

— Je ne sais pas. C'est la limite de ma patience, je suppose.

Quand j'étais enfant, j'ai essayé un nombre incalculable de fois d'obtenir une récompense. C'est différent des relations. Vous n'obtiendrez rien si vous êtes le seul à essayer. Certains essaient pendant la moitié de leur vie et ne réussissent jamais.

— Tu as été stressé ces derniers temps. Il y a une fête chez Mei. Tu veux te défouler un peu ?

— Est-ce que toi et Fuse avez déjà arrêté de faire la fête ? Ça suffit.

Ils ont tellement envie de faire la fête, d'une maison à l'autre. J'ai presque oublié qu'ils doivent planifier leur vie après l'obtention de leur diplôme dans les deux ans. Sinon, ils seront reniés.

— Avant, tu étais le premier à y aller et nous ne disions rien. Tu as changé de manière radicale.

Qu'est-ce que ça donne de mieux ?

— J'ai grandi. Comment je pourrais être le même qu'avant ? Dors.

Je réponds et m'allonge. Kita arrête de discuter et éteint la lampe, puis prend son téléphone pour jouer dans le noir.

Cela fait plusieurs nuits que je me force à dormir malgré tous les problèmes qui me rongent. J'aimerais pouvoir les ignorer, mais je n'ai pas la force de les laisser partir.

Depuis que je me suis réveillé dans cet univers parallèle, je n'ai jamais rêvé. La personne que je cherche n'est pas apparue, alors que Tun et Pang se voient plus souvent.

Mon espoir qu'il puisse retourner à sa vie dans l'autre univers commence à s'estomper. Je dois lutter contre ces pensées confuses dans mon esprit à plusieurs reprises. Que se passerait-il si je le retenais ? Mais cela ne vaut pas la peine qu'il abandonne tout pour m'attendre alors que je ne sais pas si j'aurai un jour l'occasion d'y retourner

Et si mes sentiments pour lui sont de l'amour...

Quand ce jour viendra...

Est-ce que je le retiendrai avec moi ou est-ce que je le laisserai être heureux et faire ce qu'il aime ?

Je n'en sais rien.


— Les garçons, j'ai fait votre lessive.

La mère de Tun se dirige vers la table à manger avec un panier tressé. Il est encore tôt dans la matinée. Au et Up mangent du porridge et travaillent à la table à manger à l'intérieur. Tun fait la vaisselle à l'évier pendant que j'étudie les couleurs des films dans cet univers. Une fois que nous l'avons vue, nous laissons tout tomber.

— Maman… Tu n'es pas obligée.

— Pas de souci. Je suis contente de le faire.

Elle pose le panier et tend les vêtements aux propriétaires un par un.

— C'est à Au. Ça, c'est à Tess. Et ça, c'est à Up.

Elle se souvient à qui appartiennent ces vêtements. Elle est méticuleuse, comme l'a dit Tun.

— Merci. Ils sentent si bon.

Je la remercie et je prends mes vêtements préférés, lavés et propres.

Le fait que je m'adapte progressivement à cet univers ne signifie pas que j'ai succombé au destin. Je le fais pour survivre, et cela n'a pas d'effet négatif. Au moins, cette amitié et cet amour me font sourire.

Nous nous retrouvons chez Tun le matin et nous préparons nos affaires pour rentrer chez nous le soir. Si nous sommes trop paresseux, nous restons ici. Cela fait un moment que c'est comme ça, et je suis habitué à ce mode de vie maintenant.

— J'allais te demander quand tu as quitté ta chambre. Tu as acheté un nouveau tee-shirt ? Tun ? Je n'ai jamais vu celui-ci auparavant.

La mère montre le tee-shirt que porte son fils bien-aimé. Personne ne le reconnaît, mais je m'en souviens bien, car c'est un des rares tee-shirts de couleur neutre que j'ai achetés pour correspondre à mon style d'origine. Je l'ai porté de nombreuses fois jusqu'à ce qu'il se déforme.

— C'est celui de Tess. Je l'ai volé.

La mère secoue la tête avec lassitude à la réponse de son fils.

— Tu as tes propres vêtements. Pourquoi prendre ceux de ton ami ?

— Tess s'en fiche.

— Il n'a jamais demandé. Il l'a pris même si j'aimais tellement ce tee-shirt, dis-je doucement pour tenter de convaincre la mère de prendre ma défense.

— Arrête de jouer la comédie avec cette voix douce.

— Maman, Tun m'a traité de menteur. J'ai mal au cœur...

— Mauvais garçon. Ne dis plus jamais ça à ton ami, dit la femme plus âgée en haussant le ton.

— Tu crois Tess ? Écoute-le.

— Pourquoi je suis ici ? Mon Dieeeeeu.

Au secoue la tête et retourne à la table, résigné. J'éclate de rire après avoir réussi à faire en sorte que la mère gronde son fils tous les jours.

DING

— Ce doit être Pang.

La sonnette est le signe de l'arrivée de quelqu'un.

— Je vais y aller. Je vais lui ouvrir la porte.

— Ce fichu Up-pree est rapide.

Notre invitée régulière n'est autre que Pang. Lorsqu'elle est libre, elle nous rend toujours visite avec des tas d'en-cas. C'est grâce à sa beauté qu'elle est bien accueillie par tout le monde. Rien qu'en entendant la sonnette, les gars se battent pour être celui qui ouvrira la porte avec enthousiasme.

— Hé, les gars, comment ça va ?

Sa voix unique et son visage lumineux apparaissent devant moi.

Le plaisir que j'avais à plaisanter avec Tun disparaît, ne laissant qu'un sourire d'accueil sur mon visage.

— J'ai le syndrome de la page blanche. Je n'ai aucune idée.

En fait, Au a eu le syndrome de la page blanche pendant toute la semaine.

— Je vais m'améliorer.

— Tu veux un petit-déjeuner ? lui demande Tun.

— Non, merci. J'ai déjà mangé, dit Pang.

Elle se dirige vers le comptoir de la cuisine et dépose naturellement les snacks dans les assiettes. Au, qui se détend, rompt le silence.

— Le film du dieu est sorti. Pourquoi on n’irait pas le voir pour nous remonter le moral ?

Il consultait le site Internet du cinéma parce qu'il voulait qu'on aille voir un film ensemble, hein ? Ledit dieu est le meilleur réalisateur d'Hollywood. Il est très doué pour la mise en scène et l'écriture de scénarios.

— À quelle heure ?

La question de Tun me réjouit.

— Huit heures et demie.

— C'est moi qui offre.

Ce sentiment me pousse à leur proposer de les inviter. Je ne sais pas si c'est aussi de l'amour. Tant que je peux le voir et passer du temps avec lui, je me sens heureux.

— Merde, notre sugar daddy Tess. Merci d'avance.

Je fais un signe de tête aux deux copains et me tourne vers la gentille fille.

— Tu veux te joindre à nous ?

— Je passe mon tour, mais j'irai avec vous la prochaine fois. Je pars maintenant. Travaillez bien, décline-t-elle poliment avant de se diriger vers le grand homme, de s'arrêter puis de reprendre. Tun, je peux te dire un mot ?

— Bien sûr.

Ils quittent la salle à manger en silence, laissant le reste d'entre nous avec des questions. Moi-même, je me demande ce qui est si important pour qu'ils aient besoin de le cacher à tout le monde.

Je commence à m'inquiéter du temps qui passe. Je n'arrête pas de regarder l'horloge, distrait dans mon travail. Je n'arrive pas à me contrôler pour ne pas me tourner vers ces deux-là. J'essaie de deviner le sujet de leur conversation secrète.

Peut-être qu'ils ont une correspondance ?

Ils ont soudain rêvé ?

Ils se consultent peut-être sur le retour ou autre chose...

Je laisse toutes les spéculations à l'état de pensées idiotes. J'espère que si cela arrive un jour, Tun me le dira franchement.

— Désolé.

Lorsque Pang et Tun reviennent, mon cœur suspendu à un fil est enfin remis à sa place.


On se retrouve le soir.

J'ai passé deux heures dans le dressing, prenant la liberté d'essayer les vêtements de Tess devant le miroir pour faire bonne impression auprès de Tun. Je déteste le parfum, mais j'en ai mis un avec une odeur douce cette fois-ci.

