|
| Le Titre Le TitreQuatre Ans, Mais Veut Déjà Dominer Le Monde Messages : 463
Date d'inscription : 13/07/2024
| Le Titre Mer 24 Juil 2024 - 12:50 SOTUS The Hazer & The Freshman Ecrit Par Bittersweet Carte D'identité Pays D'origine : Thailande Traduction : Amelyma & Johanne & Néphély Correction :Neï & Minidoux Nombre De Chapitres : 34 chapitres Status : Terminé Soutenir L'auteur : MEB Résumé Ceux qui viennent avant vous sont vos aînés.
Ceux qui viennent après vous sont vos juniors.
Ceux qui viennent à côté de vous sont vos amis.
Arthit, l'impitoyable chef bizuteur, pense que c'est le principe auquel tout étudiant de première année de la faculté d'ingénierie doit adhérer... Tout le monde, sauf Kongpob, l'étudiant de première année qui défie son autorité et déclare qu'il va arracher son 'gear' à Arthit en faisant de lui sa femme.
Cela n'est pas du goût du digne chef bizuteur. Il a l'intention de donner au garçon une leçon à propos de SOTUS en le forçant à en faire partie.
Dans cette bataille du gear et du cœur, qui sera le dernier homme debout entre 'le bizuteur impitoyable' et 'l'étudiant de première année provocateur' ? | | Messages : 942
Date d'inscription : 19/06/2024
| Néphély Sam 7 Sep 2024 - 17:40 Règle n°1 Ne Pas Défier le Bizuteur — C'est tout ce que vous avez ? ! PLUS FORT !
L'aboiement féroce et tonitruant résonnait à travers le hall comme la voix d’un gardien de prison hurlant après ses détenus, sauf que les "détenus" ici n'étaient pas vraiment des prisonniers, mais des étudiants de première année découragés et pâles dans le hall d'activité de la faculté d'ingénierie. Les étudiants de deuxième ou troisième année se tenaient fièrement devant les "nouveaux" ou étudiants de première année, les regardant d'un air sévère comme si les nouveaux arrivants avaient été leurs ennemis jurés dans leur vie antérieure.
Arthit, le responsable du bizutage, était un beau jeune homme aux yeux perçants, issu de la faculté d'ingénierie industrielle. C'est lui qui grondait les nouveaux à cause de leur réponse inaudible. En vérité, même s'ils avaient crié à tue-tête comme s'ils récitaient pour un spectacle, son travail consistait de toute façon à dire qu'il ne les entendait pas.
... Quoi ? Vous avez un problème avec ça ? C'est le droit de naissance accordé aux bizuteurs depuis des générations. Tout l'enfer qu'il faisait subir à ces nouveaux, il l'avait lui-même vécu. Ce n'était que le début. Les choses allaient devenir encore pires à partir de maintenant.
L'homme qui portait la casquette d'un tyran gardait son visage dur et stoïque avant de demander d'une voix neutre mais autoritaire.
— Je vais vous le demander encore une fois. Combien de personnes y a-t-il dans votre promotion ?
La salle garda le silence, comme Arthit l'avait prévu.
Évidemment, ils ne le sauraient pas. Le semestre avait commencé deux jours plus tôt et personne n'était capable de se souvenir du nom de ses camarades de classe. La faculté d'ingénierie comptait le plus grand nombre d'étudiants de l'université - près de mille - et il aurait été plus facile de leur demander de résoudre une énigme de calcul que de leur demander de préciser le nombre d'étudiants.
Mais personne n'avait dit que la tradition du bizutage devait être barbare. Il n'y avait pas besoin d'insulter les gens et d'utiliser des mots de merde. Les hommes instruits comme eux pouvaient exercer leurs pouvoirs sans recourir à des méthodes barbares, car les professeurs les surveillaient pour s'assurer qu'il n'y aurait pas de scandale. C'est pourquoi l'une des règles des bizuteurs était de parler aux étudiants de première année de la manière la plus civilisée possible. Et ces mots "civilisés" pouvaient être coupants pour les étudiants de première année qui baissaient la tête et rentraient dans le rang. Arthit continua à les intimider avec ses mots prudents.
— Je n'ai pas entendu de réponse. Donc, vous ne faites pas attention à vos amis, c'est ça ? C'est pourquoi vous ne pouvez même pas reconnaître vos camarades de classe !
Le beau chef bizuteur tournait lentement autour des rangées de sièges où se trouvaient les élèves de première année, exerçant son autorité et les terrorisant en même temps. Il passa son regard sur eux, constatant que la majorité d'entre eux avait l'air abattue et effrayée. Certains d'entre eux sanglotaient même. Cela signifiait que son impitoyable entraînement fonctionnait.
En fait, il n'était pas méchant par nature et n'était pas un psychopathe au point d'aimer voir les larmes de quelqu'un. C'était juste son travail - être un bizuteur. Quand il voyait une étudiante pleurer, son cœur tressaillait un peu. Et si la fille était mignonne, il avait même envie de la prendre dans ses bras pour apaiser sa souffrance. Cependant, il devait rester dans son rôle, fixant la jolie fille dont les larmes coulaient sur son visage. L'étudiant de première année à côté d'elle lui tendit un mouchoir et elle le prit, lui adressant un sourire reconnaissant et larmoyant.
Bon sang... c'était vraiment ringard... vraiment trop ringard. C'était un signe de manque total de respect ! Il était là et ils avaient le courage de flirter sous ses yeux. Il avait l'œil sur cette belle jeune femme de première année, voulant lui demander son numéro une fois le bizutage terminé. Mais ce gars avait agi avant lui !
Oh bien... tu veux être un chevalier en armure scintillante !? Tu veux être viril !? Eh bien, tu vas l'être !
— Toi, debout !
Il aboya sur le jeune homme à qui appartenait le mouchoir, faisant sursauter la jolie jeune femme à ses côtés. Elle jeta un regard inquiet à son camarade qui était maintenant devenu la cible du bizuteur. Mais le jeune homme, lui, ne réagit que par un léger hochement de tête, l'air imperturbable, avant de se redresser de toute sa hauteur. Arthit se sentit décontenancé. Il mesurait 178 centimètres, ce qui était légèrement supérieur à la moyenne, mais ce prétentieux était encore plus grand que lui de dix centimètres. Ses sourcils étaient plus épais, plus foncés, et son visage étonnamment attirant jetait de l’ombre sur celui de tous les autres hommes de la faculté.
C'était ennuyeux... Les pieds d'Arthit lui démangeaient de frapper quelque chose alors que son aversion pour ce type redoublait.
Il décida donc de donner une leçon à ce première année pour avoir été plus séduisant que le bizuteur en chef.
— Quel est ton nom et ton numéro d'étudiant ?
— Mon nom est Kongpob, numéro 0062, monsieur.
— Maintenant, réponds-moi. Combien de personnes y a-t-il dans ta promotion ?
— Je n'en ai aucune idée.
— Comment ça se fait que tu ne le saches pas ?
— Je n'ai jamais compté les têtes.
Non seulement ses sourcils tressautaient, mais ses mains tremblaient aussi, voulant caresser ce visage stoïque avec son poing.
Maintenant, tu me tapes sur les nerfs, le nouveau. Tu veux me défier, c'est ça ?!
Si cela se passait à l'extérieur, Arthit aurait appelé ses amis pour tabasser ce gars. Mais ils étaient encore dans le hall sous les yeux d'une centaine d'élèves de première année, alors il devait faire comme si le fait de se faire malmener ne voulait rien dire. Il pourrait se venger quand il le voudrait. C'était un bizuteur, après tout.
C'est pourquoi Arthit essaya de rester calme, ne laissant pas transparaître sa frustration, avant de hurler un ordre sévère au gars.
— Même si tu n'as jamais compté, c'est quelque chose que tu dois savoir. Tu dois répondre à chaque question que je pose, c'est clair ?
— Oui, monsieur.
Il hocha la tête une fois la réponse entendue, mettant sa main dans sa poche pour aller chercher un collier avec un pendentif en forme d'engrenage marron. Il mit le bijou en évidence et posa une question.
— Tu vois ce badge d'engrenage ?
— Oui.
— C'est l'engrenage de notre promotion - le symbole de la fierté de tous les ingénieurs, pas seulement d'un seul ingénieur. Si tu ne peux pas me montrer que tu as ce qu'il faut pour mériter cet insigne, alors dégage ! Car vous ne méritez pas votre place dans notre faculté !
La dernière phrase ne s'adressait pas à l'étudiant de première année qui se tenait devant lui, mais à tous les étudiants de première année qui étaient alignés devant lui. Le but de cette intimidation était de rappeler aux étudiants de première année que le verdict était uniquement entre les mains des étudiants de troisième année, à savoir s'ils seraient acceptés ou pas au sein de la faculté.
S'ils se comportaient bien, respectaient les ordres des bizuteurs et participaient régulièrement aux activités d'initiation, ils gagneraient facilement le badge. Mais s'ils se comportaient mal, la classe entière échouerait et le bizutage recommencerait. Et cette fois, il serait encore plus impitoyable. S'ils échouaient encore la deuxième fois, l'engrenage leur serait inaccessible et la promotion entière serait considérée comme en disgrâce.
On ne plaisantait pas. On met l'argent là où on le dit. Ce genre de situation s'était déjà produite les années précédentes et les étudiants de première année le savaient. L'avertissement fonctionna car certains d'entre eux étaient si pâles qu'ils semblaient sur le point de s'effondrer. L'homme qui avait le dessus sourit, satisfait de sa tactique visant à faire peur. Il tourna son attention vers sa cible - l'étudiant de première année qui se tenait debout face à lui.
— Maintenant, réponds-moi, Kongpob. Si on ne vous accorde pas l'engrenage à tes amis et toi, que vas-tu faire ?
Le chef bizuteur leva le menton et fit un sourire moqueur au jeune garçon. Il pensait que le nouveau répondrait 'Je n'en ai aucune idée' une fois de plus, et qu'il leur donnerait une leçon en punissant Kongpob.
Ils devaient savoir qui était le patron. Il était trop tôt pour que le gars fasse jouer ses muscles contre le bizuteur !
Se sentant victorieux, Arthit se retourna, se préparant à avancer et à reprendre sa place. Il avait déjà la punition en tête, n'attendant pas la réponse. Mais la voix de l'étudiant de première année dans son dos manqua de le faire chanceler.
— Je vais te l'arracher.
Le bizuteur s'arrêta net et se retourna pour regarder le jeune garçon, incrédule.
... arracher... quoi ? Est-ce que j'ai bien entendu ? Demande lui encore une fois.
— Qu'est-ce que tu viens de dire ? demanda Arthit, fixant le première année provocateur. Les yeux rusés de Kongpob fixèrent en retour Arthit, déconcerté, avant qu’il ne reprenne la parole, en insistant sur chaque mot.
— Si tu ne me donnes pas l'engrenage, je te l'arracherai.—
La déclaration suscita de forts murmures de la part de tous ceux qui se trouvaient dans la salle, tandis que le chef bizuteur restait bouche bée, les yeux écarquillés. Le garçon l'avait insulté... au milieu de la salle d'activités, et il avait l'impression d'avoir été giflé par une pantoufle. Ses mains commencèrent à trembler tandis que la colère montait dans sa poitrine. Il perdit le contrôle et s'approcha directement pour saisir l'étudiant de première année par le col, en hurlant et en oubliant de respecter le code qui consistait à les traiter de manière civilisée.
— Répète-moi ça ? Tu penses vraiment que tu peux me l'arracher ?!
— Oui, je le pense !
— Comment tu vas faire ça, bordel ?!
— Je vais faire de toi ma femme, monsieur !
La salle entière tomba dans le silence... un silence de mort.
Une grande main saisit celle qui tenait sa chemise. Les yeux vifs et brillants de Kongpob fixèrent intensément les yeux de l'homme stupéfait, et il dit d'un ton bas et sournois :
— On dit que ce qui appartient à ton petit-ami t'appartient aussi. Si je fais de toi ma femme, ton engrenage sera aussi le mien.
— Toi !
Arthit secoua sa main, voulant crier quelque chose en retour au nouveau, mais c'est tout ce qu'il parvint à dire avant que des acclamations et des sifflets ne retentissent dans le hall, certains venant de ses amis bizuteurs. Ils avaient même l'air heureux du défi du nouveau plutôt que furieux, appréciant le cirque où un chef bizuteur impitoyable était provoqué par un nouveau - quelque chose qui n'arrivait pas tous les jours. Cela fit craquer Arthit.
— Ferme ta putain de gueule !!!
L'ordre du bizuteur en chef était définitif, et tout le monde ferma la bouche. Ils regardèrent la confrontation des deux ennemis jurés, et Arthit rassembla le peu de self-control qui lui restait pour fixer Kongpob de son regard le plus féroce.
Comment osait-il ? Il ne savait pas si le garçon le pensait vraiment. Le voyou ne semblait pas gay. Mais il n'était pas intimidé. Si Kongpob pensait qu'il pouvait le transformer en femme, qu'il essaie. Il était hétéro et ne cédait à personne. Il relèverait tous les défis que le type lui lancerait ! Mais pour l'instant, il avait un compte à régler.
— Très bien, nous allons voir si tu es aussi bon que tu le penses. Mais maintenant, l'engrenage est avec moi. Je me réserve le droit de te donner des ordres en tant que senior.
L'homme d'autorité ricana sur le plus jeune homme avant de lui infliger la peine de mort.
— Kongpob, numéro 0062, deux cents squats jumps, ALLEZ !!
— Aye, monsieur !
L'homme qui était puni semblait imperturbable - il souriait même et répondait à l'ordre comme s'il était plus qu'heureux d'obtempérer. Il s'avança et commença ses squat jumps alors que tous les nouveaux lui jetaient des regards compatissants, contrairement à Arthit qui le regardait avec un sourire triomphant, incapable de masquer son ressentiment.
Tu penses que tu peux faire de moi ta femme, espèce d'idiot de première année. Pas dans cette vie ! Tu sous-estimes notre pari. Bientôt, tu apprendras qui deviendra la femme de l’autre !
Certainement pas le senior, mais le première année ! | | Messages : 87
Date d'inscription : 01/07/2024
| amelyma Sam 7 Sep 2024 - 17:40 Règle n°2 Répondez à Toutes les Questions que Vous Pose le Bizuteur — Qui a dit que vous pouviez lever la tête ? ! Baissez-vous, tout de suite !
Ne vous méprenez pas. Il ne s'agissait pas d'un camp d'entraînement, mais d'un ordre bien intentionné de la part d'Arthit, le chef des bizuteurs de troisième année, qui voulait que ses jeunes ingénieurs reçoivent le maximum de vitamine D du soleil de midi.
C'est ça, le soleil, en plein midi, quand le soleil était juste au-dessus de leurs têtes au milieu d'un terrain de football.
Le visage du gars brûlait ; la sueur trempait son dos mais il se tenait droit et fier comme si sa peau était habituée à la photosynthèse. Il était impénétrable. Il était là pour intimider les premières années qui se prosternaient sur le terrain, se faisant barbouiller le visage. C'était une punition qu'ils recevaient pour une seule raison.
— À quelle heure je vous ai demandé d'être ici ?
Le murmure des élèves de première année ressemblant à un bourdonnement d'abeilles, le chef des bizuteurs beugla sa question une fois de plus.
— Je ne vous entends pas ! À quelle heure je vous ai demandé d'être ici ?
— À midi pile, monsieur !
Ce n'était pas si difficile, n'est-ce pas ? Tout ce dont il avait besoin était une réponse et ils ne voulaient même pas essayer, le forçant à leur crier dessus jusqu'à ce que sa gorge lui fasse mal. Le terrain de football était grand ; pas de murs pour l'effet d'écho comme dans la salle d'activités. N'ont-ils pas compris que les bizuteurs devaient calmer leurs maux de gorge avec du miel et du citron si bien que tous les citrons ont presque été vendus sur les marchés ? Malgré tout, les bizuteurs doivent jouer les durs pour montrer aux élèves de première année l'esprit de la tradition sans l'aide d'un microphone ou d'un porte-voix. Le chef des bizuteurs, comme lui, est chargé de s'adresser à la plupart d'entre eux.
Arthit se racla la gorge pour détendre ses cordes vocales avant de poser la question une nouvelle fois.
— Et vous vous rendez compte de l'heure qu'il est maintenant ?
Les élèves de première année murmurèrent et la réponse fut indistincte. Arthit dut s'empêcher de leur aboyer dessus à nouveau.
— Ça suffit ! Ne prenez pas la peine de répondre, je vais vous le dire tout de suite ! Il est douze heures, dix-huit minutes, cinquante-sept secondes. Vous étiez en retard, vous nous avez fait attendre. C'est ce que vous croyez que nous étions censés faire ? Avez-vous la moindre idée de ce que signifie le mot "responsabilité" ? Ou vous n'en avez même pas la moindre idée !?
Arthit balaya du regard les étudiants de première année qui étaient allongés, le visage contre le sol, silencieux comme des tombes après avoir été frappés par la longue insulte. Ils ne savaient même pas que ce n'était que des préliminaires. La véritable épreuve était sur le point de suivre.
— Mais ce n'est pas grave. C'était la première fois alors je vais vous donner une autre chance.
Le verdict fit pousser aux étudiants de première année un grand soupir de soulagement, mais avant qu'ils ne puissent prendre une autre inspiration, le responsable du bizutage s’écria :
— Je vais choisir au hasard l'un d'entre vous pour répondre à ma question. Si il ou elle ne peut pas y répondre, vous serez tous punis !
La lumière de l'espoir dans leur cœur s'éteignit. C'était comme si on leur donnait une claque sur la tête pour ensuite leur donner une tape dans le dos et un autre coup de pied au derrière.
… Lorsqu'ils essayaient de répondre à la question des bizuteurs dans leur ensemble, ils les contrariaient toujours. Maintenant, leur espoir reposait uniquement dans la main d'une seule personne et ils pouvaient voir comment l'enfer pouvait se déchaîner. Qui plus est ? Celui qui était choisi au hasard considérait qu'il avait la pire des poisse, étant choisi pour porter la croix pour tous. Si ce nouveau venu ne répondait pas à la question du bizuteur, non seulement il ou elle serait puni(e), mais il ou elle serait même condamné(e) ; les ancêtres se retourneraient dans leurs tombes.
Bien sûr, Arthit le savait. C'est pourquoi il avait établi cette règle. La victime à envoyer dans la fosse de la condamnation ne pouvait être qu'un seul homme.
— Numéro 0062, lève-toi et avance !
Le numéro désigné fit ce qu'on lui disait et s'avança. Ses amis souhaitaient pouvoir le regarder pour lui montrer leur soutien, mais ils devaient garder la tête basse et ne pouvaient rien faire. Le bizuteur qui avait un meilleur point de vue avait remarqué à quel point ce type insolent avait l'air stressé - plus que d'habitude.
La vengeance est mieux servie froide...... même après dix ans. Ce type l'avait défié et humilié l'autre jour, et un homme comme Arthit ne l'aurait pas oublié.
Il voulait amener ses amis pour le tabasser dans un coin isolé, mais ce serait trop peu civilisé.
Alors, il devait le faire maintenant, ici même, avec une centaine de témoins oculaires. Pas besoin de recourir à la violence physique. Je vous avais dit que nous étions des gens éduqués qui savaient comment bizuter les nouveaux. Ce type méritait d'être puni de sang-froid pour le mal qu'il lui avait fait !
Arthit souriait de manière suffisante, fier de son plan de mise à mort parfait. Il regarda Kongpob, numéro 0062, qui se tenait immobile à l'avant, attendant la question. Il savait déjà ce qu'il devait lui demander et prononça les mots ultimes d'un ton autoritaire.
— Je t'ai demandé hier combien d'élèves il y avait dans ta promotion. Tu t'en souviens ?
— Je m'en souviens. La promotion 2013 compte un nombre total de 1 178 étudiants, dont 216 en génie industriel, monsieur.
La réponse rapide et claire prit Arthit par surprise. Il ne s'attendait pas à ce que le nouveau soit au courant, mais il s'est avéré que le gars avait bien fait ses devoirs. En fait, il ne savait pas combien d'étudiants il y avait dans la faculté. Mais la liste des noms des étudiants de première année du département d'ingénierie industrielle indiquait exactement 216. Cela prouvait que le gars n'avait pas inventé ce nombre.
... Merde. Ce type était un dur à cuire. Il a dû le sous-estimer. Mais un homme comme Arthit ne reculerait pas parce qu'il avait déjà pensé à un plan de secours.
— Bien ! Mais ce n'était pas ma question. Je l'ai seulement dit pour te le rappeler. Maintenant, regarde autour de toi. Compte combien de tes amis sont ici, haut et fort !
Celui qui avait reçu l'ordre se retourna et cria, comptant ses amis qui étaient couchés face contre terre, rangée par rangée, alors que les bizuteurs attendaient. Il pouvait voir d'un coup d'œil que tous les étudiants de première année n'étaient pas présents, ce qui ne faisait qu'augmenter la pression pour le gars qui comptait. Il atteignit son but lorsque le comptage s'arrêta au dernier étudiant de première année. Le nombre était alarmant.
— Il y a 162 de mes amis ici, monsieur.
— Et cela signifie que combien sont absents ?
— 54, monsieur.
Le gars était bon en maths comme les étudiants en ingénierie devraient l'être, Arthit fit un signe de tête approbateur. Il passa rapidement à la question suivante - une question très importante.
— Eh bien, alors. J'ai une question à laquelle tu dois répondre.
Il regarda fixement les yeux du jeune homme de première année qui le fixait. Ses lèvres s'étirèrent en un rictus vicieux avant de prononcer les mots qui font que les étudiants de première année en eurent le souffle coupé.
— Je veux savoir pourquoi 54 personnes ne sont pas là. Pourquoi sont-elles absentes ?
— ...
Il n'y avait pas de réponse, c'est vrai. Même Einstein n’aurait pas su où se trouvaient les 54 personnes qui avaient décidé de ne pas participer au bizutage.
La vérité est que le département d'ingénierie industrielle ne force pas tous les étudiants de première année à participer aux activités d'initiation. Mais si l'un d'eux s'éclipse, les autres doivent prendre la sanction. Donc, c'est inévitable. Ils doivent le faire, sauf s'ils veulent voir leurs amis punis.
Le but de sa question était donc de conduire à une punition, d'une manière ou d'une autre. L'agneau sacrificiel choisi ici devait rendre les choses plus amusantes. Cela rendrait également humble le jeune homme qui avait osé défier son autorité la veille et qui se taisait maintenant.
Vous ne savez pas à qui vous avez affaire. Je suis Arthit, le chef bizuteur, et tu devrais savoir où est ta place. Maintenant, prépare-toi à te faire huer, petit voyou, en oubliant tes amis dans les ennuis.
Arthit sourit à lui-même triomphalement. Pourtant, il n'était pas content, alors il se tourna vers les nouveaux qui étaient couchés et leur cria dessus aussi durement qu'il le pouvait.
— Levez la tête ! Levez la tête et regardez l'ami qui n'avait pas la bonne réponse pour moi ! Alors, voici votre punition...
— Ils ne sont pas absents.
L'homme qui l'a interrompu fit se retourner Arthit. Il haussa un sourcil, demandant sans mots, incertain d'avoir bien entendu.
— Redis-moi ça ?
— Tous mes 54 amis ne sont pas absents, monsieur.
Cette affirmation qui contredisait la réalité fit écarquiller les yeux d'Arthit, incrédule que le nouveau venu ose dire cela.
Tu te moques de moi ? Je te donnais une porte de sortie mais tu ne pouvais pas t'empêcher de parler, n'est-ce pas ? Tu ne vas jamais apprendre, hein ? Tu voulais me tester, d'accord, tu l'as fait, petit voyou !
— Ouvre tes putains d'yeux et regarde ! Tous tes amis sont là ? Comment oses-tu dire qu'ils sont tous présents !?
Le bizuteur furieux pointa son doigt sur les étudiants de première année allongés sur le sol chaud. Pourtant, l'explication du première année qui lui faisait face le laissa sans voix.
— Ils sont tous ici parce qu'ils sont ici dans nos cœurs. Même s'ils sont physiquement absents, ils ont envoyé leurs coeurs pour être ici avec nous, monsieur !
C'est quoi ce putain de bordel que ce mec raconte ? 'Pas absents parce que leurs coeurs sont ici ?'
C'est quoi ces conneries ?! Ce n'était pas un feuilleton ! Se prenait-il pour le héros d'un drame coréen qui sauvait ses camarades de la punition ? Il essayait de s'en sortir facilement.
— Oh, c'est vrai. Vos amis sont généreux. Avec les cœurs qu'ils ont envoyés, j'espère qu'il y a de quoi vous faire faire 54 tours de piste pour compenser les 54 absents !?
— Non, ce n'est pas ça. Les 54 coeurs sont tous avec moi, monsieur !
— Pourquoi diable t'enverraient-ils leurs cœurs ?!
— Pour remplacer celui que je t'ai déjà entièrement donné, monsieur !
Le terrain de football entier fut de nouveau plongé dans un silence de mort.
La discussion enflammée des deux jeunes hommes crachant du feu s'était soudainement recouverte d'une teinte rose violacée alors que l'étudiant de première année flirtait ouvertement avec le chef bizuteur de troisième année. Et le pire ? Les mots qu'il avait utilisés étaient exagérés et donnaient envie de vomir. Arthit, cependant, n'avait pas la nausée. Il était furieux au-delà de toute mesure et cria le nom de l'étudiant de première année.
— KONGPOB !
— Oui.
— Fais 54 tours de terrain, MAINTENANT !
— Oui, monsieur.
L'homme qui avait reçu l'ordre s'exécuta et commença à faire du jogging autour du grand terrain de football sous le soleil brûlant. Tous les élèves de première année se regardaient les uns les autres, se sentant désolés pour le gars qui les avait défendus.
Arthit, qui avait donné son ordre, retourna à sa place, sans prêter attention aux regards véhéments et haineux que les jeunes gens lui lançaient. C'était tout le contraire du regard qu'ils lançaient à Kongpob, un regard plein d'admiration. Le gars rayonnait simplement grâce aux regards de ses pairs. Ce n'était pas juste. Il avait prévu de déshonorer le premier année provocateur, pas de le glorifier. Il s'est avéré qu'il était celui qui était détesté.
Non seulement il n'avait pas réussi à obtenir sa revanche, mais son plan s'était retourné contre lui. Meeeerde. Mais son heure viendrait, et ce Kongpob apprendrait la leçon !!
‘Bataille de l'engrenage’ 2ème round : Bizuteur 0 - 1 Nouveau. | | Messages : 553
Date d'inscription : 13/07/2024
| Johanne Sam 7 Sep 2024 - 17:41 Règle n°3 Respecter les Règles et les Ordres du Bizuteur — Donne-moi ton nom et ton numéro d'identification !
— P-Praepailin, numéro 0744.
La personne qui s'était faite aboyer dessus sursauta, répondant d'une voix tremblante du mieux qu'elle put alors que des larmes perlaient dans ses grands yeux ronds. La pauvre fille avait l'air adorable.
Un homme au grand cœur comme Arthit ne pouvait s'empêcher de céder aux larmes des belles filles. Il reprit, cette fois d'une voix plus douce, tout en gardant son air sévère de bizuteur.
— Et que puis-je faire pour toi ?
— Je - hum - j'aimerais te demander de signer mon carnet.
Elle lui tendit un petit carnet, la page déjà ouverte, révélant les signatures des seniors de la faculté d'ingénierie. Les étudiants de première année avaient reçu l'ordre de se lancer dans une 'chasse aux signatures' et d'obtenir un millier de noms. C'était l'une des activités obligatoires de la faculté.
Bien sûr, Arthit, étudiant de troisième année au département d'ingénierie industrielle, était l'une des signatures recherchées pour honorer les carnets des étudiants de première année. Aujourd'hui, il portait sa chemise d'atelier, déclarant la place qu'il avait gagnée dans cette faculté, alors qu'il était venu à la cantine. Il était inévitable qu'il devienne la cible des étudiants de première année aux yeux brillants.
Cependant, ils lui demandaient rarement sa signature. Vêtu de sa chemise et assis avec ses amis bizuteurs, il ressemblait à l'un de ces étudiants voyous en guerre des gangs qui viennent de sortir de la prison de Bang Kwang(1). Pourtant, aujourd'hui, une courageuse étudiante de première année s'était aventurée sur les eaux dangereuses. Elle était petite, blonde et jolie, exactement son type. Il eut pitié d'elle, prenant le livre et le stylo, sans oublier de demander quelque chose en retour.
— Avant que je ne signe le carnet pour toi, tu dois d'abord faire quelque chose pour moi.
Obtenir une signature de la part des élèves plus âgés n'était pas une partie de plaisir. Il fallait que ce soit difficile pour que les élèves de première année les apprécient et réalisent que la vie n'était pas censée être facile. S'ils voulaient la signature du chef des bizuteurs - un élément rare - ils devaient faire encore plus d'efforts. Ses conditions pour l'échange variaient de quelque chose de stupide et mignon à quelque chose de dur. En entendant la dernière partie, Praepailin pâlit et dit d'une voix tremblante.
— Qu… qu'est-ce que je dois faire ?"
Elle était effrayée, comme s'il était sur le point de l'emmener dans les bois et de l'y enterrer.
Mon Dieu, mon Dieu. Je ne suis pas un sauvage. Arthit se voyait comme un homme généreux, toujours gentil avec les enfants et les belles filles. Praepailin correspondait à ce profil, elle méritait donc sa compassion. Ainsi, ce qu'il lui demandait était...
— Tu dois crier et confesser ton amour à cet irrésistible et beau Arthit, trois fois.
Comme il terminait son commandement, ses amis le huèrent. L'expression de Praepailin, cependant, passa de la peur à la stupéfaction.
... Quoi ? Pourquoi me regarde-t-elle comme ça ? C'était l'échange le plus facile qu'il ait jamais fait à quelqu'un. Il avait eu pitié de la jolie fille alors comment se faisait-il qu'elle se comporte comme si elle avait reçu une claque sur la tête ? Il ferait mieux de changer l'ordre pour un baiser sur sa joue !
— Dépêche-toi que je puisse retourner à mon déjeuner. Ne me fais pas attendre.
Ses mots qui portaient un soupçon de menace sortirent la jeune fille de sa torpeur. Arthit vit l'hésitation sur son visage. Ils étaient dans la cantine à midi, avec un millier d'étudiants de différentes facultés. Crier quelque chose attirerait forcément l'attention. Mais une fois que ses beaux yeux ronds rencontrèrent le regard d'Arthit qui la fixait avec impatience, la jeune fille abandonna et se mit à crier aussi doucement qu'elle le pouvait.
— P'Arthit(2), tu es le plus sexy et tu me plais ! P'Arthit, tu es le plus sexy et tu me plais ! P'Arthit, tu es le plus sexy et tu me plais !
— Whooo !!
Toute la table des bizuteurs éclata en huées et en acclamations, produisant un effet sonore pour leur impitoyable chef bizuteur. Le gars voulait esquisser un sourire en voyant une jolie fille se confesser à lui, mais il devait garder son air cool. Il répondit à voix basse comme le ferait un gentleman.
...
— Merci, de me dire ce que tu ressens. Je serai gentil. Tu peux me donner ton numéro de téléphone et je t'appellerai.
Ça avait l'air gentil mais c'était juste un stratagème pour avoir son numéro.
Il serait idiot de ne pas tirer le meilleur parti de cette situation. Il regretterait de ne pas avoir appris à la connaître puisqu'elle lui avait déjà dit qu'elle l'aimait bien. Un gars sexy comme lui n'avait pas d'autre choix que de lui rendre la pareille.
Bien sûr, Praepailin n'eut pas d'autre choix que d'obtempérer. C'est comme ça qu'il eut son numéro. Il lui tendit le carnet avec sa signature soignée, en lui faisant un clin d'œil, pensant que ça le rendait plus sexy. Et c'était le cas, car la fille rougit énormément. Elle et ses amies se retournèrent pour partir, laissant le chef bizuteur qui se faisait taquiner par ses amis.
— Tu es méchant, Arthit ! Tu as même obtenu son numéro.
— Eh bien, qui est le dieu de la séduction ?
Le dragueur accepta le compliment sans broncher. Quoi ? C'est ce pour quoi il était doué. Un talent inné qui ne pouvait pas être imité.
— Et l’élève de première année, là ? Tu ne veux pas flirter avec aussi ?
Un de ses amis désigna la rangée du fond. Les oreilles d'Arthit se dressèrent et il se retourna pour regarder, au cas où il y aurait d'autres jolies étudiantes de première année à connaître. BANG. Ses yeux se posèrent sur quelqu'un qui attira son attention. Plus précisément, l'attention de ses pieds.
Le 'première année' qui se trouvait à la tête d'un grand groupe d'étudiants était son ennemi juré qui avait osé le défier deux fois et qui avait fait de lui la risée de ses amis bizuteurs. Il avait dû refouler sa colère, avec l'intention de lui rendre la monnaie de sa pièce un jour.
... Ce fils de pute !!
— 0062, Kongpob !!
Le gars qui venait d'être interpellé s'arrêta et se tourna vers la voix. Il vit le grand groupe de bizuteurs et leur fit un wai poli comme les jeunes sont supposés le faire, en faisant particulièrement attention au bizuteur en chef qui le regardait furieusement.
— Tu as ma signature ? demanda sèchement le troisième année.
— Pas encore.
— Montre-moi ton carnet.
— Très bien.
Kongpob s'exécuta, ouvrit son sac à dos, prit son carnet et le donna au chef bizuteur. L'homme le feuilleta rapidement.
... Oh bien, le gars avait obtenu beaucoup de signatures... près de 500-600 d'après un calcul approximatif. Mais attendez ... pourquoi certaines signatures semblaient étranges ? ... Il y avait un numéro d'identification avec les dix autres numéros. Woah ! C'était des numéros de téléphone ! Pas seulement un mais plusieurs ! Certains avaient même des gribouillages supplémentaires à côté d'eux.
‘Je suis célibataire. Appelle-moi quand tu te sens seul, 24/7, bisou bisou.’
Merde. Je sais que tu es attirant et que les filles se jettent sur toi. Mais pour lui ? Un homme comme Arthit devait recourir à des astuces et des leurres avant d'obtenir le numéro de quelqu'un... et les filles ne l'aimaient même pas.
Merde, tu penses que tu es le héros d'un drama coréen ?! J'ai envie de vomir !
Arthit voulait écraser le carnet et le déchirer, mais il devait rester calme. Ils étaient en public, avec des milliers de paires d'yeux braquées sur eux. Montrer qu'il ne perdait pas son sang-froid prouverait qu'il était respectable. Il expira lentement, se calmant tandis que son cerveau concoctait un plan. Il parla d'une voix simple et sans émotion.
— Tu as obtenu de nombreuses signatures. Donc, je suppose que tu peux faire quelque chose pour moi ?
— Je peux, monsieur.
— Tu vois la table vide devant le stand de porc rouge grillé là-bas ?
Il désigna la table vide cinq tables plus loin, presque au milieu de la cantine. L'étudiant de première année qui avait suivi son indication hocha la tête.
— Oui. Je la vois.
— Va là-bas, debout sur la table, et crie très fort et très clairement...
Le chef bizuteur fit une pause et les lèvres d'Arthit s'étirèrent en un sourire malicieux, prononçant sa peine de mort.
— J'aime que les hommes me la mettent dans le cul...
En terminant sa phrase, il vit à quel point le jeune garçon avait l'air stupéfait, exactement comme lorsqu'il avait dit à la fille d'avouer ses sentiments pour lui. Mais Kongpob avait l'air pire parce que ce qu'il avait à dire était dégradant. Arthit n'était pas satisfait car il voulait réduire en miettes la dignité du garçon.
— Il y a plus. Une fois que tu as terminé, tu dois demander à dix gars ici présents, haut et fort, s'ils veulent te la mettre dans le cul, et je te rendrai le carnet.
L'homme au pouvoir brandit le carnet de signatures comme s'il tenait un otage tandis que Kongpob le fixait sans dire un mot. Arthit savait que le jeune homme devait être en train d'imploser mais il ne pouvait pas réagir. C'était un ordre d'un chef bizuteur et c'était définitif. Les nouveaux devaient se conformer à ses directives sans objection. Pourtant, le première année se tenait là, ne faisant rien, et Arthit lui donna un coup de coude.
— Tu as perdu ta langue ? Fais ce que je te dis... à moins que... tu n'aies pas le courage de le faire.
Les yeux d'Arthit brillaient d'une lueur suffisante lorsqu'il rencontra ceux de Kongpob. Puis, le plus jeune sembla avoir pris sa décision. Il se dirigea vers la table vide devant le stand de porc rouge rôti, monta dessus et se mit à crier pour que toute la cantine puisse entendre.
— J'aime que les hommes me la mettent dans le cul ! J'aime que les hommes me la mettent dans le cul ! J'aime que les hommes me la mettent dans le cul !
Tous les regards étaient tournés vers le gars qui venait de déclarer la chose la plus humiliante qu'un homme puisse faire en public, choqués. Ils furent encore plus abasourdis lorsque le beau garçon descendit de table et s'approcha des hommes qui faisaient la queue pour acheter de la nourriture.
— Tu veux me la mettre dans le cul ?!
Les élèves auxquels Kongpob posait la question avaient la bouche ouverte, tout comme les autres élèves de la cantine. Ils étaient tous sans voix, sauf un homme qui essayait de réprimer son rire.
Eh bien, eh bien, qu'est-ce que ça fait ? C'était le prix à payer pour être si populaire. Arthit lui avait juste fait crier qu'il était gay et les filles avaient maintenant compris qu'il était hors limite. Et ce n'était pas tout - il était même un bottom - un qui aimait se faire mettre !
Il se souvenait de la façon dont ce type avait déclaré qu'il ferait d'Arthit sa femme et avait même utilisé des excuses bidons pour l'énerver. Cette fois-ci, il avait goûté sa propre médecine et savait ce que cela faisait d'être humilié publiquement.
Bien fait pour toi, petit con !
Arthit regardait le première année demander à d'autres gars d'avoir des relations sexuelles anales avec lui. Quand il eut atteint le nombre cible, il revint vers Arthit tandis que certains étudiants les regardaient toujours.
— C'est fait.
— Bien. Tu t'es bien débrouillé. Tu peux prendre ton carnet.
Il jeta le carnet à Kongpob, se levant en même temps que ses camarades pour débarrasser les assiettes vides car un cours de l'après-midi les attendait. Avant qu'ils ne quittent la cantine, l'élève de première année qui avait récupéré son carnet de notes courut vers eux.
Kongpob tendit son carnet au bizuteur. Arthit ne le prit pas et haussa un sourcil avant de poser une question qui coupa comme un couteau.
— Je n'ai pas dit que je signerais ton carnet, n'est-ce pas ?
L'humiliation qu'il venait de subir lui faisait mal, mais les mots du bizuteur le blessaient encore plus profondément.
Arthit avait raison, se rappela-t-il. Le troisième année n'avait pas dit qu'il signerait le carnet si Kongpob faisait ce qu'on lui disait. C'était lui qui l'avait fait volontairement, en tombant directement dans le piège du bizuteur - un piège qu'Arthit avait soigneusement préparé pour lui.
— Mais il y a peut-être une chose que je peux faire pour toi.
Les mots généreux venant d'Arthit firent lever les yeux de Kongpob. Il sursauta lorsque l'homme plus âgé saisit sa cravate et le tira plus près de lui, chuchotant tout bas pour qu'il soit le seul à entendre. C'était un murmure, mais un murmure qui résonna dans son cœur.
— Je peux te la mettre dans le cul.
La cravate fut relâchée, suivie d'un sourire suffisant sur le visage du chef bizuteur qui sortit de la cantine avec un rire triomphant, laissant le nouveau vaincu derrière lui comme s'il ne signifiait rien.
Bataille de l'engrenage 3eme round : Bizuteur 1 - 1 Nouveau. Notes :1/ La prison centrale de Bang Kwang est une prison destinée à accueillir les prisonniers de sexe masculin et les condamnés à mort. 2/ P' se prononce 'Pi'. Il désigne une personne plus âgée que vous et est placé devant son nom pour l'appeler grande sœur ou grand frère. Laisser Un Commentaire »»————- ★ ————-«« | | Messages : 942
Date d'inscription : 19/06/2024
| Néphély Sam 7 Sep 2024 - 17:41 Règle n°4 N'oubliez jamais ce que le Bizuteur vous a dit — Où est ton badge ?
Pour d'autres, cela aurait pu être une simple question.
Mais pour le première année qui avait été sommé de se lever au milieu de la salle d'activités d'ingénierie, cette question était une condamnation à mort, surtout lorsqu'il était la cible du regard noir d'Arthit qui était un étudiant de troisième année. Ce regard intensifiait le sentiment de malaise dans ses tripes, car le regard du junior semblait pénétrer dans son esprit intérieur, et il n'avait d'autre choix que de dire la vérité malgré sa peur.
— Je... Je l'ai laissé chez moi.
Arthit laissa échapper un soupir pesant en entendant cette réponse. Il n'était pas résigné, non, mais il en avait assez de devoir rappeler sans cesse aux gens une tâche aussi simple.
— Vous pensez que je vous ai donné ce badge juste pour le plaisir ? Vous vous rendez compte de l'importance de celui-ci ? C’est une manière de faire savoir à vos amis et à vos aînés qui vous êtes. Mais tu ne l'as pas apporté et porté. Donc, tu ne veux pas que nous sachions qui tu es, n'est-ce pas !?
Celui qui se faisait engueuler sursauta, secouant violemment la tête pour démentir l'affirmation.
— N-non, bien sûr que non !
S'excuser ne servait à rien. Arthit plissait les yeux comme s'il réfléchissait à quelque chose et finit par émettre une conclusion.
— Dans ce cas... tu dois penser que tous tes amis te connaissent, donc que tu n'as pas besoin d'accrocher le badge autour de ton cou. Alors, prouvons que tout le monde connaît ton nom. Vous tous, levez les yeux vers lui, et dites-moi son nom !
Alors que les derniers mots émis par le chef des bizuteurs s'estompaient, aucun des étudiants de première année assis dans la rangée n'avait bougé ou ouvert la bouche. Ils se taisaient tous, peut-être pas parce qu'ils ne connaissaient pas le nom de leur ami, mais parce qu'ils avaient peur de la colère du bizuteur. De toute façon, ils finiraient tous par être punis.
— Personne ? Aucun d'entre vous ne sait qui il est ? Personne ne le considère comme un ami, c'est ça ?
L'affirmation acerbe fit pâlir celui qui était la cible de la question. Même s'il était un homme, il avait envie de pleurer devant une telle pression. La tête basse, il était prêt à subir la plus dure des punitions de la part du bizuteur, mais avant qu'Arthit ait pu prononcer un autre mot, une voix s'éleva.
— Son nom est 'M', monsieur.
La phrase qui brisa le silence poussa le chef bizuteur à se retourner et à aboyer sa question.
— Qui est celui qui a répondu ?
— C'est moi.
Un jeune homme leva la main et se leva, se dévoilant au bizuteur. Les yeux d'Arthit s'écarquillèrent dès qu'il posa son regard sur l'homme qui osait prendre la parole. C'était encore lui, ce vaurien qui se donnait le rôle d'un chevalier en armure brillante. Il était, en fait, l'épine dans le pied du bizuteur !
...0062, ce maudit Kongpob !
Même si l'homme avait défié son autorité à maintes reprises, un homme comme Arthit ne se laissait pas abattre. Il se sentait encore plus motivé en étant défié par un adversaire audacieux. Pourquoi laisserait-il filer cette nouvelle victime alors que le type s'était servi lui-même sur un plateau ? Il ne dirait pas non pour ne pas blesser les sentiments du gars. Il changea donc sa cible pour la nouvelle.
— Tu connais cet homme ?
— Je le connais !
La réponse confiante lui donna des démangeaisons dans les pieds sans raison. Voyons si ce connard arrogant connaissait vraiment son ami !
— Montre-moi ta carte d'identité.
'M' sursauta une nouvelle fois en entendant l'ordre et tâtonna pour trouver son portefeuille. Il en sortit sa carte et la tendit au bizuteur dont les lèvres s'étirèrent en un rictus. Il commença ensuite à poser une série de questions à Kongpob.