Après avoir vérifié mon apparence jusqu'à ce que je me sente en confiance, j'attrape la clé de la voiture et me dirige vers ma destination. Une fois arrivé, j'aperçois les deux copains qui attendent au guichet du cinéma.

— Wow, regarde-toi. Comme tu es beau !

J'accepte le compliment avec un sourire et jette un coup d'œil autour de moi, un peu surpris par l'absence de celui qui avait l'habitude d'être toujours le plus en avance.

— Où est Tun ?

— Il a soudainement dit qu'il ne pouvait pas se joindre à nous, disant qu'il avait une affaire avec Pang.

— Pourquoi il ne m'a rien dit ?

— Peut-être qu'il ne voulait pas que tu t'en mêles.

Je ne sais pas à quel point mon expression est déprimée, mais ils semblent l'avoir remarqué. Ils m'entourent rapidement de leurs bras et me poussent à l'intérieur.

— Je plaisante. Achetons les billets. Tu as dit que tu nous inviterais. Ne change pas d'avis.

D'habitude, je me distrais rarement de l'écran, car les places de cinéma sont chères. Que les films soient bons ou mauvais, j'en profite au maximum. Mais cette fois-ci, j'ai du mal à me concentrer. Mes oreilles bourdonnent. Je regarde droit devant, mais ma vision se brouille.

J'ai mal. C'est probablement le mot qui convient le mieux pour décrire ce que je ressens.

J'ai l'impression de trop interpréter les paroles de Kita. Ces propos, “Si tu es sa priorité, il te choisira”, font que son absence soudaine sans prévenir affecte mon cœur plus que d'habitude. J'ai beau essayer de me rappeler que je suis raisonnable, et j'ai beau penser à des situations urgentes ou importantes qui auraient pu le pousser à la choisir...

Cela fait toujours mal au plus profond de moi.

Le film se termine après environ deux heures, et je dis au revoir à Au et Up. En conduisant, je me souviens que Kita m'a demandé d'aller faire la fête chez une fille. Après réflexion, je suppose que je réfléchirais trop, seul dans mon appartement. Je devrais faire la fête quand je suis émotionnellement instable. Sur ce, je fais demi-tour.

— Je pensais que tu hibernerais une année de plus. Viens, mec. On t'a préparé des tonnes d'alcool.

Ces buveurs fous m'accueillent tout de suite. À en juger par l'alcool, les lumières étourdissantes et la musique qui fait vibrer la voiture, je vais sans aucun doute me bourrer la gueule ce soir.

— Oui, merci. Tu n'as pas amené ta copine ?

Je m'installe sur le canapé et retrouve Fuse, que je n'ai pas vu depuis longtemps.

— Ugh, pourquoi on resterait tout le temps ensemble ? On a besoin d'espace.

Je sais qu'il ment, même sans plus d'explications. Je secoue la tête, lassé, et tourne mon regard vers Kita, qui fume confortablement les jambes croisées.

— Tu veux fumer ?

Il lève un sourcil. D'habitude, je ne fume pas. Mais si je suis stressé, il m'arrive d'en allumer une pour me changer les idées. Je suppose que je vais en profiter aujourd'hui.

— Oui.

— Qu'est-ce qui ne va pas ?

— Pourquoi ?

— Tu as l'air bizarre.

Kita me voit plus clairement de jour en jour.

— Tu t'imagines des choses.

— Ne me dis rien, alors. Voici ton verre. Bois jusqu'à ce que tu sois assommé.

Aujourd'hui est un autre jour où j'ai envie de tout laisser derrière moi et où je ne me soucie pas de ce qui se passera à l'avenir. J'accepte donc une cigarette de mon ami et je bois sans interruption, sans regarder l'heure ni parler à personne. Je ne fais que boire... et boire.

Ma vision commence à se troubler. Le hoquet est si fréquent que je n'arrive pas à reprendre mon souffle, mais je ne m'arrête pas. En un rien de temps, j'arrive à peine à me tenir droit.

J'entends les voix étouffées des gens autour de moi. Incapable de comprendre leurs paroles, je dis oui à tout. Je les laisse m'emmener vers d'autres contrées. Après cela, je ne me souviens plus de ce qui s'est passé. Lorsque la lumière du soleil se pose sur mes yeux, je me réveille sur mon lit.

Mes comportements sauvages de la nuit dernière ont laissé un effet durable sur mon état actuel. Le mal de tête atteint mes yeux. Ma gorge est desséchée comme si j'avais avalé une poignée de sable. Ces légers symptômes me font regretter de ne pas pouvoir remonter le temps pour me prévenir de ne pas refaire une chose aussi stupide.

— Putain...

Il me faut une éternité pour me redresser. Mon colocataire, qui est habituellement à mes côtés, n'est nulle part. Je ne suis même pas sûr de l'avoir ramené à la maison.

Je cherche mon téléphone à tâtons dans mon lit et ne trouve rien, alors je me traîne jusqu'à la salle de bains.

Je me tiens en équilibre instable devant le lavabo pendant un moment et je me sens soudain nauséeux. Je me jette de l'autre côté et vomis dans les toilettes comme un fou.

Je pensais que cela m'aiderait à me sentir mieux, mais non. Il y a les deuxième et troisième rounds. La force que j'ai utilisée pour me rendre aux toilettes a été aspirée, et je m'allonge, impuissant, en haletant.

Je n'en peux plus...

Ces mots résonnent dans ma tête. J'espère que cette sensation de tourment va bientôt s'estomper, mais mon corps se moque de moi. J'ai de nouveau la nausée. Je monte aux toilettes et vomis à plusieurs reprises tout ce que j'ai dans l'estomac.

Lorsque je me sens mieux, je me lave le visage et cherche mon téléphone une dernière fois. Je le trouve sur le tapis devant la chambre. L'écran affiche les appels manqués de Friend Credits et une douzaine d'autres de Kita et Fuse.

Je touche les notifications d'une main tremblante. Je m'inquiète pour ces fauteurs de troubles, mais une autre partie de moi veut informer quelqu'un de mon état actuel pour apaiser son inquiétude. Alors que je réfléchis à la personne que je devrais appeler en premier, la personne familière m'appelle. Je n'ai plus à choisir.

Tun.

L'homme dans mes pensées qui m'a fait trembler toute la nuit.

— Allô.

Je décroche et m'assois par terre, essayant d'avoir l'air normal même si cela ne semble pas fonctionner.

— Ça va, Talay ? Tu n'es pas venu. Je suis inquiet.

J'aime sa voix. Elle me met à l'aise quand je l'écoute.

— Désolé. Je me suis réveillé un peu tard.

— Un peu, mon cul. Il est deux heures de l'après-midi.

La réponse me choque. Je n'ai pas regardé l'heure depuis mon réveil.

— Tu es malade ? Ta voix est rauque.

— Un peu. Je prends un jour de congé.

— Tu veux voir un docteur ? Tu as mangé ?

— Ce n'est pas si grave. C'est juste...

— Hé, attends, quelqu'un m'appelle. Je te rappelle plus tard.

Il coupe et raccroche sans attendre ma réponse.

J'avoue que c'est trop soudain pour moi. Je ne peux que tenir mon téléphone comme ça et me demander ce que je suis censé ressentir.

— D'accord.

Je réponds, en espérant qu'il me rappellera pour me demander comment je vais. Une minute... deux minutes... trois minutes se sont écoulées.

Je n'ai jamais été comme ça auparavant. Je suis mal à l'aise, confus, j'attends, j'espère énormément. Je m'apitoie sur mon sort, car je n'en serais pas arrivé là si je ne m'étais pas laissé séduire par quelqu'un. J'aurais été l'ancien moi qui n'était attaché à personne et qui était libre de toute action et de tout sentiment.

Quinze minutes se sont écoulées, mais c'est insupportablement long pour moi. Finalement, je n'ai rien reçu de l'homme que j'attendais. En revanche, le nom qui apparaît à l'écran est celui de mon colocataire temporaire.

— Tu décroches enfin. Tu vas bien ?

Je tiens mon téléphone en silence, laissant Kita pester jusqu'à ce qu'il ait fini, puis je réponds.

— Je viens de me réveiller.

— Qu'est-il arrivé à ta voix ? Une gueule de bois ?

En plus de vomir, je crois que j'ai mal à la tête et un peu de fièvre.

— Je suis un peu malade. Tu as dormi où la nuit dernière ?