— Quel est le vrai nom de ton ami ?
— Kathawut, monsieur.
— Et son nom de famille ?
— Hathaiprasert, monsieur !
— Sa date de naissance !
— Le 12 décembre 1995, monsieur !
Merde... ce type a bouffé le certificat de naissance ou quoi ?!!
Arthit voulait crier sa frustration. Il posait beaucoup de questions mais ce con avait réussi à y répondre correctement. Comment pouvait-il y arriver ? Ou... peut-être qu'ils se connaissaient depuis longtemps ? Pas étonnant qu'il ait été si sûr qu'il serait en mesure de répondre à tout ce que Arthit allait demander.
Mais pensait-il que quelqu'un comme Arthit le laisserait partir si facilement ? Ce ne serait pas lui s'il ne pouvait pas se venger de quelqu'un !
— Tu peux t'asseoir. On dirait que ton ami te connaît bien. Mais je veux savoir maintenant si ton 'ami' va connaître tous les autres amis comme il te connaît !
L'homme qui avait été ciblé voulait soupirer de soulagement mais il ne pouvait pas, sachant très bien que celui qui était devenu sa nouvelle cible... son meilleur ami se retrouvait dans ce pétrin pour l'avoir sauvé. Pire, il savait que son ami avait été ciblé depuis le jour où il avait défié l'autorité du bizuteur. Il craignait que Kongpob ne reçoive la pire des punitions, et il s'avérait qu'il avait raison quand le chef du bizutage cria son ordre.
— Tout le monde met son badge à l'envers !
Ils ne comprenaient pas pourquoi ils devaient le faire mais l'ordre du bizuteur était définitif et ne pouvait être remis en question. Ils retournèrent tous leur badge et dès qu'ils le firent, un autre cri retentit.
— 0023, lève-toi !
L'étudiante ayant ce code se leva d'un bond. C'était une jolie jeune femme qui tenait l'ourlet de sa chemise alors que la peur l'envahissait. Oh, ma belle, tu n'as pas besoin d'être effrayée parce que c'est ce connard de je-sais-tout que je vise !
Arthit se dirigea vers elle, qui se tenait de l'autre côté, pas très loin de Kongpob. Il se retourna et fixa l'homme qui le regardait avec un air interrogatif.
— Maintenant, donne-moi son nom.
Kongpob resta silencieux comme s'il avait reçu un coup de poing dans les tripes, réalisant la stratégie que le bizuteur utilisait contre lui. Mais il n'avait pas le droit de se plaindre, et ne pouvait que se conformer aux directives qui lui étaient données. Il prit une profonde inspiration avant de répondre.
— Son nom est 'Maprang', monsieur.
Même s'il n'avait pas l'air aussi assuré que la première fois qu'il avait répondu, la réponse était toujours claire et nette, incitant Arthit à vérifier qu'il avait raison.
— Tourne ton badge pour que je puisse voir.
L'étudiante s'exécuta et le badge révéla le nom. C'était "Maprang", comme Kongpob avait répondu.
Très bien, tu as réussi à survivre une fois de plus. Mais ne pense pas qu'un homme comme Arthit abandonnerait facilement.
— 0038 !!
Un garçon joufflu se leva à la rangée de gauche comme on le lui avait ordonné. Arthit se dirigea vers lui en aboyant sa question en chemin.
— Quel est le nom de ton ami ?
— C'est 'Oak', monsieur.
Cette fois-ci, il n'a pas eu besoin d'attendre que le jeune homme retourne le badge, car il tendit la main et le fit. Sa frustration doubla quand il vit le nom inscrit sur le badge.
Putain ! Il connaissait tout le monde ou quoi ?! Il y avait plus de deux cents étudiants de première année dans le département d'ingénierie industrielle, donc il n'y avait aucune chance qu'il connaisse tous les noms, à moins qu'il soit un Monsieur Cordialité ! Il devait bien y avoir des noms qui lui échappaient !
— 0151 !
Une étudiante portant des lunettes et une queue de cheval, à l'allure sinistre, se tenant droite comme l'avait ordonné le bizuteur, attendait d'entendre son nom de la bouche de son camarade. Mais tout ce qu'ils entendirent fut... le silence.
Je t'ai eu ! Il avait enfin trouvé le point faible de ce con !
— Quelle est la réponse ? ! Quel est le nom de ton amie !?
Arthit accentua ses mots, jetant un regard dur à Kongpob qui avait du mal à trouver ses mots.
... Alors, tu n'es pas un Monsieur Je-sais-tout, après tout. Comment oses-tu défier mon autorité ? C'était à son tour d'apprendre à ce morveux à connaître sa place. Un simple tour de piste ne suffirait pas, pas plus que des squat ou des rotations. Pour un morveux aussi arrogant, il avait quelque chose de pire en tête.
— Donne-moi ton badge.
Arthit se dirigea vers la fille et lui demanda son badge, elle était restée figée sur place, peut-être attristée par le fait que son ami ne se souvenait pas de son nom. Pourtant, elle dut remettre le badge au chef du bizutage qui l'agita à la vue de tous les élèves de première année.
— Je vous ai déjà expliqué la raison pour laquelle je vous ai donné ce badge, c'est que je voulais que vous fassiez attention à vos amis. Mais vous ne pouviez même pas vous souvenir du nom des autres. Alors, quel est l'intérêt d'avoir ce badge de ma part ?
Il s'interrompit, levant le badge en carton avec une corde orange de ses deux mains pour que tout le monde puisse le voir, et appuyant sur chaque mot avec un grognement.
— Comme vous ne voyez pas la valeur de ce badge, alors il est inutile !
Il déchira le badge en morceaux alors que les étudiants de première année restaient stupéfaits - tous les yeux de la salle d'activité étaient braqués sur lui alors qu'il déchira le papier. Kongpob était déconcerté, regardant les morceaux de papier tomber sur le sol - le papier qui avait été le badge d'une amie qu'il ne pouvait pas reconnaître, atterrissant lentement sur le sol morceau par morceau.
— ...N'oubliez jamais que cela a seulement montré à quel point vous avez tous été ignorants, en ne faisant pas assez attention à vos amis.
Arthit laissa tomber les morceaux restants de ses mains comme s'il s'agissait de simples déchets avant de retourner à sa place pour prononcer la fin de son discours.
— Aujourd'hui, mon devoir s'arrête ici. Demain, j'espère voir votre badge sur vous, sur vous tous ! Mais si vous pensez que vos amis ici vous connaissent bien, ne prenez pas la peine de le porter à nouveau ! Compris !?
— Oui, monsieur ! !
La réponse retentit à l'unisson dans la salle. Le chef des bizuteurs hocha la tête en signe de satisfaction avant d'éloigner le groupe de bizuteurs du rang, laissant la place à l'équipe récréative - les étudiants de deuxième année qui enseigneraient aux étudiants de première année comment chanter les hymnes et faire des activités amusantes - afin de rééquilibrer les émotions des étudiants de première année.
Il reconnaissait avoir dépassé les bornes à l'instant, mais c'était à lui, en tant que bizuteur, de jouer les durs et de montrer l'exemple. Pour contrôler une centaine de personnes, il fallait utiliser l'intimidation et la pression comme tactiques principales.
Donc, même s'il était perçu comme un bizuteur sans coeur, brutal et sans pitié, il devait garder son calme pour que personne ne conteste son autorité et ne manque de respect aux bizuteurs.
Il semblait que ce qu'il avait fait était efficace. L'élève de première année qui avait été sa cible était pétrifié comme s'il se sentait coupable d'avoir causé la perte de son badge à son amie.
...C'était la conséquence du manque de respect et de l'insulte envers les seniors ! Tu as été choisi d'être blessé de la manière la plus douloureuse possible !
Arthit regardait Kongpob avec mépris en s'éloignant de la salle d'activités. Mais soudain, celui-ci se mit à bouger, quittant la file des élèves de première année en courant, faisant fi de toutes les règles. Il se dirigea droit vers la fille dont le badge avait été déchiré en morceaux alors qu'elle essuyait les larmes de son visage. Arthit regarda Kongpob se pencher pour ramasser les morceaux de papier, prenant le badge dans ses mains, et leva les yeux vers la fille qui pleurait.
— Je suis désolé, quel est ton nom ?
La fille sursauta un peu mais lui répondit en sanglotant.
— Je... je m'appelle M... May.
Kongpob hocha la tête en signe de compréhension puis fit quelque chose dont Arthit ne put croire ses yeux.
Le jeune homme retira le badge qu'il portait autour de son cou et alla chercher un stylo pour griffonner quelque chose au dos du papier. Une fois terminé, il le tendit à la jeune fille avec un sourire.
— Tiens. Prends-le.
Le mot "May" avec le code "0151" était visible sur le badge. La jeune fille était décontenancée, touchée, contrairement à Arthit qui était aussi stupéfait alors que sa colère montait en flèche et le faisait trembler.
...Comment ose-t-il ? Comment ose-t-il ?
Il se dirigea vers eux deux, attrapant le grand corps de l'étudiant pour le faire tourner vers lui et lui faire face en criant.
— Qu'est-ce que tu fous, Kongpob !?
Le ton et le regard féroce qui cherchait à faire couler le sang ont fait comprendre à Kongpob à quel point l'autre homme était en colère. Pourtant, il répondit d'une voix calme.
— Je viens de lui donner mon badge, monsieur.
— Pourquoi tu as fait ça ? Qui te l'a dit ?
— Personne, mais c'est ma faute si je n'ai pas pu me souvenir de son nom ! Donc c'est ma responsabilité.
L'explication prit Arthit de court. Il croisa le regard perçant de Kongpob.
...Il n'y avait aucun défi dans les yeux du jeune homme, seulement une détermination sans faille qui le fixait.
Cela le calma soudainement tandis que sa fureur se dissipait. Il décida de parler sur un ton plus sinistre.
— Tu sais que si tu donnes ton badge à ton amie, tu ne l'auras plus ?
— Je le sais, monsieur.
Très bien. Le gars connaissait le règlement, mais il avait quand même choisi de le faire. Cela signifiait qu'il assumerait toutes les conséquences qui s'ensuivraient, comme une punition. Un chef bizuteur comme Arthit n'allait pas refuser ce privilège à ce mec.
— Si tu ne portes pas de badge, je considère que tu as enfreint le règlement de ta classe. À partir de maintenant, tu ne t'assieds plus avec les autres pendant les réunions et tu seras isolé. Et si tes amis sont punis, tu seras puni deux fois. C'est clair ?
— Oui, monsieur !
La réponse forte et audacieuse de Kongpob qui ne semblait pas du tout effrayé, alors qu'il s'agissait de la punition la plus sévère jusqu'à présent, poussa Arthit à se détourner. Il ne se dirigea pas vers les rangs des étudiants de première année, mais sortit tout simplement de la salle d'activités.
... Il ne comprenait pas pourquoi il se sentait comme ça. Tout ce qu'il savait, c'est qu'il ne supportait plus de rester dans cette salle un instant de plus. Il avait fait tout ce qu'il devait faire en tant que bizuteur et la punition était amplement méritée.
Pourtant... il ne pouvait s'empêcher de se sentir vaincu... par la détermination de Kongpob qui voulait juste sauver son amie.
Il venait juste de réaliser que... à part son arrogance qui lui donnait l'envie de lui frapper la bouche à coups de pied plusieurs fois par jour, ce qu'il détestait était aussi le regard déterminé que Kongpob lui lançait toujours. | | Messages : 553
Date d'inscription : 13/07/2024
| Johanne Sam 7 Sep 2024 - 17:42 Règle n°5 Comprendre le Devoir du Bizuteur — Est-ce que quelqu'un vous a déjà enseigné l'unité ?!
Bien sûr, quelqu'un l'a fait.
Bien sûr, la réponse aurait été un oui. Ils étaient à l'université, donc personne ne pouvait ignorer ce simple mot. Mais pour les bizuteurs en chef qui entraînaient les étudiants de première année au milieu du terrain de football à 16 heures, ces enfants étaient aussi bons que des élèves de maternelle, à en juger par la façon dont ils s'étaient comportés.
— Il y a toujours quelqu'un qui manque quand vous devez venir à la réunion ! Vous vous mettez toujours en rang en retard. Malgré les punitions, vous n'êtes jamais prêts ! Vous ne connaissez pas le mot "unité" ou alors on ne vous l'a jamais enfoncé dans le crâne !
Le cri était destiné aux étudiants de première année, qui portaient des t-shirts de sport de l'Ingénierie avec des maillots, et qui savaient quel sort les attendait. Ce qui n'était pas loin de leur prévision puisque le chef bizuteur avait déjà la punition en tête.
— C'est bon. Si ce mot a échappé à votre esprit, je vous l’enseignerai une fois de plus. Mais laissez-moi vous mettre en garde sur ma méthode d'enseignement. Si vous êtes une mauviette et que vous pensez ne pas pouvoir le supporter, retirez-vous et partez maintenant !
C'était une chose normale d'avoir une zone spécialisée pour les personnes ayant des problèmes de santé ou une forme physique plus faible afin d'éviter les blessures. La formation des bizuteurs n'était pas moins sévère que celle d'un corps d'entraînement. De nombreux étudiants de première année voulaient déjà se retirer pour éviter d'être punis... jusqu'à ce qu'ils entendent la phrase suivante du chef des bizuteurs.
— Mais... si vous partez, n'oubliez pas que vos amis qui resteront devront aussi recevoir la leçon d'unité pour vous !
… Il avait bloqué cette sortie, alors maintenant qui voudrait partir ? S'ils fuyaient, leurs amis souffriraient pour eux. Personne ne voulait prendre une sortie facile par peur d'être considéré comme égoïste et ils laissèrent Arthit balayer du regard la ligne nette des étudiants de première année qui se tenaient docilement. Aucune main ne se leva et cela lui plut.
— Bien ! Je suis forcé d’admirer votre esprit. Maintenant vous commencez à comprendre le sens du mot "unité". Mais ce n'est pas suffisant ! Quand vous vous retournez, voyez-vous vos amis de l'autre côté du terrain ? Vous devez traverser le terrain en courant et vous aligner de l'autre côté en moins de 3 minutes. Si vous êtes en retard, vous serez punis en fonction de votre temps ! C'est clair ?
— Oui, monsieur !
Tous les étudiants de première année répondirent à l'unisson, contrairement à leurs visages devenus livides. Le terrain était aussi grand qu'un terrain de football et les bizuteurs qui les attendaient à l'autre bout étaient trop loin - aussi loin que les deux buts aux extrémités opposées. Ils ne pouvaient pas le faire en trois minutes, comment pouvaient-ils y arriver ? Ils voulaient crier une protestation mais il n'y aurait pas de pitié de la part du chef bizuteur, car il criait d'autres ordres.
— Eh bien ! Mais qu'est-ce que vous attendez !? Allez-y ! Je commence à chronométrer maintenant ! GO !
Une fois ces mots prononcés, tous les étudiants de première année se mirent à sprinter comme des abeilles chassées de la ruche, courant vers l'autre côté du terrain pour y arriver en trois minutes. Ils n'y arriveraient jamais, bien sûr, et finalement, on leur dirait de s'asseoir et de se relever des centaines de fois en leur ordonnant de s'aligner encore et encore jusqu'à ce qu'ils puissent former une ligne et une formation impeccables pendant qu'Arthit superviserait l'ordre.
Après avoir couru plusieurs tours, les première année commencèrent à s'épuiser. Certains d'entre eux pâlissaient, d'autres étaient trempés de sueur, haletant pour respirer. Mais dès qu'Arthit leur lançait un regard dur, ils devaient cacher leur épuisement et se redresser. C'était ce qu'ils faisaient tous, à l'exception d'une fille au fond qui respirait toujours fort, la tête baissée, malgré son regard fixe.
… Mais attendez. Pourquoi son halètement semblait étrange. C'était trop rapide... ou...
Il ne trouva pas de réponse avant que la fille ne s'effondre sur le sol. Heureusement, Arthit avait les yeux sur elle et il se précipita pour la prendre dans ses bras à temps, empêchant sa tête de heurter le sol. Malheureusement, cet incident s'était produit de l'autre côté du terrain et l'unité paramédicale n'avait pas vu ce qui s'était passé. Il dût crier à travers le terrain pour obtenir de l'aide.
— Médecin ! Infirmière ! Où êtes-vous ? S'il vous plaît, venez aider cette fille !
Le cri d'Arthit attira l'attention de tous vers lui. Ils étaient choqués mais l'ordre des autres bizuteurs les arrêta dans leur élan.
— Ne regardez pas là-bas ! Qui vous a dit de regarder !? Tournez vos têtes par ici ! MAINTENANT !
L'ordre crispé était destiné à étouffer la panique des bizuts. Tous regardaient droit devant eux, même s'ils étaient désespérés de savoir ce qui se passait de l'autre côté.
Kongpob qui était au bout de la file, étant isolé à cause de son absence de badge, était témoin de tout. Une fois que les trois infirmières arrivèrent sur les lieux pour vérifier l'état de la jeune fille évanouie, elles en furent immédiatement informées.
— Elle fait de l'hyperventilation. Ne la faites pas s'allonger. Mettez un sac en plastique sur sa bouche et son nez. Si son état s'aggrave, on l'emmène à l'infirmerie.
Le diagnostic et les instructions étaient clairs comme de l'eau de roche et ne nécessitaient aucune explication supplémentaire pour gagner du temps afin de secourir la jeune fille. Kongpob vit comment les médecins hochèrent la tête en signe d'accord avant de transporter la jeune fille hors du champ, laissant le chef des bizuteurs derrière tandis que ses yeux les suivaient. Lorsqu'il se fut assuré que tout était en ordre, il fit demi-tour et retourna devant le rang avant de donner un autre ordre d'une voix sinistre.
— Je vous ai dit de vous retirer si vous saviez que vous ne pouviez pas continuer comme ça. Je ne peux pas être tenu responsable de votre vie ! Maintenant, s'il arrive encore quelque chose à quelqu'un au milieu du terrain, je laisserai les choses en l'état et le reste de vos amis seront punis en votre nom !
La menace de punir leurs camarades était la même que la première fois, mais cette fois, les étudiants de première année qui avaient couru pendant plus d'une heure savaient bien qu'ils ne pouvaient pas se surmener. Ainsi, malgré leur désir de rester, une vingtaine d'élèves de première année levèrent la main pour partir et sauver leur vie - la plupart d'entre eux étaient des femmes. Une fois que les bizuteurs leur eurent permis de partir, les autres recommencèrent à courir. Et lorsque le soleil fut couché, les étudiants de première année entendirent ce qu'ils attendaient.
— Très bien... c'est tout pour aujourd'hui. Je pense que vous savez tous comment être unis maintenant. N'oubliez pas la prochaine fois, car si vous l'oubliez, je recommencerai la leçon depuis le début ! Vous pouvez disposer !
— Merci, monsieur !
Le remerciement était également conforme à la norme.
Les élèves de première année traînaient les pieds en partant dans différentes directions, ressemblant à des robots à court de piles. Kongpob était le plus mal loti, car chaque punition avait été doublée pour lui, puisqu'il avait enfreint la règle. Il avait dû s'asseoir et se lever deux fois plus fort puis rejoindre la course pour rattraper ses amis. Il avait l'air d'un homme qui se serait noyé, il était trempé de sueur, son tee-shirt était collé à son dos. Son estomac grondait de faim après avoir passé tout son déjeuner à courir et il voulait désespérément prendre une douche et manger quelque chose le plus vite possible. Cependant, il n'eut pas l'occasion de quitter le terrain qu'il aperçut un ami boitant non loin de là. Il changea donc de direction et se dirigea vers l'autre homme, inquiet, et lui demanda.
— M, qu'est-ce qui ne va pas ? Tu as mal à la jambe ?
— Eh bien oui. Je pense que j'ai une entorse à la cheville.
Son ami du lycée répondit avec un regard maussade. Il avait dû se blesser gravement en recevant l'ordre de courir et de sauter accroupi. Un seul faux pas pouvait vous causer une telle entorse.
— Demande au médecin de t'examiner, peut-être ? Tu ne voudrais pas que ça s'aggrave.
Kongpob lui donna un conseil que l'autre homme approuva sans réserve d'un signe de tête. Il aida son ami à sortir du terrain, et en fait, ses jambes lui faisaient un peu mal. Peut-être qu'un peu de pommade des seniors aiderait.
La table près du terrain était occupée par les étudiants plus âgés des unités médicales et récréatives - principalement des étudiants de deuxième année, avec quelques troisième année qui agissaient comme chef de coordination pour les étudiants de première année. Les deux jeunes hommes se dirigèrent pour demander de l'aide à une jolie étudiante plus âgée, et c'est M qui prit la parole.
— P', ma jambe est blessée.
— Oh, ta jambe est blessée ? Assieds-toi, je vais y jeter un coup d'œil.
La fille qui avait le badge "P'Fang" autour du cou se précipita pour vérifier la jambe de M. Elle enleva sa basket, bougeant et serrant son pied pour jauger sa douleur avant de donner un diagnostic.
— Hmm. Ce n'est pas une entorse. Il suffit de mettre un peu de pommade pendant quelques jours et tout ira bien. Je n'ai pas le baume avec moi pour le moment mais mon compagnon est parti chercher d'autres médicaments. Vous pouvez attendre un peu ?
La réponse inattendue fit que M regarda son ami à côté de lui comme pour demander le consentement de Kongpob. Ils ne savaient pas combien de temps ils devaient attendre et ils étaient affamés. Ils n'avaient pas besoin de traîner en attendant une simple pommade puisque leur état n'était pas grave.
— C'est bon. J'en acheterai pour mon ami plus tard. Merci beaucoup.
Kongpob répondit pour eux deux mais l'autre réagit comme si elle venait de bien le regarder, s'exclamant.
— Woah, c'est toi, Kongpob ! Tu arrives au bon moment. Mon amie voulait te parler d'être un représentant de notre département. Peux-tu attendre de la voir ? As-tu un endroit où aller ?
Kongpob cligna des yeux, déconcerté. Comment se faisait-il que venir ici pour demander un soin s'était transformé en une discussion sur le fait d'être candidat au concours de l'Etoile et de la Lune de l'université. Il n'avait pas d'objection aux activités de la faculté. Mais ce qui le dérangeait, c'était son estomac qui grognait et qui l'obligeait à dire non.
— Eh bien... on va aller dîner.
— Oh, ne vous inquiétez pas pour ça. Vous pouvez manger avec nous. Attendez une seconde, je vais appeler mon ami.
Les mots de la jeune fille sortirent en un flot rapide en faisant un geste vers les repas dans des boîtes en polystyrène qui s'empilaient sur la table avant d'aller chercher son téléphone pour composer le numéro de son amie, laissant M et Kongpob perplexes. Quand elle eut fini de parler au téléphone, elle se retourna vers eux, voyant leur air stupéfait et fronça les sourcils.
— Qu'est-ce qui ne va pas ? Pourquoi n'avez-vous pas pris la nourriture ?
— Est-ce une bonne idée de nous avoir ici, à manger avec vous ?
Kongpob demanda, craignant de causer des problèmes. Il savait que ces repas étaient préparés pour les troisième année afin qu'ils puissent continuer à travailler la nuit. Même lorsqu'ils laissaient les élèves de première année rentrer chez eux, ils restaient pour nettoyer et préparer le lendemain. Pourtant, la fille qui leur avait donné la permission répondit d'une voix douce.
— Allez... c'est bon. On a commandé des tonnes de boîtes, il y en a aussi pour les bizuteurs. Ils en prennent toujours deux. Une seule n'est jamais suffisante pour eux.
L'explication qui accompagnait la mention des bizuteurs fit sursauter M, et il perdit d'un coup la moitié de son appétit pour cette seule raison.
— Si ces repas sont pour les bizuteurs, alors il est hors de question qu'on les prenne.
Le regard horrifié de M devait être si palpable que P'Fang en rit.
— Haha, pourquoi as-tu si peur ? Les bizuteurs ne sont pas si effrayants que ça. Ils font juste ce qu'ils sont censés faire. Quelle que soit la punition que tu subis, ils l'ont déjà subie aussi. C'est grâce à ça qu'ils ont gagné l'autorité de vous donner des ordres. Ils ne vous punissent pas juste pour le plaisir. Ils ont eu des mois d'entraînement avant de faire cela - maîtrise de soi et autres choses pour ne pas vous faire de mal et pouvoir gérer en cas d'urgence.
Kongpob écoutait les paroles qui racontaient des histoires dont il n'avait jamais entendu parler auparavant. Peut-être était-ce exactement comme elle l'avait dit.
Aujourd'hui, il avait vu P'Arthit donner une instruction rapide à l'unité médicale sans aucune hésitation. C'était une décision rapide, résolue et calme à laquelle il ne s'attendait pas de la part d'une personne ayant les caractéristiques d'Arthit. Chaque fois que le chef des bizuteurs leur parlait, tout ce qu'ils voyaient était la brutalité et la cruauté. Même s'ils faisaient quelque chose de bien, il trouvait le moyen de leur dire qu'ils avaient fait quelque chose de mal. Il leur infligeait une punition sans se soucier des sentiments de chacun. Pas étonnant que tous ses amis aient peur de ce type, qu'ils le méprisent et qu'ils disent toujours du mal de lui dans son dos.
Ce n'était pas nouveau. Les élèves plus âgés comprenaient qu'il devait susciter des réactions de la part des élèves de première année. Pourtant, Fang leur donna un petit conseil en tant que personne qui était déjà passée par là.
— En fait... j'aimerais que vous ne soyez pas rancuniers envers les bizuteurs. C'est juste un travail et il y a des protocoles qu'ils doivent suivre. Et surtout, vous réalisez qui se soucie le plus de vous ? Ce sont les bizuteurs.
Ces mots le prirent aux tripes, permettant à Kongpob d'y réfléchir avec une autre vision.
… Etait-il vrai que les bizuteurs étaient ceux qui se souciaient le plus de nous ? Le chef des bizuteurs, P'Arthit, semblait le détester plus que quiconque dans la classe après qu'il l'ait défié dès le premier jour.
Il admettait que c'était en partie sa faute. Il avait dit quelque chose qui avait déteint sur le bizuteur, l'insultant. Mais il n'avait voulu qu'aider son ami, alors il n'avait pas réfléchi aux choses - surtout aux conséquences. Il s'était avéré que... le chef bizuteur s’était encore plus mis en colère. Il avait été puni tellement de fois qu'il aurait juste voulu s'en aller. Pourtant, le chef bizuteur n'avait jamais eu pitié de lui.
… Comment pouvait-il croire que le bizuteur se souciait de lui ? Ce qu'il avait exprimé jusqu'à présent était plein de jugements irréfléchis, motivés par la satisfaction pure.
La confusion qui se formait lentement dans son esprit fut interrompue par la voix de Fang qui poussait les boîtes de repas vers eux.
— Prenez-les et allez manger là-bas. Il y a aussi des oranges. Je vais vous en donner. Nous en avons des kilos et nous ne pouvons pas toutes les finir.
Kongpob et M prirent les repas qu'on leur fourra dans les mains, suivis de deux oranges chacun. Comment auraient-ils pu dire non à ce stade ? Il aurait été inutile d'essayer, alors ils s'assirent et commencèrent à manger le simple riz au poulet krapao avec un œuf au plat. Une seule boîte ne pouvait pas rassasier leur faim mais cela les aida.
Alors qu'ils avaient fini de manger et qu'ils étaient sur le point d'éplucher l'orange pour la déguster, une voix venant de derrière prit la parole avant qu'ils ne puissent le faire.
— Fang, les garçons qui sont allés à l'infirmerie sont partis ? Je ne les ai pas vus là-bas. Une dernière chose, la pommade que tu m'as demandé... il y avait un modèle froid et un modèle chaud. Je ne savais pas lequel tu voulais, alors j'ai pris les deux.
La voix s'arrêta soudainement en réalisant que son amie n'était pas seule mais accompagnée de deux invités non désirés. Pire, l'un d'entre eux était celui qu'il avait le moins envie d'affronter.
— Qu'est-ce que vous faites ici ?!
La voix et la démarche d'Arthit baissèrent soudainement d'un cran alors qu'il se transformait en un brutal chef des bizuteurs - un opposé polaire de l'homme qu'il était l'instant d'avant. Les gars qui venaient de se faire crier dessus se levèrent d'un bond, mais Fang se précipitait déjà à leur rescousse.
— Eh bien... J'ai demandé à Kongpob de rester et d'attendre pour parler de sa participation pour le concours de la Lune de l'université. Nous pensons l'envoyer dans la compétition.
Malgré la raison, l'attitude d'Arthit ne s'est pas adoucie. Il jeta un regard dédaigneux au "représentant" qui allait concourir pour le titre de Lune de l'université et cracha une insulte.
— Pourquoi lui !? Notre faculté sera battue à coup sûr. Il est hideux et son comportement va nous embarrasser devant les autres facultés.
L'insulte flagrante rendit Kongpob hébété de honte. Pourtant, il ne pouvait pas ouvrir la bouche pour répliquer car l'autre homme était son senior et le chef du bizutage qui pouvait le punir quand il le voulait.
Cette soumission silencieuse dût plaire à Arthit, qui ignora les deux étudiants de première année qui restaient stupéfaits comme des choses indésirables. Il se tourna vers son amie et lui tendit un sac en plastique.
— Voilà tes médicaments.
— Merci. Ce gars l'attendait.
Fang prit le sac, en remerciant son ami. Mais la dernière phrase rendit Arthit abasourdi en voyant le sac de médicaments qu'il avait acheté passer au gars qu'il venait de mépriser, les yeux écarquillés par le choc.
— Tu en veux aussi, Kongpob ? Tu as dit que ta jambe te faisait mal.
— Oui, s'il te plaît. Merci.
Kongpob saisit la chance qui lui était offerte, jetant un coup d'œil au chef des bizuteurs et réprimant son rire en voyant l'air mal à l'aise sur le visage du gars. Le bizuteur devait avoir quelques insultes coincées dans sa gorge après avoir été malmené et comment son insulte s'était retournée contre lui. Le bizuteur n'eut pas l'occasion de répliquer qu'une voix douce et aiguë retentit.
— Où est-il, Fang !?? Notre représentant ! Laisse-moi voir à quoi il ressemble !
L'amie de Fang est entrée, appelant son amie et laissant tout le monde sans voix. Ils ne s'attendaient pas à ce que ce soit un type très grand, musclé, aux gestes très efféminés - plus féminins que les vraies femmes. "Elle" n'eut même pas besoin d'entendre qui était ce concurrent et se précipita vers Kongpob comme si elle était équipée d'un radar naturel pour détecter une prière, en couinant l'excitation qu'elle ne pouvait contenir.
— Oh mon dieu !! Comment ça se fait que tu ne m'aies jamais dit que tu avais gardé une arme secrète comme celle-ci ! Où étais-tu pendant tout ce temps, chéri !? Tu n'as pas besoin de concourir avec les autres départements. Sois juste le concurrent de la faculté d'ingénierie. On va tout déchirer, Beeotch !
Kongpob fit un léger sourire, laissant l'autre homme le faire tourner de gauche à droite pour une meilleure inspection de chaque centimètre de son corps. Alors qu'il était retourné, il aperçut l'expression de ras-le-bol d'Arthit, alors que le chef bizuteur prenait une boîte de nourriture et partait manger dans un coin, ne voulant pas entendre les louanges qui l'agaçaient, et laissant seuls les gens qui appréciaient la conversation.
Il n'y avait pas beaucoup de détails sur le concours de la Lune et de l'Etoile, mais P' Minnie aimait parler et elle n'arrêtait pas de lancer de nouveaux sujets au point que la conversation s'éternisait. Remarquant combien le temps avait passé puisque la lumière avait été allumée pour éclairer la table, il était temps d'arrêter la longue conversation pour que les étudiants de première année puissent se reposer.
— Ok, je t'appellerai pour le jour de la séance photo, cher Kongpob. Réponds à mon appel, d'accord ?
— S'il te plaît, fais en sorte que ce soit pour les affaires et rien d'autre, mon amie.
P'Fang ne put s'empêcher de lancer une taquinerie à son amie et reçut un regard moqueur.
— Allez, tu n'as pas besoin de gâcher la fête. Je ne parlerai que d'affaires, d'accord ? Une personne importante comme moi a besoin d'une conversation en tête à tête, car les voix ne suffisent pas.
Le sous-entendu fit éclater de rire tout le monde avant qu'ils ne se taisent quand une voix sévère prit la parole.
— Qu'est-ce qui vous fait rire si fort ? S'il vous plaît, soyez attentifs aux personnes qui travaillent pour de vrai ici !
La voix autoritaire n'appartenait à personne d'autre qu'au chef bizuteur qui avait disparu de la discussion pendant un bon moment et qui revenait avec une mine renfrognée comme s'il avait avalé quelque chose d'amer.
— Fang, Knot m'a dit de te demander d'aller le voir. Et les nouveaux, retournez à votre dortoir si vos affaires sont terminées ici.
Ce cri dédaigneux fit éclater le groupe bavard. Kongpob et son ami se levèrent, se préparant à battre en retraite avant de recevoir une autre punition. Mais ce n'était pas assez rapide.
— Hé, attendez !
Le cri venant de derrière les arrêta sur leur lancée. Ils se retournèrent pour regarder l'homme qui se dirigeait à grands pas vers eux et s'arrêta juste sous leurs yeux.
— Montre-moi tes mains !
L'ordre était dirigé vers Kongpob. Bien qu'il ne comprenne pas pourquoi, il savait que cela devait être une autre punition. Le chef bizuteur avait peut-être envie de jouer le rôle d'un professeur et cherchait une occasion de lui frapper la main avec un bâton ou autre.
Kongpob n'eut d'autre choix que de tendre les deux mains vers l'avant et retint son souffle en prévision d'une punition inévitable. Mais le temps passant, aucune douleur ne lui avait été infligée. Les seules choses que ses mains touchaient maintenant étaient…
Quatre oranges.
— Prenez-les ! Mes amis ont pris la peine d'apporter ces oranges, alors acceptez-les et ne les laissez pas ici !
Après avoir terminé son ordre, le bizuteur se retourna et prit une autre boîte de repas avec lui avant de se volatiliser, laissant Kongpob et son ami stupéfait, avec un regard perplexe sur leurs visages alors qu'ils essayaient de se rejouer l'événement. Puis, ils laissèrent échapper un soupir de soulagement comme rien de grave n'était arrivé.
— Ouf... ça m'a foutu la trouille. Je pensais qu'il allait nous donner une punition.
— Hmm.
C'est ainsi que Kongpob répondit à M en regardant dans ses mains les quatre oranges que quelqu'un venait de lui donner. Les oranges... qu'ils avaient oubliées de prendre. L'homme n'avait pas à s'en soucier mais il avait quand même porté les fruits aux élèves de première année.
Tout à coup, les mots résonnèrent à nouveau dans son esprit.
— Vous savez qui se soucient le plus de vous ? Les bizuteurs.
… Celui qui se souciait... ?
Rien qu'en y pensant, le visage bien défini, les yeux féroces et la bouche impitoyable du chef bizuteur se matérialisèrent devant ses yeux. Faisant correspondre les mots au visage, il ne pouvait s'empêcher de ricaner à la façon dont l'homme avait agi en donnant les oranges à Kongpob. C'était surréaliste, à la limite du comique.
Mais même ainsi, son cœur était inondé d'une chaleur étrange et il ne pouvait pas supprimer son sourire.
Ça pourrait être vrai... ces mots. La personne qui se souciait le plus de lui était celle qui était la plus méchante avec lui.
Si c'était le cas, ses chances de gagner pourraient aussi bien être nulles. Comment pouvait-il détester l'autre homme alors qu'il se demandait toujours comment un type aussi méchant pouvait être aussi "gentil" en même temps ? | | Messages : 553
Date d'inscription : 13/07/2024
| Johanne Sam 7 Sep 2024 - 17:42 Règle n°6 Toujours Ecouter les Explications du Bizuteur L'équipe récréative était une oasis pour les étudiants de première année. Le travail de celle-ci était d'apprendre aux jeunes à chanter, à jouer à des jeux amusants et à prendre soin d'eux. Ils donnaient de la nourriture aux jeunes s'ils le pouvaient. Le personnel de l'équipe était de bonne humeur et souriait 24 heures sur 24. Quel que soit le problème des nouveaux, ils pouvaient toujours aller parler à l'équipe. Les élèves de première année, par conséquent, se sentaient proches de ces aînés et les respectaient comme s'ils étaient des saints, à l'opposé de l'autre groupe d'élèves plus âgés.
Si l'équipe récréative était les Archanges, alors les bizuteurs devaient être comme des démons élevés au plus profond de l'enfer. En particulier, lorsque les bizuteurs firent irruption pendant une activité récréative, sans y être invités, ils eurent l'impression d'assister à la façon dont les anges étaient bannis par les démons. Puis, les démons commencèrent à maltraiter les étudiants de première année qui répétaient une chanson en leur criant dessus.
— ÇA SUFFIT ! Ça suffit ! J'en ai entendu plus qu'assez, je ne peux plus le supporter !
Le chef bizuteur Arthit s'avança en aboyant bruyamment, arrêtant net les étudiants de première année qui se tenaient, les bras autour du cou les uns des autres, en criant le 'chant de victoire'. Ils se redressèrent tous comme de nouvelles recrues en formation, bien qu'ils baissèrent les yeux pour éviter le regard féroce du bizuteur qui essayait de leur trouver des défauts.
— C'est le meilleur chant de victoire que vous puissiez produire ? Je n'entends presque rien ! Vous ne chantez pas à l'unisson ! Qui vous a appris comment faire ça ?
— C'est nous, monsieur !
L'étudiant de deuxième année aux traits chinois qui était à la tête de l'équipe récréative répondit immédiatement en levant la main. Leur travail consistait à enseigner aux étudiants de première année l'hymne de la faculté et le chant de victoire. Si les étudiants de première année faisaient un mauvais travail, c’était eux qui en prenaient la responsabilité. Cette fois, la cible de la réprimande était l'équipe récréative à qui l'on posa une question sur un ton sévère.
— Pouvez-vous me montrer comment vous avez appris à chanter à ces élèves de première année ?
Même s'ils étaient dans une unité différente, avec le statut hiérarchique, les étudiants de l'équipe récréative étaient considérés comme des juniors par rapport aux bizuteurs. Eux aussi devaient obéir aux ordres.
Les étudiants de première année se séparèrent, laissant un peu d'espace pour que les étudiants de deuxième année prennent place au milieu, entourés par les première année qui étaient assis en périphérie. Les deuxième année se prirent par le cou et commencèrent à crier le chant. Même s'ils n'étaient que dix, leur puissant cri résonnait bien plus fort que celui des étudiants de première année, laissant les nouveaux venus en admiration devant leur énergie.
… Mais pour le chef bizuteur qui avait les bras croisés sur sa poitrine, il voyait quelque chose de différent.
— C'est tout ce que vous pouvez faire ? Pas étonnant que les nouveaux n'aient pas réussi à chanter correctement si les profs sont nuls !
Quelle déclaration qui contrastait avec la réalité !
Même un aveugle pourrait voir à quel point le chant de l'équipe était supérieur à celui des premières années. Pourtant, personne n'osa se dresser contre le juge, se rappelant bien de la première règle disant que les bizuteurs avaient toujours raison, et la deuxième règle était : si vous n'aimez pas la deuxième règle, revenez à la première règle. Ils devaient faire avec, quand il s'agissait de la prochaine punition.
— Vous allez faire durer le chant jusqu'à ce que les premières années comprennent vraiment ce qu'est le vrai chant de la victoire ! Faites-le MAINTENANT !
Quel ordre ambigu, et pas de durée précise pour la fin. C'était comme ordonner à quelqu'un de crier jusqu'à ce qu'il se casse les cordes vocales.
Pourtant, aucun mot de protestation ne vint de l'équipe récréative. Ils s'agrippèrent au cou de leurs camarades et commencèrent à crier plus fort, tandis que les étudiants de première année les regardaient avec sympathie. Même si la chanson retentissante était courte, elle mettait à mal l'énergie et la gorge de quelqu'un si on la chantait en boucle. Pire encore, les étudiants de première année avaient dû taper du pied, regarder de haut en bas, et ils avaient encore de légers vertiges après quelques répétitions. Les membres de l'équipe récréative durent endurer cela encore et encore, et ils devaient être beaucoup plus épuisés. Ils n'avaient pas à subir cette punition pour le bien des élèves de première année. Pourtant, ils l'avaient fait.
La culpabilité les rongeait de l'intérieur alors que le chant continuait. Certains élèves de première année commencèrent à pleurer, à se sentir désolés pour les élèves de deuxième année, et à lancer des regards suppliants vers le chef des bizuteurs.
Malheureusement, Arthit était fait d'acier et ne bougeait pas. Ce qu'il faisait n'était pas de punir l'équipe récréative, les étudiants de première année étaient la vraie cible. L'équipe était un appât parce qu'ils étaient les plus proches du cœur des étudiants de première année. Cela visait à créer une pression mentale et servait de sanction indirecte et non violente. L'effet, cependant, fut monumental.
Arthit dut garder un visage impassible en écoutant le chant de l'équipe récréative comme s'il s'agissait de quelques notes indistinctes. Il semblait pouvoir attendre éternellement, tandis que pour les nouveaux, chaque son émis par l'équipe les faisait se sentir encore plus coupables.
… Comment pouvaient-ils supporter une telle douleur ?
— Puis-je dire quelque chose, monsieur !?
Un son provenant d'une rangée attira l'attention de tous, y compris celle d'Arthit. Ils regardèrent vers l'homme et ce ne fut pas une surprise. C'était 0062. Encore ce maudit Kongpob.
— Vous pouvez. Maintenant, parlez ! dit dédaigneusement Arthit et il jeta un regard vers l'homme qui s'était levé et parlait malgré les cris de l'équipe récréative.
— Je vais chanter moi-même, monsieur !
Toujours pas de surprise. Parfois, Arthit se demandait si ce voyou n'avait pas vu trop de films et s'il n'avait pas en fait un complexe du héros. Mais... s'il y avait un héros, il devait y avoir un méchant. Donc, c'était au tour du méchant de donner la réplique.
— Tu ne le feras pas ! Cet endroit n'a pas besoin d'un héros. Assieds-toi !
Arthit cria l'objection qui humilia l'autre homme. Pourtant, Kongpob continua à protester, n'abandonnant pas facilement.
— Mais je…
— Si tu ne t'assieds pas, alors sors d'ici ! A toi de choisir !
Il ne voulait aucune des deux options. Son statut était déjà mauvais, avoir reçu un avertissement et être isolé du reste de ses amis. S'il était expulsé du terrain cette fois-ci, il ne pourrait pas les rejoindre puisque c'était un rejet total : être rejeté du reste de la classe.
Finalement, Kongpob n'eut d'autre choix que de se taire et de s'asseoir alors qu'Arthit lui lançait un regard triomphant.
Vous voyez ? Il ne voulait pas prendre autant de risques. C'est comme ça qu'un gars avec un complexe du héros finit toujours.
Arthit tourna son attention vers l'équipe récréative dont la voix commençait à faiblir et à se briser, espérant que personne n'oserait interrompre sa punition à nouveau. Mais il profita de ce moment pendant moins d'une minute avant qu'une voix ne prenne la parole.
— Puis-je parler, monsieur !?
Arthit se retourna, les yeux écarquillés d'incrédulité en voyant que c'était le même homme qui avait levé la main pour parler à nouveau.
N'as-tu pas appris ta leçon ?
— Tu ne peux pas !
Le chef bizuteur asséna son refus sur-le-champ sans attendre la moindre précision de la part de l'autre homme. Il pensait que cette fois-ci, l'homme allait enfin comprendre, mais il se trompait puisque l'autre gars lança instantanément la phrase suivante.
— Puis-je parler, monsieur !?
Putain ! Il ne comprend pas le langage humain ?
— Tu ne peux pas !
— Puis-je parler, monsieur ?
— Tu ne peux pas !
— Puis-je parler, monsieur ?
— Kongpob !
Arthit aboya le nom, perdant finalement le dernier fil de sa patience. Les yeux écarquillés de fureur, il lança un regard noir à l'autre homme qui répétait sans cesse la même question comme pour l'énerver. Le jeune homme, lui, ne se laissa pas démonter, maintenant sa demande.
L'air devint lourd de tension. Même les membres de l'équipe récréative avaient arrêté leurs cris et regardaient les deux gars qui s'affrontaient. Finalement, le chef des bizuteurs lança son ultimatum.
— Quitte cette pièce et ne reviens plus jamais à la réunion !
La punition fit que tout le monde arrêta de respirer. C'était la punition la plus sévère qu'ils aient entendue. Même si Kongpob s'était préparé à une autre punition, son corps s'engourdit en entendant les mots à haute voix. Pourtant, il ne regrettait pas sa décision car c'était le choix né de sa propre conviction.
L'homme condamné quitta la rangée d'étudiants et se dirigea vers la porte, les pieds lourds comme du plomb. S'il partait maintenant, cela signifiait qu'il perdait le droit de gagner sa place dans cette classe. Avant qu'il n'atteigne la porte, une autre voix brisa le silence.
— Puis-je parler, monsieur ?
La voix arrêta Kongpob dans sa marche et attira également l'attention d'Arthit vers l'homme qui avait levé la main depuis l'une des rangées.
— Quoi ?!
M, le meilleur ami de Kongpob, se leva. Il avait l'air réticent, peu sûr de lui, mais les mots étaient poignants.
— Je demande l'autorisation pour que mon ami reste et nous chanterons à la place de l'équipe récréative, monsieur.
Les mots étaient empreints d'un grand esprit mais cela ne désamorça pas la frustration d'Arthit. D'un autre côté, ça l'empira même.
Comment pouvait-il oublier que quand il y avait un héros, il y avait aussi les copains du héros ? Mais désolé, sa décision restait inchangée.
— Non, tu ne le feras pas !
Il prononça les mots qu'il ne savait pas combien d'autres fois il devrait prononcer aujourd'hui. Il voulait punir l'homme qui avait osé le demander en premier lieu. Mais avant qu'il ne puisse ouvrir la bouche pour parler, d'autres étudiants de première année commencèrent à parler. Ce n'était pas seulement un étudiant de première année, mais des dizaines d'entre eux venant de toutes les directions.
— Puis-je parler, monsieur !?
— Puis-je parler, monsieur !?
— Puis-je parler, monsieur !?
— Puis-je parler, monsieur !?
La salle était remplie de demandes avec des mains levées de la part des étudiants de première année. Arthit finit par crier.
— SILENCE !!
Même si le bruit cessa soudainement pour que les choses reviennent à la normale, les émotions dans la salle avaient été chamboulées depuis le début. Alors qu'Arthit balayait du regard les élèves de première année dont les yeux avaient débordé de larmes, il ne voyait plus que des yeux brillants de détermination. Finalement, il fut obligé de faire marche arrière.
— D'accord, je vous donne la permission de chanter pour vos seniors. Mais votre ami ne peut pas rester !
Bon, il les laissait gagner cette fois-ci mais ne pensait pas que c'était une défaite. Il ne laisserait pas ce gamin provocateur qui défiait son autorité partir facilement juste parce que ses amis l'avaient supplié.
Il semblait que de nombreux élèves de première année essayaient de s'opposer à sa décision mais il fit semblant de ne pas les voir. Il se tourna vers l'homme qui se tenait immobile pour le presser.
— Pourquoi tu es encore là ? VA-T’EN !
Kongpob leva les yeux vers lui, voyant la frustration dans les yeux de l'homme plus âgé.
… Il était inutile de demander de la sympathie quand l'autre homme l'avait pris pour cible comme un faucon. Cette fois-ci, le bizuteur avait le bon timing et la bonne raison pour infliger une punition et chasser un garçon rebelle comme Kongpob.
— Oui, monsieur.
Kongpob répondit en se dirigeant vers la porte qui menait à la salle de réunion, sans aucune objection.
Pourtant, il ne partit pas. Il resta à côté de la salle, les oreilles attentives au moindre son qui en sortait. Il n'eut pas à attendre trop longtemps avant que les acclamations de ses amis ne reprennent, suivies des cris des bizuteurs, et qu'un chant plus fort n'éclate. La boucle se poursuivit pendant environ dix minutes.
Finalement, tout redevint calme. Il se rapprocha de la porte pour mieux entendre, mais celle-ci s'ouvrit soudainement, suivie par les bizuteurs qui partaient en groupe, avec le chef bizuteur en dernier.
Voyant qu'il était toujours là, un aboiement puissant retentit.
— Mais qu'est-ce que tu fais ici ?
— J'attends mes amis, monsieur.
Kongpob donna une réponse honnête. Même s'il était déjà exclu, les autres étudiants de première année étaient toujours ses amis et rien n'aurait pu changer cela.
Les bizuteurs échangèrent des regards comme pour se demander ce qu'ils devaient faire ou dire. Une fois qu'Arthit eut hoché la tête, tout le monde fit un pas en avant et encercla le jeune homme solitaire, bloquant sa fuite. On aurait dit qu'ils étaient prêts à tabasser le garçon pour avoir été si rebelle. Le chef bizuteur lui demanda alors d'une voix sinistre.
— Tu as compris pourquoi je t'ai viré de la salle ?
Même s'il était encerclé et qu'il risquait d'être blessé, Kongpob répondit d'une voix ferme car il connaissait déjà la réponse.
— Parce que j'ai contrarié les bizuteurs.
— Et pourquoi on était contrariés d'après toi ?
— Parce que je me suis porté volontaire pour aider l'équipe récréative.
— Non ! La raison pour laquelle je t'ai viré est celle que je t'ai déjà dite. Nous n'avons pas besoin d'un héros ici.
… Nous n'avons pas besoin d'un héros ici ?
… C'était une réponse inattendue, qui fit froncer les sourcils de Kongpob alors que la confusion le frappait.
— Qu'est-ce que tu veux dire ? Tu es fâché que je me dévoue toujours pour aider ? Je ne veux pas être sous les projecteurs ! Je voulais juste aider mes amis !
— Et tes amis ont besoin de ton aide ?!
Kongpob fut pris de court par la question. Il commença à comprendre quelque chose... quelque chose que le chef bizuteur avait essayé d'expliquer pendant tout ce temps.
— Si tes amis doivent attendre le sauvetage d'un chef quand ils ont de vrais problèmes, comment peuvent-ils prendre leur propre décision et résoudre les problèmes ? Si tout ce qu'ils veulent être, ce sont des suiveurs, n'ayant pas assez de courage pour se défendre et prendre leur destin en main, alors ils ne méritent pas d'être mes juniors !
… C'était la première fois que le chef bizuteur lui donnait réellement une explication légitime au lieu d'un ordre ou d'une punition.
Kongpob réalisa alors qu'il y avait des raisons derrière toutes les actions des bizuteurs. Ils ne vous donnaient pas une explication verbale mais plutôt une démonstration par des actions brutales. Pourtant, tout ce qu'ils voulaient faire était d'enseigner aux juniors quelques leçons de vie, et cela incluait Kongpob en tant que junior.
— Aujourd'hui, tes amis t'ont sauvé. Tu seras autorisé à rejoindre la prochaine réunion mais écoute mon dernier avertissement. Ne sois plus jamais un héros, compris ?
— Oui, monsieur.
Une fois qu'ils eurent constaté que le jeune homme avait enfin compris, les autres bizuteurs reculèrent d'un pas, laissant Arthit derrière eux. Il était sur le point de se retourner et de partir quand l'étudiant de première année l'arrêta.
— Attends ! J'ai une autre question.
— Quoi encore ?
Arthit râla, agacé. Il avait même donné une explication au garçon, et pourtant, Kongpob avait une autre question.
— Quand j'ai demandé ta signature, je n'essayais pas d'être un héros, alors pourquoi tu m'as puni ?
Eh bien. C'était quand il lui avait ordonné de demander de l'action pour ses fesses. C'était drôle. Certaines punitions avaient des raisons valables et des leçons derrière elles ; d'autres... étaient juste parce qu'il avait envie d'embêter l'autre homme.
— Tu en penses quoi ?
Arthit répliqua par cette question. Il savait que le garçon devait avoir une dent contre lui. C'est pourquoi il avait choisi ce moment pour clarifier les choses. Kongpob devait penser que la raison était la gratification. Mais la réponse qui sortit de la bouche de l'étudiant de première année fut surprenante.
— Eh bien... je pense que c'est parce que tu craques pour moi.
— Qu'est-ce que tu as dit ?!
Arthit cria, fixant Kongpob qui portait un léger sourire sur ses lèvres comme si les mots étaient totalement normaux.
— Eh bien, tu connais le dicton. Si on aime quelqu'un, on essaie toujours de lui taper sur les nerfs pour attirer son attention. Toi, monsieur, tu essayes toujours de t’en prendre à moi. Cela confirme que tu craques pour moi.
Quel... fils de pute ! C'est quoi cette logique ?! Il devait être mentalement malade pour penser qu'Arthit le punissait parce qu'il l'aimait bien !!!
— NON, JE NE CRAQUE PAS POUR TOI !
Le cri arriva au moment même où la porte de la salle s'ouvrit en pivotant, et tous les regards furent attirés vers eux. En voyant comment tous les étudiants de première année les fixaient, Arthit éleva la voix.
— Qu'est-ce que vous regardez !? Qui a dit que vous pouviez regarder ?! La réunion d'aujourd'hui est terminée alors retournez dans vos chambres ! Toi aussi, va-t'en !
Les derniers mots étaient adressés au jeune homme qui était toujours là, et Kongpob répondit docilement.
— Oui, monsieur.
Sur ces mots, Arthit pivota sur lui-même avec un air aigri et partit, furieux, tandis que Kongpob le suivait des yeux. La voix de M s'éleva, curieuse.
— De quoi avez-vous parlé les gars ? J'ai entendu un grand cri. Ça m'a fait peur, mec.
Même si les yeux de son ami étaient remplis d'effroi à l'égard du chef bizuteur, Kongpob pensait toujours aux actions de l'homme avec un sourire sur le visage. La raison derrière ses actions était les choses qu'il venait de dire à l'homme plus âgé.
Et cette raison était...
— Rien. Je voulais juste l'embêter. | | Messages : 942
Date d'inscription : 19/06/2024
| Néphély Sam 7 Sep 2024 - 17:42 Règle n°7 Bizuteur un Jour, Bizuteur Toujours. — Ma tante, du riz avec du poulet krapao et un œuf au plat. S'il vous plaît.
Le menu rapide et sans réflexion (1) était sorti du cerveau d'Arthit qui ne voulait pas travailler en ce moment. Il ne voulait pas dépenser un gramme de plus de son énergie après les activités de bizutage. C'était aussi une journée de travail. Il était épuisé d'avoir crié sur les étudiants de première année et d'avoir supervisé leur jogging autour du terrain. Mais il ne pouvait blâmer personne d'autre puisque c'était son idée à lui.
...Être un bizuteur n'était pas amusant. Ils devaient crier, ce qui leur faisait mal à la gorge, et portaient toujours une mine renfrognée pour avoir l'air hargneux au point de paralyser leur visage.
Ils ne faisaient que jouer le rôle qu'ils avaient à jouer. Parfois, cela pouvait sembler excessif, la façon dont ils exerçaient leur autorité, mais au final, les bizuteurs étaient ceux qui portaient ce poids sur leurs épaules. Ils suivaient la devise : "si les jeunes sont tendus, les bizuteurs doivent l'être encore plus". C'était là le code de conduite et la réalité qu'ils devaient accepter.
En conséquence, chaque jour, une fois le bizutage terminé, Arthit, le chef des bizuteurs, devait se précipiter à la cantine pour se remplir l'estomac de nourriture. Il se dépêchait de retourner dans son dortoir pour se changer et mettre un simple t-shirt et un pantalon court, puis descendait pour trouver quelque chose à manger à proximité. Il était presque dix-neuf heures, l'heure de pointe pour les étudiants qui se pressaient sur les lieux, au point que même le magasin de boissons avait une longue file d'attente. Il demandait toujours au marchand de lui apporter sa boisson au plus tôt et se dirigeait ensuite vers le stand de nourriture situé à côté. Heureusement, il y avait une table vide, la dernière. Il y avait un journal dessus pour tuer le temps.
Quel jackpot ! Il en profita pour s'asseoir et lire le journal, voulant rattraper les nouvelles reste du monde. Sa journée commençait par un lever matinal pour rejoindre les cours. Le soir, il s'occupait du bizutage. La nuit, il planifiait les activités du lendemain. C'est ainsi qu'il passait ses journées et ses nuits en ce moment. Si un météore avait frappé quelque part aux États-Unis... il n'en saurait rien.
Arthit tenait le journal et lisait les pages pour mettre à jour sa base de données, ignorant totalement le reste. Puis, ses oreilles captèrent une question.
— Je peux m'asseoir avec vous ?
— Bien sûr, asseyez-vous.
Il répondit sans lever les yeux, son attention était retenue par les nouvelles sur deux acteurs qui avaient rompu. Il savait que l'endroit était bondé, alors pas de problème pour partager la table. Il était là tout seul de toute façon. L'autre homme fit ce qui lui était permis, s'asseyant à l'opposé en le remerciant.
— Merci, P’Arthit.
— Hmm. C'est bon.
Arthit répondit gentiment. Étant un Phi, il devait de toute façon partager avec ses Nong. Mais attendez. Comment se faisait-il que ce type connaissait son nom ?
La curiosité lui fit lever les yeux de son journal. Ses yeux s'écarquillèrent soudainement en voyant l'homme qui était assis en face de lui.
L'autre homme ne portait pas d'uniforme d'étudiant ou de T-shirt de la faculté avec un bas de survêtement, mais était en t-shirt et en short comme lui. Cependant, leur statut ne changeait pas en fonction de leurs vêtements. Il était un bizuteur et l'autre homme était toujours un étudiant de première année. Pas seulement un étudiant de première année typique, mais un étudiant provocateur qui défiait toujours son autorité.
...0062, Kongpob
— Bordel, qu'est-ce que tu fais ici ?
Arthit sauta sur ses pieds, criant et enfilant son masque démoniaque alors qu'il reprenait son rôle de chef bizuteur. Il s'en voulait mentalement d'avoir baissé sa garde et laissé l'autre homme voir son côté plus doux. Pourtant, le jeune homme le regardait d'un air perplexe.
— Eh bien, tu viens de me dire que je pouvais m'asseoir ici. Le magasin est plein à craquer en ce moment.
Les mots du garçon le poussèrent à regarder autour de lui, voyant que toutes les tables étaient occupées. Pourtant, c'était une chose déshonorante que de permettre à un étudiant de première année de partager sa table, celle du chef des bizuteurs.
Il était sur le point de crier et de gronder le garçon, mais la voix de la tante du magasin de nourriture le stoppa.
— Je suis désolé, mon cher. Aujourd'hui, nous avons beaucoup de monde. Tu peux partager la table avec lui ?"
La tante avait dû entendre sa question, ou voir son air contrarié, et elle avait sauté sur l'occasion pour arbitrer la situation. Elle avait l'air si calme, ne voulant pas le contrarier, et ça lui a fait fermer sa gueule.
Il était un habitué des lieux et la tante était toujours si gentille en lui donnant du riz supplémentaire. Ce serait donner une mauvaise image de lui que de jouer maintenant les mauvais garçons.
À contrecœur, Arthit se laissa tomber sur le siège, la mine renfrognée, la bouche serrée, tandis que la tante se retournait pour demander à l'homme en face de lui.
— Tu as commandé un plat, mon grand ?
— Pas encore, ma tante. Je voudrais une assiette d'omelette avec du porc haché sur du riz.
— Compris. Attendez un moment et je vous l'apporte.
La propriétaire de la boutique se retourna et commença à cuisiner le plat. Après qu'elle soit partie, l'homme qui avait gardé le silence ne put s'empêcher de laisser échapper son dédain.
— Alors là, du riz avec une omelette. Tu te crois au jardin d'enfants ?
Les mots sonnaient comme un cri de guerre, laissant Kongpob savoir que l'autre homme avait refoulé ses émotions et qu'il les laissait maintenant sortir. En tant que première année, il ne pouvait pas répliquer. Si un bizuteur lui demandait quelque chose, c'était son devoir de répondre en conséquence.
— Le fait est que... je n'aime pas les plats épicés.
— Quoi ? Tu es un homme adulte et tu ne peux pas manger de plats épicés ? Quelle tapette !
L'insulte lancée avec des yeux ouvertement méprisants le fit presque trembler.
Désolé de ne pas être désolé, mais si le type voulait partager sa table, alors le prix à payer était cette guerre psychologique. Voyons voir s'il pouvait encore apprécier son repas en se faisant taquiner tout au long du repas. N'oublie jamais qui a le contrôle ici à cette table. Au vu de la nourriture, vous savez qui est l'homme.
C'était ça, c'était comme ça qu'il gagnait la guerre. Un garçon boiteux et mou comme lui n'aurait pas été capable de l'affronter. Il avait surestimé Kongpob depuis le début, mais le gars n'était qu'un blanc-bec. Il l’avait bien mérité, ce con ! Mort de rire !
— Nong, voici ton pink milk."
Putain. Je l'avais complètement oublié.
L'appel de la vendeuse de boissons qui tenait un gobelet de pink milk et le tendait vers lui un type aux yeux vifs dont le visage se mit à pâlir en refusant la boisson.
— Woah ! Mauvaise table, Phi ! Je n'ai pas commandé ça !
— Ne me fais pas chier. C'est ta boisson. Tu la commandes tous les jours, comment je pourrais me tromper ?"
...Clair comme le jour. La réponse était indiscutable et ne nécessitait aucune autre excuse. Tout ce qu'Arthit put faire fut de rester abasourdi, regardant la façon dont le nouveau venu prenait son gobelet des mains de la vendeuse de boissons.
— Et le café glacé est pour vous ?
— Oui, merci.
Kongpob posa le gobelet de café glacé sur la table, juste à côté du pink milk doux et sucré. Arthit repéra une étincelle d'humour dans les yeux du plus jeune homme avant qu'il ne pose une question simple mais tranchante.
— Je viens de m'apercevoir qu'un chef bizuteur comme toi aime le pink milk.
— Fils de... !!!
C'est tout ce qu'Arthit put marmonner, perdant tout son esprit pour trouver la bonne réplique, sentant sa fierté s'effondrer devant l'autre.
...C'était fini, son image était détruite. Il jouait les durs, l'homme le plus viril de tous, et avec cette petite erreur, tout s'écroulait. Quel était le problème, cependant ? Il n'y avait aucune règle disant qu'un bizuteur ne pouvait pas boire de pink milk. Le pink milk était délicieux. Il était froid, sucré et rafraîchissant. C'était donc son menu préféré quand il était épuisé. C'est tout. Il avait même un magasin préféré à la cantine de l'université. Mais pour garder sa personnalité de bizuteur coriace, il devait se retenir d'en commander, de peur que les étudiants de première année ne le voient et ne le considèrent moins comme un bizuteur sans pitié.
Mais aujourd'hui devait être un mauvais jour pour lui. Ce qu'il avait craint s'était réalisé... et pire, celui qui l'avait attrapé était ce gamin. C'était celui par lequel il voulait le moins être découvert.
Quelle épine dans son pied !
La vengeance brûlait en lui, un homme nommé Arthit, qui voulait jeter son pink milk au visage de l'homme qui le narguait. Mais avant qu'il ne puisse le faire, une voix interrompit sa pensée.
— L'omelette au riz et le poulet au krapao sont prêts !
La tante tendait vers eux les assiettes fraîchement cuites. Il tendit la main pour la lui prendre - le krapao avec un œuf au plat, mais une idée lui traversa l'esprit. C'était une idée qui poussa Arthit à aboyer un ordre à l'homme en face de lui.
— Attends ! Ne mange pas ça.
Kongpob arrêta sa main qui s'apprêtait à prendre la cuillère, regardant l'autre homme qui se raclait la gorge et remettait son masque de bizuteur avant de prendre la parole d'une voix sévère.
— En tant qu'aîné, je vais t'apprendre quelque chose. Tu te rends compte de la difficulté pour les paysans de mettre le riz dans nos assiettes ?
— Oui, je le sais.
Kongpob hocha la tête en signe d'affirmation sans savoir ce que l'autre homme voulait dire. Mais son intuition lui hurlait qu'un plan était en train d'être préparé. Et elle se révéla exacte quand Arthit commença à dire la phrase suivante.
— Je veux que tu montres ta gratitude envers le riz. Peux-tu réciter une bénédiction avant un repas ?
— Oui, je peux.
— Alors dis-le à voix haute ici. Laisse-moi entendre ta gratitude envers chaque grain de riz.
Kongpob était stupéfait, entendant l'ordre qui n'était rien d'autre qu'une autre punition. Il se trouvait dans un magasin de restauration bondé et si quelqu'un se mettait à réciter une prière, cette personne deviendrait certainement le centre de l'attention, ou même du ridicule. Pire encore, il devait le dire à haute voix.
Pourtant, l'homme qui avait donné l'ordre n'avait pas l'air perturbé. Il poussa même le jeune homme à suivre son ordre.
— Qu'est-ce que tu attends ? Fais-le maintenant ! Ou tu n'as en fait aucune gratitude du tout pour le riz ?!
Les mots associés à des yeux provocateurs évaluaient sa conviction. Kongpob mit une seconde à se décider. Prenant une profonde inspiration, il commença à dire la prière à haute voix.
— Chaque assiette de riz, chaque assiette de nourriture, ne les gaspillez pas car ils sont précieux ! Des millions de personnes souffrent de la famine, surtout les jeunes enfants innocents !
Toutes les personnes présentes dans le restaurant se retournèrent pour le regarder, interloquées. Certains semblaient perplexes quant à la raison pour laquelle quelqu'un criait sur des enfants innocents en ce moment. Certains se sentaient offensés par un tel prêche au milieu de leurs repas, alors ils commencèrent à chuchoter, regardant Kongpob avec mépris. Ce qu'ils ne savaient pas, c'est qu'il faisait cela pour montrer sa reconnaissance envers le riz.
Arthit, de son côté, ricanait, satisfait du visage de l'autre alors que son plan fonctionnait si bien. Mais ce n'était pas tout. Il écarta l'assiette du garçon alors que Kongpob était sur le point de manger.
— Non, attends. Ne mange pas celui-là. Celui-ci, plutôt.
Le riz au poulet krapao fut poussé vers le jeune homme, remplaçant l'assiette d'omelette au riz. Kongpob le regarda, perplexe, et demanda.
— Pourquoi m'as-tu donné ton assiette ?
— J'ai vu combien tu étais reconnaissant pour le riz, alors je veux que tu en manges beaucoup. Regarde ça. Ce plat a même du krapao et un œuf au plat, et tu seras rassasié. Quoi ? Tu ne veux pas accepter ma gentillesse ?
Une gentillesse qui était rare et étrange. Même ainsi, Kongpob ne pouvait pas dire non et il prit l'assiette sans la vouloir et commença à manger le riz avec le poulet krapao sans objection.
... Ce n'était pas grave, c'était juste un repas et il pouvait se passer d'une omelette. Il pouvait manger la plupart des plats, n'étant pas un homme difficile. D'ailleurs, le plat contenait plus de riz que d'habitude. Il ne voulait pas croire qu'Arthit avait voulu échanger les assiettes avec lui. Plus surprenant, l'homme agissait même de manière amicale avec lui.
— C'est bon ? demanda Athit.
— Oui, c'est bon.
— Vraiment ? Je pense que la tante l'a rendu un peu moins savoureux. Laisse-moi le rendre meilleur pour toi.
Sur ce, l'homme généreux ouvrit la mini tasse avec la sauce de poisson et le piment, et en prit une cuillère pour la mettre sur le riz de Kongpob, sans demander ou se soucier de sa santé. Pas seulement une cuillère, mais deux cuillères de sauce de poisson pleines de piment jusqu'à ce que le riz en soit recouvert, ressemblant plus à du riz frit avec du piment qu'à du riz avec du krapao.
— Bon appétit.
Il termina sa phrase d'une voix douce, chose inhabituelle de la part d'un bizuteur. Mais pour Kongpob, c'était la voix la plus effrayante, plus effrayante que sa voix dure habituelle. Il venait juste de réaliser qu'il était à nouveau malmené. À en juger par la quantité de piment, il savait que ce serait la punition la plus douloureuse de toutes. Pourtant, tout ce qu'il pouvait faire, c'était l'accepter.
L'homme qui n'aimait pas les plats épicés prit une cuillère de riz, hésitant, avant de se décider et de la mettre dans sa bouche, les yeux fermés. Dès la première bouchée, les épices rouges et chaudes traversèrent tout son corps jusqu'à son cerveau et il attrapa son café glacé, ouvrit le couvercle et l'engloutit. Sa bouche et sa langue étaient engourdies et ses yeux larmoyants.
Face à lui, Arthit grignotait du riz avec une omelette, et prenait une gorgée de son pink milk, jetant des coups d'œil à l'homme qui mangeait et buvait en même temps avec un air triomphant sur son visage.
Arthit reconnut qu'il intimidait le jeune homme juste parce qu'il le pouvait. Ce n'était pas la bonne chose à faire, d'abuser de son pouvoir de bizuteur. Pourtant, il ne s'agissait pas d'un élève de première année ordinaire, mais d'un provocateur qui se montrait toujours, TOUJOURS, insolent avec lui, toujours en train de l'agacer et de l'embêter. Il disait souvent n'importe quoi, comme la fois précédente où il avait demandé pourquoi Arthit devait le harceler. Alors maintenant, c'était le moment de lui montrer pourquoi...
Il n'y avait pas d'autre raison que le fait qu'il pouvait le faire.
TRRRRRRRR ! !!
Le son provenant de sa poche interrompit le cours de ses pensées. Arthit prit son téléphone et regarda le nom de son ami sur l'écran, appuyant sur le bouton vert et parlant.
— Allô, oui. Comment ça va ? Hmmm. Eh bien, je suis en train de dîner. Quoi ? Tu veux que je sois là maintenant ? Ok, ok. Je te rejoins plus tard.
Il posa le téléphone et mit les dernières cuillères de nourriture dans sa bouche. Puis il se leva en donnant un ordre.
— Je dois y aller maintenant. Et toi, finis toute ta nourriture et ne laisse rien derrière toi. Sois aussi reconnaissant que ce que tu viens de dire.
Le chef bizuteur arqua un sourcil moqueur, terminant sa phrase par une menace à l'encontre de la personne qui n’était parvenue à manger que la moitié du riz. Lorsque l'homme plus âgé partit, Kongpob laissa finalement échapper un soupir résigné.
Il avait su qu'une sorte d'intimidation allait se produire, mais il n’avait pas pu s'empêcher de se mettre en danger de toute façon. Il souhaitait pouvoir être en colère contre l'autre homme, mais il ne le pouvait pas. Peut-être que c'était lui qui avait déclenché tout cela en s'amusant avec Arthit au départ. Pas étonnant que le bizuteur ait voulu se venger de lui.
Il baissa les yeux sur l'assiette pleine de riz, de poulet krapao et de piment. Il aurait pu la laisser comme ça, car l'autre homme ne reviendrait pas pour vérifier s'il l'avait terminée ou non. Pourtant, il était un homme de parole. Il mit toute la nourriture pimentée dans sa bouche et avala tout. Au moment où il finit, sa bouche était gonflée de rouge et engourdie par les épices.
— Ma tante, l'addition s'il vous plaît.
Kongpob appela la femme qui passait devant sa table pour servir la nourriture à une autre table. La tante lui lança un regard perplexe.
— Le gars qui s'est assis avec vous tout à l'heure a déjà payé.
Le gars qui était assis avec vous tout à l'heure a déjà payé ?
Il n'y avait qu'un seul gars qui s'était assis avec lui. Ça voulait dire...
Il arrêta de penser et se leva d'un bond, quittant le magasin de nourriture et se dirigeant vers le magasin de boissons situé dans le même quartier. Il demanda à l'homme qui préparait un autre verre.
— Phi, combien coûte mon café glacé ?
— C'est bon. Celui qui a commandé du pink milk a déjà payé.
… C'était exactement la même phrase que celle qu'il venait d'entendre. Il avait voulu commander une autre boisson froide pour chasser la sensation de brûlure dans sa bouche et maintenant il avait changé d'avis, ayant le visage de quelqu'un dans son esprit.
— Je peux avoir un gobelet de pink milk ?
Il ne fallut pas longtemps pour qu'un verre de lait sucré et pastel lui soit tendu. Il paya et en prit une gorgée.
… Tout comme il l'avait pensé. Le pink milk ne dissipa pas la sensation de brûlure dans sa bouche. Mais au moins maintenant il savait pourquoi il ne pouvait pas être en colère contre l'autre homme. C'était parce que... il avait un faible pour une chose douce, c'est sûr.
Notes :1/ Blague Thaï. Quand on ne sait pas quel est le menu, ou quoi manger, le Pad Krapao est le premier qui vient à l'esprit. Laisser Un Commentaire »»————- ★ ————-«« | | Messages : 87
Date d'inscription : 01/07/2024
| amelyma Sam 7 Sep 2024 - 17:43 Chapitre Spécial 1 Dix Choses Qui Ont Basculé Quand Arthit Est Devenu le Chef Bizuteur 1- Le réveil
Arthit aimait se réveiller (très) tard.
S'il n'y avait pas de cours le matin, il dormait jusqu'à midi et s'énervait si quelqu'un le réveillait ou interrompait son sommeil. Mais une fois devenu bizuteur, il devait se lever tôt pour commencer le bizutage. Plus l'heure du rendez-vous était matinale, plus il devait se lever tôt pour se rendre sur les lieux. Il avait donc acheté un réveil et le faisait sonner toutes les deux minutes pour ne pas se rendormir.
En fait, le réveil était presque inutile. Il devait demander à un ami de l'appeler et de le réveiller. Même s'il parvenait à se lever tout en étant somnolent, il s'énervait inévitablement car il ne voulait pas quitter son lit.
Ce n'était donc pas une surprise pour les jeunes de voir que le chef du bizutage était toujours deux fois plus mal luné quand il y avait un bizutage le matin. Il avait l'air presque trois fois plus énervé.
Ils auraient dû savoir que c'était à cause d'un réveil inefficace qui n'arrivait pas à réveiller complètement une personne endormie comme Arthit.
2- Le pink milk
Arthit aimait le pink milk.
C'était la boisson fraîche la plus douce et la plus rafraîchissante. Le rose pastel était si doux, à l'opposé de la personnalité brutale du bizuteur. La boisson appropriée aurait dû être le café noir glacé que les visiteurs aimaient apporter aux prisonniers.
Il savait qu'il était étrange pour un homme viril d'aimer autant le pink milk, mais il en était quand même amoureux. Quand il était fatigué, il prenait toujours du pink milk avec toutes sortes de nourriture. Il lui donnait de l'énergie comme le Red Bull le faisait pour les autres.
Par conséquent, chaque fois qu'il venait acheter une boisson à la cantine, Arthit devait s'empêcher de demander du pink milk. La vendeuse lui demandait souvent pourquoi il changeait son menu, mais il lui disait qu'il voulait du changement et commandait de l'eau à la place. C'était pour préserver sa personnalité de dur à cuire.
Il s'était mis en tête qu'une fois la période d'initiation terminée, il commanderait du pink milk pour en boire plusieurs fois par jour, rattrapant ainsi le temps perdu.
3- Botan
Arthit détestait les Botan.
Il était amateur de sucreries et n'aimait rien d'amer, y compris les bonbons médicinaux 'Botan' pour les maux de gorge. Cependant, le fait de crier sur les étudiants de première année l'obligeait à prendre soin de sa gorge. C'était une honte pour les bizuteurs de bizuter les jeunes avec des voix éraillées.
Les bonbons pour le mal de gorge étaient un médicament d'urgence que tous les bizuteurs avaient dans leur poche. Arthit avait essayé de l'éviter en demandant au service de bien-être de lui préparer une limonade mélangée à du miel.
Mais comme cela prenait trop de temps à préparer, personne ne s'était donné la peine de le faire pour lui. En fin de compte, il avait dû prendre des bonbons de Botan à la fin d'une séance de bizutage, à contrecœur, et avaler quelques bonbons par la suite pour se débarrasser du goût désagréable. Il avait toujours quelques bonbons dans sa poche pour cette raison.
Il devait faire mine de ne pas être gêné de transporter des bonbons qui ne correspondaient pas à l'image d'un bizuteur. Mais tant qu'il ne les sortait pas devant tout le monde, son secret était préservé.
4- L'entraînement
Arthit n'aimait pas le sport.
Il s'entraînait rarement. Pendant son temps libre, il aimait s'allonger, mettre le ventilateur à côté de lui, lire des bandes dessinées et jouer à des jeux vidéo dans sa chambre plutôt que de jouer au football sur un terrain. Même s'il savait pratiquer tous les types de sports, il choisissait toujours les sports d'intérieur comme le basket.
Il n'était pas métrosexuel, ayant peur de la lumière du soleil, non. Il pensait simplement que le soleil de Thaïlande pouvait griller du poulet, et il ne voulait pas finir comme ça à force de courir sur un terrain sous le soleil à 40 degrés Celsius.
Mais une fois qu'il est devenu bizuteur, il a été formé comme une recrue que l'on prépare pour la guerre.
Courir au milieu de la journée avec le soleil au-dessus de sa tête était normal. S'il voulait punir les nouveaux, il devait les convaincre que c'était possible en se servant d'eux-mêmes comme exemple. Les squat jump, les abdos et les pompes, il les avait tous réussis au cours des sessions d'entraînement au bizutage. De plus, il avait dû suivre un cours de natation pour renforcer ses poumons afin de pouvoir pousser ses cris.
... Le résultat ? Il avait perdu 5 kilos tout en conservant sa musculature élancée, paraissant plus musclé - c'est ce que disaient ses amis.
Il admettait que c'était un côté positif. Mais si on lui posait la question, il répèterait qu'il n'aimait pas faire de l'exercice.
5- Le duvet
Arthit détestait le duvet sur son visage.
Il n'aimait pas la sensation de rugosité lorsqu'il touchait son visage. La légère barbe sur son menton était ennuyeuse et lui donnait un air bizarre.
Pourtant, ses amis lui demandaient de la garder pour ajouter des années à son apparence. Sans le duvet, il aurait ressemblé à l'un des étudiants de première année. Ils pourraient le prendre pour un camarade plutôt que pour un senior.
Il devait aussi garder ses cheveux à la base de son cou, ajoutant un air espiègle à sa façade de bizuteur. Pour dire la vérité ? Il faisait chaud, il voulait juste avoir une coupe de skinhead. Mais bien sûr, ses amis l'en ont empêché, disant que ça ne correspondait pas à l'image d'un bizuteur.
Alors, Arthit utilisait un ruban pour attacher ses cheveux, exaspéré à chaque fois qu'il était au dortoir. Pire, il devait cacher son rasoir pour ne pas se faire prendre à se débarrasser de son duvet.
6- La salle de classe
Arthit n'était ni un élève brillant, ni un élève moyen.
Disons simplement qu'il se débrouillait bien, quelque part au milieu. Il allait en cours quand il se sentait assidu et la séchait quand il était paresseux, tout comme le reste de la promotion.
Cependant, en tant que bizuteur, surtout dans sa faculté, il devait suivre une règle importante : vous pouvez faire autant d'activités que vous le souhaitiez, mais vous ne devez pas sécher les cours. Il n'y avait pas d'exemption pour ceux qui n'étudiaient pas, et si vous ne suiviez pas cette règle, les professeurs vous surveillaient, et votre nom était instantanément exclu de la liste des activités.
C'est pourquoi un chef du bizutage comme Arthit devait traîner son corps fatigué à chaque cours, sans jamais le manquer, peu importe l'heure du bizutage. Sinon, il serait instantanément renvoyé de son poste.
Mais ne pensez pas qu'il y prêterait attention. Il avait juste rejoint la classe parce qu'il le devait. Ce à quoi il excellait, c'était dormir les yeux ouverts, et il comptait sur ses amis pour lui donner des cours supplémentaires après la classe, ce qui l'aidait à réussir tous les cours en obtenant de bonnes notes.
Chaque fois qu'un examen était terminé, si quelqu'un lui demandait ce qu'il avait étudié, tout ce qu'il pouvait répondre était... n'en parlons plus.
7- Un vélo
Arthit avait un vélo.
Ce n'était pas un vélo ordinaire mais un vélo noir classique. Pour lui, c'était la chose la plus cool qui soit.
Il aimait faire du vélo pour se rendre au dortoir et à son cours. Le campus était vaste et verdoyant avec des myriades d'arbres.
Quand il était sur son vélo, il contemplait les arbres et la vue, tout en se relaxant. Mais si un étudiant de première année le voyait sur son vélo, il aurait une mauvaise opinion de lui car cela contrastait avec sa personnalité de dur à cuire.
Par conséquent, il montait à l'arrière de la moto de son ami chaque fois qu'il venait sur le campus ou qu'il devait faire des courses. De nombreux amis lui ont dit qu'ils allaient collecter des fonds pour acheter une moto et lui donner afin qu'il ne soit plus un fardeau pour eux.
Il a accepté ce don avec joie. Mais il n'a pas dépensé l'argent pour une moto. Au lieu de cela, il est allé aux enchères pour acheter un autre vélo classique... et bien. Il ne pouvait pas s'en empêcher. Le vélo était sa passion, après tout.
8- Les larmes des femmes
Les larmes des femmes étaient un point faible pour Arthit.
Il était sensible à toutes sortes de larmes de femmes. Parfois, lorsqu'il faisait le bizutage et aboyait sur les nouvelles recrues jusqu'à ce qu'elles fondent en larmes, son cœur sautait toujours un battement. Rongé par la culpabilité, il voulait apaiser leur douleur, mais il devait faire comme s'il s'en fichait, et leur jeter un regard sévère.
Ainsi, chaque fois que le bizutage était terminé, il se demandait s'il n'avait pas exagéré. Il craignait qu'une fois le bizutage terminé, aucune fille ne veuille lui parler.
Il avait entendu dire que la plupart des bizuteurs étaient sexy. Même s'ils avaient l'air effrayants pour les étudiants de première année, ils étaient populaires et avaient de nombreuses admiratrices.
Mais ce qu'il vivait était tout le contraire. Aucune femme de première année n'avait le béguin pour lui en secret. Elles essayaient même de l'éviter comme s'il était un monstre.
Donc, il devait admettre qu'il n'était plus du tout convaincu. Ce que la génération précédente des bizuteurs lui avait dit, à savoir qu'une fois qu'on devenait bizuteur, on devenait le chouchou des filles, n'était qu'une arnaque.
9- Amis
Arthit avait beaucoup d'amis.
C'était un type facile à vivre qui aimait faire la fête et qui ne disait jamais non quand on lui demandait de faire quelque chose.
Il avait des amis à la faculté et dans d'autres facultés. Il n'a jamais réalisé que cela aurait été un obstacle pour lui d'être bizuteur en chef.
Pourquoi ? Quand il était avec les étudiants de première année, il devait garder son identité de dur à cuire. Se mêler et plaisanter avec ses copains n'était pas autorisé.
Ses amis savaient pourquoi il agissait de cette façon. Cependant, ils aimaient lui faire des farces quand il tombait sur eux et quand les élèves de première année étaient là, en essayant de le faire rire devant les jeunes. Bien sûr, il était difficile pour lui de prendre un air sérieux et de rire aux éclats lorsque personne ne regardait.
Arthit avait prévenu ses amis à plusieurs reprises. Parfois, il les appelait même pour les gronder, mais ils ne faisaient jamais ce qu'il leur demandait. Au final, les problèmes lui sont tombés dessus. Il avait déjà assez de problèmes avec les élèves de première année, et il devait aussi s'occuper de ses amis.
10-0062 Kongpob
Arthit voulait être un bon bizuteur.
Il savait que les bizuteurs doivent supporter toutes les réactions négatives qui les affectent. Pourtant, il essayait de faire son travail du mieux qu'il pouvait. Il a utilisé le raisonnement, le contrôle de soi, et la stratégie pour créer l'esprit des étudiants de première année. Pourtant, tous ses plans se sont effondrés avec l'apparition inattendue d'un étudiant de première année.
... 0062 Kongpob !
... L'étudiant de première année qui l'avait défié depuis le premier jour dans le hall de réunion. Ce type lui tapait toujours sur les nerfs avec ses mots nonchalants et faisait craquer Arthit à plusieurs reprises, le faisant perdre son self-control en tant que chef bizuteur. Même s'il avait réussi à se venger du garçon et à lui donner une leçon pour que les autres étudiants de première année ne fassent pas la même chose, le gars agissait toujours avec indifférence. Cela rendait Arthit encore plus furieux au lieu de lui donner satisfaction.
... Il avait l'impression de perdre face à ce nouveau venu.
Ce qui lui déplaisait le plus, c'était la façon dont Kongpob le regardait. Le scintillement dans ses yeux semblait cacher des secrets qu'Arthit ne connaissait pas. Il ne voulait pas y prêter attention, de toute façon. Il croyait qu'un jour la victoire lui reviendrait, du moment que la décision finale de leur donner la reconnaissance de la classe et l'engrenage était entre ses mains.
Chaque fois qu'Arthit faisait le bizutage, il se concentrait sur l'activité. Pourtant, ses yeux se promenaient toujours vers quelqu'un dans ces rangées... juste au cas où ce morveux se lèverait et lui répondrait avec quelque chose. Il ne serait pas pris au dépourvu, en étant aussi prudent.
Par conséquent, même si c'était difficile à admettre, il ne pouvait pas nier le fait qu'une chose qui avait attiré son attention et qui était l'une des choses les plus mémorables dans sa vie de bizuteur était...
Kongpob. | | Messages : 553
Date d'inscription : 13/07/2024
| Johanne Sam 7 Sep 2024 - 17:44 Chapitre Spécial 2 Une Journée Ordinaire dans la Vie de Kongpob 06.00
Kongpob se réveilla.
C'était un lève-tôt qui se levait automatiquement vers 6 heures du matin. Sa mère l'avait entraîné depuis qu'il était petit en le réveillant tôt pour qu'il fasse l'aumône aux moines. Il avait gardé cette habitude même en grandissant. Peu importe l'heure à laquelle il se couchait, dès que l'horloge approchait de six heures, son corps se réveillait de lui-même et il ne pouvait pas se rendormir.
Chaque matin, Kongpob se rendait en moto au marché pour prendre son petit-déjeuner, qu'il s'agisse de bâtonnets de pâte frits, de lait de soja, de porridge ou de riz bouilli. Il fréquentait les boutiques qui proposaient des mets délicieux. Et très tôt le matin, il achetait toujours de la nourriture pour l'offrir aux moines.
Il considérait le petit-déjeuner comme le repas le plus important de la journée, celui qu'on ne pouvait pas manquer, car il donnait de l'énergie à votre corps pour toute la journée. Ainsi, il ne manquait pas son petit-déjeuner car son corps avait besoin de ce carburant pour affronter une nouvelle journée.
07.00
Kongpob prit une douche avant d'aller en classe.
Il allait repasser sa chemise d'étudiant le matin en regardant les nouvelles du matin à la télévision. Il se tenait au courant de la situation politique et économique, de la bourse et des nouvelles internationales. Si les nouvelles locales ne parvenaient pas à maintenir son intérêt, il passait à CNN. Par chance, son dortoir était équipé d'un service de câble avec la chaîne.
Kongpob suivait paisiblement sa routine quotidienne, sans se presser. Il restait encore du temps, mais il y avait une chose qu'il gardait comme dernière chose à faire avant de quitter son dortoir : nouer sa cravate.
En fait, il n'aimait pas mettre la cravate, et il ne prêtait pas vraiment attention à l'uniforme des étudiants. Il ne voyait aucune importance aux uniformes, sachant que le cerveau humain ne jugeait pas un autre être humain à partir d'eux. Mais bien sûr, il avait compris que ce que son cerveau pensait était différent de la vraie responsabilité. C'est pourquoi il suivait la règle, pour montrer son obligation en tant qu'étudiant de première année à la faculté d'ingénierie.
Se sentant contraint, il nouait quand même sa cravate aussi bien qu'il le pouvait chaque fois qu'il portait l'uniforme. Il avait hâte d'être au jour où il pourrait l'enlever et enfiler la chemise d'atelier à la place.
08.00
Kongpob arriva au campus.