— Chez Mei. Je n'ai aucune idée du moment où j'ai été assommé. Tout ce que je sais, c'est qu'un ami a dit que tu te plaignais de ne pas vouloir rester ici et qu'il t'a ramené chez toi.

— J'étais si ivre que ça ?

— Ouais.

J'espère juste que personne n'a filmé ce qui s'est passé hier soir pour me faire chanter.

— Tu as mangé quelque chose ?

— Non.

— Je vais t'acheter de la nourriture et des médicaments.

— D'accord. Merci.

Encore une fois, même si quelqu'un se soucie de moi, je suis toujours blessé.

— Je serai à la maison dans une demi-heure. Tu peux tenir jusque-là ?

J'ai l'habitude de la solitude. J'ai été blessé par la déception. J'ai été ignoré. Et je me suis habitué à tout cela. Ce n'est pas différent. Ça va aller mieux. Je vais être capable de l'accepter.

— Bien sûr...

Ça passera.

— Kita, la fille que tu aimais...

Avant de raccrocher, je veux stupidement lui demander quelque chose.

— Quand tu n'as pas été choisi la deuxième fois, comment tu t'es senti ?

— Rien. J'avais juste un petit faible pour elle.

— Et la dernière fois ?

J'entends son petit rire, puis il se tait, s'arrêtant pour réfléchir.

Kita joue à la guerre des nerfs.

— Je ne sais pas. Je ne sais pas trop comment le décrire. Peut-être que j'étais triste de ne pas avoir eu juste un petit faible pour elle.

— …

— C'est que je suis tombé amoureux de quelqu'un comme ça.

Le temps que je me débarrasse des mots douloureux de mon ami, il a déjà raccroché.

Je m'assois sur le canapé, regardant mon téléphone et le balcon, m'enfonçant dans mes pensées, laissant le temps passer pour rien. La vibration de mon téléphone attire mon attention vers quinze heures.


“Désolé de ne pas t'avoir rappelé. J'avais une course à faire. N'oublie pas de prendre soin de toi.”


Un message de Tun.

Je m'allonge et le relis plusieurs fois. Il est peut-être court, mais il contient tout. Des excuses. Une explication. Une remarque bienveillante.

… Aucune voix que je veuille entendre, cependant.

Un jour, je me suis demandé pourquoi les humains enduraient la douleur et se mettaient dans un état pitoyable. Pourquoi nous noyer dans la tristesse alors que nous pourrions aller de l'avant ? J'ai même ri de certaines scènes de mélodrames et d'actions idiotes surréalistes.

Pleurer dans la baignoire. Courir sous la pluie. Se saouler.

Mais maintenant que j'ai connu cette douleur, je réalise que je veux faire tout cela. Les émotions humaines sont tout sauf simples.

Il n'est pas facile de forcer un sourire.

Il n'est pas facile de rire.

Il n'est pas facile d'arrêter d'attendre et d'exprimer l'abattement...

… quand on a si mal à l'intérieur.


Salon de Friend Credits

Up-pree

Tu es absent depuis deux jours. Tu te sens mieux ?

Tess

Oui, je suis juste un peu malade.

Adisorn

C'est bien que ce ne soit pas grave. J'ai entendu dire que tu étais épuisé.

Tess

Qui te l'a dit ?

Adisorn

Tes photos sont partout sur Instaqam. Dis-nous ce qui te stresse.

Tess

Je voulais juste me saouler.

Up-pree

Tu étais triste à cause du film ? C'est pour ça que tu as bu tout de suite après !

Tess

Vous ne comprenez rien à rien.

Je peux séparer ma vie des films.

Up-pree

Si ce n'était pas la raison...

Je parie que tu étais contrarié que Tun soit avec Pang.

Laisse-moi taguer @Pakorn

Adisorn

Oublie ça. Il s'en fout complètement.

Il nous a laissé tomber au cinéma, et aujourd'hui il a quitté son travail pour être avec elle.

Il a oublié ses amis.

Pakorn

Pourquoi est-ce que tu me harcèles ? C'est embêtant.


C'est à ce moment-là que j'ai découvert pourquoi il m'a raccroché au nez sans hésiter. La raison est que l'autre personne est plus importante.

Pensez-y. Cela fait environ un mois, mais je suis toujours blessé.

Je ne peux même pas me forcer à arrêter de lire la conversation dans la discussion de groupe, comme si je voulais la souligner et me rappeler d'arrêter d'attendre quelque chose qui n'est pas à ma portée.

Je reste le même, n'exprimant pas ma tristesse et n'évoquant pas le passé. J'y arrive... très bien. Personne ne le remarque. Tout est normal, comme les autres jours.

— Vous avez fait vos valises ?

La question de Tun fait sursauter tout le monde. Je verrouille rapidement l'écran de mon téléphone et lève les yeux en souriant, sans répondre.

Cela faisait déjà un moment que Friend Credits travaillait sérieusement à l'élaboration du scénario. Tout semblait aller comme sur des roulettes. Mes amis se sont relayés pour collecter des informations hors site jusqu'à ce que nous en ayons assez. Néanmoins, nous manquons encore de nouveauté. C'est pourquoi nous avons prévu de nous déplacer tout en écrivant avec notre bus dans quelques jours. Nous espérons que ce voyage nous fera vivre des expériences extraordinaires.

— Nos valises, mon cul. Il nous reste trois jours, grommelle Au en levant les yeux de son ordinateur portable.

Nous sommes toujours dans le studio-bus, comme d'habitude. La différence, c'est que je n'ai rien à faire, alors je cherche de multiples références pour faire de la mise en couleur près d'eux.

— Je n'aime pas cette scène. Est-ce qu'on devrait la supprimer ?

Up change immédiatement de sujet. Il a l'air sérieux avec la partie qu'il est en train d'écrire sur son ordinateur portable miteux.

— Qu'est-ce qui ne va pas ? C'est romantique, lance Au.

— L'amour est un sacrifice. Permets-moi de lever les yeux au ciel.

— Hein ?! Quand tu aimes quelqu'un, tu souhaites son bonheur même sans toi dans sa vie.

— C'est trop optimiste. Crois-moi. Au fond de lui, le protagoniste espère être choisi. Il perd simplement parce qu'elle choisit quelqu'un d'autre. D'où le sacrifice.

Pourquoi cela ressemble-t-il à mon histoire au fur et à mesure que je l'écoute ? Peut-être est-ce vrai que le mot “sacrifice” est utilisé pour réconforter ceux qui ne sont pas choisis.

— Et alors ?

Ils ont chacun leur propre opinion. Et à chaque fois qu'ils s'opposent, c'est une tierce personne qui décide.

Même s'il s'agit d'une des premières versions, je ne peux m'empêcher de me demander quelle sera la réponse.

— Ma réponse ?

— Oui.

Tun me regarde après avoir entendu la question. Je n'arrive pas à comprendre ce que ces yeux essaient de transmettre. Il veut peut-être mon avis ou simplement regarder. Finalement, je reste silencieux alors qu'il ne dit rien.

— Tun !

Après une longue pause, les deux copains lui tapent sur la tête.

— Efface-le. Si tu veux mon avis…

Nous obtenons enfin la réponse.

— Je ne suis pas assez gentil pour laisser cette personne aimer quelqu'un d'autre.

DING

Les gars sont tout excités en entendant la sonnette. Chaque fois que Pang se présente, la tension retombe car elle vient toujours avec de délicieux en-cas, de la musique unique et des activités divertissantes qui nous encouragent à travailler.

Cette fois-ci, c'est pareil.

Je reste à la table du studio-bus, écoutant de temps en temps mes amis à l'extérieur. Je ne m'attendais pas à ce que Pang monte dans le bus pour me saluer dix minutes plus tard.

— Occupé ?

Le sourire sincère qu'elle me donne toujours rend difficile le fait de penser à elle de manière négative.

— Ouais. Désolé de ne pas vous avoir rejoints.

— Ce n'est pas grave. Je ne fais que passer. Je vais bientôt partir.

Elle entre à l'intérieur jusqu'à ma table avant de me tendre un sac contenant quelque chose.

— Je t'ai acheté de quoi grignoter.

— Tu n'es pas obligée, dis-je, mais j'accepte quand même.

— J'ai entendu dire que vous alliez écrire à l'extérieur, dit-elle en entamant une autre conversation, s'asseyant sur la chaise de Tun à côté de ma table.