Le cours d'anglais commençait à 8h30, et il devait traverser le campus de la faculté d'ingénierie à la faculté de langues de l'autre côté. Une fille plus âgée d'une autre faculté demanda son Facebook, et il le lui donna. Cependant, il ne lui dit pas qu'il n'était pas très actif sur cette plateforme.
Kongpob n'était pas étranger aux réseaux sociaux. Il avait des comptes Line, Twitter et Google+, mais juste pour la forme. S'il s'agissait de quelque chose d'important, il appelait pour parler. Il ne voulait pas faire d'erreur et provoquer des malentendus, c'était plus rapide que d'attendre que l'autre partie tape une réponse. Parfois, il n'était pas sûr de la signification des stickers Line que ses amis utilisaient.
Du coup, ses amis n'aimaient pas lui parler via les réseaux sociaux. Ils avaient même classé Kongpob dans le groupe 'lu' mais sans réponse. Il avait un iPhone mais ne savait pas comment l'optimiser. Ses amis lui avaient suggéré de prendre un Nokia 3310 et qu'il aurait dû vendre son iPhone. Kongpob se disait qu'il devrait peut-être suivre leur conseil.
08.30
Kongpob assista à son premier cours.
Il restait au fond de la salle avec les camarades masculins de sa section. Plus tôt, ils lui avaient dit que, pendant le cours de l'après-midi qui concernait un grand groupe d’étudiants, il y aurait l'élection du président de leur classe.
M, son meilleur copain, le poussa à se présenter à cette élection. Kongpob secoua la tête avec véhémence, ne voulant pas ajouter une autre responsabilité sur ses épaules. Il voulait seulement passer ces quatre années comme une brise facile. Pourtant, ses amis ne cessaient de l'encourager jusqu'à ce qu'il doive leur demander d'arrêter. Il les prévint même que si l'un d'entre eux le choisissait...
Ils pourraient s'attendre à une vengeance.
10.25
Kongpob termina son cours et se dépêcha de voir son mentor de code.
Son département avait révélé qui serait le mentor de deuxième année depuis les premiers jours dans la salle d'activité. Les mentors devaient aider les étudiants de première année et leur remettre les livres de cours. Mais le mentor de Kongpob n'était pas rentré du programme Work & Travel aux États-Unis et il avait dû acheter des manuels et des documents de sa propre poche.
Aujourd'hui, cependant, il avait reçu un appel téléphonique de son mentor, lui disant de venir chercher ses affaires. Il se précipita vers le bâtiment de la faculté d'ingénierie, à la recherche du mentor qui était assis à une table en marbre. C'était la première fois que Kongpob posait les yeux sur son mentor de code.
P'Ple, une jeune fille à l'allure chinoise insolente qui était une cheerleader de deuxième année et semblait détendue et amicale, contrairement à son rôle, l'attendait. Une fois qu'il arriva, elle souleva une grande boîte en carton remplie de papiers et de manuels et la posa à son grand étonnement. L'étudiante de deuxième année dut le percevoir à sa démarche, alors elle lui expliqua.
"Ils ne viennent pas seulement de moi, ne t'inquiète pas. Ils viennent des anciens mentors et ont été transmis depuis des générations. Prends juste ce que tu peux utiliser. Le reste, tu peux le donner en héritage au prochaine 0062. Et voici ton souvenir de ma part. Je ne savais pas ce que tu aimais, alors j'ai juste pris tout ce que je pouvais. Tu peux partager avec tes amis."
La jeune fille posa un grand sac en plastique rempli de snacks devant lui dès qu'elle eut terminé sa phrase. Kongpob vit les lettres 'Duty-Free'. P'Ple avait dû les acheter à l'aéroport. Pourtant, la grande quantité devait coûter une fortune, même sans taxe.
Kongpob leva les mains et fit un wai(1) à la jeune fille, mais P'Ple s'empressa de l’interrompre, disant que c'était sa punition pour être arrivée en retard pour l'accueillir. Elle l'excusa ensuite pour qu'il rejoigne la classe et échangea son numéro avec lui pour qu'elle puisse lui offrir un vrai repas avec les autres étudiants du même code. De cette façon, il pourrait se familiariser avec les juniors et les seniors.
Après le départ de P'Ple, Kongpob prit un livre dans la boîte et le feuilleta. Certains des livres semblaient abîmés par la guerre, ce qui indiquait leur âge, et les pages étaient griffonnées au stylo, quelques formules, des dessins parsemés quand quelqu'un s'ennuyait. Une chose ressortait : peu importe qu'il s'agisse d'une feuille de papier ou d'un manuel, la première page portait toujours le code 0062.
Kongpob vit le manuel d'anglais qui était le même que celui qu'il étudiait en ce moment. Il se dit qu'il devrait apporter cet ancien manuel en classe à partir de la semaine prochaine.
10.45
Kongpob avait un rendez-vous pour une séance de photos pour la Lune de la faculté.
P'Minnie lui avait dit hier de venir à la séance avec une fille de l'autre département, Praepailin, qui était l'Étoile de la faculté.
Certaines facultés utilisaient le vote des étudiants de première année pour choisir la Lune et l'Etoile, mais ceux de la faculté d'ingénierie avaient déjà été choisis par les étudiants plus âgés. Il n'y avait pas le temps de convoquer un millier d'étudiants pour voter. Chaque département avait envoyé ses représentants pour être sélectionnés, et le jackpot avait atterri sur Kongpob.
Kongpob avait été interviewé pour une brève biographie et ses impressions sur le fait d'être un étudiant de première année à l'université. Elle serait publiée sur le site Web avec celles des autres Lunes et Étoiles avant la finale de la soirée des nouveaux étudiants.
Pour être honnête, Kongpob ne se souciait pas du tout de ce concours. Mais P'Minnie semblait avoir de grands espoirs pour lui et elle lui avait dit de se préparer à montrer son talent lors de la nuit de la finale. Cela lui donnait du fil à retordre car il n'avait aucune idée de ce qu'était son talent.
... S'il ne se souciait pas des seniors, il aurait abandonné dès la fin de la séance photo.
12.00
Kongpob prit son déjeuner.
Il rejoignit des dizaines d'autres étudiants de sa filière. Ils s'étaient rapidement rapprochés depuis le début du semestre et traînaient toujours ensemble en un grand groupe, ressemblant à un gang d'étudiants techniques prêts à battre d'autres gangs. Leurs amis les avaient surnommés 'le gang des bad boys'. Ils en avaient juste l'air, mais en fait, c'étaient des voyous qui aimaient plaisanter et étaient ainsi devenus très vite des amis proches.
De plus, même s'ils avaient l'air mauvais, ils ne pouvaient pas se comparer aux étudiants de troisième année qui portaient leurs chemises d'atelier d'ingénierie et se promenaient pour annoncer leurs prouesses en marchant dans la cantine. Même si les effectifs étaient les mêmes, leur influence ne pouvait pas égaler celle des troisième année.
Une fois que les étudiants de troisième année furent passés devant eux, tous les étudiants de première année à la table se levèrent et firent un wai aux troisième année en signe de respect, conformément aux règles. Certains des étudiants plus âgés hochèrent la tête en signe de reconnaissance, d'autres les ignorèrent, comme le chef des Bizuteurs. Dès que Kongpob effectua un wai, Arthit ne lui accorda même pas un regard, mais continua à marcher avec son visage stoïque comme si les étudiants de première année étaient invisibles.
Il ne fut donc pas surprenant que dès que les bizuteurs furent partis, beaucoup d'étudiants de première année commencèrent à faire des commérages sur eux. Kongpob n'approuvait pas ce comportement, mais il ne s'en plaignit pas à voix haute. Il était conscient que tant qu'ils n'avaient pas gagné leurs gears et leur place dans cette faculté, les bizuteurs avaient le droit de les traiter comme des étrangers, et non comme des juniors auxquels ils devaient prêter attention.
13.00
Kongpob entra dans sa classe de l'après-midi.
C'était la salle principale où tous les départements de la faculté d'ingénierie devaient avoir un cours ensemble. Avant que le cours ne commence, quelqu'un se leva pour parler de l'élection du président de classe à la fin de la session. Cela correspondait à la rumeur qu'il avait entendue.
Kongpob commença à sentir que ses camarades chuchotaient entre eux tout en le regardant comme s'ils voulaient lui forcer la main en le nommant. Certains d'entre eux commencèrent à lui dire qu'il devait accepter le poste, sans se soucier de son précédent avertissement.
Kongpob dut trouver une échappatoire en lançant les snacks que son mentor de code lui avait donnés pour les faire taire. À ce moment-là, ils cessèrent de parler, le laissant soupirer en lui-même en signe de résignation. Il avait perdu sa concentration, pensant qu'il aurait dû sécher le cours pour éviter cette situation.
15.30
Kongpob fut nommé président de la classe.
Il avait été retenu par ses camarades pour rester. Pire, ils l'avaient nommé comme président de classe. Ce n'était pas seulement de la part de ses amis mais aussi de la part des autres étudiants de première année du département. Bien sûr, il essaya de rejeter le poste en disant qu'il n'était pas le bon et qu'il devait y avoir quelqu'un de plus approprié. Il n'était pas prêt à assumer cette grande responsabilité qui venait avec une grande tâche.
Son raisonnement et ses allures durent les convaincre, car, finalement, ses camarades finirent par choisir quelqu'un d'autre. Kongpob eut l'impression d'avoir échappé à la mort, et c'est ainsi que la présidence de la classe retomba sur les épaules d'un étudiant du département de génie civil. Une fois le vote terminé, tout le monde courut hors de la salle, en particulier Kongpob qui sauta sur sa moto pour retourner au dortoir. Il dut changer l'uniforme pour le tee-shirt de la faculté car à 16 heures aujourd'hui...
Les étudiants en première année d'ingénierie industrielle allaient avoir leur bizutage.
16.10
Kongpob rejoignit l'activité de bienvenue.
Ils avaient dix minutes de retard à cause du vote. et ils se mirent en rang en retard. Cela, d'une certaine manière, n'était pas une excuse acceptable pour les bizuteurs qui les avaient attendus. La punition avait déjà été prévue. Ils avaient ordonné à ceux qui étaient arrivés les premiers de se tenir le cou les uns aux autres en s'asseyant et en se levant jusqu'à ce que tous les élèves de première année arrivent dans la salle.
Au total, cela représenta près de deux cents fois pour eux. Une fois que les bizuteurs furent satisfaits, ils leur dirent d'arrêter. Ensuite, ils leur demandèrent de répéter le mot SOTUS pour souligner l'importance de l'ancienneté, de l'obéissance aux règles, du respect des traditions, de l'unité et de la générosité.
... Avant de rejoindre l'université, Kongpob était un fervent antagoniste du système SOTUS. Il pensait que le respect ne pouvait pas être gagné par la force ou la peur. Cela incluait également le bizutage qui ressemblait à l'entraînement des recrues, avec tous les abus verbaux et la pression mentale jusqu'à ce que certains d'entre eux craquent.
Pourtant, il avait pris conscience de certains côtés positifs. Au moins, le système SOTUS lui avait permis de se faire de nouveaux amis, lui avait fait connaître le sens de l'unité et l'esprit des autres membres de sa classe. Chaque fois qu'il avait obtenu l'acceptation des étudiants plus âgés, il était vraiment fier d'être un étudiant en ingénierie.
Par conséquent, il n'avait jamais manqué une séance de bizutage, même s'il savait qu'il était dans le collimateur des bizuteurs. Il avait secrètement protesté contre le système SOTUS lors de ses premiers jours, et c'est pourquoi il avait laissé échapper son objection et sa dérision. Il s'était avéré qu'il avait insulté les bizuteurs et reçu une punition plus sévère que les autres.
Il y avait une chose qui le dérangeait encore. Il avait l'impression que le chef des bizuteurs le regardait souvent avec dédain, même s'il n'avait rien fait de mal. Il lui rendait toujours son regard, et c'est le bizuteur qui détournait toujours les yeux. Alors, l'homme devenait encore plus irrité et commençait à aboyer une punition injustifiée aux nouveaux.
Kongpob ne pouvait pas exprimer son objection, bien sûr. Même s'il ne comprenait pas pourquoi ils étaient punis, tout ce qu'il pouvait faire était de l'accepter.
18.00
Kongpob termina sa séance de bizutage.
Certains garçons agités et pleins d'énergie le trainèrent quand même pour faire un match de football. Il dut les suivre malgré ses membres épuisés par les punitions. Il réussit à terminer un court match, trempé de sueur comme s'il avait été noyé. Il ne voulait pas trop réfléchir, considérant cette activité comme un exercice pour le rendre plus sain. Cela pourrait l'aider à s'endurcir pour les prochaines séries de punitions.
Maintenant, il était sur sa moto, en route vers le dortoir. En chemin, il s'arrêta pour louer quelques films dans son magasin habituel. Une fois arrivé à la chambre, il enleva le t-shirt de la faculté et le posa dans une bassine de détergent, car il devait s'en servir tous les deux jours. Puis il se changea et mit un simple t-shirt et un short, prêt à descendre pour trouver quelque chose à manger.
19.30
Kongpob était en train de dîner.
C'était un stand à côté du dortoir. Le goût était bon, le prix était décent et il fréquentait souvent cette échoppe. Il y avait quelques étudiants ici et là, la plupart venant de son université. Il entra donc dans le magasin et commanda un plat de porc frit simple avec de l'ail, n'aimant pas la nourriture épicée. Une fois que la nourriture fut servie et qu'il eut commencé à manger quelques cuillères, quelque chose devant l'échoppe attira son attention.
"Quels plats savoureux avez-vous aujourd'hui, ma tante ?"
La voix familière lui fit lever les yeux, et il rabaissa instantanément le regard, voyant que le type qui parlait maintenant était le même qui l'avait puni dans la soirée. Le chef bizuteur, Arthit !
Arthit ne se rendit pas compte que le nouveau était dans la boutique parce qu'il continua à parler avec un air détendu sur le visage, discutant avec la tante pendant que Kongpob tendait les oreilles pour écouter.
"Que voulez-vous manger aujourd'hui ?"
"Tout ce que vous avez. J'ai confiance en votre cuisine, n'importe quel plat sera délicieux, choisissez-en juste un pour moi."
"Alors... pourquoi pas des spaghettis frits ?"
"Woah... maintenant votre cuisine est devenue internationale ! Pas mal, pas mal. Donnez-m'en un, s'il vous plaît, et à emporter. Je vais manger dans ma chambre. Je vais aller là-bas pour prendre une boisson, et je reviens ici, d'accord ?"
Le client donna une longue série d'ordres puis s'éloigna vers la boutique de boissons située à proximité. Au bout d'un moment, il revint avec un gobelet de pink milk qu'il commença à siroter en attendant ses spaghettis à emporter. Il demanda alors le prix.
"C'est combien, tante ? Trente-cinq ? Je te donne quarante bahts, la prochaine fois tu m'en donneras plus."
Le ricanement guttural et l'attitude enjouée étaient un spectacle rare, gardant les yeux de Kongpob sur l'homme alors qu'il était perdu dans sa rêverie. Puis, il sursauta, baissant la tête, se rappelant que l'autre homme aurait pu le repérer.
Heureusement, le chef des bizuteurs prit seulement son sac de nourriture et partit, laissant Kongpob qui soupirait à haute voix de soulagement d'avoir évité une punition. Il avait même appris que le chef des bizuteurs parlait comme un être humain aux autres personnes, et que ses mots et sa voix étaient agréables, contrairement à ce qu'il faisait lorsqu'il criait et aboyait sur les étudiants de première année au milieu du terrain.
Une autre chose qu'il avait aussi apprise était que... le chef des bizuteurs Arthit aimait vraiment le pink milk.
19.45
Kongpob fit ses devoirs.
Après avoir terminé son travail, il choisit un des films qu'il avait loué pour le regarder. Il aurait pu le télécharger sur un site pirate, mais il avait choisi de soutenir les versions protégées par le droit d'auteur. Il achetait ceux qu'il aimait, surtout les films indépendants difficiles à trouver en ligne.
En outre, il préférait les regarder sur un écran de télévision plutôt que sur un autre écran à cause des pixels HD, ce qui lui donnait l'impression d'être dans une salle de cinéma. Il allait toujours au cinéma lorsqu'un nouveau film sortait. Parfois avec des amis, parfois seul. Il aimait les films plus que les séries télévisées thaïlandaises, et concentrait son attention sur le film, se perdant dans l'histoire, profitant de son temps seul pendant deux heures entières.
21.30
Kongpob termina le film.
Il s'étira, chassant les courbatures de son corps. Il se dit qu'il fallait prendre une douche et se brosser les dents. Une fois terminé, il se dirigea vers le balcon pour accrocher sa serviette. Tout à coup, la porte vitrée en face de sa chambre s'ouvrit en coulissant, et quelqu'un en sortit.
Kongpob se retourna et revint à l'intérieur. Il ouvrit le rideau et regarda furtivement l'homme de l'autre bâtiment. C'était le même gars qu'il avait vu au stand de nourriture. Maintenant ce même type portait un panier de vêtements à accrocher sur le balcon, juste en face de la chambre de Kongpob.
Il savait depuis un moment que le chef bizuteur Arthit vivait seulement à une quinzaine de mètres. Plus étonnant encore, ils vivaient tous les deux au sixième étage, et leurs balcons se faisaient face.
C'était la deuxième fois qu'il voyait le type étendre ses vêtements sur le balcon. La première fois, il n'était pas sûr qu'il s'agissait du chef bizuteur. Mais après avoir bien regardé, il su que c'était lui. Kongpob s'esquiva dans la pièce avant que l'homme plus âgé ne le surprenne à regarder, et se cacha à l'intérieur de la pièce pour fixer le bizuteur.
Kongpob n'était pas un psychopathe ou un harceleur. Il observait seulement le comportement du bizuteur parce qu'il voyait quelque chose qu'il n'avait jamais vu auparavant.
Comme maintenant, qui laverait ses vêtements et les accrocherait à 9 heures du soir ? Il semblait que cette tâche était une question de vie ou de mort, accrochant les vêtements et secouant ses cheveux qui tombaient, agacé à chaque fois qu'il se penchait pour ramasser les vêtements. Finalement, il retourna dans la chambre, perdant patience, et revint avec ses cheveux attachés en arrière en un chignon grossier, avec des cheveux ébouriffés sur le devant. Après avoir utilisé une pince pour maintenir les cheveux indisciplinés sur son front, il poursuivit sa tâche, se sentant satisfait.
Au bout d'un moment, alors qu'il commençait à suspendre ses vêtements, il n'eut plus de pinces pour les vêtements. Il retira donc celle qu'il avait sur la tête, mais ses cheveux se prirent dans le centre et il ne put la retirer.
Kongpob ricana en voyant la frustration de l'autre homme. Arthit détacha lentement ses cheveux de la pince, jusqu'à ce qu'il y parvienne enfin. Il prit un air satisfait de sa victoire et continua à suspendre les vêtements. Une fois terminé, il retourna à l'intérieur, l'air satisfait...
... sans savoir que Kongpob l'avait observé pendant tout ce temps avec un sourire satisfait sur le visage.
22.30
Kongpob alla se coucher.
Une fois que sa tête eut touché l'oreiller, il ne put fermer les yeux pour dormir, se tournant et se retournant pendant une heure, et il était encore bien éveillé. Peut-être était-ce dû au café qu'il avait bu dans la soirée, ou peut-être était-ce pour d'autres raisons.
L'horloge indiquait 23h30. Il décida de se lever du lit, ouvrit le tiroir, sortit le paquet de Marlboro et le briquet pour aller sur le balcon. Il alluma une cigarette, l'inhala profondément, et libéra les fumées grises qui traînaient dans l'air.
Kongpob faisait tout cela — boire, fumer, mais parce qu'il voulait socialiser. De temps en temps, il prenait une bouffée pour se détendre du stress. Il savait que c'était mauvais pour sa santé, mais au moins cela aidait à calmer son esprit errant.
Il regarda la pièce en face de lui. La lumière lui indiquait que l'autre homme était encore réveillé. Il se demanda ce qu'Arthit était en train de faire — était-il en train de faire un devoir, de regarder un film, de surfer sur internet, ou de parler à sa petite amie au téléphone ?
Cette dernière question lui donna une sensation étrange de poids dans la poitrine et il tira une longue bouffée de sa cigarette. Pourquoi devait-il se soucier de savoir si l'autre gars avait une petite amie ? Peut-être qu'il se sentait trop seul, et que son esprit commençait à inventer des absurdités.
Avant que sa pensée ne puisse s'emballer davantage, la porte du balcon opposé s'ouvrit une fois de plus, et l'homme sortit. Kongpob se laissa tomber sur le sol, accroupi, et regarda par derrière le bord du balcon, utilisant l'obscurité comme voile.
De cet endroit, il vit comment l'autre homme accrochait sa serviette. Les cheveux d'Arthit étaient plaqués contre son crâne comme pour quelqu'un qui vient de prendre une douche. Il marmonnait quelque chose avec humour, et une mélodie flottait sur le balcon. Il retourna dans sa chambre, et il ne fallut pas longtemps pour que la lumière derrière le rideau ne s'éteigne.
Kongpob se redressa de toute sa hauteur et regarda la pièce assombrie.
... C'est pourquoi il ne voulait pas dire à l'autre homme qu'il vivait en face de lui. Il ne voulait pas rater le privilège de voir le comportement du bizuteur dans son habitat naturel. C'était tout le contraire de ce qu'il leur avait montré lors du bizutage.
Kongpob écrasa la cigarette sur le balcon et jeta le filtre dans la poubelle. Il retourna à l'intérieur, se laissa tomber sur le matelas, et le sommeil commença à le gagner. Avant de fermer les yeux, son esprit vagabonda vers l'homme qui vivait en face de lui.
... Il devait être en train de dormir à présent. Pourtant, Kongpob espérait que ses mots lui parviendraient comme le dernier message de la soirée.
24.00
Bonne nuit et dors bien, P'Arthit. Notes :1/ Le wai est une salutation traditionnelle thaïlandaise qui témoigne de la cordialité et du respect envers l'autre personne. Vous pouvez le faire en joignant les paumes de vos mains au niveau de votre visage. Il existe trois niveaux : sous le menton pour une personne plus jeune. Au niveau de votre visage pour quelqu'un de même niveau, et légèrement au-dessus de vos lèvres pour quelqu'un de plus âgé. Laisser Un Commentaire »»————- ★ ————-«« | | Messages : 942
Date d'inscription : 19/06/2024
| Néphély Sam 7 Sep 2024 - 17:44 Règle n°8 Prouvez au Bizuteur ce dont vous êtes capable — Poulet grillé, poulet grillé, il va se faire transpercer, OUCH, il va se faire transpercer ! OUCH ! Dans la fesse gauche, dans la fesse droite. C'est chaud, chaud, c'est brûlant. WOOOOH !
... C'était grâce à l'amusement et aux chants que l'on savait que c'était le moment de la brigade récréative.
Les étudiants de première année dansaient à tue-tête, évacuant ainsi la frustration d'avoir été punis par les bizuteurs. Même si ce n'était qu'une punition légère, faire l'exercice de la chaise pendant cinq minutes faisait que leurs jambes étaient toujours engourdies et qu'ils ne pouvaient pas se tenir droit. Rien ne pouvait les empêcher de danser maintenant, avec le tambour au rythme incessant. Ils avaient été entraînés durement, alors ils se déchaînaient jusqu'à ce qu'un des RS leur dise d'arrêter.
— Très bien ! C'est fini pour aujourd'hui ! Si quelqu'un veut s'inscrire pour les Freshy Games, venez au gymnase à sept heures.
La dernière phrase était un rappel pour qu'ils n'oublient pas. Bientôt, un événement important pour tous les étudiants de première année allait commencer, appelé les ‘Freshy Games’, un événement sportif auquel toutes les facultés participaient. Il comprenait des concours de pom-pom girls. Tout le monde s'était entraîné dur pendant tout le mois, spécialement pour cet événement.
Kongpob se prépara à partir avec ses amis. Il était presque dix huit heures et il voulait trouver quelque chose à manger. Mais avant qu'il ne parte, une voix l'arrêta.
— Hé, Kong, attends !
M l'appelait derrière lui. Il s'arrêta et se retourna quand l'autre s'approcha de lui et lui demanda.
— Tu dois aller quelque part ? Je voudrais m'inscrire pour le match de basket. Tu peux venir avec moi ?
Ce n'était pas une surprise que M lui demande. Il était un ancien joueur du lycée. Ils s'entraînaient ensemble après l'école, rejoignant les jeunes étudiants et jouant juste pour le plaisir. Pourtant, on considérait qu'ils avaient un bon niveau d'entraînement puisqu'ils avaient gagné les matchs importants de l'école, comme la Journée des sports. Donc, c'était une évidence pour Kongpob d'acquiescer.
— Très bien. Mais laisse-moi manger d'abord. Tu veux venir ?
La devise de Kongpob était ‘une armée marche sur son estomac’. Le processus de sélection exigeait encore qu'ils montrent leurs astuces. C'est pourquoi ils étaient assis à la cantine pour se ressourcer après avoir été vidés par le bizutage.
Le temps qu'ils finissent de manger, il était un peu plus de sept heures. Ils se dirigèrent tous les deux vers le bureau des candidatures à l'intérieur du gymnase de l'université. En entrant, ils virent que le hall était presque rempli d'étudiants en ingénierie, et pas seulement des étudiants de première année. Des étudiants plus âgés étaient également présents, dont Big Sis Minnie, un gars potelé qui avait un esprit féminin. Dès qu'elle les repéra, elle se précipita pour saluer les garçons.
— Bonjour, Kongpob mon cheri. Ça fait longtemps que je ne t'ai pas vu et tu m'as tellement manqué. Qu'est-ce qui t'amène ici ?
— Bonjour, sis. Mon ami et moi sommes ici pour nous inscrire pour le match.
Il lui fit un wai et une réponse polie mais ses mots firent bondir Minnie.
— Nooooon ! Tu t'inscris pour le match de basket ? Mais on a le concours à gagner ! Tu penses être à la hauteur pour les deux compétitions ?
Ah bon... il avait oublié l'autre compétition pour laquelle il s'était inscrit. Outre les Freshy Games et le Grandstand Display, il y avait encore ce concours du roi et de la reine auquel il fallait participer.
Il avait été choisi comme roi de la faculté d'ingénierie, grâce à Minnie qui avait tiré quelques ficelles pour qu'il soit désigné sans le vote des étudiants de première année. Certains de ses amis avaient découvert qui était le roi élu de leur faculté seulement lorsqu'ils avaient vu l'interview sur le site Internet de l'université. M sembla s'en souvenir tout de suite et il se lança.
— Donc, tu peux passer ton tour. J'avais oublié que tu avais le concours.
Kongpob secoua la tête. Il était déjà là et il ne voulait pas gâcher cette chance. Alors il se tourna pour demander la permission à Minnie.
— Et si je m'inscrivais comme remplaçant ? Est-ce que ça serait bon ?
— Hum. Ce sera très bien si tu es un joueur de remplacement. Tu fais du footing pendant quelques minutes - ça pourrait te permettre de marquer des points. Au fait, tu as préparé le spectacle de talents ?
... C'était une autre chose qu'il avait oubliée. Le concours du Roi et de la Reine n'était pas seulement déterminé par l'apparence mais aussi par les talents. Les concurrents devaient montrer leur talent en cinq minutes sur la scène. Pour Kongpob, il ne savait pas comment gérer cinq minutes ; il ne savait même pas quoi faire sur scène pendant cinq secondes, à part se présenter. Pourtant, en voyant les yeux pétillants et pleins d'espoir sur le visage de Minnie, il dut lui mentir.
— Je ne l'ai pas fait, mais j'ai pensé à quelque chose.
— Tu dois te dépêcher. Si tu ne sais pas quoi montrer, tu peux me demander. Je t'aiderai. Tu n'as pas à avoir peur. Je vais faire de toi le roi, crois-moi !
Big Sis Minnie était tellement convaincante, on aurait dit un mentor de concours de beauté. Kongpob lui lança un sourire timide. Il n'avait pas peur. Il ne se souciait pas d'être nommé roi de l'université ou quoi que ce soit. S'il avait su que ce serait si compliqué, il se serait retiré plus tôt.
— Allons nous inscrire maintenant ou on va louper la date de clôture.
M intervint pour rappeler pourquoi ils étaient venus ici en premier lieu. Kongpob acquiesça et s'éloigna de Minnie, balayant le gymnase du regard à la recherche de la table d'inscription. Ce n'était pas difficile puisqu'une dizaine d'étudiants de première année en encerclaient une où une étudiante plus âgée tenait un papier avec une liste de noms.
Ils étaient sur le point de s'approcher de la table mais avant qu'ils n'y arrivent, une clameur s'éleva derrière eux. Kongpob se retourna et vit l'origine du bruit qui le stupéfia.
Les étudiants en ingénierie de troisième année, tous des hommes, marchaient dans le gymnase. Leurs visages ne montraient aucune émotion, mais l'atmosphère s'était soudainement alourdie au point que les étudiants de première année avaient dû leur céder la place.
Kongpob n'était pas familier avec certains de ces visages - ils devaient venir d'autres départements. Mais l'un d'eux, celui qui marchait droit devant lui, sans prêter attention à personne, était celui qu'il connaissait déjà trop bien.
Il s'agissait d'Arthit, le chef des bizuteur.
Kongpob regarda comment il entraînait la foule des juniors dans le gymnase et alla directement parler au personnel féminin à la table des inscriptions. Puis, le personnel cria à haute voix.
— Très bien, garçons et filles ! Ceux qui veulent s'inscrire aux sports, veuillez venir par ici !
Les élèves de première année auraient pu deviner que la présence des bizuteurs ne pouvait pas être une bonne nouvelle - jamais. Et ils avaient raison.
Lorsque Kongpob et M rejoignirent le groupe de trente étudiants, ils entendirent des insultes murmurées par les seniors.
— C'est tout ce qu'on a ici ?
— Ils ont l'air de mauviettes.
— Je le pense aussi.
Les critiques firent pâlir les étudiants de première année, mais ils s'assirent et attendirent. C'est alors que le chef bizuteur Arthit s'avança vers eux, promenant son regard froid sur les jeunes, et commença à parler durement.
— Nous vous avons appelé à cet endroit non pas parce que nous allons vous aider à vous entraîner ou vous donner des conseils. C'est votre propre responsabilité. Je suis ici aujourd'hui pour vous dire que depuis la naissance des Freshy Games, la faculté d'ingénierie n'a jamais été vaincue par quiconque. Nous avons toujours été numéro un. Alors, que ça ne s'arrête pas à votre promotion.
Tous les étudiants de première année restèrent muets à la fin de son discours. Ils avaient compris que les troisièmes années n'étaient pas venus ici pour leur raconter l'histoire de la victoire de l'ingénierie mais pour leur faire peur. C'était un ordre indirect destiné à leur mettre la pression, leur disant qu'ils devaient gagner même si les Freshy Games étaient censés être un événement amusant, facile à vivre, créé pour unir les étudiants de toutes les facultés. Beaucoup d'entre eux devaient se disputer mentalement quand l'un des étudiants de première année perdit patience et prit la parole.
— Mais les Freshy Games sont là pour nous faire collaborer. Ils veulent que nous connaissions le sens de l'esprit sportif, n'est-ce pas ?
Arthit se tourna vers l'homme. Il vit que Kongpob était toujours assis sur le sol. Il avait pensé que ce devait être le morveux habituel qui avait parlé, envahi par le complexe du héros, mais c'était l'autre étudiant de première année qui était tout près. Il n'avait jamais vu ce type avant. Il devait venir d'un autre département.
Le type qui avait parlé avait l'air d'un vaurien, insolent et suffisant. Prem, son ami du bizutage, se mit en colère et lui lança une réplique.
— Si c'est ça que tu veux, alors rentre à la maison et demande du lait à ta mère !
— Ne parle pas de ma mère !
Le gars offensé qui s'était levé, était furieux, avait l'air d'être prêt à se battre sans se soucier que l'autre soit son aîné. Le troisième année lui cria dessus, en colère.
— Hé, lâche-moi un peu ! Tu te prends pour un dur ? Tu as oublié qui est ton aîné ici ? Ou tu veux que je te frappe ?
— Viens, je t’attends ! Tu crois que j'ai peur de toi ? Être plus âgé ne veut pas dire que je ne peux pas te frapper !
— Qu'est-ce que tu as dit ?!!
L'homme insulté forma des poings avec ses mains et se jeta sur le jeune homme. Arthit dut intervenir. Il tira sur son ami, Prem, et l'arrêta.
— Prem, arrête !
— Tu n'as pas entendu ce qu'il vient de me dire ? Je vais lui arracher les dents et lui donner une leçon !
— Qu’est ce que tu attends ! Tu crois que j'ai peur de toi, putain ! ?
Les jurons le rendirent encore plus furieux. Prem retroussa ses manches, prêt à donner le premier coup de poing. Kongpob, qui était assis non loin de là, se leva d'un bond et prit les bras de son ami, l'empêchant de se jeter dans la bagarre.
— Hé, hé ! Tu dois te calmer !
— Comment je pourrais ? Je lui ai demandé gentiment mais il m’a cassé les couilles !
La dernière partie de la phrase mit encore plus en colère l'homme furieux.
— Va te faire foutre ! Je vais te casser la gueule !!!
L'élève plus âgé recula sa main, prêt à donner un coup de poing, obligeant Arthit qui le retenait à crier à pleins poumons, sa patience à bout.
— ARRÊTEZ ! Arrêtez tous les deux ! BANDE D'ABRUTIS ! Vous n'avez pas honte de vous !?
À la fin de ses mots, tout le monde s'arrêta. Les hommes qui se disputaient semblèrent réaliser à l'instant qu'ils étaient la cible de tous les regards dans le gymnase.
Arthit lâcha son ami, et s'avança pour faire face à l'adversaire et lui poser une question.
— Tu veux savoir pourquoi ? Bien ! Je vais te donner une raison.
Le chef bizuteur se tourna vers tous les autres première année qui étaient sur le sol afin qu'ils puissent entendre cette raison importante.
— Tous les étudiants de première année ont dû penser qu'il s'agissait simplement des Freshy Games, un événement sportif typique. Mais pour nous, c'est une chance de prouver vos capacités si vous appartenez à la faculté d'ingénierie. Plus vous le prenez au sérieux, plus nous pouvons voir que vous reconnaissez l'importance de vos missions. Si vous le prenez à la légère, sans être déterminés à gagner et en abandonnant avant de vous battre, alors vous ne méritez pas une place dans notre faculté !
Arthit ne parlait pas en tant que chef bizuteur. Il parlait en tant qu'étudiant plus âgé de la faculté d'ingénierie.
... En fait, il n'était pas sûr que la faculté d'ingénierie ait été championne des Freshy Games. Quand il était en première année et qu'il s'était inscrit au basket, les bizuteurs lui avaient dit la même chose et lui avaient mis la même pression. Ainsi, sa promotion avait gagné tous les sports. Les troisièmes années qui étaient là maintenant à côté de lui avaient été à l'époque les étudiants de première année dans les équipes sportives.
... C'est pourquoi gagner le jeu était devenu un but, transmis d'une génération à l'autre. C'était aussi une chance pour les élèves ingénieurs de prouver leur esprit, et de préserver la dignité de la faculté ayant le plus grand nombre d'étudiants. S'ils ne parvenaient pas à battre leurs concurrents des autres facultés dont les effectifs étaient moindres, cela serait une honte pour eux tous.
— Nous allons gagner.
Arthit regarda la voix qui l'avait interrompu. Cette fois, il n'était pas surpris : la voix venait de ce connard au complexe du héros.
Kongpob avait lâché son ami et s'était avancé pour se tenir à côté de lui, faisant front au chef bizuteur. Il fixa le regard dédaigneux d'Arthit alors que l'élève le plus âgé le menaçait.
— Ne prends pas tes grands airs ! N'oublie pas que tu parles au nom de tous les élèves de ta classe et que cela signifie que tu prends la responsabilité de tous sur tes épaules !
— Je sais. C'est pour ça que je t'ai dit que nous allons gagner. Nous allons vous prouver que même les étudiants de première année comme nous ont la dignité des élèves ingénieurs. Nous ne laisserons personne nous regarder de haut !
La démarche de Kongpob ne signifiait pas qu'il voulait défier ou manquer de respect aux étudiants plus âgés ; elle provenait d'une confiance visible pour tous. Une fois de plus, ses paroles avaient donné du courage aux autres dans le gymnase, et ce feu était clairement visible dans leurs yeux lorsqu'ils regardaient les juniors autour d'eux.
— Bien. Nous vous surveillerons.
Arthit prononça un dernier mot et se retourna pour faire un signe de tête à ses amis, leur donnant un signal.
Les troisièmes années quittèrent alors le gymnase, ayant fait leur part, suivies d'un grand soupir de soulagement de la part des premières années. Certains des bizuteurs étaient encore furieux, même après avoir quitté le gymnase, et commencèrent à jurer.
— Putain ! Je n'ai pas fait couler le sang de cet enfoiré de première année. T'aurais pas dû m'arrêter.
Prem - le gars bronzé qui parla révélant son héritage du Sud et qui était un étudiant en génie civil - jura bruyamment. Mais Arthit, qui marchait avec lui, lui lança un regard ennuyé alors qu'il commençait à parler.
— Tu as perdu la tête ? Si tu avais commencé la bagarre, il y aurait eu une centaine de témoins oculaires. Quelqu'un l'aurait signalé aux professeurs.
— Eh bien... tu as raison. Et ce beau gosse était de ton département ? Il était sacrément curieux.
Son ami avait changé de sujet, voyant l'attitude de Kongpob. Il fit un hochement de tête sec.
— Oui, il est comme ça. Je suis fatigué de le punir.
Il avait donné un avertissement au type pour lui dire qu'il fallait qu'il arrête de jouer au héros, au sauveur. Mais cette fois il comprenait pourquoi ce gars avait fait ce qu'il avait fait. Les choses étaient devenues incontrôlables et si Kongpob n'était pas intervenu, la situation entre les étudiants de première année et les bizuteurs aurait probablement dégénéré, surtout avec une tête brûlée et une grande gueule comme son ami.
— Bâtard arrogant. Il pense qu'il va y arriver.
Arthit se stoppa dans son élan en entendant la raillerie de son ami. Prem devait être énervé par l'élève de première année désobéissant qu'il s'apprêtait à affronter et donc il pensait qu'ils étaient tous pareils.
Arthit savait bien que c'était différent quand il s'agissait de Kongpob.
— ... Ne le sous-estime pas.
Le murmure d'Arthit provenant de derrière fit se retourner l'autre homme, qui ne l'entendait pas bien.
— "Qu'est-ce que tu as dit ?
— Rien.
Arthit répondit par la négative et s'éloigna comme si rien ne s'était passé. Mais son esprit revenait sans cesse à la même pensée, encore et encore. L'idée le dérangeait, un élève de première année... parce qu'au fond, il savait qu'il y croyait.
Que Kongpob gagnerait. | | Messages : 87
Date d'inscription : 01/07/2024
| amelyma Sam 7 Sep 2024 - 17:45 Règle n°9 Tenez la parole que vous avez donnée au bizuteur — Hey, Kongpob, Kongpob ! Qu'est-ce que tu regardes comme ça ! ? Je ne cesse de t'appeler et tu ne réponds pas !
La voix de M sortit de sa rêverie l'homme distrait qui ramena son regard vers le terrain de basket où un match était sur le point de commencer. Son esprit n’était pas concentré pas sur les rencontres des Freshy Games car il attendait quelqu'un.
... Quelqu'un qui a ramené son esprit au point de départ.
Le jour précédent..
FWEEEET!!
Le sifflet indiqua un arrêt de jeu, signifiant que le match de basket-ball entre la Faculté d'ingénierie et la Faculté d'éducation était terminé. Une forte acclamation éclata dans le public au bord du terrain, rejointe par celle des joueurs triomphants.
— ON A GAGNÉ ! !! Maintenant on va en finale !! WOOOHOOO !
Kongpob entendit le cri de M, un grand sourire sur son visage, alors qu'il courait vers les places réservées pour lui taper dans la main. Kongpob lui rendit son geste avec lassitude, à l'opposé de ce qui se passait dans le gymnase. Son ami le remarqua et fronça les sourcils.
— Qu'est-ce qui ne va pas chez toi, Kong ? Pourquoi cette mine renfrognée ? On vient de gagner le match ! Fais au moins semblant d’être heureux, mec !
— Rien... C'est juste que je ne vois pas de troisième année ici.
Kongpob haussa les épaules, laissant échapper ce qui le préoccupait.
Ce n'était pas seulement aujourd'hui. Depuis le début des Freshy Games, la veille, il n'avait vu que des étudiants de première et de deuxième années aux matchs. Les années supérieures de la faculté d'ingénierie n'avaient même pas pris la peine de participer, contrairement aux autres facultés. C'était eux qui avaient insisté pour que les étudiants de première année gagnent tous les matchs comme autrefois.
— Je suppose qu'ils ont peur de perdre la face. Ils nous ont fait craindre de perdre, non ? Et maintenant qu'on a réussi, tout ce qu'ils nous ont donné étaient des menaces en l'air. Je vais vous montrer de quoi nous sommes capables. Je vais leur planter les trophées dans leurs putains d'yeux pour qu'ils deviennent aveugles ! Sales bâtards ! Ils n'ont aucune idée de ce à quoi ils s'attaquent !
Le type qui avait craché ces mots alors qu'il essuyait la sueur sur son front était 'Wad' - le type qui avait du sang chinois et de grands yeux à une seule paupière. C'était le nouvel ami de Kongpob qui avait tenu tête au troisième année dans le gymnase.
Kongpob n'avait fait sa connaissance que lorsqu'il avait rejoint l'équipe de basket et qu'ils s'étaient entraînés ensemble. Il avait appris que Wad était du Département de Chimie et qu'il était un fervent activiste contre le système SOTUS. Il participait rarement aux activités de bizutage et n'avait rejoint le match que parce qu'il aimait le basket.
Il était si bon qu'il avait été désigné capitaine de l'équipe. Le seul bémol de ce type était sa tête brûlée qui le faisait exploser et se dresser contre les bizuteurs. Il s'était mis en tête de remporter la victoire et de sauver leur dignité. C'était devenu une force motrice qui le conduisait, lui et ses coéquipiers, vers la finale.
— Allons nous reposer. On a la finale demain. On emmerde les troisièmes et les quatrièmes années. Tout ira bien même s'ils ne viennent pas voir le match. Une fois qu'on aura gagné, ils en entendront parler de toute façon. Arrête de les chercher.
M frappa l'épaule de Kongpob alors qu'il sortait du terrain, et Kongpob dut se lever et le suivre avec les autres élèves. Pourtant, il ne put s'empêcher de jeter un coup d'œil vers la tribune du côté des ingénieurs. Il ne vit que les étudiants de première année qui chantaient et remplissaient les places. Certains partaient pour voir les autres jeux.
Chaque année, les Freshy Games se déroulent pendant trois jours. Les étudiants de première année se rendent dans différents lieux pour soutenir les différents sports - football, volley-ball, tennis de table et badminton - où seuls les vainqueurs pouvent passer au tour suivant. D'après ce qu'il avait compris, la faculté d'ingénierie n'avait jamais été battue dans aucun de ces sports. Cela signifiait que la menace de la part des seniors avait fonctionné - une source de motivation qui maintenait les étudiants de première année dans un esprit combatif.
Même si Kongpob n'était qu'un remplaçant, il s'était entraîné dur toute la semaine. C'était lui qui avait dit aux bizuteurs que les premières années allaient prouver leur valeur. C'était donc son devoir de travailler du mieux qu'il pouvait, dans l'espoir que les seniors reconnaissent enfin le potentiel des nouveaux. Mais voilà, même s'ils étaient arrivés en finale, les seniors n'étaient pas présents au match.
... Et cela incluait cet homme.
Il ne savait pas pourquoi ses yeux erraient souvent et cherchaient cette personne. Il savait que les chances que l'autre homme se montre étaient minces, mais il espérait toujours voir ces yeux perçants. Lorsqu'il s'était rendu compte que ses yeux s'étaient trop longtemps détachés du jeu, il avait dû les ramener et se focaliser sur le match, se maudissant lui-même.
... Il avait dû perdre la tête... Foutu Kongpob !
Le gars qui se battait avec lui-même secoua la tête pour dissiper cette distraction, se disant qu'il avait besoin de dormir pour que son corps se repose et soit prêt pour la finale à venir.
Il avait donc dit bonne nuit à ses amis et avait enfourché sa moto pour retourner à son dortoir à presque 20 heures, avant que les événements sportifs ne se terminent pour la journée. Mais avant d'arriver, il avait fait un détour et s'était rendu au stand de nourriture près de chez lui. Il avait mangé avant le match mais tout avait été digéré et dépensé. Il était donc ici, à la recherche de quelque chose de léger à manger. Il s'était arrêté au stand de brochettes de porc grillé où un vendeur faisait griller la viande parfumée.
— Dix brochettes de porc et un sachet de riz gluant, s'il vous plaît.
— Vous pouvez attendre un moment ? Le porc est presque cuit, avait dit le vendeur en retournant le porc et en le faisant griller de l'autre côté.
Il n'avait pas remarqué que le seul porc restant était celui qui grillait. Il n'avait pas envie de chercher autre chose et il était là de toute façon. Donc ça ne le tuerait pas d'attendre.
— Ok.
Il hocha la tête et attendit. Enfonçant sa main dans les poches, Kongpob alla chercher de l'argent et le compta pour payer tout en calculant le prix. Une voix s'éleva dans son dos.
— Dix brochettes de porc et un sachet de riz gluant, s'il vous plaît.
— Vous pouvez attendre un moment ? Le porc est presque cuit.
C'était la même phrase, exactement la même. Kongpob leva les yeux de son portefeuille et se tourna vers l'homme qui se dirigeait vers l'étalage de nourriture et répondait joyeusement au vendeur.
— Okkkkkiii doki.
La phrase fut coupée court lorsque le chef bizuteur remarqua le gars qui était là avant lui. Il retira rapidement de sa bouche le verre de lait rose qu'il buvait avec enthousiasme et le mit derrière son dos, le dissimulant. Son expression passa de sympathique à sombre lorsque Kongpob leva la main pour faire un wai.
— Sawaddee krub, P'Arthit.
— Uhuh.
Arthit répondit sèchement, sans se soucier du salut de l'autre. Il ignora Kongpob comme si un interrupteur avait été actionné et que l'ambiance était soudainement passée de décontractée à tendue. C'était sinistre et Kongpob dut engager la conversation.
— Nous sommes en finale maintenant avec le basket. J'ai entendu dire que nous sommes en finale pour tous les sports.
— Pourquoi tu me le dis ?
Kongpob fut surpris par la réponse de l'homme qu'il cherchait sur le terrain de basket. Il ne l'avait pas trouvé là-bas, mais là, ils s'étaient croisés au stand de porc grillé. Il rassembla son courage.
— Je ne t'ai pas vu au match alors j'ai pensé que tu ne savais pas.
— Ne t'embête pas à me dire que tu es arrivé en finale. Je m'en fous à moins que tu ne GAGNE !
Les mots étaient froids, tranchants et blessants, ce qu'on pouvait attendre d'un bizuteur. Il savait maintenant pourquoi les troisièmes années ne s'étaient pas montrés aux matchs. Ça n'avait pas d'importance pour eux, sauf si les premières années étaient champions.
— Ne t'inquiète pas. On va gagner.
Si suffisant, et ces mots sonnèrent comme la réplique ringarde d'un film. Les lèvres d'Arthit se crispèrent, agacé.
... Ouais, c'est ça, vas-y, tu es un héros, un gars parfait pour ces étudiants de première année.
Arthit se demandait si le jeune homme avait déjà entendu le dicton "personne n'est parfait". Personne dans ce monde ne peut gagner en tout et dans toutes les situations. Tout le monde a une faiblesse. Sinon, il n'y aurait pas le mot " perdant " dans le dictionnaire.
— Tu penses que tu peux le faire ? J'ai entendu dire que tu t'étais aussi inscrit au concours de la Lune et de l'Etoile.
La question semblait assez simple mais Kongpob avait commencé à comprendre. Il s'était rendu compte que derrière la question se cachait quelque chose. Son intuition était bonne - l'autre homme n'attendit même pas sa réponse et poursuivit sa phrase avec une lueur moqueuse dans les yeux.
— Tu te souviens quand j'ai dit que la Faculté d'Ingénierie n'a jamais été vaincue ? Si tu veux que je t'accepte, tu dois gagner tous les concours.
... Tous les concours comprenaient le concours de la Lune et de l'Etoile, interpréta Kongpob.
Ne sous-estimez pas le concours de la Lune et de l'Etoile. Les élus n'étaient pas jugés sur leur apparence mais aussi sur leurs autres compétences et talents. Il y a eu des gagnants de toutes les facultés et le trophée n'est pas resté dans une seule faculté.
Cette compétition est censée être un concours amusant et haut en couleur, en plus des Freshy Games, et les prix ne sont pas très élevés. Leurs tâches par la suite ne sont pas aussi importantes que celles de Miss Univers, mais c'est quand même considéré comme une preuve de dignité de la faculté qui gagne. C'est pourquoi Big Sis Minnie avait tiré les ficelles pour qu'il devienne candidat sans être choisi par les étudiants de première année..
Plus important encore, Kongpob n'avait pas voulu le faire en premier lieu. Être le numéro un parmi les dizaines de facultés avait peu de chances de se réaliser. Par conséquent, le défi des bizuteurs était presque irréalisable.
Arthit fixa triomphalement l'expression inquiète de Kongpob, qui devint stupéfait.
Il savait que le jeune homme perdrait de toute façon. C'était un garçon de bonne famille et il n'avait aucun talent particulier. Tout ce qu'il savait faire, c'était agir comme un héros. Une fois qu'il serait vaincu, Arthit le punirait devant tous les élèves de sa classe. Même s'il gagnait tous les matchs, à part le concours de la Lune et de l'Etoile, ce serait toujours considéré comme une promesse non tenue.
Tout le fardeau de la classe était sur ses épaules... pas étonnant qu'il ait pris un air sombre, ne sachant pas quoi dire, jusqu'à ce que le vendeur de porc grillé prenne la parole.
— Voilà !
Le sac de porc grillé et de riz gluant fut placé devant lui. Arthit le prit et paya, se retournant pour s'éloigner aussi gracieusement qu'il le put.
C'était lui qui était le véritable héros ! Peu importe à quel point le gars s'était cru cool, celui qui avait le dernier mot serait toujours celui qui aurait le dessus-Arthit gloussa mentalement.
Le "vrai héros" souleva le gobelet de lait rose qui se trouvait dans son dos pour le boire, célébrant ainsi sa victoire. Mais quelques pas plus tard, une voix surgit derrière lui et le stoppa net dans son élan.
— Et si je gagne tout ? Qu'est-ce que tu me donneras ?
Il faillit recracher son lait rose. Arthit toussa bruyamment, se retourna et interrogea l'autre homme avec un visage incrédule, se demandant s'il avait bien entendu.
— Quoi ? ! Qu'est-ce que tu veux dire ? Pourquoi je te donnerais quelque chose ?
L'autre homme laissa échapper un long soupir, sa démarche et son ton se transformant en une attitude plus détendue.
— Appelons cela un pari. Si je perds, je ferai ce que tu demandes. Mais si je gagne, alors tu devras faire tout ce que je te demande.
Ce fut au tour d'Arthit d'être stupéfait en entendant ces mots et réalisant qu'il était défié ; sa colère s'enflamma.
Le jeune homme l'avait provoqué une fois de plus !
— Kongpob ! Comment oses-tu faire un pari avec moi ! ?
Le chef des bizuteurs cria, furieux. Mais l'autre homme qui était réprimandé ne fit qu'un léger sourire, pas du tout intimidé. Il commença à s'expliquer.
— Je ne négocie pas. Je fais juste une offre. Tu peux la prendre ou la laisser. Je suis désavantagé ici... à moins que tu aies peur que je gagne.
La première partie n'était rien mais la dernière partie le frappa en plein dans les tripes, le mettant encore plus en rogne.
… Le gars avait l'air stupéfait mais en fait, il était comme de l'eau qui dort. Pas une eau ordinaire, mais une eau usée mélodramatique ! C'est pour cela qu'il était défiant, ne craignant pas son autorité. Bien ! Si le garçon osait le défier, il l'accepterait. Il lui donnerait une leçon et lui apprendrait qu'un homme comme Arthit était un véritable homme, qui ne craignait rien ni personne !
— Très bien. J'accepte ton offre car je sais qu'un homme comme toi ne peut que perdre.
Le chef des bizuteurs accepta l'accord mais n'oublia pas de proférer une insulte et un avertissement au jeune homme. L'expression de Kongpob était restée calme. Il a alors invité le troisième année en remuant le couteau dans la plaie.
— Ok, demain viens voir le match pour que tu puisses voir de tes propres yeux que je gagne s'il te plaît.
— Espèce de fils de... !
Arthit ne trouva pas les mots justes pour maudire l'homme en face de lui, alors il se contenta de faire demi-tour et de s'éloigner en piétinant, exaspéré. Les yeux de Kongpob le suivirent, aspirant à une réponse qu'il ne reçut jamais.
... Il ne voulait pas mettre Arthit en colère avec ce défi, mais il s'était emporté. Il voulait se mettre dans la peau de l'autre, pour voir à quel point le bizuteur en chef était coincé. Il souhaitait seulement que les étudiants de troisième année voient les matchs, pas seulement le basket, mais aussi les autres matchs. Pour qu'ils réalisent à quel point les étudiants de première année étaient dévoués à la victoire.
Quant à l'accord - celui qui perdait devait faire tout ce que le gagnant demandait... c'était juste un bonus. C'était juste pour s'amuser puisqu'il voulait prendre le jeu au sérieux et gagner. C'était risqué, il le savait. Mais une fois qu'il avait mis un pied dedans, il devait tout donner, quoi qu'il arrive.
Le jour suivant...
— Hé, Kongpob ! Kongpob ! La Terre appelle Kongpob ! Concentre-toi, mec ! On est sur le point de commencer le match.
La voix de M le sortit de sa rêverie. Il était maintenant à la finale de basket-ball, et il n'était plus remplaçant - étant sur le terrain pour la première mi-temps afin de pouvoir garder son énergie lors de la seconde mi-temps pour le concours de la Lune et de l'Etoile. Mais son esprit n'était pas du tout focalisé sur le jeu alors que ses yeux erraient parmi le public dans la tribune, voyant que l'homme qu'il cherchait n'était pas là.
Donc ... Arthit n'était pas venu au match, après tout.
Il aurait dû le savoir. Qu'espérait-il ? Quelqu'un comme le chef bizuteur Arthit n'aurait pas pris le temps de venir voir les nouveaux à moins qu'ils ne gagnent. Il avait espéré, cependant, que son défi pour mettre l'homme en colère aurait fonctionné. Mais ce qu'il voyait maintenant, c'était le vide.
Son plan avait dû échouer...
Il décida de ne plus attendre et se dirigea vers ses amis pour les encourager avant le début du match, pour leur apporter un soutien moral. Mais avant qu'ils ne puissent le faire, un cri d'encouragement retentit de l'autre côté de la tribune où se trouvaient les étudiants en ingénierie. Le capitaine leva les yeux et demanda.
— Qu'est-ce qui se passe ?
Une voix incita tous les membres de l'équipe de basket à se retourner et à regarder. Ils virent la cause de ces cris marcher dans un grand groupe - avec les étudiants de troisième et quatrième année de la faculté d'ingénierie. Presque vingt au total. Ils se dirigèrent directement vers le terrain et se placèrent au bord, ne prêtant attention à personne autour d'eux, comme si ces places leur revenaient de droit. Pourtant, d'après leur allure, on aurait plutôt dit qu'ils étaient là pour mettre les étudiants de première année sous pression.
— Oh bien, je pensais qu'ils ne seraient pas là. Très bien, alors maintenant on peut leur montrer qu'on va gagner !
Kongpob entendit la déclaration vengeresse de Wad alors qu'il regardait son ennemi juré de troisième année qui se tenait à côté du gars que Kongpob avait cherché. Puis, le capitaine appela tout le monde à se rassembler et à faire un autre hourra retentissant - un qui devait être plus fort que le précédent pour faire grimper le moral des joueurs.
— Ingénieurs, battez-vous ! Allez, allez les Ingénieurs ! C'est parti !!!
Les applaudissements ainsi que les tambours retentirent pour les encourager, signalant que le match avait enfin commencé. Les joueurs de la faculté d'ingénierie entrèrent sur le terrain avec ceux de la faculté des sciences. Ils étaient les meilleurs concurrents des Freshy Games ; leurs scores étaient presque à égalité alors qu'ils se relayaient pour gagner, jusqu'à ce que le coup de sifflet mette fin à la partie.
Fweeeeeeeeeeeeet !
Tous les regards se tournèrent vers le tableau d'affichage. C'était clair pour tous : la Faculté d'Ingénierie avait gagné avec un score de 83-76.
— WOOO ! Putain, on l'a fait ! On a gagné !!!!!!!!!!
Kongpob regarda le bras de M qui se tendait pour frapper le sien. Il n'avait pas eu besoin d'attendre que son ami vienne le rejoindre sur le banc de remplacement car il avait couru sur le terrain, sautant et criant. Son enthousiasme ne s'arrêta pas là car il entendit le personnel masculin de la tribune des pom-pom girls crier.
— Hé, les gars, dernières nouvelles ! Le match de football là-bas... on a gagné grâce à un penalty !
Un cri éclata sur le terrain alors que la foule joyeuse sautait en l'air. Aujourd'hui, il y avait deux finales : le basket et le football. La faculté d'ingénierie avait également remporté d'autres trophées lors de la soirée précédente. Ainsi, ils étaient maintenant champions dans toutes les catégories et avaient enfin prouvé leur valeur en tant que nouveaux étudiants de la faculté d'ingénierie.
Kongpob jeta un coup d'œil vers les troisièmes années, jaugeant leurs réactions. Certains d'entre eux montraient leur joie mais la plupart restaient stoïques, surtout les bizuteurs qu'il connaissait bien. Leurs visages restaient neutres, sans expression et sans émotion. Il aurait pu les observer davantage si Big Sis Minnie n'avait pas parlé de sa douce voix virile en entrant sur le terrain.
— Kongpob, chéri ! Où es-tu, Kongpob !? Oh, tu es là. Viens avec moi dans la loge. Tu as encore le concours de la Lune à gagner.
Minnie l'entraîna hors du terrain, sans attendre son consentement, et ils passèrent devant les étudiants de troisième année. Cela lui donna l'occasion de se rapprocher de quelqu'un.
— N'oublie pas de venir me voir à mon prochain concours.
Kongpob chuchota le rappel à l'intention du chef bizuteur avant d'être entraîné tandis qu'Arthit leva les yeux et croisa son regard pendant un bref instant. C'était suffisant pour lui, car il avait compris pourquoi il avait cherché quelqu'un dans la tribune pendant tout le match.
Et maintenant il réalisait pourquoi il avait une envie et une motivation de gagner.
... c'était parce qu'il avait voulu quelque chose de ce quelqu'un en particulier - quelque chose de si simple mais à laquelle il tenait.
Le "soutien moral", c'est comme ça que ça s'appelait. | | Messages : 553
Date d'inscription : 13/07/2024
| Johanne Sam 7 Sep 2024 - 17:46 Règle n°10 Pas de Secret avec le Bizuteur La scène était prête… les lumières étaient allumées. Mais l'homme n'était pas prêt.
— Bonsoir ! C'est le moment que tout le monde attend ! Le concours de la Lune et de l'Etoile de l'université va commencer maintenant !
Kongpop entendit les deux présentateurs travestis prendre la parole sur la scène extérieure du concours, suivis d'un cri tonitruant. Pas besoin de regarder pour voir combien de personnes étaient là. Après le concours, il y aurait des concerts de groupes célèbres, signifiant la cérémonie de clôture des Freshy Games, également connue sous le nom de "Freshy Night".
Les étudiants, non seulement les première année mais aussi les autres seniors, étaient là pour s'amuser et voir si leurs juniors allaient gagner le concours. Tous les élèves étaient à l'affût, attendant avec enthousiasme et excitation.
… Contrairement à ce que Kongpob ressentait derrière la scène.
Pour être honnête, il n'était pas sûr de pouvoir gagner. Gagner la couronne de la Lune n'était pas aussi facile qu'une épreuve sportive basée sur le travail d'équipe, malgré la performance qu'il devait faire avec l'Etoile de la même faculté que lui. Le résultat dépendait de l'individu et c'était lui qui se battait pour lui-même. De plus, il avait donné sa parole à quelqu'un qu'il allait certainement gagner.
Il n'avait personne d'autre à blâmer. Les choses avaient dérapé parce qu'il avait été trop grossier. S'il perdait, cet homme serait sur son dos comme un vautour. Le chef bizuteur aurait une grande satisfaction à vaincre son ennemi juré et aurait une autre excuse pour punir ses camarades de première année. Ça ne le dérangeait pas d'être puni si ce n'était que lui. Mais porter le poids de la responsabilité pour toute la classe, c'était lourd.
… Avait-il fait le bon choix en provoquant l'autre homme... juste parce qu'il avait voulu se mettre dans la peau d'Arthit ?
Kongpop laissa échapper un lourd soupir avec une expression tendue. Cela devait être si évident que P'Minnie, qui s'occupait de son look, prit la parole.
— Tu es nerveux, chéri ? Tu as l'air si sérieux. Non, non, ça ne va pas. Tu dois sourire. Si tu ne peux pas, pense aux récompenses. J'ai entendu dire que nous avons un tas de sponsors cette année. Si tu gagnes, tu vas être tellement riche.
… Si tu gagnes ? … c'est ça. S'il gagnait, l'autre homme devrait faire tout ce qu'on lui demanderait. Bien que Kongpob n'ait toujours pas trouvé quoi demander, pour l'instant, le simple fait de penser à l'expression frustrée du chef bizuteur lui fit lever les lèvres en un mince sourire. Cela, aussi, n'échappa pas aux yeux de P'Minnie.
— Eh bien, tu as entendu parler des récompenses et maintenant tu souris. Tu es du genre économe, mon garçon. Mais ce sourire était très bien. Il est charmant.
— Ingénierie, vous êtes prêts ?! Tenez-vous prêts.
La voix du personnel, derrière la scène, les appela pour qu'ils se préparent. P'Minnie le précipita sur scène, en poussant son dos, ainsi que Praepailin, la candidate Etoile de la faculté d'ingénierie, leur donnant des encouragements.
— Allons-y, Lune et Etoile !
Les lumières s'assombrirent alors que le spectacle était sur le point de commencer. Kongpob jeta un coup d'œil au public en dessous - il était difficile de dire qui était qui, mais il savait que cette personne serait là. Il prit une profonde inspiration, se concentrant sur ce qu'il avait à faire.
Le spectacle était sur le point de commencer…
— Tu ne te soucies jamais de ce genre de choses. Pourquoi tu me traînes ici ?
Arthit entendit Prem demander alors qu'il était sur le point de manger les boulettes de viande rôties qu'il venait d'acheter. Ils se tenaient à bonne distance de la scène et de la tribune d'encouragement où se trouvaient les première année. Les gens étaient peu nombreux là où ils étaient, puisque les première année s'étaient attroupées près de la scène, désireux de voir la performance des concurrents. Mais le bizuteur en chef ne prenait même pas la peine de regarder et il en expliqua la raison à son ami.
— Je voulais juste voir le concert après le concours.
— Ouais ? Tu es là pour le concert ? Pourquoi tu m'as appelé à dix-huit heures, bordel ?
La plainte de son pote fit presque s'étrangler Arthit. Il avait terminé son cours à presque dix-huit heures, et en sortant du bâtiment, il avait appelé Prem pour qu'il vienne regarder le match de basket avec lui. Il n'avait même pas changé sa chemise d'atelier et n'avait rien mangé. C'est pourquoi il mangeait les boulettes de viande maintenant. Il ne pouvait pas laisser Prem se moquer de lui, car lui aussi avait été pénible.
— Tu voulais les voir aussi, admets-le. Je t'ai appelé mais tu as emmené Non et d'autres gars.
En entendant la réplique, ce fut au tour de Prem de se sentir mal à l'aise et de se taire. Il arracha un bâtonnet de boulette de viande à Arthit pour le manger, distrayant le gars de son embarras et trouvant une parade.
— J'ai amené les gars pour intimider les nouveaux ! Quand ils verront notre numéro, ils vont être sous pression et ils vont perdre. Qui aurait pensé qu'ils pouvaient gagner ? C'est embarrassant. Si ce voyou gagne encore, je suis foutu !
— Huh, il n'y a aucune chance qu'il gagne… affirma Arthit en souriant de manière suffisante.
… Gagner les jeux sportifs était une chose, mais gagner le concours de la Lune et de l'Etoile était difficile. Quel talent avait quelqu'un comme Kongpob ? Il avait l'air si casanier, aussi. Il ne gagnerait pas et pourtant le type osait le défier. Si le crétin perdait, il lui ordonnerait de faire quelque chose d'embarrassant devant tout le campus pour qu'il soit humilié jusqu'à ce que ses enfants grandissent ! Attends de voir, 0062 !
— A suivre… les concurrents de la faculté d'ingénierie !!!
Le son provenant de la scène attira l'attention d'Arthit et il se tourna pour regarder. L'obscurité de la scène rendait impossible de voir les choses clairement. De leur place au fond, les gens semblaient aussi petits que des fourmis. Il devait regarder l'événement sur l'écran du projecteur, mais il entendit quand même des cris et des applaudissements bruyants, avant que la lumière stroboscopique ne brille lentement sur la scène, révélant le candidat Lune de la faculté d'ingénierie.
Kongpob était simplement vêtu d'une chemise claire et d'un jean foncé. Il avait l'air ordinaire par rapport aux autres candidats, qui portaient des costumes flamboyants et magnifiques, comme les danseurs d'un groupe de musique country. Praepailin portait une robe, et avait l'air douce avec sa couronne de fleurs.
— Bonsoir. Nous sommes des représentants de la faculté d'ingénierie. Nous allons chanter pour vous aujourd'hui. Si quelqu'un sait chanter, veuillez vous joindre à nous et chanter avec nous.
Oh mon… un spectacle de chant. Quel salaud de base.
Arthit sourit d'un air moqueur, retirant son attention de la scène, ayant l'intention de manger une autre boulette de viande rôtie et attendant d'entendre la musique.
— Konna koto i na , dekitara il na, anna yume konna yume ippai aru kedo…
Les boulettes de viande faillirent glisser de ses mains. Il leva rapidement les yeux et regarda la chanteuse avec incrédulité. C'était l'air familier qu'il écoutait depuis qu'il était enfant, celui d'une émission diffusée sur Channel Nine Comics tous les matins du week-end : La chanson thème de Doraemon.
“... minna minna minna kanaete kureru
fushigina POKKE de kanaete kureru
sora wo jiyuu ni tobitai na
(hai ! takekoputaa !)
AN AN AN, tottemo daisuki, DORAE—MON.”
Kongpob et Praepailin chantèrent des couplets en alternance, mais cela fit ricaner le public qui chanta avec eux. Le rythme s'accéléra ensuite. Alors que l'intro commençait, certaines personnes commencèrent à applaudir en entendant les paroles anglaises bien connues.
"Young man, there's no need to feel down.
I said, young man, pick yourself off the ground.
I said, young man, 'cause you're in a new town
There's no need to be unhappy.
It's fun to stay at the Y-M-C-A. It's fun to stay at the Y-M-C-A
They have everything for you men to enjoy, you
can hang out with all the boys…
It's fun to stay at the Y-M-C-A. It's fun to stay at the Y-M-C-A.
You can get yourself cleaned, you can have a
good meal, you can do whatever you feel…"
Les deux étudiants de première année sur scène chantaient en faisant les gestes du Y M C A avec leurs mains. Le public en bas dansait de joie tandis qu'Arthit regardait, stupéfait.
En fait, les voix de Kongpob et Praepailin étaient moyennes mais ils savaient comment divertir la foule puisque tous les yeux étaient rivés sur eux. Ils réussirent à entraîner tout le monde dans leur courte performance.
La musique se termina et les lumières se tamisèrent. Il vit un personnel traîner une chaise et apporter une guitare acoustique au milieu de la scène alors que Kongpob commençait à expliquer.
— Vous êtes déjà fatigués ? Nous allons écouter une ballade comme dernière chanson. Si vous avez encore de la voix, vous pouvez chanter avec moi.
Au début, il pensait que Kongpop prendrait la guitare du staff, mais il la remit à Praepailin qui s'assit et commença à accorder les cordes. Il était d'autant plus déconcerté que c'était un homme qui jouait de la guitare et faisait pleurer les filles. Ce nouvel arrangement attira un autre cri du public, fasciné par la performance. Puis, Kongpob commença à chanter de sa voix douce et profonde la mélodie.
Et c'était une chanson qui fit écouter Arthit…
“Je te regarde depuis trop longtemps.
Je n'ai pas toujours le courage de te regarder.
J'ai peur qu'un jour tu découvres ce que je cache… Un secret bien enfoui, un secret jamais révélé… J'ai peur de ne plus pouvoir le retenir.
Plus je me rapproche, plus j'ai envie de m'ouvrir.
Quand nos yeux se rencontrent, c'est trop dur de garder mon amour caché à l'intérieur.
Et le secret de ton cœur… est-ce que j'y suis aussi ?
S'il te plaît, dis-moi le secret de ton cœur.
Je ne peux pas m'arrêter de penser à tes mots, comme si mon esprit tournait en rond.
A cause de toi… Tu es si doux. Le mot "Je t'aime", combien de temps dois-je le garder à l'intérieur ?
Un secret que j'ai caché. Je ne l'ai jamais dit à personne et je ne peux pas attendre.
Plus je me rapproche, plus j'ai envie de m'ouvrir.
Quand nos yeux se rencontrent, c'est trop dur de garder mon amour caché à l'intérieur.
Et le secret de ton cœur… est-ce que j'y suis aussi ?
S'il te plaît, dis-moi le secret de ton cœur."
La note finale se termina par des applaudissements, signifiant que la belle performance de la faculté d'ingénierie était terminée. Les maîtres de cérémonie se levèrent pour faire une remarque finale.
— C'était la performance de la Faculté d'Ingénierie. Je pense que beaucoup d'entre vous ont apprécié. Mais laissez-moi faire une brève interview sur les raisons pour lesquelles vous avez choisi ces trois chansons.
— J'ai choisi ces chansons parce qu'elles représentent notre âge. La première chanson parle de notre enfance. La deuxième chanson parlait de notre deuxième étape de vie en tant qu'adultes. La troisième chanson parlait du moment où nous sommes assez vieux pour tomber amoureux.
La réponse de Kongpop, en particulier la dernière phrase, sentimentale et mélodramatique, suscita un autre cri, de la part des filles.
… Mais la réalité était tout autre. Ils avaient choisi ces chansons parce que Praepailin ne savait jouer que cette chanson depuis l'époque où elle s'était entraînée pour les examens au lycée. Pour les autres chansons, il avait choisi celles que tout le monde connaissait et pouvait chanter.
Après les avoir proposées à P'Minnie, elle lui avait donné son accord, pensant que c'était inhabituel et que peu de gens auraient choisi la même chose. Ils voulaient que la performance soit un peu voyante mais attrayante pour le public. Il s'était entraîné à ne pas chanter faux et s'était concentré sur la création d'une atmosphère amusante, tout comme P'Minnie l'avait demandé. Il pensait donc qu'ils s'en étaient bien sortis et avaient obtenu une meilleure réponse que ce à quoi ils s'attendaient.
Même Arthit, qui se tenait loin, pouvait sentir l'excitation du public après la fin du spectacle. Même Prem prit la parole, tout aussi enthousiaste.
— Ils vont passer au prochain tour.
Les sourcils d'Arthit s'agitèrent, il perdit son appétit. Il tendit le sac de boulettes de viande à son ami, toujours pas convaincu.
— Juste le prochain tour. Il doit encore répondre à la question.
Même s'il avait insulté l'homme, Arthit ne pouvait s'empêcher d'être secoué.
Il avait oublié que Kongpob était un survivant sournois. C'était dans sa nature. Sinon, le morveux n'aurait pas eu le courage de s'opposer à lui pendant le bizutage. Et c'était une qualité unique et un charme qui attirait les gens à le suivre, sans parler de ses camarades de première année. Les juges allaient probablement être attirés, eux aussi.
Bien sûr, comme prévu, Kongpop et Praepailin se qualifièrent pour la finale avec les cinq autres concurrents, en ayant les meilleurs scores.
Les deux se changèrent avec leur uniforme universitaire formel, et se tinrent sur la scène, prêts pour les questions qui seraient choisies au hasard.
— Ensuite, Kongpop, le représentant de la faculté d'ingénierie industrielle, s'il vous plaît, approche !
Kongpop alla chercher un morceau de papier dans la boîte. Il obtint le numéro 7 et le passa au présentateur, qui tenait une enveloppe de questions comme dans un concours de beauté.
— Très bien… voici la question pour toi, Kongpop.
Kongpop fit une pause, laissant la musique monter pour exciter le public. Ils retenaient leur souffle alors que le maître de cérémonie posait la question.
— Que penses-tu du système SOTUS et du bizutage ? Penses-tu qu'il devrait être annulé ? Et pourquoi ?
Tout le monde fut stupéfait par cette question difficile. Elle abordait de nombreux problèmes car SOTUS était une tradition scandaleuse et la réponse pouvait être délicate. Kongpop était issu de l'ingénierie qui tenait encore le système SOTUS en haute estime, il était donc encore plus difficile de répondre. Il savait que de nombreuses personnes étaient d'accord avec le système SOTUS, mais que beaucoup d'autres s'y opposaient fermement, tout comme lui l'avait fait avant de rejoindre le campus. C'était une question piège. Si vous la manquiez, ce serait une mission suicide.
Kongpop passa tranquillement en revue ses pensées, confus. Il donna finalement la réponse qui était la plus vraie pour son cœur.
— Je pense que chaque système dans le monde a ses avantages et ses inconvénients, et c'est ainsi que nous l'avons mis en œuvre. Le système SOTUS lui-même a ses avantages : il nous apprend à être unis avec nos amis. Nous venons d'horizons différents, et le bizutage nous a permis de trouver plus rapidement nos points communs. Mais si les personnes qui gèrent le système SOTUS ne peuvent pas se contrôler et utilisent une force excessive, les élèves de première année ne les respecteront pas et ne leur obéiront pas. Ça pourrait se transformer en une grosse bagarre. Donc, je ne peux pas vraiment dire si le système SOTUS devrait être annulé parce que nous devons considérer à quoi il sert. Ce que je peux confirmer, c'est que... je viens de vivre le bizutage et même si les étudiants plus âgés appliquaient le système SOTUS, chaque action était justifiée. Leurs raisons étaient de faire en sorte que les étudiants de première année comme nous passent leur vie à l'université en utilisant tout leur potentiel.
Sa réponse n'était pas inclusive mais elle était claire et poignante, et elle semblait honnête. Le public applaudit bruyamment, satisfait.
Arthit regarda l'écran du projecteur, voyant Kongpop dire merci avant de retourner à sa place sur la scène. Il se détourna alors du concours, voulant aller silencieusement de l'autre côté de la cour, laissant Prem seul. Son ami cria.
— Hé ! Où est-ce que tu vas, Arthit ?
— Je reviens tout de suite.
Il répondit sèchement, s'éloignant rapidement de la foule, n'attendant pas d'entendre les réponses des autres concurrents et ignorant la performance de la Lune et de l'Etoile de l'année précédente pendant que les juges se concertaient sur le résultat.
Puis vint le moment d'annoncer les gagnants. Avant de remettre le grand prix, les animateurs commencèrent par les petits prix.
— Nous avons les gagnants des votes populaires !
Les prix du vote populaire étaient décernés par le public et d'autres parties, comme les clubs d'étudiants et les associations d'anciens élèves, et non par les juges. Ils votaient pour la Lune et l'Etoile qu'ils aimaient. Cette année, l'Etoile du vote populaire alla à la fille de la faculté d'éducation.
— Et le prix de la Lune des votes populaires revient à…
Les effets sonores tonitruants augmentèrent l'excitation de la foule avant que le présentateur annonce le nom…
— … M. Kongpop Sutthilak de la faculté d'ingénierie !
Kongpob fut stupéfait lorsqu'un projecteur se braqua sur lui. Il se souvint alors qu'il devait accepter le prix, qui comprenait l'écharpe de la Lune, une peluche et divers bons de réduction. Des applaudissements nourris et joyeux l'accompagnèrent alors qu'il souriait pour une photo avec la gagnante.
Mais qui aurait pu savoir qu'au fond de lui, Kongpop était anxieux ?
Gagner le vote populaire ne signifiait pas qu'il avait gagné la couronne. La plupart du temps, celui qui remportait les votes populaires ne gagnait pas la couronne de la Lune de l'Université, et c'était juste une façon de distribuer les prix à tout le monde de manière égale pour que les concurrents ne soient pas découragés. En conséquence, il réalisait que ses chances de gagner un autre prix étaient minces, et il vit sa défaite imminente face à cette certaine personne.
Sa déception s'accrut encore lorsque le maître de cérémonie annonça les autres gagnants et que son nom ne fut pas mentionné jusqu'au moment d'annoncer la Lune et l'Etoile.
— L'Etoile de l'université de l'année académique 2013 est… Mme Praepailin Phutthiaksorn de la faculté d'ingénierie !
Les cris des étudiants de première année en ingénierie envahirent la scène. Ils furent pris par surprise, car P'Minnie avait dit que l'Étoile de la faculté d'ingénierie se battait habituellement avec difficulté, perdant souvent contre les majors en langues et n'atteignant pas les tours suivants. C'était leur première victoire en presque une décennie.
Kongpob applaudit, félicitant son ami. Même si Praepailin n'avait pas l'air si exceptionnelle que ça par rapport aux autres candidates, elle avait un regard doux, un beau sourire, et était d’une beauté naturelle. Sa réponse aux questions des juges avait montré sa vivacité d'esprit et prouvé que la couronne était bien méritée.
Après que la gagnante ait accepté les prix et posé pour les photos, toutes les voix se turent alors que la foule tendait l'oreille pour entendre qui prendrait la couronne de la Lune - la dernière annonce pour ce soir.
— Et le gagnant de la Lune de l'Université de l'année académique 2013 est…
Kongpop soupira. C'est bon. Il avait fait de son mieux. Quelle que soit la punition qu'Arthit lui imposerait, il devrait le faire. C'était dommage, cependant, qu'il ne soit pas celui qui donnerait sa requête à Arthit.
Il pensa, résigné, en regardant les lumières de la scène qui commençaient à s'éteindre. La musique réveilla l'attente de tous, suivie par le nom du gagnant.
… Le gagnant sur lequel toutes les lumières se braquèrent.
— … M. Kongpop Sutthilak de la faculté d'ingénierie !
L'homme qui avait gagné leva rapidement les yeux, déconcerté.
… Vous vous moquez de moi ? Il avait gagné à la fois le vote populaire et la couronne de la Lune ?!
Mais il devait y croire car l'instant d'après, on lui remettait l'écharpe, une couronne de fleurs et bien d'autres récompenses. Les flashs des appareils photo le submergeaient tandis que les étudiants en première année d'ingénierie sautaient, frappaient sur les tambours et criaient leur victoire sur la tribune, se réjouissant d'avoir raflé les trophées des événements sportifs et du concours de la Lune et de l'Etoile. Ils les avaient tous gagnés, prouvant enfin leur valeur en tant que jeunes ingénieurs.
Le concours de la Lune et de l'Etoile de l'université se termina en beauté. Les concurrents quittèrent la scène pour laisser le personnel installer les instruments pour le concert de clôture, mettant fin aux Freshy Games de cette année.
Lorsque Kongpob descendit, il fut entouré de personnes qui le prenaient en photo. P'Minnie, le mentor honoraire, cria et sauta pour le serrer dans ses bras, les larmes aux yeux, ravie que ses deux protégés aient tous deux gagné.
La Lune de l'université fut tirée pour prendre une photo avec la foule ici et là, et ses lèvres commencèrent à fatiguer à force de sourire. Finalement, il s'excusa, cherchant un coin tranquille non loin des coulisses. Alors qu'il s'approchait, quelqu'un était déjà là. C'était la même personne qui avait surpris Kongpob auparavant.
… Le gars qui avait accepté son défi, le chef bizuteur Arthit.
Il n'avait pas pensé qu'il verrait le gars si tôt, comme si l'autre homme l'avait attendu et ne reculait pas. Il s'approcha donc du bizuteur, levant les mains pour effectuer un wai comme le commandait leur hiérarchie et les règles de SOTUS. Mais les mots qui quittèrent sa bouche étaient tout le contraire de l'humilité.
— J'ai gagné.
— Oui, je sais ! Qu'est-ce que tu veux de moi ?
Droit au but, comme le chef bizuteur était censé l'être. A en juger par l'expression de son visage, le troisième année semblait être frustré parce qu'il avait été vaincu. Il n'y avait pas de raison de tourner autour du pot. Kongpob lui rendrait la politesse en répondant tout de suite à sa demande.
— Je vais te demander de…
La voix traînante du dernier mot fit battre le cœur d'Arthit, non pas à cause de l'excitation, mais de la peur. Il avait deviné que Kongpob lui ordonnerait de faire quelque chose d'humiliant parce qu'il était le chef du bizutage. Pourtant, il avait assez de dignité. Il ferait tout ce que le gars lui demanderait pour respecter sa part du marché.
Ainsi, Arthit regarda droit vers Kongpob, croisant son regard malgré les frissons qu'il ressentait à l'intérieur, attendant d'entendre l'ordre du vainqueur.
— … Je ne peux pas penser à quoi que ce soit pour le moment, alors je reviendrai te voir plus tard.
Hein ?! Quoi ?! Je reviendrai te voir plus tard ? Comment osait-il laisser Arthit en suspens ? Le chef bizuteur jurait, en colère, perdant sa patience.
— C'est quoi ce bordel ?! Pourquoi tu fais le timide maintenant ? Crache juste ce que tu veux, bordel !
Mais avant que le jeune homme n'ait pu répondre, un grand cri retentit sur le devant de la scène, suivi d'un air populaire interprété par un chanteur célèbre qui avait été invité à se produire lors de la dernière Freshy Night. Puis, le chef bizuteur entendit une question désinvolte.
— Tu penses que la chanson est bonne ?
Quel changement de sujet, et cela dissipa la colère d'Arthit qui devint perplexe à la place. Pourtant, il répondit à la question alors que la musique continuait.
— Cette chanson ? Elle est bonne, je suppose. Je n'y ai jamais prêté attention.
— Non. Je parlais de la chanson que j'ai chantée.
En entendant la précision, le gars qui avait mal compris la question commença à se souvenir de ce que l'autre gars avait chanté sur scène.
Oh, la chanson que ce con a chantée sur scène. De laquelle il parlait ? Il avait chanté la chanson thème de Doraemon et YMCA. Et puis, il y avait eu cette longue chanson à la fin.
Sans comprendre pourquoi, il commença à se sentir mal à l'aise, en se rappelant les paroles de cette ballade et en regardant la lueur dans les yeux de Kongpob. Il aboya.
— C'était stupide.
Kongpob voulut rire de la réponse qu'il avait anticipée, sachant qu'il ne devait pas s'attendre à moins de la part du chef bizuteur.
… P'Arthit était toujours le méchant P'Arthit. Il n'essayait pas d'être gentil et courtois. Pourtant, Kongpob voulait toujours voir l'expression de frustration à laquelle il s'attendait avant le début du concours. Il était vraiment heureux d'avoir gagné celui de la Lune. Il allait aborder un autre sujet mais il fut coupé.
— Nong Kongpob ! Je suis du club des étudiants. Je peux avoir une interview avec toi, s'il te plaît ?
Une fille de quatrième année, portant des lunettes, accompagnée d'un caméraman, coupa la conversation en s'approchant des deux hommes. Ils avaient repéré la Lune de l'université qui avait cru échapper à la foule. Mais il s'avérait qu'il était toujours retrouvé. Kongpob voulait parler à Arthit un peu plus longtemps, mais le bizuteur partit, sans que Kongpob puisse le retenir. Les gens du club étudiant commencèrent à le bombarder de questions.
— Comment tu te sens d'avoir été couronné Lune de l'université ?
— Eh bien, je ne sais pas.
C'était une réponse directe. Le journaliste dut le taquiner pour obtenir une meilleure réponse.
— Eh bien, comment tu peux ne pas savoir ? Tu n'es pas excité à l'idée d'être la Lune qui a gagné sa place auprès de son Étoile ?
Ces mots lui firent marquer une pause. Il laissa échapper un murmure qui était sa véritable pensée.
— Il ne s'agit pas seulement d'une lune et d'une étoile, tu sais ?
La déclaration énigmatique fit froncer les sourcils à son interlocuteur, confus.
— Hein ? Tu veux dire quoi par 'il ne s'agit pas seulement d'une lune et d'une étoile' ?
Kongpob sourit finement, regardant dans la direction où quelqu'un venait de s'éloigner, et murmurant une courte réponse dont lui seul connaissait la véritable signification....
— ... C'est un secret. | | Messages : 942
Date d'inscription : 19/06/2024
| Néphély Sam 7 Sep 2024 - 17:46 Règle n°11 Ne vous Mêlez pas des Affaires du Bizuteur — … 44 ! … 45 ! … 46 ! … 47 ! …
— Stop ! Vous ne pouvez toujours pas le faire en même temps ! Combien de fois je vous ai ordonné de faire des squats depuis le début du semestre ? C'est tout ce que vous pouvez me faire ? ! C'est minable ! Je ne vois aucun progrès. Recommencez. Faites-le maintenant !
C'était l'un des ordres que les étudiants de première année avaient entendus et auxquels ils étaient devenus presque apathiques, on leur disait d'enrouler leurs bras autour du cou de leur ami puis de faire des squats à plusieurs reprises. Ils avaient presque terminé le cinquantième tour, mais les bizuteurs n'étaient pas contents. On leur avait demandé de recommencer, en faisant un cercle, et ils ne pouvaient pas s'arrêter tant que les bizuteurs n'étaient pas satisfaits, ce qui était tout à fait contraire au sentiment de ras-le-bol qui habitait tous les élèves de première année.
... Ils avaient pensé que tout irait mieux une fois les Freshy Games terminés parce que la faculté d'ingénierie avait fait une performance spectaculaire, en remportant tous les sports et en gagnant le concours du roi et de la reine de l'université. Les étudiants de première année avaient espéré que les bizuteurs seraient plus sympathiques et apprécieraient leurs efforts.
En fin de compte, les bizuteurs étaient toujours les mêmes et conservaient leur brutalité comme le sel conserve son goût salé. Ils étaient toujours des démons assoiffés de pouvoir aux yeux des étudiants de première année. Ils étaient d'autant plus terrifiants qu'il ne restait qu'une semaine avant le "jour de la reconnaissance" et que le bizutage allait baisser le rideau. Ainsi, les bizuteurs avaient senti qu'ils devaient faire un effort supplémentaire pour rappeler aux élèves de première année qui ils étaient. Par conséquent, ces derniers étaient les premiers à payer le prix fort.
Les étudiants de première année se préparaient pour un nouveau round de "squat". Avant qu'ils ne commencent, la porte de la salle d'activités s'ouvrit et cinq ou six hommes entrèrent dans la pièce à la manière des membres d'un boysband. Leurs allures étaient à l'opposé de leurs regards sauvages et leurs visages étaient moins familiers aux élèves de première année. Ils comprirent qu'il devait s'agir des seniors, car dès que les bizuteurs les virent, ils se levèrent d'un bond, le dos droit, et levèrent les mains pour faire un wai, saluant bruyamment à l'unisson.
— Bonsoir, Phi !
Les seniors hochèrent la tête et se dirigèrent vers le centre de la salle. Les bizuteurs s'écartèrent rapidement de leur chemin et présentèrent les hommes.
— Voici vos seniors de quatrième année. Saluez-les !
Le son des salutations retentirent dans toute la salle. Les étudiants de première année reçurent alors l'ordre de s'asseoir et de se préparer pour le discours du senior qui occupait la salle.