— Ouais. Ça t'intéresse ?

— J'ai des tonnes de travail. Je vais passer mon tour cette fois-ci. Bon voyage.

Avec ça, c'est comme si nous étions déconnectés. C'est gênant quand on ne sait pas quoi dire.

Pourtant, quand je la vois et que je la regarde en face, les dernières paroles de Tun résonnent dans ma tête. Sur le fait qu'il n'est pas assez gentil pour laisser sa bien-aimée aimer quelqu'un d'autre. Pourquoi ai-je l'impression qu'il a subtilement parlé de Pang ?

Maintenant que j'y pense, le picotement dans ma poitrine s'amplifie. Même si cela les regarde, je suis curieux. Je rassemble enfin mon courage pour demander.

— Pang, je peux te demander quelque chose ?

— Hmm ?

— J'ai eu cette conversation avec Tun. Il pensait que tu étais peut-être la personne qu'il cherchait. Je ne sais pas si…

Elle se tait en entendant cela.

— Tu penses la même chose ?

Je veux être sûr avant qu'il ne soit trop tard pour me défiler.

— Je ne sais pas. On en a parlé plusieurs fois.

— …

— Plus je passe de temps avec lui, plus je pense qu'il pourrait être le bon.

Toc, toc, toc.

Avant que mon cerveau n'ait pu tout assimiler, les coups frappés à la fenêtre m'interrompent. La confusion des sentiments qui m'habitent ne se lit pas sur mon visage, du moins en apparence.

Pang croise le regard de la personne qui se trouve derrière la fenêtre. Elle esquisse un doux sourire et s'excuse. Je ne peux pas nier que ces deux-là sont parfaits l'un pour l'autre.

Tun est celui que Pang cherchait, et Pang a trouvé Tun.

Je me sens à nouveau comme ça...

Je n'ai rien à faire avec lui.


— Avant de partir, laisse-moi distribuer ça.

Comme prévu, tout le monde se rassemble devant la maison du célèbre ancien directeur graphique. L'ambiance est animée et assez chaotique.

— Trop booooon.

Je porte un tote bag et distribue des jus de fruits à tout le monde comme s'il s'agissait d'un camp d'étudiants bénévoles. Je dois les distribuer parce que le jus d'orange est un cadeau de Jubjang, la responsable de l'Association des Thaïlandais dans un univers différent. De plus, il y a actuellement des morceaux de poulet grillés, grâce à la gentillesse de Puwadol, l'infirmier.

En plus du cadeau offert par amour, Jubjang s'attend à ce que je prenne des photos pour elle. Si un jour le film devient célèbre, elle aura du contenu à publier pour le montrer.

Bien sûr, je ne mentionne jamais les noms à Au et Up. Ils savent seulement que ça vient de mes amis.

— Cette plante prend trop de place. Elle est inutile.

Après avoir pris le goûter, Au écarte l'arbre à trompettes roses et lève les yeux au ciel, comme si cela l'ennuyait vraiment.

— Sa signification est belle, argumente Tun en boudant.

Il pense que c'est mignon ?

— Arrête de te voiler la face, espèce de voyou.

Comme c'est à moi de m'en occuper, je vais blesser la personne qui me l'a donné si je ne l'emporte pas avec moi. Je réfléchis à la façon de la rendre utile, et j'ai une idée.

— Que diriez-vous de ceci ? Puisque c'est une plante qui représente l'amitié des Friend Credits, écrivons nos trois souhaits pour cette année. Dès que l'un d'entre eux se réalise, nous l'enlevons.

— Oui, c'est beaucoup plus utile maintenant, lance Up avant de murmurer. Je suis sarcastique.

— Hé, j'ai entendu, aboie-je.

— Très bien, alors. Allons-y.

— Prends notes. Les jaunes sont ceux de Up. Le violet c'est ceux de Au. Toi...

Je tends les notes roses au gars à côté de moi. Au lieu de les prendre, il reste immobile, comme pour m'énerver.

— Prends-les.

Je baisse la voix en insistant sur chaque mot.

— Pourquoi tu me parles rarement ces derniers temps ?

— Qui ? Je suis toujours le même.

Non, je ne le suis pas. L'incident d'il y a quelques jours est la raison pour laquelle je m'éloigne lentement de Tun. Je pensais que c'était facile. Je ne m'attendais pas à ce qu'il le remarque.

— Non. Tu as changé.

— J'ai été stressé par ma famille.

— Tu te sens mieux maintenant ?

— Pourquoi tu t'inquiètes ? Prends ça.

Je lui fourre les notes dans la main pour mettre fin à la conversation. Je me tourne alors vers la mère, qui sourit en tenant dans ses mains d'énormes boîtes repas pour quatre personnes.

— Faites bon voyage. Voici votre nourriture. Mangez-en quand vous aurez faim.

Elle est toujours aussi mignonne.

— Merci.

Nous partons tôt le matin pour arriver à destination avant la nuit. Comme la maison de plage que nous avons réservée a une vue qui vaut un million malgré son faible prix, c'est un bon signe pour ce voyage délicieux.

Une autre chose amusante est que c'est un voyage dans la ville natale d'Au, mais il n'a pas du tout l'intention de rentrer chez lui. C'est fou.

Monsieur l'acteur est notre chauffeur. S'il est fatigué, je peux le relayer. Alors que je suis assis sans but à côté de Tun, ne voulant pas le distraire, je sors les notes de couleur œuf pour écrire mes souhaits afin de tuer le temps.

— Qu'est-ce que tu écris ?

La personne dont je souhaite le moins l'attention se tourne vers moi.

— Les yeux sur la route.

— Laisse-moi voir.

— Tu comprends ce que ça veut dire “souhaits personnels” ?

Je couvre le texte de la note comme si c'était top secret.

— Ton souhait, c'est de trouver ton portoloin, c'est ça ?

— M. Je sais tout.

— Je lis dans tes pensées.

Non. Il ne sait rien.

— Ça ne te regarde pas.

— Et l'autre note ?

— J'espère que notre film aura du succès.

J'ai écrit mes souhaits sur deux notes, car c'était ce qui me venait à l'esprit à ce moment-là. Je ne sais toujours pas quelle est la dernière chose que je souhaite.

— Tu ne vas pas écrire le dernier ?

— Je le ferai quand je saurai ce que c'est.

— C'est toi qui vois. Écris-le avant que l'arbre à trompettes roses ne dépasse les dix mètres.

— Espèce de...

Je serai peut-être encore là quand l'arbre atteindra cette hauteur, et il sera probablement retourné dans l'autre univers. Putain !

J'aimerais parfois pouvoir arrêter le temps maintenant, laisser derrière moi mes soucis et les mauvais moments des autres jours pour être avec Tun et nos amis.

La lumière chaude du soleil, le vent sur mon visage lorsque j'ouvre les fenêtres et la vue des deux côtés apaisent mon cœur. Néanmoins, je ne peux m'empêcher de jeter un coup d'œil à l'homme à côté de moi de temps en temps.

Le studio-bus arrive à destination en début de soirée. Nous avons l'impression d'être libérés de tout fardeau. Nous ne travaillons pas et nous nous amusons à jouer dans l'eau. La première journée se termine rapidement et la deuxième matinée commence.

— Vous savez pourquoi nous sommes ici, n'est-ce pas ?

La question d'Au, le local, nous laisse perplexes.

— C'est toi qui as suggéré qu'on vienne ici, espèce de crétin, s'emporte Up-pree.

— Écoutez, les mecs. Il y a une île remarquablement belle dans ma ville natale. C'est une île secrète. Pas très fréquentée. Seuls les gens du coin la connaissent. Le plus beau, c'est qu'elle est paisible, parfaite pour trouver des idées.

— C'est la première fois qu'on te voit faire preuve de bon sens.

— Je parle avec bon sens tous les jours. C'est juste au-delà de votre compréhension.

— Comment y arriver ? demande Tun.

— Prendre un bateau est la seule option. C'est un peu dur, mais ça en vaut la peine.

Avant de partir, nous préparons une couverture, de la nourriture, des boissons, des livres, du matériel de travail et de petits ordinateurs portables. Nous imaginons un voyage merveilleux, mais nous sommes confrontés à des difficultés.

Si c'était un film, ce serait la scène la plus pourrie.