Les élèves de première année étaient anxieux et nerveux. À chaque réunion, les étudiants de deuxième année étaient les animateurs et dirigeaient les activités récréatives, les étudiants de troisième année étaient les bizuteurs et les seniors de quatrième année restaient en dehors de tout ça. Les premières années n'avaient aucune idée de ce qui les attendait. Les troisièmes années étaient déjà assez brutaux, comment les quatrièmes années pourraient être pires ? Ils ne survivraient pas à une autre punition, même s'ils en avaient une.
Les élèves de première année retenaient leur souffle, essayant d'évaluer la décision des aînés. Puis ils entendirent quelque chose de totalement inattendu.
— Vous avez fait du bon travail aux Freshman Games. Nous vous en remercions.
... Pas une réprimande, mais un compliment.
Les élèves de première année se regardèrent, sidérés et étonnés. Ils recevaient rarement des compliments. La plupart du temps, ils étaient grondés ou intimidés, blessés encore et encore jusqu'à ce qu'ils soient engourdis. Ils ne pouvaient pas riposter, car les aînés avaient le droit de les traiter ainsi, selon les règles : "Ceux qui sont venus avant vous sont de grands frères et soeurs. Ceux qui sont venus après vous sont vos petits frères et sœurs. Et si vous êtes ici en même temps, vous êtes des amis". Donc, ceux qui sont venus après doivent obéir et respecter ceux qui sont venus avant eux, tout comme ceux qui avaient le droit de contrôler les troisièmes années étaient naturellement les quatrièmes.
Ainsi, les quatrième année tournèrent leur attention vers les bizuteurs qui se tenaient en ligne, silencieux.
— Quant à vous, les troisièmes années, qui punissez les premières années, je ne suis pas sûr que vous soyez aussi bons qu'eux. Quelqu'un m'a dit que vous les punissiez de manière inappropriée, en leur ordonnant de courir et de former une ligne, de s'asseoir et de se tenir debout, de faire des squats et des pompes. Vous leur avez même ordonné de faire cinquante-quatre tours de piste.
Kongpob leva rapidement les yeux, en entendant ces derniers mots. C'était la punition qu'il avait reçue pour avoir défié les bizuteurs. Il avait également été isolé du reste de ses camarades de classe et avait reçu une double peine par rapport à celle de ses amis parce qu'il n'avait pas de badge. D'une certaine manière, les bizuteurs avaient été moins brutaux avec lui après qu'il ait cessé d'être un héros comme le chef des bizuteurs, Arthit, le lui avait appris. Les bizuteurs lui avaient alors permis de rejoindre ses amis sans être puni deux fois.
L'incident remontait à un certain temps, mais les sanctions sévères que les bizuteurs leur infligeaient n'avaient pas changé. Elles étaient encore fraîches dans l'esprit des élèves de première année, qui se souvenaient de celui qui les avait impitoyablement punis.
— Qui est le chef bizuteur ?
— C'est moi !
Arthit avança et se tint dans la position de repos, son visage stoïque et sans expression, convenant à sa position de chef bizuteur, attendant que l'aîné ne demande sombrement.
— Donne-moi la raison pour laquelle tu as puni les étudiants de première année.
— Je les ai punis pour qu'ils restent disciplinés, Phi !
La réponse était claire et catégorique. Et c'était quelque chose que tout le monde savait déjà. Pourtant, certains se demandaient pourquoi la punition était nécessaire. Les bizuteurs n'étaient jamais satisfaits. Les élèves de première année avaient l'impression que les bizuteurs le faisaient par pure satisfaction plutôt que pour les discipliner. La question soulevée au milieu de la salle d'activités avait piqué la curiosité des élèves de première année qui écoutaient la conversation.
— Alors, puisque tu es le responsable, tu peux refaire toutes les punitions que tu leur as données, pas vrai ?
— Oui, Phi !
— Montre-le à nous et aux nouveaux.
À la fin de la demande, le chef bizuteur se retourna vers ses amis qui attendaient d'entendre la suite. Puis, il prononça la sanction qui choqua tout le monde.
— Bizuteurs, voici votre punition ! Cinq cents squats, cinq cents pompes et cinq cents sauts accroupis. En tant que chef des bizuts, je suis tenu de tout faire et de finir les cinquante-quatre tours. Allez !
— Oui, Phi ! !
Les bizuteurs crièrent à l'unisson, acceptant volontiers la punition. Ils se mirent en ligne, enroulant leurs bras autour du cou de leurs amis, faisant des squats tout en comptant à voix haute. Les chiffres étaient beaucoup plus sévères que ceux qu'ils avaient donnés aux étudiants de première année, et ceux-ci les regardaient avec étonnement.
Certains d'entre eux jubilaient, comme s'ils se vengeaient des bizuteurs, en voyant comment ils goûtaient à leur propre médecine. Mais la plupart des élèves de première année ne souriaient pas, observant comment les bizuteurs étaient punis. Même si les juniors les avaient contrariés et qu'il y avait un certain degré de mystère, au fond, les premières années connaissaient la raison derrière les actions des bizuteurs. Cela faisait partie du système SOTUS. Chaque fois que les élèves de première année avaient des problèmes, les bizuteurs étaient les premiers à les aider à les régler. Ils les poussaient et les motivaient également à accomplir de nombreuses choses.
... Cela pouvait sembler exagéré, mais c'était vrai quand ils disaient : "ils ont gagné leur fierté d'étudiants de première année grâce aux bizuteurs."
De nombreux étudiants de première année commencèrent à s'agiter, mal à l'aise avec la punition. Kongpob voulut lever la main pour demander la permission d'aider. Mais il craignait d'être doublement puni parce que les seniors étaient là. S'il parlait, cela pourrait empirer les choses. En plus, il était certain que les aînés ne laisseraient jamais un étudiant de première année intervenir.
Ils durent donc supporter et regarder la punition se dérouler. Ils seraient autorisés à partir une fois que les bizuteurs auraient terminé tous les ordres. Même s'ils avaient l'air forts grâce à l'entraînement précédent, ils furent sanctionnés en se levant et en s'asseyant, en faisant des squats et des pompes sans s'arrêter. Ils avaient beau essayer de cacher leur épuisement, ils ne pouvaient pas dissimuler leur transpiration et leur respiration sifflante lorsqu'ils essayaient de reprendre leur souffle.
Même Arthit, le responsable du bizutage, était visiblement fatigué. Il eut du mal à sortir de la salle d'activités pour accomplir la dernière pénalité : les cinquante-quatre tours de piste.
Kongpob se prépara à se lever une fois la réunion terminée, voulant suivre Arthit à l'extérieur et vérifier qu'il allait bien. Mais avant qu'il ne parte, la voix de son meilleur ami l'arrêta.
— Où tu vas, bon sang ?
— Je vais voir P'Arthit courir.
— Il va vraiment courir ? Tu n'as même pas fini tous les tours.
M disait la vérité et c'était ce que Kongpob avait pensé.
... En vérité, il n'avait pas fait les cinquante-quatre tours. Il avait couru six ou sept tours quand le bizutage s'était terminé. Les médecins lui ont demandé de s'asseoir et de se détendre avec ses amis. Faire autant de tours l'aurait envoyé à l'hôpital, et les bizuteurs auraient eu des problèmes. Donc, le reste de l'équipe avait essayé de sauver les étudiants de première année. Il se rappelait combien ses jambes étaient douloureuses le lendemain matin, juste après avoir couru quelques tours. Le chef bizuteur qui venait de terminer toutes ces punitions devait se sentir très fatigué. Il n'était donc pas certain que l'homme ait assez d'endurance pour terminer la course.
— Allons manger et on pourra retourner faire le devoir d'anglais. On a un test de physique demain.
M l’avait alerté de la charge de travail qu'il fallait faire d'ici la fin de la nuit. Cela rendit Kongpob encore plus hésitant. Il regarda l'horloge qui indiquait presque 18 heures. Le temps de manger son dîner, de faire son devoir et de réviser, il serait trop tard de toute façon. Même s'il allait surveiller Arthit, il ne pourrait que rester là et regarder, car il ne pourrait rien faire pour aider.
Finalement, Kongpob laissa tomber. Il alla dîner avec M et ses autres amis, puis retourna au dortoir en moto. Plus tard, il finit de taper son devoir d'anglais et le sauvegarda pour en imprimer une copie dans une boutique d'impression en bas de la résidence. Ensuite, il devait étudier pour le mini test de physique de demain matin.
Mais après avoir lu la moitié des livres, il s'endormi, les yeux tombant, à cause des chiffres étourdissants. Il était presque 21 heures quand il regarda de nouveau l'horloge. Un café en canette lui permit de rester alerte. Kongpob s'étira, chassant sa fatigue, et jeta un coup d'œil à la porte vitrée du balcon, pour voir des gouttes de pluie tomber. Oh, quand est-ce qu'il avait commencé à pleuvoir ? Il était perdu dans ses révisions et ne l'avait pas remarqué.
Kongpob attrapa un parapluie et prit l'ascenseur pour descendre, avec l'intention d'aller au magasin 7-Eleven près du dortoir et d'acheter quelques snacks pour se débarrasser de sa somnolence. Il marcha sous la pluie qui commençait à devenir plus forte, tenant fermement son parapluie. Quand il arriva à la supérette, beaucoup de gens étaient là pour se protéger de la pluie. Avant qu'il n'entre, une moto s'arrêta près du trottoir, et deux étudiantes trempées se précipitèrent pour rester sous le toit.
— Merde, la pluie est arrivée de nulle part.
— Pas vrai ? Il ne pleuvait pas autant tout à l'heure. On est presque au dortoir. Ou on devrait faire un tour là-bas ?
— Tu es folle ? ! Non, je ne vais pas parler. Ça va se calmer bientôt. Mais quand on était en voiture, j'ai vu quelqu'un courir sous la pluie sur le terrain de foot.
— Tu as dû rêver, allez. Pourquoi quelqu'un courrait-il sous la pluie en ce moment ?
— Je ne sais pas. Peut-être que je l'ai imaginé. Il faisait sombre. Je ne voyais pas très bien.
Kongpob s'arrêta, entendant la conversation qui avait attiré son attention. Ces mots lui rappelaient quelqu'un.
... Quelqu'un qui courait sous la pluie sur le terrain de football en ce moment. Cela pourrait-il être...
La seule réponse qui lui vint à l'esprit fit que le type qui était venu ici pour acheter du café, oublia tout. Il se précipita vers le dortoir, attrapa sa moto, et roula avec le parapluie vers le campus. Il ne savait pas si la femme avait réellement des hallucinations, mais il voulait le voir de ses propres yeux.
Kongpob gara sa moto près du terrain de football et regarda rapidement la zone où il y avait encore quelques lumières allumées. La forte pluie rendait la visibilité très faible - presque nulle - mais il repéra une silhouette qui se déplaçait.
... Cela ne pouvait pas être vrai. Qui courait si tard alors qu'il pleuvait des cordes. Rien que de penser que ça pourrait être cet homme, il avait tellement envie d'aller le voir. Tu dois avoir perdu la tête, espèce de fou !
L'homme s'en voulut, soupira avec résignation et tourna le dos, prêt à retourner au dortoir. C'est alors qu'un bruit le stoppa net dans son élan. C'était un son faible et distant. Et même s'il était presque inaudible à cause de la pluie, il réalisa que c'était le bruit de pas frappant le sol. L'homme qui avait fait ce bruit était la personne qu'il cherchait...
Kongpob s'approcha de la personne sans aucune hésitation. Son souffle se bloqua dans sa gorge alors qu'il observait l'état du chef bizuteur.
L'homme était trempé comme s'il était tombé dans l'eau, trempé de la tête aux pieds. Ses cheveux, son jean et le T-shirt noir qui était l'uniforme des bizuteurs collaient à son corps. Mais le pire de tout était son visage qui montrait l'épuisement dû à une longue course.
— P'Arthit ! Il pleut. S'il te plaît, arrête de courir !
Kongpob ouvrit rapidement son parapluie et le tint au-dessus du senior, et la pluie l'éclaboussa. Il s'en fichait car elle ne pouvait pas être comparée à la fatigue du chef bizuteur qui le regardait. Puis, Arthit siffla un renvoi.
— Tu... tu ne te mêles pas de mes affaires. Encore cinq tours et j'ai fini.
... Cinq tours ? Cela signifiait que depuis 18h00, Arthit avait couru et tenu ses promesses. Il ne s'arrêterait pas avant d'avoir terminé les cinquante-quatre tours. Kongpob n'avait pas atteint ce chiffre lui-même, donc il ne pouvait pas croire qu'Arthit irait vraiment aussi loin. Cela devait être la dignité des bizuteurs.
— Mais tu es trempé. Tu vas être malade.
Il essaya d'arrêter Arthit mais l'autre lui coupa la parole.
— Si... si tu veux que j'arrête alors reste à l'écart. Ne sois pas sur mon chemin pour que je puisse terminer !
— Je vais courir avec toi.
Kongpob lui annonça la nouvelle et se mit à courir à côté du chef des bizuteurs, tenant le parapluie pour protéger le troisième année de la pluie. Arthit dut s'arrêter et aboya un ordre.
— Qu'est-ce que tu fais ?! Recule !!!
Kongpob ne voulait pas céder ? Il le fixa de nouveau dans ses yeux féroces et resta sur ses positions.
— Non. Si tu ne t'arrêtes pas pour te reposer, je n'arrêterai pas de courir.
— Kongpob !!
Arthit hurla le nom du jeune homme, et perdit patience. Kongpob savait que l'homme était furieux mais il ne laisserait pas Arthit courir sous la pluie comme ça. Il ne pouvait pas. Alors que les choses s'intensifiaient, une autre personne intervint.
— Qu'est-ce qui se passe ici, Arthit ?
Les deux se tournèrent pour regarder l'un des bizuteurs qui tenait un parapluie en s'approchant. Arthit n'était pas surpris par l'apparition de son ami et il commença à s'énerver, frustré.
— Ce petit nouveau est une plaie. Tu peux t'occuper de lui pour que je puisse continuer ?
L'autre bizuteur changea son attention de cible pour se tourner vers la personne non invitée, demandant d'un ton tendu, comme le font habituellement les bizuteurs.
— Qu'est-ce que tu fais ici, le nouveau ?
— C'est un torrent ici. Pourquoi P'Arthit doit continuer à courir ? Je peux prendre sa place ?
Kongpob espérait que ce bizuteur montrerait de la sympathie envers son ami et lui permettrait de terminer les tours pour montrer son esprit. Mais à sa surprise, le bizuteur le repoussa et lui expliqua clairement.
— C'était la punition du chef des bizuteurs, pas celle d'un étudiant de première année.
— Mais...
— Ça suffit ! Tu n'as pas ma permission ! Va attendre sous le toit du bâtiment !
... Même pas une chance de protester.
Kongpob réalisa que se disputer serait inutile. S'il avait insisté, il aurait été traîné par ce bizuteur imposant et musclé dont l'expression ressemblait à celle d'un démon du Temple de l'Aube.
Il regarda Arthit avec hésitation mais l'autre homme détourna le regard. Il reprit sa course sous la pluie qui commençait à devenir une simple bruine, laissant Kongpob derrière lui. Le bizuteur restant lui donna une tape et lui demanda de se rendre avec lui sous le bâtiment.
Il dut donc suivre le bizuteur, confus, alors que les questions et la colère tourbillonnaient dans son esprit.
Pourquoi ?
Pourquoi les troisièmes années ne faisaient rien pour aider, en voyant leur ami courir comme ça ? Pourquoi P'Arthit devait-il le faire seul ? Pourquoi ne pouvait-il pas courir à sa place ?
Mais toute cette confusion se transforma en surprise. Dès qu'il atteignit le dessous du bâtiment près du terrain, il vit beaucoup de gens qui attendaient à chaque table. Ils venaient de l'ingénierie, et tous - les bizuteurs et les troupes récréatives - étaient là. Même les paramédicaux comme P'Fang étaient présents et elle l'appela dès qu'elle le repéra.
— Oh, hey, Kongpop, tu es là ! Tu es trempé. Tu veux une serviette ? Tu peux attendre avec tes amis là-bas, je te l'apporterai.
... Amis ??
Il regarda directement la table que Fang lui avait indiquée. Ses yeux s'agrandirent quand il vit que près de vingt étudiants de première année étaient là, en train de discuter. Certains d'entre eux s'étaient changés en vêtements décontractés comme lui. Mais certains portaient encore des maillots de sport qui indiquaient qu'ils n'étaient pas retournés au dortoir. Parmi eux, une femme portant des lunettes dont le regard l'a attiré, et elle lui a fait signe.
— May.
Kongpob appela le nom de l'amie qui avait été gravé dans son esprit. Il lui avait coûté le badge nominatif qui avait été déchiré en morceaux par le chef bizuteur après qu'il n'ait pas répondu à la question. Il avait donc donné son badge à May et pris la punition à sa place. À ce moment-là, il savait que May avait pleuré toutes les larmes de son corps et avait eu peur des bizuteurs. Mais maintenant, elle était là, debout, avec une expression anxieuse, avec d'autres bizuteurs et le personnel.
— Pourquoi tu es là ? Depuis combien de temps tu es arrivée ?
Demanda rapidement l'homme qui venait d'arriver, perplexe, et essayant de faire des rapprochements pour comprendre la tournure inattendue de l'événement. May lui fit finalement une révélation.
— Je suis ici depuis presque une heure. J'ai quitté la bibliothèque et je rentrais au dortoir en passant par la piste. Mais j'ai vu P'Arthit courir, alors j'ai appelé mes copines et elles sont venues ici pour voir.
May fit un signe de tête en direction de ses copines qui ne tardèrent pas à intervenir.
— Oui, j'ai pris une photo de la tête du bizuteur et je l'ai postée sur Facebook. C'est devenu viral."
L'explication donna à Kongpob assez d'informations pour reconstituer l'histoire. Donc, ce n'était pas seulement lui qui savait qu'Arthit courait.
TRRRRRR ! !
La sonnerie du téléphone le fit sursauter, interrompant sa rêverie. Il avait presque oublié qu'il avait son téléphone sur lui. Il glissa rapidement ses mains dans la poche trempée de son short. Heureusement, le tissu était assez épais pour empêcher l'eau de s'infiltrer dans le téléphone. Il regarda l'écran, puis voyant le nom de son ami proche, il répondit à l'appel.
— Hey, M.
— Kong mec ! Dernières nouvelles ! J'ai vu des gens partager une photo du chef bizuteur en train de courir !
— Ouais. Je sais. J'y suis.
— Woah ! Donc c'est vrai ! Est-ce qu'il court toujours ? Mais il pleut. Ne me dites pas qu'il court sous la pluie !
... Le gars devait être fou. Seul un homme qui avait perdu la tête pouvait faire ça. Mais le plus fou... ça devait être lui. Il savait qu'Arthit luttait pour finir les tours mais personne ne faisait rien pour l'aider. Tout ce qu'ils faisaient, c'était de rester là, à attendre, et à s'inquiéter, en regardant le chef bizuteur tenir sa parole.
Il réalisa à ce moment-là à quel point l'honneur et la dignité du chef bizuteur étaient grands. Et maintenant, il savait pourquoi Arthit avait été choisi pour occuper ce poste. Il n'avait pas demandé de sympathie. Aucune chance qu'Arthit accepte son aide.
Kongpob regarda distraitement la pluie qui se transforma en bruine jusqu'à ce qu'elle cesse complètement. C'était au même moment qu'Arthit termina sa course.
Les bizuteurs et l'équipe médicale se précipitèrent hors du bâtiment pour jeter une couverture sur l'homme trempé qui boitait et titubait comme s'il était sur le point de tomber car toutes ses forces avaient quitté ses membres. Kongpob, qui les suivait sur le terrain, posa une question, inquiet de l'état de l'homme.
— Tu vas bien, P'Arthit ?
Même s'il était fatigué au point de ne plus pouvoir parler, le chef des bizuteurs trouva tout de même l'énergie d'aboyer sur les premières années qui était rassemblés autour de lui pour l'observer.
— Qu'est-ce que vous faites ici, vous les étudiants de première année ? !! Dégagez et retournez dans vos dortoirs ! Knot, ramène-moi dans ma chambre. Je vais me changer.
Cette dernière phrase était destinée au grand et imposant bizuteur qui était venu plus tôt pour emmener Kongpob. Knot aida son ami épuisé à s'éloigner du terrain et se dirigea vers la voiture qui attendait à proximité. Tout le monde leur fit place, à l'exception de Kongpob qui continuait à les suivre pour leur offrir son aide.
— Je vais vous accompagner.
Arthit se retourna vers l'homme au complexe du héros. Les vêtements et les cheveux mouillés du jeune homme commençaient à sécher, mais son entêtement ne faiblissait pas pour autant. Il le fusilla du regard, frustré.
— Pourquoi tu me suis ? !
— J'aimerais m'assurer que tu es bien rentré chez toi.
— Non ! Un étudiant de première année reste avec les étudiants de première année. Ne te mêle pas des affaires des bizuteurs !
— Un première année n'a pas le droit de s'inquiéter pour les troisièmes années ?!
Un grand cri au milieu du terrain rendit tout le monde silencieux aux alentours. Tous les regards étaient tournés vers les deux hommes, et Kongpob fixait Arthit avec ses yeux suppliants.
Il voulait demander au chef bizuteur. Le supplier... que ce n'était pas seulement lui mais beaucoup d'autres étudiants de première année qui s'inquiétaient pour lui et voulaient s'assurer qu'il allait bien.
Mais pour toute réponse, Arthit détourna simplement le regard et se tourna vers ses amis.
— Knot, allons-y. Quant à toi, si tu me suis encore, je punirai toute ta classe demain !
Le chef des bizuteurs donna un dernier avertissement aux élèves de première année qui l'entouraient avant de se diriger vers la voiture avec les autres bizuteurs et les médecins. Il ne restait plus que les étudiants de première année sur le terrain, ainsi que l'équipe de récréation qui partait progressivement alors que la pluie qui s'était arrêtée recommençait à tomber.
— Kongpob, on y va.
May se rapprocha et appela l'homme stupéfait. Il acquiesça, marchant derrière son amie pour retourner au bâtiment sous la pluie qui tombait sur le sol et disparaissait dans la terre.
Ce n'était pas différent de ses sentiments. Peu importe à quel point il essayait de les transmettre à l'autre homme, ils étaient juste balayés et évaporés...
... Et n'atteignaient jamais le coeur de cette fameuse personne. | | Messages : 87
Date d'inscription : 01/07/2024
| amelyma Sam 7 Sep 2024 - 17:47 Règle n°12 Ne vous Mêlez pas des Affaires du Bizuteur BRRRRRRR !!
… Le téléphone sonnait. Ses oreilles le percevaient. Ses mains bougèrent. Son coeur lui ordonnait de le décrocher. Mais ses jambes... étaient mortes.
Arthit était couché dans son lit dans un état qui ne pouvait être décrit que comme "laminé".
La raison n'était autre que la démonstration de ses prouesses devant les étudiants de première année, subissant sa punition brutale en faisant 500 abdos, 500 pompes et 500 squats. Et le clou du spectacle avait été de faire 54 tours du terrain de football avec la pluie qui tombait en toile de fond comme si on craignait que ce ne soit pas assez difficile pour lui.
Il passait des moments assez difficiles. En plus d'être épuisé, son corps pourrait tout aussi bien être mort. Après qu'un ami l'ait aidé à sortir de la piste et à monter dans la voiture, Arthit s'était évanoui, et ses amis avaient dû lui donner les premiers soins. Ils avaient failli l'emmener chez un médecin, mais heureusement, il s'était réveillé en chemin et leur avait demandé de retourner au dortoir. Il voulait juste se reposer et ne voulait pas en faire tout un plat, de peur que les professeurs n'interviennent s'ils entendent parler de cet incident.
Une fois arrivés au dortoir, ses amis l'avaient porté. Ses jambes tremblaient et il n'arrivait pas à tenir debout. Finalement, son ami avait réussi à le ramener dans sa chambre. Une fois ses vêtements changés, on lui avait dit de prendre toutes sortes de médicaments, y compris des remèdes contre le rhume, des anti-inflammatoires et des analgésiques, avant qu'il ne se mette enfin au lit. Un ami s'était porté volontaire pour rester avec lui en cas d'urgence au milieu de la nuit.
Il avait été pris par le froid toute la nuit et s'était réveillé vers midi. Une fois réveillé, il s'était rendu compte qu'il avait un peu de fièvre et un léger mal de gorge. Le pire, c'était ses jambes qui lui faisaient mal jusqu'aux os, comme s'il avait été écrasé par un camion. C'était dû à une inflammation musculaire. Il dut presque ramper jusqu'aux toilettes, donnant à son ami l'impression d'être pathétique.
Finalement, ses amis n'avaient pas eu le choix. Ils avaient séché le cours de l'après-midi et l'avaient emmené à l'hôpital pour un examen de contrôle. Bien sûr, il avait été réprimandé pour ses exploits, et le médecin lui avait prescrit un grand nombre de médicaments et mis un bandage sur sa cheville gauche douloureuse. Puis un ami l'avait ramené au dortoir. Il était maintenant allongé, raide et endolori, incapable de bouger ses membres, se sentant comme une bûche morte. Même lorsque le téléphone sonnait sur la table de nuit près du lit, il n'arrivait pas à l'atteindre. Il demanda de l'aide à son ami qui prenait son tour pour accompagner le malade pendant que les autres sortaient dîner.
— Prem, donne-moi mon téléphone.
— Tiens.
Prem lui lança le téléphone portable avant de mettre des chips dans sa bouche et de rire devant la télé, inconscient des souffrances de son ami. Arthit ne savait pas si le type était là pour s'occuper de lui ou s'il cherchait simplement à changer de décor. Il ramassa son téléphone. Quand il vit le nom du correspondant, il appuya rapidement sur le bouton.
— Bonsoir.
— Hé, fils de pute ! T'es encore en vie ?
Quel accueil chaleureux, mais il s'y était habitué parce qu'il entendait cela depuis le début des répétitions du bizutage pendant les vacances scolaires.
— Presque, P'Deer. Hier, j'ai vu mon grand-père me faire signe et j'ai failli lui courir après.
Un gloussement se fit entendre à travers le combiné. Son aîné répondit alors par une remarque plus légère.
— Tu es quand-même un petit malin alors tu vas t'en sortir. J'ai entendu que Knot t'avait emmené à l'hôpital et je me suis inquiété. Qui t'a dit de faire ce numéro ? On s'était mis d'accord sur 20 tours, non ?
...C'est vrai. Le gars à qui Arthit parlait était 'Deer', le quatrième année qui était venu dans la salle d'activité la veille. Il était autrefois le chef des bizuteurs des troisièmes années et c'est lui qui avait ordonné à Arthit de se punir. C'était une mise en scène pour démontrer aux étudiants de première année qu'au-dessus des troisièmes années, il y avait les quatrièmes années.
Même si les séniors ne sont pas impliqués dans le bizutage, les quatrième années sont leurs "aînés". Les années inférieures doivent leur montrer du respect conformément à la hiérarchie et au système d'ancienneté. Donc, gonfler leurs poitrines était le moyen le plus facile de montrer qui était le patron. Un bouc émissaire avait été choisi, quelqu'un que les premières années pensaient ne jamais pouvoir faire tomber. Les bizuteurs étaient donc devenus les victimes. Et c'est pourquoi il avait provoqué l'homme à l'autre bout du fil.
—Eh bien, j'avais peur que les nouveaux ne voient pas à quel point vous êtes " impressionnants ".
— C'est toi qui es impressionnant. Tu es devenu le sujet de conversation de la ville, tu sais ça ? Les étudiants de première année ont partagé la photo de toi en train de courir sur Facebook. Ils nous ont insultés, en disant que les seniors étaient trop sévères. On a juste fait une apparition pendant une seconde et maintenant on est les hommes les plus détestés de l'année. Ça n'en valait pas la peine !
L'autre gars prit un ton irritable, ce qui laissa Arthit sans voix.
Il n'avait pas pensé que les étudiants de première année le suivraient et le verraient. Il avait pensé qu'ils ne se soucieraient pas de savoir si les bizuteurs seraient morts ou vivants. Ils pourraient même se réjouir de voir les bizuteurs être punis devant eux, ressentant un sentiment de justice. Faire 54 tours était une exagération, une tâche herculéenne à accomplir. Pourtant, un homme comme le chef des bizuteurs, Arthit, ne revenait pas sur ses paroles. Il l'aurait fait même si c'était presque impossible, et même si à la fin cela avait détruit son corps.
— Ok, repose-toi. Je ne te dérange plus. Rétablis-toi vite, petit voyou boiteux !
Cette remarque taquine, en guise d'adieu, montra encore à quel point l'aîné était inquiet, il le savait, alors qu'il posait le téléphone. Prem prit la parole en même temps.
— Ton département était tellement extraordinaire. Il n'y a rien de tel dans le mien.
Arthit haussa les épaules et répondit sans trop réfléchir.
— Je n'y peux rien. C'est l'une de nos règles.
...Des règles que tout le monde doit suivre, surtout quelqu'un qui porte le fardeau du chef bizuteur. Quoi que vous ordonniez aux nouveaux, vous devez être capable de le faire. Chaque punition n'était pas pour le pouvoir ou l'auto-gratification, même si elle semblait impitoyable, comme la façon dont il avait ordonné à Kongpob de faire 54 tours. Même s'il savait que Kongpob n'avait pas fait ces tours, il, en tant qu'homme qui avait donné cet ordre, était responsable. Même s'il devait repousser ses limites, ou même si les gens s'inquiétaient pour son bien-être, il devait le faire.
...inquiets ?
Quand il pensa à ce mot, son esprit se porta soudainement sur les paroles de quelqu'un. Ce qui était gravé dans son esprit n'était pas les mots mais... ces yeux.
Il n'arrivait pas à comprendre ce que l'autre personne voulait lui dire. Ce n'était pas seulement la colère, mais aussi la douleur qu'il ressentait. Elle empestait l'autre homme et empêchait Arthit de croiser son regard car le sentiment de culpabilité le submergeait.
...Eh bien, pourquoi se sentirait-il coupable de toute façon ? Il n'avait rien fait de mal. Il avait chassé le nouveau parce qu'il était trop curieux. Le vaurien avec un complexe de héros qui aimait être au mauvais endroit au mauvais moment. Kongpob ne pouvait pas le blâmer ! Ok, ça suffit. Plus il y pensait, plus son mal de tête empirait. Il avait suffisamment mal aux jambes et la migraine le conduirait à l'hôpital pour de bon cette fois.
Arthit chassa cette idée, se forçant à penser à autre chose en appelant son ami qui regardait la télévision et grignotait nonchalamment des snacks.
— Prem, j'ai faim. Tu peux descendre m'acheter du porridge ? Apporte-moi aussi une tasse de pink milk.
L'homme qui était concentré sur l'écran regarda son ami, sans être surpris par les habitudes alimentaires d'Arthit. Ils étaient amis depuis toujours et il savait qu'en dépit de son visage stoïque, le bizuteur en chef était en fait un tendre lorsqu'il s'agissait de nourriture. Ce qui le rendait incapable de retenir une remarque sarcastique était la façon dont le patient ne tenait même pas compte de sa condition physique.
— Tu es malade et tu demandes quand même du pink milk ?
— Tu n'y connais rien, mec. Le pink milk est mon fortifiant. Ça marche mieux que les médicaments. Mes jambes vont guérir rapidement avec ça.
Prem leva les yeux au ciel en entendant les paroles de son ami. Si le pink milk pouvait guérir ses jambes, pour Arthit, une tasse ne suffirait pas, mais il lui faudrait un litre pour s'y tremper.
— Très bien, très bien. Je vais descendre t'en chercher un. Maintenant, dors, espèce de bâtard boiteux !
L'insulte suivie d'un grognement survint avant que Prem ne se lève et ne descende en bas comme on le lui demandait. Malgré sa réplique, il se souvenait de la raison de sa présence ici : s'occuper du chef bizuteur diminué.
Il était presque 19 heures. C'était l'heure d'affluence où les étudiants se pressaient pour dîner et où les stands de nourriture étaient bondés comme s'il y avait un festival. Il lui fallut beaucoup de temps pour se frayer un chemin à travers la foule et se procurer le porridge. Mais quand il vit la longue file d'attente à la boutique de smoothie, il voulut faire marche arrière. Il y avait presque 10 personnes dans la file. Pourtant, il s'approcha du vendeur avec la note à la main.
— Une tasse de Pink Milk, s'il vous plaît, demanda Prem d'un air fatigué.
Ce son n'échappa pas à l'homme qui était dans une autre file d'attente à proximité. Il se tourna vers Prem et leva les mains pour faire un wai.
— Bonsoir, P'Prem.
Le bizuteur se tourna vers la voix et hocha la tête en signe de reconnaissance en voyant le jeune homme de première année qui avait remporté la couronne de roi de cette année.
— Bonsoir.
Prem se disait que ce gamin avait des bonnes manières, même s'il venait d'un autre département. Même quand ils se rencontraient en dehors du campus, il montrait du respect. Pourtant, la phrase suivante balaya instantanément cette admiration.
— Ce pink milk est-il pour toi ?
Le bizuteur faillit tomber la tête la première, oubliant qu'il avait commandé une boisson qui n'était pas trop virile. Mais c'était trop compliqué d'expliquer que ce n'était pas pour lui. Prem dut donc faire semblant et répondit à la question d'une voix sévère.
— Pourquoi tu demandes ? !
— Pour rien.
Kongpob baissa rapidement les yeux, chassant sa curiosité. Il se rendit compte qu'il était indiscret, alors il se tut. Pourtant, il ne pouvait pas arrêter ses pensées qui tournaient autour du pink milk.
...le pink milk glacé qui lui rappelait quelqu'un.
Depuis la veille, la nouvelle de la course d'Arthit était devenue virale. Cela avait commencé avec les étudiants de première année de son département et maintenant tous les autres départements étaient au courant. Il y avait eu des réactions positives et négatives. Certaines personnes appréciaient. Certains disaient que c'était juste un coup de publicité. Certains, dont Kongpob, ne comprenaient pas pourquoi Arthit devait aller aussi loin.
Il savait que c'était par sens de l'obligation et pour préserver la dignité des bizuteurs. Mais ce qu'il ne comprenait pas, c'est qu'Arthit ne se rendait pas compte que beaucoup de gens s'inquiétaient pour lui.
Faire quelque chose qui pousse son corps à ses limites allait avoir des conséquences. Il avait essayé de prévenir Arthit, il avait essayé d'aider, mais tous ses efforts avaient été balayés. L'autre homme agissait comme s'il ne voulait pas reconnaître ses sentiments et cela le faisait souffrir. Une fois arrivé au dortoir, il avait rapidement ouvert la porte du balcon et regardé sur le balcon en face du sien, mais il ne pouvait rien voir. Il y avait un rideau que le chef des bizuteurs avait mis en place pour bloquer la vue.
Donc, en fin de compte, Kongpob n'avait pas été capable d'obtenir des informations sur la santé de l'autre homme jusqu'à maintenant. Même s'il avait passé sa journée à faire sa routine, il n'arrivait pas à se détendre, frustré de ne pas pouvoir cesser de s'inquiéter. Ce même sentiment qu'il avait ressenti lorsqu'il avait vu Prem commander le pink milk.
...Cette personne en particulier était toujours dans son esprit.
TRRRRRRR!!
Une sonnerie de téléphone le sortit de sa rêverie. Il vit que c'était l'iPhone de Prem qui sonnait. Le bizuteur le prit pour répondre à l'appel entrant, sans se soucier que Kongpob puisse entendre la conversation en restant à côté.
— Allô, quoi, la clé USB ?! Oh, merde. J'ai oublié. Oui, elle est avec moi. Je suis désolé... quoi ? Là, maintenant ? Très bien, très bien. Je vais te l'apporter.
L'homme effaré regarda à gauche et à droite et ses yeux s'accrochèrent à ceux de Kongpob.
— Tu connais Arthit, n'est-ce pas ?
— Oui, je le connais.
Kongpob hocha la tête à cette étrange question. Prem savait certainement qu'il était du même département que celui d'Arthit. Prem, à son tour, voulait juste s'en assurer, car il était sur le point de confier une tâche importante au nouveau venu.
— Peux-tu apporter le porridge et le pink milk à Arthit ? Il vit au dortoir Romruedee, tout près d'ici. Chambre 618. J'ai un imprévu. Voici l'argent et le porridge.
L'ordre avait été donné rapidement, et Kongpob n'avait pas eu le temps de refuser avant que l'argent et le sac de porridge ne lui soient remis. Le bizuteur à la tête brûlée avait filé, le laissant recoller les morceaux de l'histoire.
Attendez, donc le porridge et le lait froid n'étaient pas à Prem. Ça veut dire qu'ils étaient pour...
Il n'y avait qu'un seul nom dans son esprit. Kongpob ne put empêcher un sourire de s'étendre sur son visage, en pensant à la chance qui s'était mise de son côté et qui lui avait ouvert la porte pour se rapprocher de l'homme qui l'avait inquiété toute la journée. Il annula donc le café glacé qu'il avait commandé et attendit le lait rose. Puis il reprit le chemin habituel. Cette fois, il ne prit pas le tournant vers son dortoir mais s'arrêta à un bâtiment voisin. Beaucoup de gens entraient et sortaient, alors il put passer l'entrée sans utiliser de carte magnétique. Il appuya sur le bouton de l'ascenseur pour le 6ème étage et alla directement à la chambre 618.
...La chambre qu'il regardait souvent de son balcon.
Kongpob s'arrêta juste devant la porte, étrangement ravi et inquiet de ce qu'il ferait si l'homme derrière la porte était l'ami d'Arthit. Il pourrait être balayé d'un revers de main, se faire dire d'aller se faire voir avant de pouvoir demander comment l'homme allait. Quoi qu'il en soit, il avait au moins une chance d'apercevoir Arthit. Il décida donc de frapper à la porte.
Toc ! Toc !
... Silence. ... Aucune réponse.
Kongpob essaya encore, mais toujours aucun signe de vie. Arthit dormait-il ? S'était-il trompé de chambre ? Réticent, il s'apprêtait à frapper pour la troisième fois, mais il fut grondé par un grand cri venant de derrière la porte.
— Entre. La porte n'est pas fermée !
C'était sans aucun doute la voix du chef bizuteur, la voix qu'il connaissait bien. Donc, après la permission, il tourna la poignée, ouvrit la porte et balaya la pièce du regard pour en apprécier l'intérieur. La pièce était de couleur claire et aussi grande que la sienne. Les affaires étaient placées un peu partout en gros tas, renseignant sur l'habitant qui était allongé sur le dos et lisait une bande dessinée, se relaxant. Il n'avait même pas jeté un regard au visiteur qu’il commença à râler.
— Tu sais que ma jambe me fait mal et tu frappes à la porte, connard. Qu'est-ce qui t'a pris si longtemps ? Tu es allé acheter de la nourriture ou tu es resté pour aider les vendeurs ?
— Il y avait une longue queue, monsieur.
Une conclusion respectueuse n'aurait pas pu émaner de son pote et Arthit bondit dans son lit. Il se tourna pour regarder le visiteur, les yeux écarquillés, stupéfait quand il vit qui avait frappé à la porte.
— Kongpob !!! Qu'est-ce que tu fais ici ?! cria Arthit, pointant son doigt vers le nouveau venu, ayant l'air de voir un fantôme et submergé par la confusion.
...Comment ce bâtard de 0062 est arrivé ici ??...Sait-il qu'il est dans cette pièce ?? ...Et p-pourquoi est-il venu le voir ??
Toutes ces questions avaient une explication simple.
— P'Prem a eu un imprévu urgent, il m'a demandé de t'apporter le porridge et le pink milk.
L'homme qui était responsable de la livraison tendit le sac de porridge et la tasse de pink milk pour qu'Arthit les voie. Dès que le chef bizuteur les vit, il souhaita avoir de bonnes jambes pour pouvoir donner un double coup de pied à l'ami qui l'avait trahi.
...Ce putain de traître !
Qu'est-ce qui était si important pour que Prem le laisse tomber comme ça ? Pire, il aurait pu choisir n'importe qui pour apporter la nourriture, mais il avait choisi le dernier homme qu'Arthit voulait voir ! À quoi servait son numéro d'hier, alors que ce jeune homme était témoin de son état proche du coma. Son personnage de dur à cuire et de chasseur de têtes était ruiné ! Putain de merde... Ça le rendait fou !!!
L'homme humilié souhaitait que la Terre s'ouvre et l'avale. Il voulait se lever et fermer la porte, mais Kongpob s'était déjà approché du lit, demandant .
— Comment vas-tu ?
— Je vais bien !
Même si son état était à un million d'années-lumière d'être parfait, il préférait garder sa dignité de bizuteur en chef. On ne l'appelait pas l'Impénétrable bizuteur en chef pour rien. Superman l'appelait Big Bro et même Spider-Man ne l'embêtait pas. Mais Kongpob se méfia en prenant connaissance de l'état de l'homme blessé sur le lit.
— Vraiment ? Pourquoi as-tu un bandage autour de ta cheville ?
...Merde. Je l'avais oublié.
L'homme qui avait compris qu'il en avait trop révélé tira rapidement la couverture sur ses jambes, une excuse bâclée s'échappant de ses lèvres.
— Eh bien, c'était juste pour le plaisir.
C'était si peu convaincant que c'était nul, si nul que même un enfant de maternelle pouvait détecter un mensonge. Alors, bien sûr, le nouveau le comprit. Kongpob n'avait pas l'intention d'insister, mais il se dirigea directement vers le lit au milieu de la pièce et l'homme qui s'y trouvait glapit.
— Qu'est-ce que tu fais ? !
Au lieu de répondre, Kongpob appuya sa main directement sur les jambes d'Arthit, sous la couverture. Une légère tape suffit à faire reculer Arthit.
"Aïe !!!"
"Tu es blessé et gravement blessé. Tu ne peux pas marcher, n'est-ce pas ?"
Le diagnostic fit bouillir le sang d'Arthit ...Oui, je sais que mes jambes sont blessées et tu n'as pas besoin de me le rappeler ! Qui a dit qu'il avait le droit de toucher à mes jambes ? Il n'a même pas demandé la permission avant !
"Ce ne sont pas tes affaires. Va-t'en !"
"Comment puis-je te laisser tout seul ? Tu es blessé. Je vais te mettre le porridge dans un bol."
Non seulement le jeune homme ignora ses paroles, mais il alla même prendre un bol et une cuillère. Puis, il posa une petite table japonaise sur le lit pour servir le dîner - de la bouillie de porc avec un œuf à la coque et une tasse de pink milk. Une fois le repas terminé, Kongpob s'assit sur une chaise près de la table de lecture située de l'autre côté de la pièce et regarda fixement l'homme alité qui avait toujours l'air d'un cerf pris dans la lumière des phares. Arthit était déconcerté par ce service inattendu, mais il ne voulait pas dire "merci" - il n'était pas courant qu'un bizuteur fasse cela, et surtout pas avec le vaurien dans sa chambre.
— Pourquoi es-tu encore là ? !
— J'attends pour nettoyer les assiettes après que tu aies fini. Tu ne peux pas te lever et le faire, n'est-ce pas ?"
Ne sachant pas si Kongpob était sincère ou s'il était un emmerdeur, ses mots frappèrent Arthit en plein dans les tripes. Il souhaitait pouvoir se lever et frapper le jeune homme au visage.
Maintenant tu vois que je suis blessé et tu es devenu si arrogant, fils de pute ! Mais il savait que se disputer ne servirait à rien. Il n'avait plus d'énergie pour se lever et pousser cet homme hors de la pièce.
Donc, Arthit dut manger du porridge par frustration et laisser Kongpob scruter sa chambre. L'étudiant de première année regardait jusqu'à ce que ses yeux se posent sur la porte vitrée coulissante. Le rideau n'était pas complètement fermé, alors il eut un aperçu de la vue depuis le balcon.
...Ce balcon, il aimait toujours y jeter un coup d'oeil depuis l'autre côté du bâtiment.
C'était étrange de voir la vue de ce côté. Il s'était souvent demandé ce que l'autre homme faisait dans sa chambre. Mais maintenant qu'il était là, il se rendait compte que sa chambre était si loin et si isolée. C'était indescriptible. S'il retournait dans la chambre d'en face, il ne verrait cet homme que lorsqu'il sortirait pour étendre son linge à sécher.
Son esprit se porta sur les vêtements sur le balcon et il réalisa soudain qu'il les avait vus depuis la nuit dernière.