— Où se trouve ton île remarquablement belle ?

Dès que je pose le pied sur le sable blanc, mon esprit se remplit de questions. Cet endroit n'est pas différent des îles que nous avons visitées auparavant. Aucune zone n'est propice au travail parce qu'un groupe de personnes se promène sur la plage.

— Là-bas. Tu vois ?

Au pointe du doigt vers notre droite, et je découvre qu'il existe une petite zone de sable blanc. Merde, je suis désolé de l'avoir maudit dans mon esprit pendant environ deux lignes.

— Où se trouve l'embarcadère pour louer un bateau ?

— Louer un bateau, mon cul. On va marcher.

— Ça va aller ? demandé-je pour m'en assurer.

— L'eau nous arrive à la cheville. De quoi tu as peur ?

Sur ce, Au nous fait avancer sans crainte. Je mesure la distance avec mes yeux. L'île est à une centaine de mètres. C'est facile.

Nous marchons en ligne lentement jusqu'à ce que nous découvrions que seuls quelques premiers mètres nous arrivent à la cheville. L'eau devient de plus en plus profonde. Je pense que l'eau nous arrivera bientôt au cou, espèce d'idiot.

Nous devons soulever nos affaires au-dessus de nos têtes tout en marchant. Quel état pitoyable. Il y a toutes sortes d'obstacles sur le chemin pour nous mettre à l'épreuve. Les rochers qui nous barrent la route. Les vagues qui s'abattent constamment sur nous.

Je pensais que ce serait facile. Maintenant, j'ai l'impression de ne plus pouvoir continuer.

Mon souffle s'accélère. Mes mains et mes jambes tremblent tellement que je manque de tout laisser tomber dans l'eau. Mais je ne laisse pas cela se produire. Je m'arrête simplement et je regarde tranquillement les trois autres s'éloigner de moi.

Je ne peux pas dire un mot. L'incident de la noyade défile dans mon esprit, scène par scène. Je n'aurais jamais cru que je me sentirais aussi terrifié au fond de moi. Je me demande si je dois continuer à avancer ou faire un pas en arrière lorsque le type qui se trouve à une courte distance se retourne.

— Qu'est-ce qu'il y a ?

— …

Il marche vers moi sans attendre la réponse. Il m'atteint en un clin d'œil.

— N'aie pas peur.

Sa voix douce et grave et ses yeux doux soulagent considérablement mon anxiété.

— C... C'est facile pour toi de dire ça. Et si je glisse et que je suis emporté par l'eau ?

— Accroche-toi à moi.

— Et si tu es emporté par l'eau ? Je ne serai pas entraîné avec toi ?

Je reconnais que je suis paranoïaque. Je préfère faire demi-tour.

— Je te promets que tout ira bien. Donne-moi la couverture et ton sac. Je vais les porter.

Il prend tout et place mes poignets tremblants sur ses épaules.

— Merci.

— Suis-moi lentement.

Au début, j'ai trop peur de bouger mes jambes, mais après quelques pas, je me sens à l'aise. Tun ne dit plus rien, mais ses gestes me rassurent et je m'en remets à lui. Finalement, j'arrive à me débarrasser un peu de ma peur.

— Bienvenue dans cet endroit merveilleux !

Au crie et court sur la plage comme un gamin.

Heureusement que nos appareils électroniques sont emballés dans des sacs en plastique étanches, sinon nous n'aurions rien eu d'autre que nos yeux pour immortaliser cette beauté.

— Vous avez une heure pour prendre des photos en guise de souvenir, puis nous nous mettrons au travail.

Si nous étions dans l'autre univers, les enregistrements vidéo seraient montés et étalonnés magnifiquement avant d'être téléchargés sur YouTube pour être montrés à mes amis. Tout ce que je peux faire maintenant, c'est photographier quelque chose, puis je passe le temps qu'il me reste à regarder la nature pour m'imprégner de l'atmosphère.

Je suis tombé amoureux de la mer, mais elle m'effraie aussi. J'en garde de bons et de mauvais souvenirs.

— Tu te sens mieux maintenant ?

— Oui, réponds-je au grand type.

Il hoche la tête en signe de compréhension, s'allonge sur le tapis et ferme confortablement les yeux. Je jette un coup d'œil furtif à Tun. Voyant qu'il dort profondément, je le fixe et me perds dans mes pensées.

Une petite heure s'est écoulée. On prend tous nos outils de travail et passe en mode sérieux. La situation est totalement différente de celle d'avant.

— Où en étions-nous ?

Tun bâille malgré la sieste.

— Au début !

Nous travaillons tous dur comme si nous n'allions jamais nous réveiller demain. Je pense que c'est dû à la tranquillité et au fait que nous avons quitté la ville animée pour travailler ici. Ils nous aident à trouver une conclusion et à corriger les parties sur lesquelles nous étions bloqués en peu de temps.

Quelques heures plus tard, nous faisons nos bagages. Up ne veut pas partir maintenant, nous avons donc le temps de profiter de la nature.

— Ils sont à cran quand ils travaillent, mais leur humeur change du tout au tout quand ils jouent.

Je regarde les deux copains qui sont trempés. Ils jouent dans l'eau avec plaisir de l'autre côté de la plage.

Je m'assois sur le sable et je regarde les vagues s'écraser sur la plage avec l'homme à côté de moi.

— C'est comme ça.

— Tu t'y es fait ?

L'acteur doit travailler avec l'équipe de scénaristes en coulisses, et les personnalités de ces deux-là sont aussi un peu bizarres. Je ne peux m'empêcher de demander.

— Bien sûr, nous avons eu le déclic, répond Tun en souriant. Et toi ? Comment vont Fuse et Kita ?

— Ils sont fous. En fait, ces deux-là sont très gentils. Ils ne passent pas leur temps à se disputer.

— Et nous ?

Nous ?

Cette question est vraiment difficile. Il n'est pas difficile d'y répondre, mais il est difficile... de le lui dire.

— Je ne sais pas.

— On se connaît depuis presque un an.

C'est pour ça que je suis perdu.

— Comment dire ? J'aime quand on est ensemble. Je me sens vraiment seul quand on est séparés. Mais quand on est ensemble, on se prend la tête.

La vérité, c'est que je suis tombé amoureux de lui, mais qu'il me considère comme un ami.

Notre relation semble tantôt proche, tantôt hors de portée, si bien que je ne sais pas si je dois me rapprocher ou m'éloigner, comme j'essaie de le faire.

— C'est bien. J'adore ton visage agacé.

Il prend une expression moqueuse.

Pourquoi ne peux-tu pas aimer tout ce qui me concerne ? Pourquoi tu ne peux pas m'aimer plus que comme un ami ?

— Tais-toi.

— Tu t'appelles Talay(1) et tu aimes la mer. Dis-moi quel est le voyage à la mer qui t'a le plus impressionné.

Je réponds presque immédiatement.

— Quand je suis allé à la mer dans un film avec mes amis et que je me suis évanoui. Ils m'ont porté dans la panique.

— C'est drôle, s'amuse Tun. Tu étais si fatigué que ça ?

— Mon estomac était vide et il faisait très chaud, alors je me suis évanoui.

— Heureusement que tu as mangé un grand bol de porc à l'ail avec du riz aujourd'hui, et que le temps n'est pas étouffant.

— Tu te souviens de ce que j'ai mangé ?

— Allez, tu as aussi mangé les desserts thaïs qu'ils ont servis et plusieurs verres de jus de pois chiches.

— Tu t'en souviens bien.

— Parce que je m'en soucie.

J'essaie d'étouffer mon sourire et de laisser tomber mon regard sur le sable pour que Tun ne le remarque pas. Il ne dit rien, laissant le temps passer jusqu'à ce que le ciel change de couleur. Le soleil va bientôt se coucher.

J'étire mes jambes sur le sable, sentant les vagues s'écraser plus profondément sur la plage. Mais ce qui me choque le plus, c'est que l'homme à côté de moi appuie son pied sur le mien.

Ses yeux brillent et il serre les lèvres sans explication. Je ne pose pas de question, j'obtempère. Je n'entends rien d'autre que mon cœur qui bat à tout rompre.

Le ciel vanille. Les vagues. Le sable blanc.

Notre contact.

Les battements incontrôlables de mon cœur.

Avec tout cela combiné, je me rapproche lentement de lui. Je peux sentir son souffle chaud dans la courte distance qui nous sépare, et nous pourrons partager notre premier baiser si...

… il ne s'éloigne pas.

— …

Je reste sans voix après avoir été repoussé. Il me ramène à la raison.

J'ai envie de me gifler. Qu'est-ce qui m'a fait croire que Tun pourrait me rendre la pareille ? Je m'engourdis en me faisant rejeter.

— Désolé, dis-je en faisant semblant de rire.

Je me lève et m'éloigne.

Je repense à ma conversation avec Kita. Trois fois... les chances de ne pas être choisi.

La première fois, il n'a pas regardé un film avec moi pour sortir avec Pang.

La deuxième fois, il m'a raccroché au nez quand j'étais malade parce que Pang l'avait appelé.

Et la troisième fois, même s'il n'avait personne d'autre, il ne m'a toujours pas choisi.

Je n'aurais jamais cru que l'amour pouvait nous faire perdre autant de choses.

Je perds qui je suis.

Je perds le contrôle.

Je perds mon cœur pour lui.

“Ne laisse pas les choses commencer.” Je devrais m'arrêter, mais il est trop tard.

… Tout a déjà commencé.

Notes :
1/ Talay veut dire mer.

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Johanne
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Johanne
Sam 7 Sep 2024 - 17:38



Chapitre 14
COSMIC SKY
05h00

Quand j'étais heureux, la journée se terminait en un clin d'œil. Maintenant que je suis triste, une journée s'écoule lentement, comme pour m'embêter. Je sais que ce n'est qu'un ressenti, mais je n'arrive pas à le gérer.

— Bonjour, les gars.

— …

— Bonjour...

Je ne sais pas pourquoi je me suis réveillé si tôt pour m'entraîner à parler devant le miroir. Même si ça me fait bizarre, je continue à saluer avec un sourire.

— Hé, les gars.

C'est vraiment étrange, et ma voix sonne vraiment faux.

— C'est pas bon. Trop évident.

Essayons encore...

— J'ai faim. Mangeons.

Ça ne sonne pas bien. Il est cinq heures du matin.

— Je veux regarder le lever du soleil.

Merde, Au et Up dorment encore. La seule personne éveillée est celle qui occupe le salon.

Nous devions dormir dans la même chambre. Mais après l'incident, Tun a prétexté le travail pour dormir sur le canapé.

Lorsque je me souviens de ce geste embarrassant, j'aimerais que ce qui s'est passé il y a deux jours n'ait été qu'un rêve. C'est bien que Tun n'en parle jamais, alors que je fais comme si rien ne s'était passé pour éviter une situation embarrassante. Je n'ose même pas le saluer avec toutes les salutations que je suis en train d'inventer.

— Qu'est-ce que je fais ?

Finalement, je sors de la salle de bain la tête baissée, me jette sur le lit et m'enferme dans la chambre jusqu'à tard.


07h00

— Tess, tu n'as pas bien dormi cette nuit ? Tu as l'air grognon.

Up fronce les sourcils, les yeux pleins de curiosité.

— Je vais bien. Qu'est-ce qu'il y a pour le petit-déjeuner ?

— Du porridge aux crevettes.

C'est une question rhétorique parce que la nourriture est juste devant moi. Je ne veux pas qu'ils me demandent pourquoi je suis sorti de la chambre tout épuisé. Mais lorsque je fais le tour de la table et que je tire une chaise, Up m'interrompt.

— Ta place est là-bas. À côté de Tun. C'est le bol d'Au.

— D'accord.

Je jette un coup d'œil à la personne en question et me dirige timidement vers le siège vide d'en face. C'est vraiment gênant. Nous ne nous regardons pas et continuons à manger le porridge.

— Hey.

Je manque de m'étouffer. Tun rompt le long silence, alors je réponds rapidement.

— Oh, hey, salut.

— Qu'est-ce qui ne va pas chez vous deux ? Vous agissez bizarrement. Je l'ai remarqué depuis qu'on a quitté l'île secrète.

Est-ce que je peux dire que j'ai presque embrassé Tun mais qu'il m'a rejeté ? Je ne sais pas comment agir, alors je m'éloigne de lui et je ne peux pas croiser son regard, comme vous pouvez le voir.

— Rien. On est pareil, non ? dis-je, en déplaçant mon regard maladroitement, pas du tout suspect.

— Il suffit de se réconcilier si vous vous êtes disputés. C'est déjà stressant.

— On ne s'est pas disputés.

Mais nous mangeons tous les deux super vite, comme si nous voulions être les premiers à finir le repas et à nous cacher.


09h00

— Où sont les gars ?

Je rassemble mon courage pour poser la question à l'homme qui passe son temps avec son ordinateur portable. La maison de la plage est plongée dans un silence complet sans ces copains aux personnalités contrastées. Tun et moi sommes les seuls dans le salon.

— Ils pensaient qu'on se disputait, alors ils nous ont donné une chance de nous réconcilier.

Je ne sais pas si nous allons nous réconcilier ou être encore plus gênés.

— Ils imaginent toujours des choses. Pourquoi penseraient-ils ça ?

— C'est vrai.

— Tu regardes un film ?

— Oui, ils ont dit que c'était un film original, alors je le regarde.

Bien que les yeux de Tun soient fixés sur l'écran, il n'a pas l'air concentré. Cela me rend curieux de connaître sa réponse.

— En quoi c'est un original ?

— Je ne l'ai jamais regardé.

— Mais nous l'avons déjà regardé ensemble.

— …

— Tu ne te souviens pas qu'on l'a regardé ou tu te fiches de ce qu'est ce film ?

Un autre silence. Nous nous détournons l'un de l'autre sans prononcer un mot jusqu'à ce que Au et Up reviennent.


11h00

— Les gars, c'est l'heure de travailler.

Avant de commencer ce voyage, nous nous étions fixé comme objectif que notre travail progresse pendant une semaine sur cette magnifique plage. Cela fait quatre jours et nous sommes toujours au même endroit. De plus, chaque fois que nous avons essayé de nous mettre au travail, nous avons toujours commencé par ouvrir les canettes de bière. On buvait jusqu'à plus soif, puis on s'endormait, et le travail n'avançait pas. Cela s'est répété jusqu'à ce que je gronde chacun d'entre eux.

— Pourquoi tu ne t'assieds pas ici, Tess ?

Au m'appelle, me faisant signe d'une manière insistante.

— Laisse-moi étudier un peu ces couleurs. Vous, faites votre travail.

— Tu sembles t'intéresser à la production. Pourquoi tu n'as pas étudié dans le département que tu préférais ? Pourquoi tu as choisi l'Administration des Affaires ?

— J'aime les défis. Je voulais essayer quelque chose pour lequel je n'étais pas doué. La colorimétrie n'est qu'un passe-temps, inventé-je rapidement une excuse.

Arrêtez de demander, s'il vous plaît.

— D'autres questions ?

— Non.

Je ne m'assieds pas avec eux. Je suis seul près de la fenêtre pour étudier les couleurs des différents genres de films de cet univers. Qu'il s'agisse des tendances qui changent chaque année ou des techniques de couleur que je n'ai jamais vues auparavant. En plus d'un an, j'ai découvert une autre chose que je veux. En plus d'évoluer dans cette carrière, je veux échanger des expériences avec des personnes intelligentes et apprendre de nouvelles choses chaque jour.

L'autre raison pour laquelle je ne m'assois pas avec eux est la même que d'habitude. Je ne veux pas mettre Tun mal à l'aise en étant près de lui, alors il vaut mieux que je reste à l'écart.

— Et voilà. Le problème de la dernière fois, c'est comment créer une surprise dans l'acte I, commence Up avec de la détermination dans les yeux.

— J'y ai réfléchi toute la nuit. On va y arriver.

Au fait glisser son ordinateur portable vers son meilleur ami. En les voyant travailler, je me concentre sur ce qui se passe devant moi.

Malgré tout, j'entends clairement leur conversation.

— C'est bien, mais c'est trop mélodramatique et sans suspense.

— Si le premier n'est pas le bon, pourquoi pas ce rebondissement ? C'est de l'humour noir, suggère encore Au.

Je ne peux m'empêcher de l'encourager en l'écoutant. Il travaille toujours dur et a beaucoup d'idées.

— Pas bon. Trop de trous dans l'intrigue.