— P'Arthit. Je suppose que tes vêtements sont secs. Je les rentre ? S'il pleut, tes vêtements vont être mouillés.
Arthit avait mis du porridge dans sa bouche, il dut donc mâcher rapidement. Il voulait crier et arrêter le type, mais c'était trop tard. Le jeune homme avait fait coulisser la porte et était sorti sur le balcon. Il alla prendre tous les vêtements sur l’étendoir avant de demander une dernière fois.
— P'Arthit, où est le fer à repasser ? Je peux te l'emprunter ? Je repasserai tes vêtements pour toi.
— Ce n'est pas la peine ! Laisse-les là !
Le propriétaire de la chambre avait protesté à temps. Mais c'était inutile puisque l'autre homme avait déjà apporté les vêtements et les avait posés sur la chaise avant de protester à son tour.
— Tu vas les laisser prendre la poussière ? Laisse-moi les repasser pour toi.
Il ressemblait à une mère poule et rendit Arthit sans voix. Il regarda Kongpob chercher la planche et le fer à repasser qui se trouvaient sur l'étagère sous la télévision. Le gars était même généreux, il attrapa la télécommande et l'apporta à l'homme dans le lit.
— Tu veux regarder la télévision ? Je t'ai apporté la télécommande au cas où tu voudrais changer de chaîne.
C'était le genre de question qu'Arthit n'avait jamais entendu de la part d'un ami. Quand Prem était là, il tenait la télécommande comme un bien précieux, sans prendre la peine de lui demander s'il voulait regarder quelque chose. Les autres amis qui restaient avec lui avaient laissé ses affaires tranquilles la plupart du temps.
Mais ce type... il s'occupait de tout sans qu'on le lui demande. Il veillait sur lui, ramassait ses vêtements, les repassait, et n'avait aucun scrupule à se faire chasser. Il ne savait pas pourquoi Kongpob faisait tout ça mais il était sûr d'une chose...
...cela lui rappelait les derniers mots et les yeux brillants du garçon qui le regardaient après la course.
Arthit savait qu'il mangeait beaucoup plus lentement, car il était occupé à faire passer son regard entre l'écran de télévision et l'homme qui repassait ses vêtements. Les nouvelles à la télé ne lui rentraient pas dans la tête et le temps qu'il finisse de manger, Kongpob avait réussi à terminer le repassage et à les accrocher dans le placard. Il se dirigea vers la table pour prendre le bol à nettoyer et jeta la tasse de pink milk. Puis, il aperçut quelque chose sur la table de chevet.
— C'est vrai. Tu dois prendre tes médicaments. Avant que tu ne commences à manger, j'ai oublié de demander si tu avais des médicaments à prendre avant les repas.
Kongpob s'est puni d'avoir oublié. Comme on pouvait s'y attendre, il y avait des médicaments à prendre avant les repas, comme indiqué sur l'étiquette.
— ...C'est ça. Tu en as un. Pourquoi tu ne me l'as pas rappelé ? Quand tes jambes vont-elles guérir ? N'oublie pas la prochaine fois.
Une longue série de plaintes avait suivi comme si Arthit était un petit enfant. Cela fit bondir l'étudiant de troisième année qui avait été nommé chef des bizuteurs, aboyant sur la mère poule, frustré.
— Laisse-moi tranquille ! Je ne suis pas un enfant. Je suis plus vieux que toi !
Lorsque le cri se dissipa, la pièce entière devint silencieuse pendant un moment. Ce silence fit comprendre à Arthit qu'il avait été trop dur.
Il savait très bien que l'autre homme se souciait de lui. Mais il avait la dignité d'un "senior" à tenir. Il ne pouvait pas laisser l'autre homme penser qu'il était incapable de prendre soin de lui-même. Être impuissant le mettait mal à l'aise.
Pourtant, Kongpob ne montra aucun signe de colère et laissa seulement échapper un léger soupir. Il s'assit sur le lit près de l'homme blessé, parlant d'une voix plus douce.
"Je sais que P'Arthit est plus âgé que moi, mais tu dois aussi savoir que tu ne vas pas bien. Quand tu ne vas pas bien, tu as besoin de quelqu'un pour prendre soin de toi. Quand tu iras mieux, tu pourras me punir. Mais pour le moment, fais ce que je te dis... S'il te plaît ?"
Le ton ne ressemblait pas à un avertissement mais à une supplication, accompagné par les yeux qui le regardaient fixement.
... La même paire d'yeux de la même personne qui a vaincu Arthit à maintes reprises.
Il dut se détourner, décidant de prendre le médicament que lui donnait l'autre homme, cédant à sa demande, et buvant l'eau à petites gorgées pour avaler les pilules. Kongpob était en train de prendre le verre pour le laver quand Knot, l'ami qui l'avait surveillé la veille, rentra.
— Salut, Arthit. J'étais au dîner et P'Deer demandait de tes nouvelles...
La phrase se termina brusquement lorsque le bizuteur aperçut un inconnu dans la chambre de son ami. Le jeune homme se rendant compte qu'un autre bizuteur était arrivé, leva rapidement les mains pour lui témoigner son respect par un wai.
— Bonjour, P'Knot.
— Je te bénis.(1)
Knot accepta le geste avec un wai en réponse, perplexe, oubliant son personnage de bizuteur coriace pendant un moment. Le jeune homme ne s'attarda pas à poser des questions. Dès que Kongpob vit que quelqu'un était venu s'occuper d'Arthit, il ne voulut pas abuser de son hospitalité et se tourna vers l'homme dans le lit pour lui dire au revoir.
— Je vais partir maintenant. Passe une bonne journée, P'Arthit.
Le chef bizuteur ne regarda même pas le nouveau venu qui lui témoignait du respect, conservant son indifférence qui sied au chef bizuteur. Il laissa Kongpob sortir de la pièce. L'autre bizuteur qui était encore dans l'embrasure de la porte les regarda, encore plus confus.
— Mais qu'est-ce que le nouveau faisait ici ?
— Il repassait.
— Repasser quoi ??
La réponse était encore plus confuse, mais le bizuteur en chef coupa la parole à son pote.
— Je vais me coucher. J'ai sommeil.
Arthit se laissa tomber sur le lit et tourna le dos à son ami, mettant fin à la conversation.
Il ne voulait répondre à aucune question, sentant la fièvre monter alors que son visage brûlait, que sa tête tournait. C'était sûrement pour ça qu'il avait facilement laissé ce type s'occuper de lui.
Pire encore, ces yeux fous le hantaient toujours. Même s'il essayait de s'en débarrasser, il ne pouvait pas les laisser partir de son esprit comme s'ils étaient gravés dans sa mémoire.
Maintenant, Arthit en était certain. Ce que Kongpob essayait de lui montrer, ce n'était pas les yeux de la colère ni ceux d'un sentiment de faiblesse. C'étaient des yeux suppliants...
...des yeux qui le suppliaient de "comprendre" à quel point l'autre homme tenait à lui. Notes :1/ En thaï, c'est littéralement "Comme vous le feriez, rendez hommage au Bouddha". Cela signifie que lorsqu'une personne rend hommage à une personne âgée, en particulier à un parent âgé, la personne âgée répondra en disant qu'elle doit donner une bénédiction à la personne plus jeune. Dans le bouddhisme, les parents sont considérés comme saints - parfois appelés "les ordonnés de votre foyer" - et donc les membres plus âgés de la famille ont le pouvoir de bénir ou de maudire les plus jeunes. Laisser Un Commentaire »»————- ★ ————-«« | | Messages : 553
Date d'inscription : 13/07/2024
| Johanne Sam 7 Sep 2024 - 17:47 Règle n°13 Faites en sorte que le Bizuteur Reconnaisse la Dignité des Nouveaux Enfin, vint le jour que les étudiants de première année de la faculté d'ingénierie attendaient.
Après presque deux mois de bizutage, d'exercices de chant, de punitions et de pressions exercées par les seniors, aujourd'hui tout cela prenait fin. Aujourd'hui, enfin, c'était "le dernier jour du bizutage".
Dans cette université, chaque département de la faculté d'ingénierie avait sa propre réunion d'encouragement. Ainsi, il était plus facile de superviser les étudiants de première année, surtout lorsqu'ils devaient programmer la période de clôture du bizutage pour tous les départements où tous les étudiants de première année se rassemblaient.
Ainsi, à 18 heures, le terrain était rempli d'étudiants de première année de la faculté d'ingénierie, bien habillés dans leurs uniformes d'étudiants. Près de 800 étudiants de tous les départements étaient alignés avec les étudiants plus âgés qui attendaient sur la tribune pour assister à la cérémonie de clôture. C'était considéré comme l'événement majeur de la faculté.
— Hé, Kong.
Kongpob se tourna vers l'homme qui l'avait appelé et vit un ami du département de génie chimique dans une rangée à côté de lui.
— Wad. Je pensais que tu ne viendrais pas, demanda-t-il, sachant à quel point ce type était contre le système SOTUS.
Il n'avait jamais assisté aux réunions. Sa présence sur le terrain était surprenante. L'autre gars haussa les épaules et offrit une explication.
— Je ne comptais pas venir mais je voulais le gear. C'est cool si je peux le montrer à mon frère.
La raison enfantine fit rire Kongpob. Il avait presque oublié qu'en plus de la cérémonie de clôture, c'était aussi aujourd'hui qu'ils devaient gagner leur gear. Ces derniers symbolisent les ingénieurs et sont divisés en deux catégories : les "Gears de la Faculté" et les "Gears du Département". Certains départements pouvaient utiliser "l'Anneau de Promo" à la place, car les traditions variaient d'un département à l'autre. Une fois qu'ils avaient gagné ces engrenages ou ces bagues, ils étaient enfin acceptés comme "frères et sœurs", comme faisant partie de la famille de la faculté d'ingénierie.
Par conséquent, gagner l'engrenage était la "première étape" dans cette bataille de la dignité, suivie par "la reconnaissance de la promo" dans chaque département où la brutalité des bizuteurs variait.
Bien sûr, le département dont on parlait le plus en ce moment était le département d'ingénierie industrielle avec le plus grand nombre d'étudiants. Leur bizutage était devenu célèbre lorsque le chef du bizutage s'était puni en courant sous la pluie, rendant ses photos virales sur Facebook et devenant une célébrité en un clin d'œil. De nombreux étudiants de première année d'autres départements avaient donc voulu voir le bizuteur en personne.
Lorsque les bizuteurs entrèrent sur le terrain, tous les regards se tournèrent vers le chef des bizuteurs. Il marchait debout avec près de trente autres membres du département qui portaient tous des chemises d'atelier. Ils portaient un air renfrogné sur leurs visages, ressemblant à des gangsters sauvages. Puis, le chef bizuteur Arthit, qui était le leader, les salua d'une voix qui résonna à travers le terrain sans utiliser de microphone.
— Bonjour, jeunes gens !
— Bonjour, monsieur !
Tout le monde répondit à l'unisson et se tût, attendant d'entendre les prochains mots du chef bizuteur qui regardait les nouveaux d'un air sévère.
— J'ai appris que le nombre total d'entre vous qui sont venus à cette réunion était de 791, plus que ce que nous avons demandé qui était de 750. J'admire votre esprit !
… Le compliment amena de nombreux étudiants de première année à chuchoter, surpris. Ils ne pensaient pas que le brutal chef bizuteur serait gentil, contrairement à la façon dont les rumeurs l'avaient dépeint. Tout le monde était surpris, à l'exception du département d'ingénierie industrielle qui resta silencieux, connaissant l'habitude du bizuteur en chef Arthit. Il vous réconforte puis vous gifle sans ménagement... et sans pitié. C'était comme ils l'avaient prévu. Dès que la phrase suivante sortit, les chuchotements s'éteignirent alors que les étudiants de première année pâlissaient.
— … mais j'ai vérifié votre livre de signatures. Beaucoup d'entre vous n'ont pas obtenu 1.000 signatures comme vous me l'aviez promis. Vous savez ce que cela signifie ?!
Bien qu'étant dans un département différent, tous les étudiants de première année devaient participer à certaines activités ensemble. L'une d'entre elles était l'inévitable "Chasse aux signatures", où les étudiants de première année se voyaient remettre un cahier dès le début du semestre, et soumettaient leur travail une semaine avant la cérémonie de clôture pour que les bizuteurs le vérifient.
Demander 1 000 signatures d'ingénieurs n'était pas une tâche facile. Certains étudiants de première année avaient remis leurs cahiers même s'ils n'avaient pas pu terminer leur travail. Bien sûr, cela n'avait pas échappé à l'œil vigilant des bizuteurs. C'était alors une question de vie ou de mort.
— Dans le futur, vous deviendrez des ingénieurs. Un ingénieur doit tenir ses promesses. Ce que vous avez démontré aujourd'hui, c'est votre manque de préparation. Laissez-moi vous demander ceci : vous voulez toujours être des étudiants en ingénierie ?!
— Oui, monsieur !
Leurs voix résonnaient, sans peur. Même si on les grondait pour leurs erreurs, une réponse valait mieux que le silence.
— Donc, je suppose que vous êtes tous prêts. Je peux avoir le gear, s'il te plaît ?
Le chef bizuteur se tourna vers son collègue bizuteur de troisième année qui portait deux plateaux avec des engrenages dessus, l'air glorieux et prestigieux.
— Cet engrenage est le cœur de la faculté d'ingénierie. Il n'y a qu'un seul engrenage pour vous dans ce monde. Vous allez prouver que vous le méritez. Sinon, ces engrenages seront jetés dans la piscine, et vous serez disqualifiés de tous les départements.
La menace fit déglutir de nombreux étudiants de première année. Ils savaient que ce n'était pas une menace en l'air, car le chef bizuteur était sérieux. La légende disait que les bizuteurs de la génération précédente avaient jeté les engrenages dans la piscine de l'université et que toute la classe avait été disqualifiée de la reconnaissance de promo. Ils ont dû subir un bizutage de rattrapage pendant un an avant de réussir l'épreuve.
Les étudiants de première année étaient donc concentrés, attendant d'entendre la phrase finale qui déterminerait leur sort. Finalement, le chef du bizutage donna un ordre.
— Je vais vous demander de chanter l'hymne de l'université, l'hymne de la faculté, et ensuite de faire le chant de victoire en fonction du nombre d'étudiants dans votre classe. Vous devez vous diriger les uns les autres. Je serai en haut du bâtiment. Si vous ne chantez pas assez fort pour que je puisse entendre, alors vous échouez !
… Le bâtiment là-bas… Depuis le terrain, ils voyaient le bâtiment de la faculté d'ingénierie… avec sept étages. Bien qu'il ne soit pas très loin, ils n'étaient pas sûrs que leur voix puisse atteindre les bizuteurs au sommet. Mais le chef des bizuteurs ne les laissa pas protester et aboya l'ordre comme s'il voulait le graver dans la tête des étudiants de première année.
— Rappelez-vous, vous n'avez qu'une seule chance ! Faites de votre mieux et c'est tout ce que je vous demande. Vous pouvez le faire ?!
— Oui, monsieur !!
La réponse était plus forte que jamais, encourageant les nouveaux dans ce combat à prouver leur valeur.
Le chef des bizuteurs hocha la tête en signe d’acquiescement avant de conduire le groupe de bizuteurs hors du terrain, tandis que certains restaient pour garder les première année en rang. Ils n'interviendraient pas cette fois-ci, laissant les tâches aux nouveaux.
L'homme qui s'avança en tête de la file était celui qui avait été élu président de classe du département de génie civil. Il ordonna aux étudiants de première année de commencer à chanter l'hymne, l'air posé, et sa voix était forte et claire comme un leader. Les étudiants de première année commencèrent à chanter à pleins poumons l'hymne de la faculté.
La chanson qui leur avait été étrangère…
Après presque deux mois d'initiation, cette chanson aux paroles très longues et à la mélodie peu familière s'était ancrée dans leurs esprits et ils la chantaient maintenant sans aucun effort. Même s'ils venaient tous de départements différents, tous chantaient à l'unisson sans avoir pratiqué ensemble.
… C'était une voix sincère qui, ils l'espéraient, parviendrait à atteindre les bizuteurs du bâtiment au loin.
Arthit se dirigea vers le bâtiment de la faculté et prit l'ascenseur jusqu'au septième étage. Au dernier étage, il sortit dans le couloir, où quelques ingénieurs seniors étaient déjà debout pour observer les étudiants de première année à travers une grande fenêtre.
— Prem, comment ça se présente ?
Il appela son ami proche qui tenait un gros reflex numérique et zoomait sur les rangées de nouveaux étudiants, avec l'air efficace de l'homme qui l'utilisait depuis longtemps. Son ami quitta l'objectif des yeux et lui fit signe.
— Tu peux voir par toi-même. La lumière est magnifique.
Alors Arthit se dirigea vers son ami et regarda le terrain. Il entendit le faible son de l'hymne de l'université, mais il pouvait dire que c'était le dernier couplet. Ensuite, les étudiants de première année formèrent un cercle pour se préparer au chant de victoire. En raison du grand nombre de personnes, ils durent former de nombreux cercles imbriqués les uns dans les autres, et les cercles n'étaient pas vraiment circulaires. Ils ressemblaient à des fleurs dessinées par des enfants de maternelle. Mais ils étaient toujours aussi beaux dans la lumière orange du soleil couchant. Les yeux d'Arthit s'attardèrent sur la scène pendant un long moment.
… C'est terminé.
À partir d'aujourd'hui, ses fonctions de chef du bizutage touchaient à leur fin. Il n'y aurait plus d'entraînement physique pour préparer le bizutage, plus de réunion pour résumer le résultat de chaque session. Il n'y aurait plus de punition pour les nouveaux, suivie de son auto-punition qui lui donnerait de fortes douleurs aux jambes.
Même si ses jambes lui faisaient encore mal, la douleur disparaîtrait bientôt, tout comme le bizutage qui était terminé. Mais pour Arthit, il savait que les "souvenirs" resteraient. Toutes les difficultés et les fardeaux en tant que chef du bizutage, devant faire face à un certain étudiant de première année qui l'avait défié depuis le premier jour, étaient maintenant terminés. Il avait dû trouver comment gérer ce type plusieurs fois, au point d'en être frustré.
Il gloussa en pensant au vaurien et à tout le reste. Il ressentit également la perte alors que le compte à rebours commençait vers la dernière minute. En fin de compte, il devait abandonner son rôle et son autorité en tant que bizuteur et laisser les premières années décider de leur chemin. Tout ce qu'il pouvait faire maintenant était de regarder de loin, et cela incluait un certain étudiant de première année.
Clic.
Le bruit de l'obturateur le tira de sa rêverie et il se retourna pour regarder son ami. Prem pointait l'appareil sur lui, ce qui lui fit froncer les sourcils.
— Qu'est-ce que tu fais, Prem ?
— Je te prends en photo. L'ambiance est parfaite.
La personne qui était soudainement devenue la cible de l'objectif leva les yeux au ciel, mais Prem lui demanda de prendre la pose, en utilisant comme toile de fond la vue des étudiants de première année qui s'agitaient. Avant qu'il n'appuie sur l'obturateur, la voix d'un autre bizuteur l'interrompit.
— Allons-y, Arthit. Ils vont verrouiller le bâtiment dans un instant, vint lui dire Knot tandis que les autres bizuteurs prenaient l'ascenseur pour rejoindre le rez-de-chaussée.
Il commençait à faire sombre, la lumière baissant, Arthit dut quitter la fenêtre et suivre le groupe de bizuteurs pour accomplir son dernier acte.
Même si le soleil s'était couché et que les personnes présentes sur le terrain s'en remettaient aux projecteurs, l'acclamation du chant de victoire était toujours d'actualité car les étudiants de première année avaient reçu l'ordre de le faire en fonction du numéro de leur promotion. Cela signifiait que pendant 35 fois ils devaient se pencher et regarder en l'air, en criant à pleins poumons jusqu'à ce que beaucoup abandonnent finalement. Certains durent prendre un temps d'arrêt et se reposer à la tribune. Certains poursuivirent, sans se décourager. Ils s'accrochaient à leurs amis, en chantant le cri de la victoire jusqu'au bout.
Arthit réapparut, mais cette fois-ci il était sur la tribune afin que les étudiants de première année en périphérie puissent le voir. Il beugla une annonce.
— J'étais là-haut en train d'écouter. Votre voix était trop faible pour que je puisse l'entendre ! Votre formation était un désastre ! Si c'est tout ce que vous pouvez faire, vous ne méritez pas d'être nos frères et sœurs ! Le reste des seniors qui regardent depuis les tribunes, descendez s'il vous plaît. Plus besoin de les écouter ! Réunion terminée !
La dernière phrase stupéfia les élèves de première année. Ils furent encore plus bouleversés lorsque les étudiants plus âgés qui les observaient depuis le début descendirent de la tribune, les rejetant en tant que camarades ingénieurs. Ils avaient fait de leur mieux, mais ce n'était pas suffisant.
— Qu'est-ce que vous attendez les gars ? J'ai dit terminé. Vous pouvez partir maintenant !
Le hurlement du chef des bizuteurs les coupa comme un couteau jusqu'à ce que de nombreux étudiants de première année se mettent à pleurer. Mais personne n'osa sortir de la file. Les 791 étudiants de première année restèrent en formation sur le terrain. Ils avaient fait tant d'efforts. S'ils sortaient maintenant, cela signifiait… qu'ils étaient complètement vaincus.
Tout le monde pensait la même chose, sans avoir besoin de mots. Le président de la classe se précipita en avant et se tint devant le chef du bizutage, annonçant leur intention.
— Pouvons-nous avoir une autre chance de faire le chant ?!
Les bizuteurs qui quittaient le terrain s'immobilisèrent. Les lèvres d'Arthit s'étirèrent en un mince sourire, jetant un coup d'œil aux étudiants de première année sur le terrain, et hocha la tête d'un air moqueur.
— Très bien ! Vous aurez ce que vous avez demandé. Mais c'est votre dernière chance !
Le simple fait d'entendre cette permission fit gonfler leurs cœurs. Même avec une seule chance, ils feraient de leur mieux. Le président de la classe se précipita alors vers la formation et donna l'ordre du chant.
Tous les ingénieurs de première année se serrèrent les uns contre les autres, les bras autour du cou de leurs camarades, et regardèrent vers le bas. Ils crièrent le chant de victoire plus fort que jamais, faisant de celui-ci un chant qui parlait de leur valeur et de leur dignité. Cela montrait à quel point ils étaient unis et c'était une démonstration puissante.
Pourtant, pour les bizuteurs, même si c'était beau, ce n'était pas assez pour leur reconnaissance. Une fois le chant terminé, le chef des bizuteurs remonta sur la tribune et prononça son jugement pour la deuxième fois.
— Premières années, souvenez-vous de ça ! C'était votre dernier chant en tant qu'étudiants universitaires. À partir de maintenant, vous n'avez plus le droit de faire le chant de la victoire !
La disqualification d'un chant équivaut à la disqualification de leur place en tant qu'étudiants ingénieurs.
Leurs efforts des deux derniers mois, en participant à toutes les séances de bizutage, avaient été vains. Ce qu'ils avaient fait était inutile. Beaucoup de gens laissèrent échapper des sanglots incontrôlables. Même Kongpob ressentit cette lourdeur dans sa poitrine. Il voulait lever la main et demander la permission une fois de plus, sachant que leurs chances étaient minces. Mais avant que quelqu'un ne puisse faire quoi que ce soit, la voix du responsable du bizutage amena tout le monde à lever les yeux vers lui.
— … Parce qu'à partir d'aujourd'hui, vous n'êtes pas seulement des étudiants de l'université. Vous tous ici, vous appartenez à la Faculté d'Ingénierie. Votre prochain chant sera un chant de victoire qui représentera tout le monde dans cette faculté !
… Les phrases contradictoires firent que tout le monde s'arrêta alors qu'ils commençaient à saisir la véritable signification. Leurs souffles étaient pris dans leur gorge alors qu'ils attendaient les prochains mots.
— Jeunes gens, écoutez-moi bien. Pour ce test, vous avez tous réussi !
Dès que le mot retentit, des cris éclatèrent sur tout le terrain. Beaucoup sautèrent et s'étreignirent, joyeux, et beaucoup se mirent à pleurer encore plus fort que l'instant d'avant. Leurs larmes étaient nées de la joie et du soulagement. Enfin, ils avaient gagné leur place dans la faculté d'ingénierie.
— Maintenant, tous les seniors. Veuillez accueillir nos nouveaux frères et sœurs !
Le chef des bizuteurs appela ses pairs qui descendaient de la tribune. Ils ne quittèrent pas le terrain mais se tinrent autour des premières années, se préparant à lancer un chant de bienvenue aussi fort que celui des nouveaux. Les première année étaient devenus une partie de la famille des ingénieurs. Il ne restait plus qu'à passer la reconnaissance de classe dans chaque département, et l'initiation serait terminée.
Après le chant de bienvenue, les étudiants plus âgés vinrent chercher les gears sur les plateaux de cérémonie et les remirent aux étudiants de première année de chaque département. Kongpob en prit un de la main de P'Fang.
— Kongpop, félicitations.
— Merci beaucoup.
Kongpob leva les mains pour faire un wai, souriant en prenant l'engrenage emballé dans un sac en plastique transparent. Il le déballa car il voulait voir le symbole durement gagné de la faculté d'ingénierie.
L'engrenage était en laiton, en forme de roue dentée, gravé du nom de la faculté et du numéro de la classe 35. Il avait entendu dire que l'engrenage avait été choisi comme symbole de l'ingénierie parce qu'il représentait l'"unité". Un engrenage est une collection de roues dentées qui fonctionnent systématiquement. Si l'une des roues dentées se casse, l'engrenage devient défectueux. Ils avaient gagné l'engrenage parce qu'ils avaient travaillé dur ensemble, tous ensemble, et pas seulement grâce à l'aide d'un héros, comme quelqu'un lui avait dit.
Maintenant, il avait enfin compris. Tout ce qu'Arthit lui avait appris. Même si c'était une leçon difficile, tout avait son sens et ses raisons. Malheureusement, à partir de maintenant, il pourrait ne plus jamais en faire l'expérience.
Mais au moins, c'était le "premier pas" qui le rapprocherait de quelqu'un.
Clic.
La réflexion de Kongpob fut interrompue lorsqu'il entendit un son étrange. Il se tourna vers le bruit et vit un visage familier qui vérifiait l'appareil photo. Il leva rapidement les mains en guise de wai.
— Bonjour, P'Prem. Je ne savais pas que tu étais ici.
— Yep, je suis ici pour prendre des photos de vous. Je vais aller là-bas pour prendre d'autres photos.
La brève explication amena Kongpob à le regarder, déconcerté. Mais Prem n'y prêta pas attention, car il s'en alla prendre des photos d'autres élèves. Il ne voulait pas manquer un bon cliché.
Le photographe leva son appareil pour prendre une autre photo grand angle, mais l'appareil émit un bip sonore, indiquant qu'il n'avait plus de mémoire.
Eh bien, la carte était pleine. Ça devait être à cause de la vidéo qu'il avait enregistrée sur les étudiants de première année. Il avait oublié d'apporter une carte mémoire de secours.
Prem abaissa donc l'appareil photo et parcourut les photos pour choisir celles à supprimer afin de libérer de l'espace. Une image attira son attention et l'obligea à la regarder pendant un moment.
… Il ne voulait pas se féliciter, sachant qu'il était un bon photographe. Mais ces deux photos étaient vraiment belles et se démarquaient des autres images. Non pas parce qu'elles avaient un bon angle ou une bonne lumière, mais à cause des expressions faciales.
… Une expression de fierté. Les yeux du garçon brillaient comme s'il pensait à quelqu'un avec un léger sourire sur le visage. Cela semblait naturel. Pour Prem, c'était la meilleure photo de la cérémonie de clôture entre les "donneurs" de gears et les "receveurs".
… Entre les "bizuteurs" et les "nouveaux". | | Messages : 942
Date d'inscription : 19/06/2024
| Néphély Sam 7 Sep 2024 - 17:47 Règle n°14 Le Bizuteur Doit Garder Son Honneur — ...Ce soir ? Je suis libre. Oui. Oui. Je te verrai plus tard.
— Tu parles à une fille, Kong ? Tu avais l'air sacrément gentil.
M mettait des nouilles rouges dans sa bouche, mais il tendait l'oreille pour écouter la conversation comme un radar. Les autres personnes autour de la table étaient également intéressées alors qu'elles déjeunaient. Ils n'étaient pas vraiment intéressés par les affaires de Kongpob mais espéraient que si des filles flirtaient avec le roi de l'université, peut-être pourrait-il leur en présenter. Ils attendirent donc d'entendre la réponse du gars qui prenait une cuillère pleine de riz frit.
— Mon mentor de code voulait me payer un repas.
Tout espoir avait été tué. Les visages des autres gars s'effondrèrent alors qu'ils regardaient leurs assiettes.
...Merde. Tu avais un bel ami, mais il était inutile. Après que Kongpob ait été couronné, il avait eu beaucoup de prétendantes... des filles, des gays, des bisexuels, tout ce que vous voulez. Mais il n'avait montré aucun intérêt pour qui que ce soit. Il avait seulement fait connaissance avec eux, mais sans laisser entrer personne, comme le ferait quelqu'un qui protège sa vie privée. Même s'il semblait être amical, très peu de gens savaient à quoi il pensait. Un jour, M s'était plaint à lui, lassé.
— On a de la peine pour toi, mec. Tu gâches ta belle gueule.
— Je n'ai pas le temps pour ça, tu le sais. Rien que les cours et les activités me prennent déjà tout mon temps. Samedi, c'est le jour de la reconnaissance, tu te souviens ?
Kongpob donna à son ami une réponse sincère. Ce n'est pas qu'il ne se souciait pas des femmes ou des relations, mais maintenant il préférait se concentrer sur autre chose. Même après la fin du bizutage, il y avait de nombreuses activités à faire. Cela utiliserait toute l'énergie qu'il avait.
— En parlant de la journée de reconnaissance, je me demandais ce que les bizuteurs ont dans leurs manches. Tu vas manger avec le mentor de troisième année, alors renseigne-toi pour nous.
M lui tapa sur l'épaule en lui confiant une tâche avec un sourire malin. Les autres approuvèrent l'idée. L'homme qui se voyait confier une tâche d'espion secoua violemment la tête en signe de rejet, disant à ses copains que ce ne serait qu'un simple repas. Finalement, ils lui dirent que c'était pour le bien de tous et de sa promotion, et qu'il devait donc accepter le travail.
Ainsi, à dix-huit heures, Kongpob se présenta avec une mission d'espionnage dans un restaurant de BBQ de porc grillé en face du campus. C'était un endroit populaire pour offrir une récompense aux élèves de même code, car c'était bon marché, délicieux et pratique. La plupart des tables étaient déjà occupées mais il n'était pas trop difficile pour lui de balayer des yeux le restaurant jusqu'à ce qu'il trouve son mentor assis dans un coin au fond.
— Bonjour, P'Ple.
Il leva la main pour saluer son mentor aux yeux bridés qui avait toujours l'air aussi insolente que la première fois qu'ils s'étaient rencontrés, lorsqu'elle lui avait apporté des livres et des collations. Cette fois, il vit un étudiant plus âgé, mignon et grand, qu'il ne connaissait pas, assis avec elle.
— Nong Kongpob, j'aimerais te présenter 'P'Noomnoon', ton mentor de code de troisième année, et 'P'Paak', ton mentor de quatrième année.
— Salut. Je suis désolé d'être en retard. Vous attendez depuis longtemps ?
Réalisant qu'ils étaient ses mentors de code 0062, il leur rendit hommage avec un wai, et demanda avec culpabilité. Il n'était qu'un étudiant de première année, mais il les avait fait attendre. Et il était en retard le premier jour de la réunion, ce qui était impoli. Le mentor Noomnoon secoua la tête, et dit sur un ton amical.
— Non, tu n'es pas en retard. On vient juste d'arriver. L'endroit est toujours bondé alors nous avons voulu réserver une table pour être sûrs d'avoir assez de place pour tout le monde.
— Tout le monde ?
Kongpob fronça les sourcils car il pensait que ses mentors du code étaient tous là. Peut-être qu'il y aurait ceux qui avaient été diplômés ? Il avait partiellement raison quand Noomnoon prit la parole, surpris.
— Oh, Ple ne t'a pas dit ? Je vais te le dire alors. Voilà le truc, Kong. Notre mentor de code qui a été diplômé l'année dernière s'appelait P'Fon. C'est la petite amie de P'Tum et ils étaient dans la même classe. Ils vont se marier à la fin du mois prochain. Notre département a une tradition selon laquelle si deux codes mentors se marient, alors les deux codes se mélangent en tant que "co-mentors". C'est pourquoi les mentors de P'Tum sont également présents.
Le jeune homme hocha la tête pour montrer qu'il connaissait cette tradition. C'était charmant. Cela aidait à rapprocher les deux codes à mesure qu'ils apprenaient à se connaître.
— Quel est l'autre code ?
— 0206. Tu vois, c'est juste un échange de numéros. Les gens disent que Fon et Tum sont de vraies âmes sœurs.
Noomnoon expliqua avec une expression rêveuse alors que P'Paak, la quatrième année, la taquinait d'être mélodramatique. Elle lui donna une tape sur l'épaule et vit un groupe de personnes à l'entrée du magasin de barbecue.
— Eh bien, les voilà.
On dirait que les mentors du code 0206 s'étaient réunis devant le restaurant puisque toute l'équipe arriva en même temps. Le wai devint confus alors que les juniors rendaient hommage au groupe, notamment au plus ancien, P'Tum, l'homme à l'allure chinoise. Malgré ses lunettes, ses yeux étaient toujours très bridés, contrairement à "P'Fon", la superbe femme métisse thaïe-indienne aux yeux fascinants. Elle était si belle que certaines personnes dans le restaurant se retournèrent pour la regarder, mais elle n'y prêta pas attention. Au lieu de cela, elle commença à marcher vers quelqu'un avec un regard déterminé sur son visage.
— Te voilà ! Tu es Kongpob, le roi de l'université, pas vrai ? J'ai vu tes photos sur le site web pendant le concours. Et bien, tu es beaucoup plus beau en personne.
Kongpob sourit maladroitement aux compliments en sentant les vibrations de jalousie provenant du futur marié. P'Tum s'éclaircit la gorge, et tout le monde le regarda.
— Venez ! Présentons-nous. Voici notre première année 0206, 'Lin'. Là-bas, le deuxième année, 'Touch'. Et le quatrième année, 'Pete'. Le troisième année sera bientôt là.
Lin était une fille aux cheveux courts, avec une démarche masculine. Les deuxième et quatrième années étaient toutes deux de bonne humeur. Ainsi, les camarades du code 0062 commencèrent à se présenter pour mieux connaître les gens du code 0206. À partir de maintenant, ils allaient devenir des co-mentors.
Avec tout le monde présent, ils commencèrent à faire griller le porc. Un buffet avait l'avantage de permettre à chacun de manger ce qu'il voulait, sans avoir à se soucier des manières. Avec le grand nombre de personnes, la table avait deux réchauds pour la zone senior et les juniors. Ils mangeaient et discutaient entre eux, se détendant jusqu'à ce qu'ils soient interrompus par la voix de Tum en bout de table qui se leva pour faire signe à quelqu'un devant le restaurant.
— Hé ! I-Oon ! Par ici.
Kongpob devina qu'il s'agissait du troisième année qui allait se joindre à eux. Avec un nom aussi doux, il devait s'agir d'une fille. Il se tourna pour regarder le propriétaire du nom mais fut surpris de voir quelqu'un portant une chemise de labo familière. De plus, l'homme s'approchait de la table et Kongpob écarquilla les yeux lorsque l'autre leva la main pour faire un wai, en parlant d'un ton sinistre.
— Hé, Phi. Je t'ai dit de ne pas m'appeler 'I-Oon'. Appelle-moi 'Arthit'.
L'expression du chef bizuteur était tellement sinistre, contrairement à Tum, qui répondit d'un ton léger.
— Pourquoi ? Ton surnom est 'I-Oon'. Je t'appelle ainsi depuis la première année que tu es ici et je ne veux pas le changer.
— Mais maintenant, je suis dans ma troisième année et je suis le chef bizuteur.
Arthit essaya d'accentuer le mot "chef bizuteur". Il y avait des étudiants de première année ici et il devait garder sa personnalité. Si quelqu'un découvrait qu'il avait un joli surnom comme 'I-Oon'(1), toute l'image de l'impitoyable bizuteur serait ruinée... surtout pour cette personne assise au bout d'une table. Il avait vu comment le gars le regardait avec une étincelle dans les yeux qui pouvait être interprétée comme étant à la fois surprise et amusée.
Il savait qu'il allait rencontrer le nouveau 0062. Il connaissait ces chiffres par cœur. Il voulait lui faire faire des débuts mémorables, lui faire savoir qui était le mentor du code et gagner le respect de ce type qui l'avait toujours défié. Malheureusement, il avait eu un cours en laboratoire, donc il était en retard. Même en se dépêchant, il n'avait pas pu arriver à l'heure. Pire encore, son aîné l'avait appelé par ce surnom à son arrivée. Il aurait dû parler à P'Tum pour préparer son entrée !
L'homme qui savait qu'il avait foiré son arrivée avait l'air fatigué. Mais son aîné le comprenait même s'il avait involontairement mis le gars dans l'embarras.
— C'est vrai, j'oubliais que tu étais maintenant le chef bizuteur. Vous n'avez pas encore terminé le bizutage, les gars ?
— Si. Mais il nous reste encore la journée de reconnaissance et la cérémonie de remise des équipements du Gear.
En raison de ses deux dernières batailles, Arthit devait encore garder sa façade de dur à cuire. Il voulait désespérément se raser, se couper les cheveux, se débarrasser de son air sauvage mais il devait les garder. Sinon, les nouveaux ne seraient pas intimidés lorsqu'il leur ordonnerait de faire quelque chose.
— Vous avez réfléchi à la façon dont vous alliez les faire travailler ?
La question allait directement au cœur du problème. Kongpob, qui était aussi un espion, tendit l'oreille pour obtenir la réponse afin de pouvoir partager l'information avec ses amis. Mais son espoir fut anéanti par la réponse vague et secrète.
— Je ne peux pas vous le dire. Mais je vous assure qu'il sera aussi brutal que celui que vous m'avez donné.
Les derniers mots ne manquèrent pas d'intimider, et Kongpob réalisa qu'il n'avait aucun moyen de savoir. Avec le chef bizuteur ici, sa mission avait échoué avant d'avoir commencé. Il vit le sourire triomphant d'Arthit, sachant qu'il avait le dessus avant que son visage ne pâlisse au fur et à mesure que le quatrième année poursuivait.
— Eh bien, on vous a fait courir autour du campus et chanter l'hymne de la faculté. Je me souviens que tu hurlais comme un chien devant le dortoir des femmes à 4 heures du matin. La gérante t'avait même jeté un bol à la tête. Tu t'étais enfui si vite !
...Et voilà, c'était reparti. Embarrasse ton protégé de code devant les autres, tu veux ? Tu ne sais pas quand il faut tenir ta langue, Phi ? Regarde comment le première année sourit comme un idiot !
Arthit avait envie de se frapper le front, se sentant résigné face à son mentor de code. Au lieu de l'aider à garder son personnage de dur à cuire, Tum le rendait encore plus amusant. Il n'avait pas envie de poursuivre la conversation, ne sachant pas ce que le quatrième année pourrait encore évoquer pour l'humilier. Il se leva donc pour éviter la conversation.
— Je vais aller chercher du porc.
Il se leva rapidement et partit en direction du buffet, sans se soucier de savoir si la bande allait faire des commérages sur lui. C'était mieux que de subir les moqueries des élèves de première année.
Pour être honnête, il n'était pas en colère contre P'Tum. Ils étaient proches et il savait que le gars était enjoué et drôle. Mais il avait un mauvais timing. Son travail de chef bizuteur n'était pas encore terminé, alors il ne pouvait pas se joindre à la rigolade, surtout pas avec ce voyou de première année dont les yeux pétillants le regardaient.
Merde. Pourquoi était-il toujours au mauvais endroit au mauvais moment ?!
Il ne trouvait pas de moyen de se défouler, alors il s'en prenait à la nourriture. Arthit prit du porc avec des pinces, mettant au hasard le gros tas de viande sur une assiette jusqu'à ce qu'il glisse presque. Il vit des légumes sur un plateau à côté du porc et voulut prendre une autre assiette pour gagner du temps. Il s'avéra que les assiettes étaient trop grandes et qu'il cherchait un moyen d'en tenir trois en même temps. Tout à coup, on lui en retira une et une voix aimable prit la parole.
— Laisse-moi t'aider.
Ce n'était personne d'autre que le type qui aimait se trouver au mauvais endroit au mauvais moment. Il lui parlait même avec un sourire.
— Je ne savais pas que ton surnom était I-Oon.
— Qui t'a permis d'utiliser ce surnom ?!
Arthit grogna. Il savait qu'il allait être taquiné et il avait raison. Cela ne faisait même pas trois minutes qu'il avait quitté la table, et ce type l'avait suivi jusqu'ici pour le narguer.
...Personne ne savait qu'il avait ce surnom, sauf ses meilleurs amis. Ils l'avaient toujours appelé Arthit, car dire 'I-Oon' leur donnait la chair de poule. Ils auraient pu l'appeler 'Oon'(2) mais ça devenait trop confus, alors il leur a dit d'arrêter. De plus, ce surnom était trop doux et ne lui correspondait pas. Mais il semblait que quelqu'un ici n'était pas d'accord car Kongpob intervint, curieux.
— Pourquoi je ne peux pas t'appeler comme ça ? Je pense que 'I-Oon' est un bon surnom.
— Si tu continues à m'appeler comme ça, je vais te punir avec des pompes ici même dans le restaurant. Et n'en parle à personne !
Le chef bizuteur ordonna durement, son attitude sévère. Cela fit reculer l'homme grondé et Kongpob répondit rapidement en utilisant son autre nom.
— Oui, P'Arthit.
Le porteur du nom hocha la tête, satisfait. Ce nouveau venu aurait dû connaître sa place et ne jamais contester son autorité. Il partit, ramenant les assiettes à la table, mais une voix douce derrière lui l'arrêta.
— Tes jambes vont mieux maintenant ?
— Um-hm, elles vont bien.
— C'est bon à entendre. Je ne dois pas trop m'inquiéter pour toi.
Cette brève phrase fit qu'Arthit s'arrêta et regarda l'autre homme. Celui-ci arborait un léger sourire, comme il l'avait toujours fait, mais ce n'était pas un sourire provocateur comme la première fois. C'était le sourire de quelqu'un de soulagé. Cela rappela à Arthit la fois où Kongpob était venu dans sa chambre et l'avait aidé. C'était si évident maintenant.
Ses yeux... et ses sourires étaient toujours sincères et vrais. C'était les émotions qu'il avait toujours ressenties quand Kongpob était là.
Le chef bizuteur ne répondit pas. Au lieu de cela, il tourna sur lui-même et se dirigea directement vers la table. Il se laissa tomber sur le siège à côté de Tum, la place libre que le senior lui avait réservée. Il parlait aux étudiants de première année, ses dernières victimes.
— Eh bien, je veux savoir pourquoi vous avez choisi d'étudier l'ingénierie ici.
— C'est près de chez moi.
La réponse de Lin rendit toute la table muette, ne sachant pas si elle plaisantait ou pas. Le senior qui avait posé la question fronça les sourcils, incrédule, mais Lin insista pour dire qu'elle disait la vérité. Alors tout le monde éclata de rire. Bien, c'était clair et simple. Tum demanda alors aux autres.
— Et toi ? J'espère que ce n'est pas parce que c'est proche de là où tu vis.
Kongpob secoua rapidement la tête et donna une réponse qui rendit tout le monde également sans voix mais... pour une raison différente.
— Non, ce n'est pas ça. Je voulais étudier l'économie mais ma mère voulait que je fasse des études d'ingénieur. Alors j'ai passé les examens pour entrer dans cette université.
Tous les yeux étaient sur lui. Même Arthit qui prenait le porc avec une baguette s'arrêta. P'Fon poursuivit et demanda.