— Tu n'as jamais entendu parler de la façon de couvrir les failles de l'intrigue ?

— Non.

— Qu'en penses-tu, Tun ? Cet enfoiré de Up n'arrête pas de me rembarrer.

— Si tu n'arrives pas à te décider, laisse tomber pour l'instant. Pourquoi ne pas commencer par autre chose ? Par exemple, les scènes qu'on veut ajouter ou les idées présentées qui ne fonctionnent pas.

— Ça me paraît bien.

Au cours du dernier mois, Friend Credits n'a même pas commencé à écrire un scénario complet. Ils ont été occupés à chercher des idées et à organiser chaque scène en fonction du scénario. Malgré la difficulté de ce projet, je crois fermement qu'ils peuvent y arriver jusqu'à ce que...

La conversation s'échauffe manifestement. Les expressions et les manières d'Au et d'Up semblent particulièrement préoccupantes. Je les regarde de temps en temps avec inquiétude, craignant qu'ils ne se battent.

Je n'arrive pas à croire que ce qui me fait peur va se produire quelques instants plus tard. Leurs voix sont de plus en plus fortes.

— Pourquoi ne pas ajouter cet événement ? Il correspond à la carrière de l'actrice principale, dit Au, et Up refuse immédiatement.

— Il se terminera en une seule scène, sans conséquence pour la fin. Pourquoi l'ajouter ?

— J'aime bien.

— C'est vraiment hilarant. Supprime-le.

— Et ça ?

— Non. Tu devais être ivre quand tu l'as écrit. C'est comme si tu n'avais pas utilisé ton cerveau pour penser à cette idée.

— Tu n'arrêtes pas de dire non. Quelle est ton idée géniale, alors ? Dis-moi.

— Je n'en ai pas encore trouvé, mais je sais que la tienne ne marche pas.

— Tu crois que le monde tourne autour de toi ?

La discussion s'arrête. Mais je peux dire que c'est l'eau calme, l'un des signes annonciateur d’une tempête. Comme prévu, ils reprennent quelques minutes plus tard.

— Ton idée dans le dernier film…

Au ne termine pas sa phrase et se contente de serrer les dents. Cela fait lever les yeux à Up d'une voix contrariée.

— Quoi ?

— Je disais, tu penses que ton idée dans le dernier film était bonne ? Elle était tellement bonne qu'elle a fait un flop !

Putain !

Perdant la tête, Up se lève et tend la main pour attraper le col d'Au, mais l'homme au milieu les sépare.

— Hé, calmez-vous.

Heureusement que Tun est là pour régler le problème. N'ayant plus envie de travailler, je me lève pour aider à améliorer la situation.

— Est-ce que c'est uniquement de ma faute ? Qui était d'accord avec moi à l'époque ?

Je déteste quand mes amis se disputent et quand tout semble terrible à chaque seconde. Qu'il s'agisse de ma relation avec Tun ou des désaccords de la bande.

— Est-ce que j'ai déjà rejeté tes idées, Up ? C'est toi le chef.

— Tu n'as pas pu ou tu n'as pas voulu ? Quand les films ont échoué, tu as rejeté la faute sur les autres. Tu as toujours été comme ça.

— …

— Oh, d'accord ! Ils ont échoué à cause de mes idées. Ils ont échoué parce que j'étais nul. Tu n'as rien fait de maaaaaal, Au. Tu es content maintenant ?

— Putain.

— Si c'est la fin de notre histoire, je dirai juste ceci. Pourquoi tu as tant pleuré quand on nous a critiqués ? Tu nous as déjà demandé si on voulait de ton énergie négative ?

— Qui se marre quand ses films n'ont pas de succès comme toi ? Je dois être heureux quand mon travail est critiqué ? Je dois être heureux quand personne ne nous engage ? Je suis censé mentir en disant que je suis heureux alors que je suis triste ?

— Calmez-vous, tous les deux.

— Qui se calmerait, putain ?

Furieux, Au n'écoute plus personne. Il jette sa canette de bière par terre et s'en va sans se retourner.

— Au ! Où tu vas ? lui crié-je après.

— Il est tellement énervant. Qu'il aille se faire foutre. S'il ne peut pas accepter la vérité, laisse-le tout seul.

Up jure et se lève. Il part dans une autre direction.

Je reste immobile pendant un moment, ne sachant pas quoi faire, puis les pensées sauvages dans ma tête se transforment en question...

En ce moment, je ne sais pas si c'est le problème entre Tun et moi ou la dispute entre Au et Up qui est le pire.


Après avoir regardé à tour de rôle l'horloge sur le mur pendant un certain temps, Tun et moi abandonnons. Nous ne voulons pas nous précipiter, car nous pensons que le temps guérira tout. Pourtant, je suis inquiet.

— C'est le soir. Au n'est pas revenu et n'a pas décroché son téléphone.

Nous nous sommes installés sur la terrasse pour prendre l'air et nous avons regardé la plage s'étendre devant nous. J'ai laissé derrière moi l'humiliation de l'incident d'il y a deux jours, car la dispute de mes amis semblait plus inquiétante.

— Il a dit qu'il avait besoin d'être seul et qu'il reviendrait. Comment va Up ?

Tun s'enquiert de l'autre ami qui s'est enfermé dans la chambre depuis tout à l'heure.

— Il est ivre.

— Ne t'inquiète pas. Ils sont toujours comme ça. J'ai l'habitude.

Mais pas moi...

— J'espère qu'ils vont vite se réconcilier. Ce n'est pas drôle.

Je ne veux plus être choqué et angoissé comme ça.

J'ai d'abord imaginé que nous serions heureux pendant ce voyage. Que le scénario progresse ou non, j'espérais que nous rentrerions au moins avec des souvenirs inoubliables. Mais maintenant, il n'y a même plus un soupçon de bonheur.

— Ne sois pas stressé.

Semblant vouloir me réconforter, Tun tend la main et masse la zone entre mes sourcils. Mais cela me tire de mes pensées désordonnées et mon corps réagit rapidement. Je repousse sa main. Réalisant ce qu'il a fait, il se fige dans cette position.

Je ne suis pas dégoûté par son contact. J'ai juste peur de tomber encore plus bas. J'ai peur que ça se termine comme l'incident récent si nous nous laissons emporter par l'émotion.

— Pardon. Je t'ai vu froncer les sourcils, alors...

— Ce n'est rien, dis-je.

— Tu as faim ?

— Non. Je n'ai pas d'appétit.

— Désolé.

— Et maintenant ?

— Je ne pensais pas que les choses se passeraient ainsi.

— Tu veux dire Au et Up ou nous ?

Tun s'arrête. Je souris et je reprends calmement :

— Dans ce dernier cas, ce n'est pas de ta faute.

— Talay, laisse-moi te poser la question franchement.

— …

— Y a-t-il quelque chose que tu veuilles me dire ?

À la seconde où nos regards se croisent, mon cœur s'emballe de façon incontrôlée. D'accord. Même si son expression laisse entendre qu'il ne me presse pas de répondre, la situation m'oblige à dire quelque chose.

Et je ne veux plus mentir.

— Pour être honnête, depuis que nous avons décidé de ne jamais mentionner l'incident de ce jour-là, je me sens sacrément mal à l'aise. Je me sentirais mieux si tu m'envoyais balader.

— Je ne...

— Attends ! Je n'ai pas fini.

Je l'arrête. Il faut que je parle avant de perdre mon courage.

— En fait, ce qui s'est passé ce jour-là...

Chacune de mes actions ne s'est pas produite dans le feu de l'action ou à cause de l'ambiance. Je voulais juste t'embrasser comme j'avais toujours eu envie de le faire.

J'ai été trop stupide pour me retenir. J'ai été trop stupide pour gérer mes propres sentiments. Et je suis stupide parce que je n'ai pas trouvé de meilleure façon de me confesser.

Après avoir fait face aux pensées qui débordent dans ma tête, je respire profondément et je rassemble mon courage pour lui dire ce que je ressens, même si je sais que je vais être rejeté. Oui, tant pis pour lui.

— Tun.

(Rrrr - Rrrr --)

— Attends une seconde.

Je déteste que le téléphone sonne toujours pendant les moments importants.

— Oui, Pang.

Et je déteste encore plus la personne qui appelle.

Elle n'a pas tort. Elle n'a rien fait de mal. Je suis un mauvais perdant.

Tun se lève instantanément pour parler au téléphone, me laissant deviner leur relation à ma place. La question suivante est : combien de temps vais-je me poser la question ?

De quoi parlent-ils ? Sont-ils amoureux l'un de l'autre et prévoient-ils de retourner ensemble dans l'autre univers ? Les sentiments que je contrôlais autrefois ne sont pas évacués. Ce n'est pas différent de la partie du scénario dont nous avons discuté avec passion.

Est-ce qu'on se sacrifie quand on aime quelqu'un ?

Je commence à être d'accord avec ce qu'a dit Up sur le fait qu'on n'a pas besoin de sacrifier quoi que ce soit si on est choisi. J'ai perdu aujourd'hui, alors le mot "sacrifice" me réconforte un peu. Maintenant que j'y pense, je suis reconnaissant envers la sonnerie de tout à l'heure pour m'avoir empêché de lui avouer mes sentiments. Il faudra bien en finir un jour.

— Pourquoi tu n’es pas rentré à l'intérieur ?

L'homme dans la réalité me fait sortir de mes pensées.

Tun penche la tête et vient s'asseoir à côté de moi.

— Tu as fini de parler ?

— Oui. Ce n'est pas fatigant d'être assis ici ?

— Comment ça, c'est fatigant ?

Je reçois la réponse une seconde plus tard avec l'heure sur l'écran du téléphone qu'il affiche. Tun a parlé à Pang pendant une demi-heure, mais je n'ai pas remarqué le temps qui s'est écoulé.

— Il fait nuit. Rentrons à l'intérieur.

— Pourquoi elle t'a appelé ?

En plus de ne pas l'écouter, je ne peux pas lutter contre ma curiosité.

— Rien.

Je le savais. À quelle réponse t'attendais-tu, Talay ?

— Pourquoi tu ris ? demande Tun en voyant ma réaction.

— Rien. Je me sens juste comme un idiot.

Nous ne sommes pas assez proches pour tout nous dire.

— Dis-moi, si nous étions dans notre univers, est-ce qu'on serait amis ?

— Peut-être.

— J'en doute. Tu es trop différent.

Pas du tout. Vu nos cercles sociaux, je ne serais jamais tombé sur lui. Et il vaut mieux que tout redevienne comme avant. Il a l'avenir devant lui, et moi mon rêve inachevé. Comme chacun a son propre chemin, marcher ensemble sur le même est intolérablement épuisant.

Pendant un moment, je pense au décès d'un membre de l'Association des Thaïlandais dans un univers différent. Je l'ai gardé à l'esprit pendant un long moment. J'ai envisagé de le lui révéler à plusieurs reprises. J'ai eu de nombreuses occasions, mais c'est aujourd'hui que ça se passe.

— Il y a quelque chose d'important que je veux que tu saches.

— Qu'est-ce que c'est ?

— J'ai rencontré Dol le mois dernier et j'ai appris que quelqu'un du groupe était décédé.

Encore une fois, je dois rassembler une énorme quantité de courage pour lui faire face.

— Je pense qu'il est temps d'envisager sérieusement le retour à la maison.

— Même si tes efforts pour trouver ton portoloin sont une perte de temps ?

— C'est mieux que de ne rien faire.

— Notre situation actuelle n'est-elle pas géniale ?

— C'est génial, mais ce n'est pas bien. C'est facile pour toi de dire ça parce que tu as trouvé cette personne. Tu attends simplement de rentrer chez toi. Il n'y a pas de quoi s'inquiéter.

— Comment tu le sais ?

— Tu as dit que Pang pourrait être la bonne, et elle a pensé la même chose.

— Tu lui as demandé ?

— Oui.

— Pourquoi tu lui as parlé, d’abord ?

Je serre les lèvres, choqué par ce que je viens d'entendre. Je m'étais un peu préparé, mais ça fait quand même mal, putain.

— Désolé.

C'est le seul mot qui me vient à l'esprit en ce moment.

Si j'avais un super pouvoir, je me téléporterais quelque part pour ne pas avoir à regarder son visage menaçant. Mais c'est une pensée impossible. Mes mains et mes pieds sont faibles. Si l'un d'entre nous peut partir, c'est lui.

Mais Tun ne partira pas.

Le silence s'installe jusqu'à ce que le ciel devienne complètement noir. La lumière à l'extérieur de la maison s'allume automatiquement tandis que des centaines d'excuses résonnent dans ma tête.

— Talay, que se passerait-il si nous décidions de rester ici ?

— Hein ?

Après un long silence, Tun pose une question sans me regarder. Il fixe l'immensité devant nous.

— Qu'est-ce qui t'a fait penser à ça ? demandé-je, sous le choc, en essayant de stabiliser ma voix.

— Je pense que nous sommes dans une bonne situation. Regarde, nous avons des familles, des amis, de nouveaux rêves, dit-il en fixant ses yeux ambitieux sur moi. Pang m'appelle souvent parce qu'elle fait tout pour rester ici.

Sur ce, je me sens engourdi de la tête aux pieds.

J'ai l'impression d'être dans un état où j'ai envie de rire comme de pleurer. Vu ce que j'ai essayé de faire pour lui, de me faire à l'idée qu'il partirait un jour et d'accepter qu'il aime quelqu'un d'autre, c'est peine perdue.

Sans valeur.

— Tu es égoïste.

— Comment ?

— Tu ne te rends pas compte que tu voles la vie de Pakorn et de Tess ?

— Pakorn me vole aussi ma vie, affirme Tun, sans aucune gêne. Quant à toi, malgré toutes les disputes avec ta famille, tu as encore de l'argent et des relations. Si tu veux devenir coloriste, ta famille peut te soutenir. Si tu veux quelque chose, il te suffit de demander et tu l'as. Qu'est-ce qu'il y a de mal à cela ?

— Je n'en veux pas.

— …

— Tu as déjà demandé à Pakorn s'il voulait vivre ta vie ? C'est sa maison, sa famille.

Je me lève, tremblant. Je crie sans retenue.

— Je veux rentrer chez moi parce que mon rêve s'y trouve. Ma famille, mes parents, mon frère et mes amis, qui me manquent tant, ne sont pas là.

— Je n'ai rien de tout ça !

— …

— Je veux juste me réveiller et savoir que quelqu'un m'attend. Je ne veux pas me retrouver seul à nouveau.

— Tun.

Je l'appelle par son nom, mon visage brûlant comme si j'étais sur le point de pleurer.

— Traite-moi d'égoïste ou de n'importe quoi d'autre.

— Ce n'est pas la question.

— Je m'en fiche.

— Est-ce que le fait que tu n'aies pas de parents signifie que tu peux voler ceux des autres ?!

Je réalise immédiatement que mes mots sont trop durs, mais il est trop tard. Au moment où je dis ça, Tun serre le poing, prêt à me frapper.

Je n'esquive pas. Au contraire, je lève le menton, attendant avec soumission d'être frappé.

— Fais-le.

C'est alors que les larmes que je retenais coulent sans contrôle. Finalement, Tun baisse le poing.

Comment en est-on arrivé là ?

— J'ai essayé de t'aider. J'ai essayé de contacter celui qui pourrait être ton portoloin. Quelle putain de perte de temps.

— Qui t'a demandé de faire ça ? Est-ce que je t'ai déjà demandé de te mêler de tout ?

— …

— Je ne veux pas partir. Pang non plus. C'est toi qui mets ton nez dans mes affaires.

— Tu ne m'as jamais dit ce que tu voulais. Tu ne m'as jamais dit... ce que tu faisais avec Pang pendant tout ce temps.

Je ne pouvais que supposer les choses par moi-même, et j'avais tort. Il souhaite rester ici. Qu'est-ce que je peux faire ?

— C'est vrai, ce ne sont pas mes affaires, admets-je sans autre choix.

— …

— Nous n'aurions pas dû nous rencontrer, dis-je en sachant très bien que c'est impossible.

On ne peut pas redevenir des inconnus.

Nous avons partagé des souvenirs. Nous avons traversé des moments difficiles ensemble. Nous étions d'accord sur beaucoup de choses. Pendant un certain temps...

Il était mon monde.

C'est dommage que je ne puisse jamais lui dire honnêtement à quel point je l'aime. Je dois garder pour moi que cet amour est arrivé, bien qu'il n'en ait aucune idée.


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