— Pourquoi tu n'as pas étudié ce que tu aimes ? Étudier quelque chose que tu n'aimes pas pendant quatre ans sera une torture. Tu gâches aussi ta chance. Tu pourrais peut-être en reparler à ta mère ? Ton avenir t'appartient.
— Quelqu'un aussi me l'a dit.
Kongpob avait pensé à son choix plusieurs fois.
Il aimait les marchés boursiers, les indicateurs économiques et les chiffres, et voulait travailler dans ce secteur. Mais il ne voulait pas désobéir à sa mère qui avait mis beaucoup d'espoir en lui. Parfois, son esprit et son cœur s'opposaient. Même maintenant, il ne pouvait toujours pas abandonner ses rêves.
— Eh bien, si tu ne veux pas étudier l'ingénierie, tu pourras être transféré l'année prochaine. Mais cette année, tu seras notre protégé de code. Nous t'achèterons tous les repas que tu veux, ne t'inquiète pas !
Tum l'encouragea et Kongpob lui sourit avec reconnaissance. Avoir de gentils mentors de code le rendait fier de faire partie de cette faculté.
... Une faculté qui était unie et qui avait un lien fort entre les Phi et les Nong.
La soirée barbecue des mentors et mentorés se poursuivit alors que les fumées des grills les enveloppaient. Ils discutèrent de bon cœur jusqu'à ce que l'horloge sonne 20 h. Il était temps de partir. Ils remercièrent les aînés qui les avaient invités, souhaitèrent un heureux mariage au couple et promirent de se présenter au banquet.
Puis ils commencèrent à partir un par un. Ceux qui n'avaient pas de voiture allèrent avec Tum car il les déposait. Kongpob était venu avec sa moto et donc il pouvait se débrouiller tout seul. Ensuite, il y avait Arthit qui était toujours devant le magasin. Alors il ne put s'empêcher de demander.
— Comment tu vas rentrer chez toi ?
— C'est pas tes oignons !
Le cri était exactement comme les autres fois où le chef des bizuteurs voulait mettre fin à la conversation. Mais cette fois, Kongpob savait que c'était différent. Le type était crispé, furieux, frustré comme si quelque chose avait mal tourné. Et ça devait être à cause de lui.
— Tu es en colère contre moi ?
La question fit lever les yeux froids et durs d'Arthit sur lui.
— Pourquoi je serais en colère contre toi ? Qu'est-ce que tu es pour moi ? Tu n'as même pas gagné la reconnaissance. Est-ce que tu veux même étudier dans cette faculté ?!
… Le sarcasme lancé sur lui sidéra Kongpob, il essaya tout de même de protester.
— Mais je suis un étudiant en ingénierie.
— Hein, tu es sûr de vouloir en être un ? Si tu ne voulais pas étudier ici, pourquoi tu es entré dans la faculté et tu as volé la place de quelqu'un qui la voulait ? Tu réalises combien de personnes veulent étudier l'ingénierie ? Si tu es venu ici juste pour tuer le temps et repasser les examens l'année prochaine, tu es un connard égoïste !
Les mots durs étaient pleins de mépris, rendant Kongpob engourdi de confusion. Il ne comprenait pas pourquoi Arthit l'insultait et rejetait ses intentions.
— J'avais mes raisons, et je ne suis pas ici pour tuer le temps. J'ai participé à toutes les activités de la faculté et j'obtiendrai la reconnaissance.
L'explication était, bien sûr, inutile puisque le bizuteur poursuivit sa moquerie.
— Ne sois pas si arrogant. Ce n'est pas si facile de gagner la reconnaissance !
— Je la gagnerai !
Kongpob cria, confiant, rencontrant les yeux d'Arthit et ne reculant pas. Cela mettait encore plus en colère le chef bizuteur qui essayait d'être digne.
... Il savait que le nouveau s'était joint à toutes les activités, et c'est pourquoi il croyait que Kongpob voulait vraiment étudier l'ingénierie. Ensuite, il avait déclaré qu'il ne voulait pas être ici mais qu'il était quand même déterminé à être reconnu comme un étudiant en ingénierie. Pour quelqu'un qui ne s'intéressait pas du tout à l'ingénierie mais qui avait quand même le courage de déclarer son intention d'être reconnu comme tel, c'était irrespectueux car il étalait son ego sur tous les aînés ingénieurs !
Arthit allait ouvrir la bouche pour lancer une autre insulte mais le bruit d'une moto le coupa alors qu'elle s'approchait et s'arrêtait devant le restaurant de BBQ. C'était Knott qui était venu le chercher. L'homme sauta rapidement sur le véhicule et commença à se plaindre.
— Tu étais où, bordel ? Je t'ai appelé plusieurs fois. Allons-y !
— Et le première année ? Comment il rentre chez lui ?
Knot regarda Kongpob qui leva ses mains pour lui rendre hommage, s'inquiétant pour le plus jeune. Mais Arthit le coupa.
— C'est un adulte. Il sait comment rentrer chez lui. Allons-y maintenant !
L'autre bizuteur éloigna le véhicule, perplexe après s'être fait engueuler, laissant le jeune homme derrière lui sans un mot d'adieu. Il devina qu'ils avaient dû se battre lorsque son ami prit la parole, frustré, derrière lui.
— Organisons une réunion demain. J'ai changé d'avis à propos de la journée de reconnaissance. On va rendre la tâche difficile.
— Qu'est-ce que le première année t'a fait cette fois ?
Knot demanda d'un air fatigué. Son ami était tellement furieux que ça devait être quelque chose de grave. Il n'arrivait pas à comprendre pourquoi, cependant, l'auteur du crime était toujours le même. C'est alors qu'il découvrit le problème, en entendant derrière lui un discours furieux au gré du vent.
— Tu sais... ce connard de 0062 disait qu'il voulait étudier l'économie. Il a juste choisi de faire de l'ingénierie parce que sa mère l'y a obligé !
— Et alors ?
— Il a dit qu'il serait transféré dans une autre faculté !
— Eh bien, il a raison. S'il ne se plaît pas ici, il pourrait aller dans une autre faculté. Tu te souviens de Vin ? Il est allé à l'étude des médias à la place.
Le rappel du nom d'un ami qui avait été dans la même bande qu'eux en première année obligea Arthit à se reprendre et à réfléchir.
... C'est vrai. À l'époque, beaucoup de gens de sa promotion étaient partis vers d'autres facultés. Certains n'aimaient pas l'ingénierie, d'autres ne pouvaient pas suivre leurs études et d'autres encore ne pouvaient pas s'adapter à l'environnement. Cela ne le dérangeait pas et il acceptait même leurs décisions... même s'il s'agissait de ses amis.
— Alors qu'est-ce qui te dérange ? Ne me dis pas que c'est à cause de ça ?
Aucune réponse d'Arthit. Il n'arrivait pas à trouver les mots pour expliquer ce qui le contrariait. Un simple étudiant de première année qui voulait changer de faculté, ce n'était pas grand-chose. Il avait même commencé à se battre avec ce type.
L'une des raisons pour lesquelles il était frustré était qu'il voulait montrer à l'étudiant de première année que le responsable du bizutage avait de l'honneur. Il avait consacré son temps et son énergie à faire en sorte que les étudiants de première année apprécient leur faculté et cet étudiant avait dit qu'il n'avait pas d'amour ni de passion pour l'ingénierie. Comment pouvait-il rester calme ? Une autre raison pour laquelle il était trop émotif ? Peut-être qu'il était juste...
— ...Le BBQ était nul.
Arthit répondit calmement alors que sa colère se dissipait. Mais son cœur se sentait plus lourd.
... Ouais, la deuxième raison pour laquelle il était frustré était parce que le barbecue était nul... après que cette certaine personne ait prononcé le mot.
...le mot qui montrait son hésitation "à partir". | | Messages : 87
Date d'inscription : 01/07/2024
| amelyma Sam 7 Sep 2024 - 17:48 Règle n°15 Trouvez le Moyen de Contourner le Jeu du Bizuteur La journée de reconnaissance du département d'ingénierie industrielle eut lieu juste cinq jours après la fin de l'initiation.
Les étudiants de première année n'avaient pas encore récupéré. Leurs gorges desséchées venaient juste de revenir à la normale après le boum et ils devaient se préparer à une nouvelle bataille. Mais même s'ils étaient fatigués, les premières années avaient traîné leurs corps fatigués jusqu'à l'événement.
C'était parce que le jour de reconnaissance était aussi important que la cérémonie de remise de l'équipement du Gear. Elle était considérée comme plus brutale. La façon de gagner la reconnaissance variait chaque année, selon les bizuteurs qui leur concoctaient les épreuves. Il pouvait s'agir de courir autour du campus en chantant l'hymne de l'université ou de grimper sur un poteau glissant et huilé pour y attraper un drapeau qui se trouvait à cinq mètres du sol.
Il n'était donc pas surprenant que les étudiants de première année qui s'étaient réveillés tôt fassent la queue au milieu du terrain à 7 heures du matin le samedi. Ils étaient anxieux, plus nerveux que lorsqu'ils attendaient les résultats d'admission, car ils attendaient l'annonce des bizuteurs concernant les épreuves.
De nombreux étudiants téméraires de première année avaient essayé de se renseigner sur les épreuves auprès de leurs aînés, mais les étudiants plus âgés étaient restés muets. C'était un secret très bien gardé par les bizuteurs. Pourtant, ils avaient entendu quelque chose dont ils ne savaient pas si ça leur remontait le moral ou si cela empirait les choses.
... Ils avaient entendu que le rituel de reconnaissance de cette année serait l'un des plus difficiles !
Kongpob, étant l'un des agents de renseignement et ayant affronté directement le chef bizuteur lors de la soirée barbecue, était certain que ce test de reconnaissance ne serait pas facile. Il pourrait avoir été le catalyseur de cette brutalité supplémentaire.
Il savait... que la confiance qu'il avait montrée au chef des bizuteurs pour mériter leur place avait mis Arthit en colère. Ce qu'ils avaient eu ne pouvait pas être appelé une dispute mais cela avait laissé certaines questions en suspens.
Il voulait qu'Arthit comprenne qu'il avait glissé ces mots non pas parce qu'il voulait encore le défier, mais parce qu'il voulait seulement montrer à Arthit ses efforts et ceux de ses amis. Ainsi, même si cela allait être difficile, il devait traverser cette bataille et prouver qu'ils avaient leur place dans la faculté d'ingénierie. Ils seraient les étudiants de première année acceptés et reconnus par tous dans le département.
C'est pourquoi Kongpob était impatient de voir le chef bizuteur. Ses yeux étaient rivés sur celui qui menait la procession des troisièmes années sur le terrain avant de s'arrêter devant les rangs des étudiants de première année, l'air toujours aussi impitoyable. Puis, Arthit enchaîna avec son discours.
— Premières années, écoutez bien ! Aujourd'hui est votre grand jour. Vous allez nous prouver à tous que vous avez votre place dans ce département !
Arthit balaya des yeux les étudiants de première année bien habillés sur le terrain. Ils semblaient être plus nombreux que précédemment. Donc, au moins, ils reconnaissaient l'importance de ce rituel. Mais le nombre n'affecterait pas la mission qu'il s'apprêtait à leur confier.
— Vous avez vu le drapeau de la classe sur la tribune ? !
Tous les regards se tournèrent vers le drapeau pourpre qui portait l'insigne de l'engrenage d'ingénierie avec des lettres blanches épelant le nom du département en anglais. Il flottait au-dessus du sommet de la tribune en plâtre, où des tissus de cinq couleurs avaient été posés sur les marches qui descendaient jusqu'en bas.
— Votre mission est de récupérer ce drapeau ! Je ne vais pas vous dire comment. Vous devrez utiliser ce que nous vous avons appris et vos capacités pour l'obtenir. Vous avez jusqu'à 19 heures aujourd'hui. Si vous ne l'obtenez pas, vous serez disqualifiés en tant qu'élèves ingénieurs !
L'ordre était simple mais la tâche était difficile. Les mots du chef bizuteur ne révélaient rien. Ils avaient plus de dix heures pour récupérer le drapeau, il devait donc y avoir un piège, un plan caché. Même si ça les démangeait de demander, le bizuteur les avait déjà avertis de ne pas le faire. Les premières années devaient donc se taire et accepter leur sort, attendant le compte à rebours du chef bizuteur Arthit.
— Si vous êtes prêts, vous pouvez commencer ! Premières années, venez saisir le drapeau !
Après avoir terminé son discours, le chef des bizuteurs se recula, laissant une ouverture aux premières années pour s'emparer du drapeau. Les étudiants de première année se regardèrent avec perplexité. Ils ne pensaient pas que le chemin pour prendre le drapeau serait pavé de pétales de rose comme ça. Mais ils savaient que s'ils restaient hésitants et que personne ne s'avançait, toute la classe perdrait le drapeau.
Un homme du premier rang fut propulsé en avant comme un commando. Il marchait d'un pas chancelant, en regardant le haut de la tribune. Mais dès qu'il posa un pied sur la première marche, Knot se glissa devant lui et lui bloqua le passage.
— Qu'est-ce que tu fais, le nouveau ?
L'étudiant sursauta, choqué, mais rassembla son courage pour répondre.
— Je viens récupérer le drapeau.
— Non, tu ne le prendras pas ! Descends, s'il te plaît !
Le refus estomaqua le jeune homme, mais ce fut exactement comme beaucoup l'avaient imaginé. Les bizuteurs ne les laisseraient pas passer directement et prendre le drapeau facilement à moins qu'ils ne prouvent qu'ils le méritaient. Ce qu'ils voulaient savoir, c'était ce qu'il fallait faire.
— Comment on est supposé récupérer le drapeau ?
— C'est ton problème. Ce ne sont pas mes affaires !
Ces mots dédaigneux donnèrent à tout ceux qui se trouvaient sur le terrain l'impression d'avoir reçu une claque sur la tête, réalisant à l'instant même que la lutte pour obtenir le drapeau de la classe serait rude.
Une épreuve sans indice et sans consigne. Ils devaient aussi faire ce que les bizuteurs voulaient. Qui aurait pu accomplir cela ? La conquête du drapeau de la classe cette année pourrait être appelée par un ou deux mots...
...Putain de dure !
Même Kongpob n'avait pas imaginé que ce serait comme ça. C'était plus compliqué que d'utiliser la force physique ou la matière grise pour s'emparer du drapeau. C'était être perdu et tâtonner dans le noir, sans lumière qui les mènerait au but.
Même si cela semblait sans espoir, 200 têtes valaient mieux qu'une. Tous les élèves de première année décidèrent de faire un brainstorming pour trouver une solution. Ils s'assirent en cercle sur le terrain et entamèrent une discussion sérieuse menée par Tew, l'homme qui avait été poussé à l'avant un peu plus tôt. Il lança la première question.
— Quelqu'un a une idée ?
— Pas la moindre idée. Nous n'avons même pas un putain d'indice.
La première question suscita une réplique véhémente de la part d'un homme joufflu portant un badge au nom de 'Oak'. Tout le monde acquiesça, comprenant pourquoi le gars était frustré. Les bizuteurs n'avaient rien expliqué. Les étudiants de première année pourraient tout aussi bien lire dans les pensées pour trouver la solution. Ils étudiaient l'ingénierie, pas la sorcellerie.
— Peut-être que le chef des bizuteurs nous a déjà donné un indice. Pensez-y.
May, une fille à lunettes, avait levé la main pour proposer une idée, voulant calmer ses camarades. Une fille aux cheveux courts, assise à côté d'elle, fit une observation.
— Eh bien, je me demande à quoi servent ces tissus colorés sur l'escalier ?
Cette question fit se retourner Kongpob pour regarder la tribune. Le bizuteur Knot était toujours là, gardant la première marche qui menait au drapeau. Derrière lui se trouvait une toile de fond jaune, suivie de la toile bleue sur la deuxième marche, puis de la verte, de la rose et de la rouge, jusqu'au drapeau pourpre du département au sommet.
Au début, il avait pensé que c'était des décorations pour mettre en valeur le drapeau du département. Mais en vérité, ces cinq couleurs n'avaient rien à voir avec son département. Seul le pourpre était la couleur de la faculté. La façon dont les tissus étaient attachés aux escaliers ressemblait à...
— Les niveaux dans un jeu.
La voix qui exprima la pensée de Kongpob vint d'un ami proche assis à côté de lui. M avait levé la main et offert son point de vue de joueur. Il l'avait compris dès le premier coup d'oeil et commença à l'expliquer à d'autres amis.
— Regardez, les tissus attachés aux étoiles représentent chaque niveau que nous devons passer. Il y a cinq couleurs. Ça veut dire que les bizuteurs ont préparé cinq niveaux que nous devons franchir. Mais comment ? Je n'en ai pas la moindre idée.
Les mots de M avaient allumé une petite flamme d'espoir chez les premières années. Le problème était de savoir quels étaient ces cinq niveaux et par où ils devaient commencer.
Kongpob fronçait les sourcils, tendu, tout comme ses amis, tandis que les rouages de leur tête travaillaient pour trouver la réponse. Il se concentrait sur les mots du chef bizuteur.
... Arthit voulait-il garder l'information pour lui ? Ou quelque chose avait-il échappé à l'esprit de Kongpob ?
'Vous allez avoir besoin de ce que nous vous avons appris et utiliser vos capacités pour obtenir le drapeau.'
Tout ce que les bizuteurs leur avaient appris. Quelle était cette chose que les troisièmes années répétaient toujours dans chaque session de bizutage ? Il n'y avait qu'une seule réponse,
"SOTUS"
Le marmonnement de Kongpob était encore assez fort pour que M, assis à côté de lui, l'entende.
— Qu'est-ce que tu as dit ?
— Ça pourrait être à propos de SOTUS. C'est ce que les bizuteurs nous ont appris,dit-il, incertain.
Mais les mots illuminèrent les yeux de M comme s'il venait de trouver la pièce manquante d'un puzzle.
— C'est vrai. Si c'était SOTUS, ça serait logique. Les cinq toiles sur la tribune sont les cinq lettres que nous devons traverser.
M tapa les épaules de son ami comme un homme heureux qui venait de résoudre le mystère et leva les mains pour tout expliquer aux autres camarades. Il n'y avait aucune garantie qu'ils aient raison, mais ils préféraient tenter leur chance. C'était mieux que de perdre du temps, alors les élèves de première année commencèrent leur quête avec la première lettre sur la première marche.
'Séniorité : respectez vos aînés.'
— Alors qu'est-ce qu'on fait pour y arriver ? Vous voulez qu'on respecte tous les aînés ?
Demanda bruyamment quelqu'un depuis l'une des rangées.
Le geste le plus simple pour respecter les aînés était d'effectuer un waï. Les élèves de première année avaient été forcés de présenter leurs respects à tous les aînés qu'ils croisaient, car c'était un signe de bonnes manières et de traditions. Mais que les deux cents élèves de première année présentent leurs respects aux bizuteurs un par un serait bizarre et ne les aiderait pas à passer le premier niveau. Il devait y avoir autre chose qui démontrait leur respect envers les aînés...
— Plus âgés que les troisièmes années, il y a les quatrièmes années. Vous vous rappelez comment ils ont été intimidés quand les 4ème années sont arrivées ?
Oak se leva, les faisant se souvenir de l'incident où les bizuteurs de quatrième année avaient ordonné aux troisième année de se punir dans la salle d'activités. S'ils venaient à nouveau aider, il y aurait peut-être un moyen pour eux d'obtenir le drapeau. Le sommet de la chaîne alimentaire dans le département était être la quatrième année.
— Qui a les numéros des quatrièmes années ? Faites venir le délégué de classe. Appelons les secondes et les troisièmes années, aussi. Appelez-les tous ici !
Du brouhaha se fit entendre alors que les étudiants de première année cherchaient les numéros. N'importe quelle autre année du moment qu'elle était supérieure à celle des étudiants de première année.
La chasse aux délégués de classe commença lorsque chaque étudiant de première année appela son mentor de code. Ils demandaient aux mentors de venir sur le terrain et la plupart étaient rembarrés. Il n'était que 8 heures du matin, un samedi matin. Les participants avaient dû se rendre en moto jusqu'aux dortoirs des mentors et les avaient supplié. Certains étaient revenus avec les élèves plus âgés, comme un service de livraison, tandis que d'autres aînés passaient pour assister à la saisie du drapeau.
Finalement, ils avaient trouvé la personne clé, le président de la classe " P'Deer ", celui-là même qui avait été le chef des bizuteurs en son temps et qui avait puni les bizuteurs de troisième année. En quittant sa voiture, il était toujours déconcerté. Mais après avoir entendu les explications des étudiants de première année, il laissa échapper un rire, comprenant enfin ce qui se passait. Il ajouta même que la mission de cette année était très difficile.
Quand tout le monde fut là, il était temps de montrer comment les nouveaux comprenaient le mot " séniorité ". Un wai n'aurait pas suffi. Après une longue discussion et après avoir demandé conseil aux élèves plus âgés, ils avaient compris que "rendre hommage aux anciens" signifiait "respecter" ceux qui avaient plus d'expérience et être "humble" envers eux pour gagner leur acceptation. Les élèves de première année décidèrent donc de demander simultanément la permission.
— Pouvons-nous être vos frères et soeurs, Phi ?
— Bien sûr. Je n'ai aucune objection. Qu'en disent les autres ?
Deer hocha la tête en souriant légèrement. Le délégué de classe, les deuxièmes années et les troisièmes années étaient tous d'accord. Deer cria de façon taquine à l'homme qui montait la garde dans les escaliers.
— Toi, le bizuteur là-haut, vas-tu les laisser passer ?
Le bizuteur Knot garda un visage neutre et sans réaction. Quelqu'un incita Tew à remonter là-haut pour demander.
— Puis-je aller jusqu’au drapeau, mon frère ?
Tout le monde sur le terrain retenait son souffle, avec l'impression que son cœur pouvait s'arrêter de battre à tout moment, surtout Kongpob qui avait proposé cette idée. Ils avaient déjà perdu plus d'une heure. S'ils se trompaient, ils devraient recommencer. Ils espéraient donc qu'ils avaient interprété correctement les paroles du bizuteur en chef.
Kongpob fixait la scène, tendu. Tout était calme, comme si le temps s'était arrêté. Le bizuteur Knot se mit à bouger, laissant le passage avec un mot sec.
— Tu peux !
Au terme de cette permission, les élèves de première année crièrent d'excitation, heureux d'avoir franchi le premier niveau. Kongpob et M se tapèrent la main avec un grand sourire. Bien qu'ils n'aient pas encore le drapeau, au moins ils étaient sur la bonne voie, encouragés de pouvoir passer à l'étape suivante.
Sur la deuxième marche, arriva un nouveau bizuteur qui attendait de remplacer Knot avec pour mission la deuxième lettre du mot SOTUS.
‘Ordre : suivre les règles et les ordres.’
Les étudiants de première année étaient déjà en uniforme, conformément aux règles. Mais il fallait quelque chose de plus pour que les bizuteurs les acceptent. Ce quelque chose devait être ce que les bizuteurs soulignaient toujours dans chaque session de bizutage - ce pour quoi ils avaient été punis et entraînés de nombreuses fois...
— Former les rangs.
La conclusion fit pâlir beaucoup d'étudiants de première année. Mais ils étaient tous d'accord pour dire que c'était le moyen le plus facile et le plus rapide, car ils devaient encore franchir les autres niveaux avant 19 heures.
Les nouveaux commencèrent donc à former les lignes, à donner des ordres et à le faire aussi rapidement et proprement que possible. Les hommes restaient au bout des rangs pour s'occuper des femmes. Celles qui ne pouvaient pas continuer étaient autorisées à se reposer. Elles s'étaient mises à courir et à tomber encore et encore en demandant la permission au bizuteur. Il était presque midi lorsqu'ils entendirent le son providentiel "vous pouvez passer".
Les acclamations bruyantes et hurlantes se mêlèrent à l'épuisement. Les jeunes gens boitillèrent un par un pour prendre le déjeuner fourni par l'équipe d'assistance médicale près du terrain - une simple boîte de riz. Assis en cercle, ils discutaient de la prochaine mission.
— La troisième lettre 'Tradition : respecter les traditions'. Mais de quoi s'agit-il ? Nous ne savons pas quel genre de traditions ce département a.
Kongpob entendit M demander en grignotant le riz frit. Il était à bout de nerfs car lui aussi était en première année. Donc, ceux qui savaient étaient ceux qui étaient déjà venus ici auparavant. Ils se tournèrent à nouveau vers P'Deer, qui observait le rituel depuis le début de la matinée. Mais la réponse fut négative.
— Nous n'avons pas de traditions.
— Pas même une seule ? demanda gentiment 'Maprang', la plus belle fille de la classe, essayant de soutirer une réponse à l'aîné. Deer dut réfléchir davantage avant de donner une réponse hésitante.
— Eh bien, je ne suis pas sûr que ce soit pertinent. Mais si on parle de quelque chose qu'on fait toujours, il va y avoir un match de football des anciens élèves le soir du Nouvel An. Après le match, on nettoie et on va à une fête ensemble.
Les étudiants de première année échangèrent un regard. Un match de football était à exclure, pour l'instant, tout comme la fête. Il ne restait donc plus qu'à faire le ménage. Mais pour cent étudiants de première année, nettoyer juste autour du stade serait trop facile. Nettoyons le campus.
Par conséquent, ils passèrent tout l'après-midi à ramasser les ordures après avoir divisé les zones du campus et nettoyé les lieux. Ils ne savaient pas s'ils avaient bien choisi cette tradition, mais elle était utile pour leur institution. C'est peut-être pour cette raison que le bizuteur, qui était une femme sympathique, leur donna facilement le "laissez-passer" malgré le temps que cela avait pris.
Quand ils regardèrent l'horloge, il était presque 4 heures. Passer le quatrième niveau allait être plus urgent. Ils y arrivèrent : 'L'unité : être un et uni'. Rien ne pouvait mieux le démontrer que de chanter les hymnes.
...Tambours prêts, cordes vocales prêtes. Mais surtout, ils devaient être unis.
Les étudiants de première année mirent tout ce qu'ils avaient dans leur chanson : l'hymne du département, l'hymne de la faculté, l'hymne de l'université, ainsi que toutes les chansons récréatives qu'ils avaient apprises et répétées. Ils dansaient et chantaient fort, ils étaient déchaînés, tandis que les étudiants plus âgés des autres départements se pressaient pour les regarder et les soutenir moralement.
Lorsque la lumière diminua dans la soirée et que l'hymne universitaire commença à faiblir, ils furent alors autorisés à passer au niveau supérieur. Les étudiants de première année n'avaient presque plus de force car ils travaillaient dur depuis le matin. Il y avait un dernier niveau à franchir.
‘L'esprit de générosité’.
Et l'homme qui montait la garde avec le pouvoir de décision dans les mains n'était autre que le chef bizuteur Arthit. Se levant, il se tenait sur le chemin qui menait au drapeau pourpre flottant. Il leur restait une heure pour gagner.
— Que diable allons-nous faire ? C'est le plus dur. Je ne vais pas courir autour du terrain, bon sang non. Je n'ai plus de force.
Kongpob se posa à côté de M qui était déjà grognon, la voix rauque à force de beugler les hymnes. Il reconnut que lui aussi n'avait plus beaucoup d'énergie. S'ils devaient prouver leur esprit en faisant les tours de piste, ils n'y arriveraient pas. Et le temps pressait.
Beaucoup d'entre eux avaient l'air stressé, ne sachant pas comment franchir la dernière barrière qui était la plus difficile.
Kongpob lança son regard vers quelqu'un sur la tribune. Le chef des bizuteurs se tenait debout, les bras derrière le dos, en position de repos, attendant.
Son expression était déterminée et son regard était aussi intense que possible, comme quand Kongpob l'avait observé lorsqu'il avait fait des tours de piste sous la pluie.
Tout à coup, quelque chose lui traversa l'esprit. Kongpob essaya de saisir l'idée, son cerveau réfléchissant, puis il appela ses amis.
— Les gars, s'il vous plaît, écoutez !
Tous les regards étaient tournés vers le roi de la classe qui se tenait debout au milieu du cercle.
...Même s'il n'en était pas totalement certain, c'était peut-être le seul moyen de passer Arthit et de gagner le drapeau de la classe.
Kongpob prit une grande inspiration, les yeux fixés sur le chef bizuteur sur les marches, et prit la parole.
— J'ai un plan... | | Messages : 553
Date d'inscription : 13/07/2024
| Johanne Sam 7 Sep 2024 - 17:49 Règle n°16 Montrez Votre Esprit au Bizuteur Il était 18h15.
La luminosité déclinait mais l'homme dont le nom signifiait "Soleil" se tenait immobile sur la tribune, bloquant le chemin comme une forteresse, empêchant les étudiants de première année de s'emparer du drapeau de la classe et de gagner leur place dans le département de génie industriel.
De son point d'observation, le chef du bizutage voyait comment les étudiants de première année discutaient au loin avec les seniors du département qui s'étaient joints à eux pour assister à la bataille. Le rituel était devenu bondé et animé, car ils avaient entendu dire que celui de cette année serait très dur et féroce.
Franchement, la reconnaissance de classe pouvait être facile et difficile à la fois. C'était généralement difficile au début. Si vous ne pouviez pas deviner ce que les bizuteurs voulaient que vous fassiez, les nouveaux n'avaient pas d'indice pour les guider dans la bonne direction. Tout ce qu'ils avaient, c'était les cinq tissus de couleurs différentes décorant les marches qui représentaient chaque niveau qu'ils devaient passer. Les tissus pouvaient être interprétés de mille façons différentes.
Arthit avait pensé qu'il leur faudrait au moins une demi-journée pour résoudre l'énigme. Pire encore, ils risquaient de ne pas du tout pouvoir dire ce que c'était. Il s'était avéré qu'il ne leur avait fallu qu'une demie-heure, battant ainsi le record, pour découvrir que l'énigme était la signification de "SOTUS".
Il ne savait pas si les étudiants de première année avaient eu de la chance ou s'il les avait sous-estimés. Le plan qu'il avait concocté était devenu futile. Pourtant, il aurait été étrange que les élèves de première année n'en aient aucune idée, car les bizuteurs avaient toujours mis l'accent sur SOTUS pendant le bizutage.
Par-dessus tout, il avait choisi SOTUS comme critère parce que c'était la meilleure preuve que les bizuts étaient vraiment unis en tant que "classe".
En réalité, quelle que soit l'année, les activités choisies pour tester les élèves de première année lors de la journée de reconnaissance ne visaient pas seulement à prouver leur unité. Elles testaient également le respect des élèves de première année envers leurs aînés, s'ils comprenaient leurs rôles et s'ils s'entraidaient. Même après le bizutage, de nombreuses autres activités nécessiteraient qu'ils travaillent ensemble.
Le jour de la reconnaissance était donc venu avec de nombreux objectifs. Les bizuteurs voulaient s'assurer que les élèves de première année comprenaient le mécanisme de fonctionnement des choses, et le jugement était entre leurs mains. Ils voyaient que les élèves de première année faisaient vraiment des efforts et les laissèrent passer au niveau suivant jusqu'à ce qu'ils aient franchi les quatre premiers niveaux.
… Pour la dernière épreuve, "Esprit : être gentil", il était certain qu'ils n'auraient pas la tâche facile.
Pour cette dernière épreuve, c'était lui, le redoutable chef bizuteur, dont le niveau était exceptionnel, qui était le juge. C'était un sujet difficile à exprimer de manière concrète. Le temps était compté. Les étudiants de première année avaient l'air tendus, mais discutaient encore, sans se décourager. Puis, ils commencèrent à bouger comme s'ils étaient arrivés à une conclusion.
Arthit vit les élèves de première année s'arrêter au milieu du terrain, alignés en ordre. Il ne savait pas ce que ces jeunes allaient faire, mais le coupable n'était autre que cette personne... le jeune homme qui attira son attention en marchant droit vers la tribune. Ce bizut fit chaque pas, assuré, jusqu'à ce qu'il atteigne la marche en dessous d'Arthit et s'arrête.
… Il faisait maintenant face à 0062 Kongpob.
— Pourquoi es-tu ici ?!
— Je suis ici pour parler au nom de tous les étudiants de première année. Nous aimerions vous inviter en bas.
La réponse non équivoque stupéfia Arthit. Il ne pouvait pas en croire ses oreilles que les étudiants de première année aient eu les tripes de lui demander de descendre. Ils avaient montré leurs meilleurs efforts dans d'autres épreuves et maintenant ils pensaient juste l'avoir de manière facile ? Pensaient-ils qu'il allait juste s'éloigner pour qu'ils puissent avoir le drapeau ? C'était un manque total de respect envers lui en tant que chef du bizutage !
La colère de la dernière forteresse couvait mais il la réprima, gardant son visage neutre et sinistre. Il lança une question indignée à l'étudiant de première année.
— Pourquoi est-ce que je descendrais ?!
— Parce que nous allons vous montrer notre esprit et gagner votre acceptation.
L'explication de Kongpob était logique. Les nouveaux avaient dû penser à faire quelque chose qui nécessitait qu'il descende et vérifie. Bien sûr, il n'allait pas se résigner facilement. Pire, les nouveaux avaient fait une grave erreur en élisant le négociateur qui avait été son ennemi juré.
… Eh bien, ils n'ont jamais eu une conversation bonne et cordiale. La dernière fois qu'ils s’étaient parlés à la fête des mentors et des mentorés de code, il avait appris que cet homme aurait voulu étudier l'économie, et non l'ingénierie. Pourquoi se serait-il donné tant de mal pour participer à toutes les activités de la faculté, pour ensuite repasser les examens l'année suivante ? Ce rituel de reconnaissance ne signifiait rien pour lui car il n'avait aucun poids pour prouver son appartenance à la faculté d'ingénierie.
Pourtant, Kongpob avait insisté pour qu'il ait le drapeau, le regard et la démarche assurés, tout comme il l'était maintenant. C'était tellement exaspérant qu'Arthit ne pouvait s'empêcher de se moquer.
— Tu me montres ton esprit, hein ?! Demande-toi s'il y a de l'esprit en toi. Je t'ai dit que si ça ne venait pas vraiment du cœur, tu ne méritais pas la reconnaissance de ta place dans ce département !
Les mots faisaient mal mais Kongpob n'était pas surpris, connaissant leur exercice habituel. Il savait qu'Arthit était en colère contre lui depuis cette nuit-là. Il s'était quand même porté volontaire pour lui parler parce qu'il y avait beaucoup de choses qu'il voulait dire, tout en sachant très bien qu'il ne pourrait pas influencer cet homme têtu même s'il essayait. Il savait aussi que s'il continuait à insister, les choses risquaient de devenir trop émotionnelles et que le bizuteur en chef se mettrait à nouveau en colère. Il voulait juste clarifier les choses et tout expliquer pour qu'Arthit comprenne.
— P'Arthit…
Le murmure était si doux qu'Arthit s'arrêta pour regarder l'homme sur la marche inférieure dont le visage s'adoucissait alors qu'il commençait à s'expliquer.
— … J'ai admis que je ne voulais pas étudier l'ingénierie, mais je n'ai jamais regretté d'être dans cette faculté. Je suis fier de pouvoir rejoindre les classes, de retrouver mes amis et d'avoir de bons seniors. Si P'Arthit a pensé que je n'avais aucune passion pour l'ingénierie, tu as tort. Je veux vraiment en faire partie, et mes amis aussi. Ou nous n'aurions pas fait autant d'efforts pour gagner votre acceptation. Si tu veux savoir si on est sérieux, viens sur le terrain avec moi… s'il te plaît.
Les longues phrases n'étaient pas aussi catégoriques que la première fois, mais c'était une supplication… pour sa sympathie.
… Il avait déjà entendu ce ton de voix auparavant lorsque le jeune homme l'avait forcé à prendre les médicaments. Cela le calmait à chaque fois qu'il l'entendait ; son esprit et sa bouche cessaient de fonctionner et étaient incapables de trouver une réplique.
Arthit resta silencieux, jetant un coup d'œil aux jeunes gens sur le terrain qui l'attendaient. Il aurait pu jouer les durs pour gagner du temps puisqu'il ne leur restait qu'une demi-heure avant l'échéance. Mais il était curieux de savoir ce que les élèves de première année feraient pour montrer leur esprit. Qu'ils obtiennent le drapeau de la classe ou non, c'était à lui de décider.
— Très bien, je vais descendre…
Le chef bizuteur accepta l'invitation, voyant comment Kongpob souriait alors que le soulagement l'envahissait. Le nouveau s'éloigna et lui ouvrit la voie pour descendre les escaliers. Il s'arrêta finalement devant les rangées de première année au milieu du terrain et cria son défi.
— Très bien ! Comment allez-vous me montrer votre esprit ?!
Kongpob revint prendre sa place à l'avant. C'est lui qui répondit d'une voix forte et sombre.
— Notre esprit a été rendu possible grâce à l'esprit des bizuteurs. Si vous ne nous aviez pas montré l'exemple, nous ne saurions pas comment en avoir un. Maintenant, nous aimerions montrer notre gratitude pour votre esprit ! Premières années, formez les rangs !
Alors que le commandement s'estompait, tout le monde sur le terrain courut pour former un cercle autour du chef bizuteur. Deux cents étudiants de première année formèrent un grand cercle au milieu duquel se trouvait un Arthit déconcerté.
Qu'est-ce que cela signifie ? Que font les étudiants de première année ? Que veulent-ils dire en disant que leur esprit est né de celui des bizuteurs ? Qu'ont-ils voulu dire en disant qu'ils voulaient montrer leur gratitude…
Il n'eut pas à attendre longtemps car la réponse vint comme un ordre de Kongpob qui faisait partie du cercle.
— Premières années, montrez votre esprit, maintenant !!
Arthit fut témoin de l'esprit des étudiants de première année qui hurlaient les mots.
— Merci, P'Arthit, de nous avoir enseigné !
— Merci, P'Arthit !!
— Merci !!
— Merci, Phi !
— Merci beaucoup !
Les mots de gratitude résonnèrent de chaque étudiant de première année dans le cercle, tous disant "Merci" directement au chef bizuteur.
La personne qui les avait unifiés, eux qui venaient de différents milieux et de toutes les classes sociales.
La personne qui avait sacrifié son temps pour faire les séances de bizutage tard dans la nuit.
La personne qui avait fait 54 tours de terrain sous la pluie pour montrer qu'elle tenait sa parole.
… La personne dont l'esprit était le plus fort et qui avait enseigné aux étudiants de première année la signification de la dernière lettre du mot "SOTUS".
Le mot "esprit" ne signifie pas seulement être généreux mais aussi "mettre son cœur à l'ouvrage", comme l'avaient montré les bizuteurs. C'est comme ça que les étudiants de première année donnèrent ce "cœur" aux bizuteurs en retour.
Le "merci" tonitruant était le témoignage de la gratitude des étudiants de première année envers les seniors. Une fois que chacun d'entre eux dans le cercle eut dit le mot, Kongpob leur donna l'ordre final.
— Les nouveaux, un chant pour remercier le chef bizuteur. Allez !!
Tout le monde mit ses bras autour du cou de ses amis et baissa la tête pour faire le plus grand chant possible en l'honneur du chef bizuteur, même s'il ne leur restait presque plus d'énergie. Les étudiants des autres années regardaient avec admiration, incrédules de voir que les étudiants de première année osaient faire un chant directement vers le chef des bizuteurs, sans peur, ce qui était inouï. Ils admiraient l'unité dont ils étaient témoins - deux centaines d'étudiants de première année criant le chant sur le seul chef bizuteur.
… C'était une scène puissante et émouvante à voir.
Arthit, d'un autre côté, resta immobile et sans expression lorsque le chant prit fin. Il serra les mains en poings, son corps tremblant comme s'il était furieux, et il rugit.
— Vous pensiez passer avec cette performance ?!! Je suis désolé ! Je ne vous laisserai pas l'avoir !
Arthit s'éloigna du cercle en faisant les cent pas et cria à ceux qui se trouvaient sur son chemin de reculer. Il disparut derrière la tribune avant que quiconque n'ait pu l'arrêter, laissant les étudiants de première année, le cœur brisé et abattus, méditer sur le verdict du chef bizuteur.
… Ils avaient échoué.
Le cœur de Kongpob s'effondra. C'est lui qui avait eu l'idée du plan après avoir entendu M parler des 54 tours. Cela lui avait rappelé quand Arthit avait couru sous la pluie, ne laissant personne l'aider. C'est à ce moment-là qu'il avait finalement réalisé que l'esprit du chef bizuteur était plus grand que tout le monde. Il avait proposé l'idée à ses pairs, en espérant qu'Arthit comprendrait enfin leurs sentiments.
Finalement, ils avaient échoué… Non seulement Arthit ne leur avait pas permis de passer le test, mais il s'était même mis en colère. Toute la classe prit le coup avec lui et Kongpob s'excusa auprès de tous, accablé de culpabilité. Beaucoup lui dirent que tout allait bien - que cet acte était partagé par tous. Tout ce qu'ils avaient à faire était de penser à un nouveau plan.
En regardant la montre, leur cœur fit un bond dans leur gorge. L'aiguille sonna 7 heures et Knot reprit sa place sur la tribune avant de hurler un ordre.
— Les nouveaux, à terre ! MAINTENANT !! Votre temps est écoulé !!
Les nouveaux firent ce qu'on leur demandait. Ils coururent et s'alignèrent à nouveau. Beaucoup fixaient le drapeau, leurs coeurs s'attardant sur l'opportunité manquée.
… Ils l'avaient presque eu. Ils avaient fait de leur mieux toute la journée mais ça ne voulait rien dire.
— Qui vous a dit de regarder le drapeau ?! Vous n'avez plus le droit de le regarder !!! Inclinez votre tête maintenant !!
Les mots les blessèrent profondément mais ils firent ce qu'on leur demandait. Ils baissèrent la tête, criblés de déception. Certains se mirent à sangloter, incapables d'arrêter leurs larmes. Le soleil s'était couché depuis longtemps, le terrain était sombre. Aucune lumière provenant des stroboscopes. La journée de reconnaissance était terminée. Le terrain entier était rempli d'un silence accablant.
Puis, ils entendirent un son doux et mélodieux dans le vent.
"Oh, oh, oh, eh… oh… eh… oh, mes jeunes."
Tout le monde leva les yeux, surpris de voir d'où venait le son. C'était l'équipe récréative qui portait des plateaux de cérémonie avec de petites bougies, menant la procession de quelques centaines de seniors qui avaient observé le rituel depuis le début. Ils allumaient la bougie et donnaient la lumière à la personne à côté d'eux jusqu'à ce que la lumière se fasse, chassant l'obscurité tout en encerclant les étudiants de première année. La chanson mélodieuse commença à l'unisson alors qu'ils chantaient.
"Oh, mes petites sœurs et mes petits frères. Laissez-moi vous admirer pour toujours.
Je vous chérirai comme mon précieux cœur, je ne vous laisserai jamais partir.
La La la la, la la la, la la la.
Je prendrai soin de vous, mes précieux chéris. Je vous chérirai et vous garderai près de moi.
La La la la, la la la, la la la,
Puissiez-vous être libérés du chagrin et de la douleur, être en bonne santé et avoir de la chance, mes très chers petits.
Laissez-moi lier ce fil blanc sacré, la la la, la la la.
Attaché à vos poignets, la la la, la la la.
Comme le lien de nos cœurs, qui ne finira jamais.
Oh....oh..oh.
Dans ce lien de nos cœurs qui ne finira jamais."
Une fois le dernier couplet terminé, de nombreux étudiants de première année semblaient encore confus tandis que d'autres commençaient à comprendre ce qui se passait. Ils restèrent silencieux, n'ayant aucune idée de ce qu'il fallait faire jusqu'à ce que Knot aboie un ordre.
— Les nouveaux, envoyez l'un d'entre vous !
C'est "Tew" qui fut poussé en avant pour les représenter comme la fois précédente. Il s'avança vers la tribune, l'air intimidé, craignant qu'ils ne soient gênés si le bizuteur les refusait à nouveau. Knot resta en place sur le premier escalier, immobile et regardant le représentant des nouveaux comme pour jauger son attention. Finalement, il prononça les mots que tous les étudiants de première année mouraient d'entendre.
— Montez et prenez votre drapeau !
Une forte acclamation éclata lorsque le bizuteur donna la permission. Tous les regards étaient tournés vers l'homme qui montait pour prendre le drapeau sur les marches du haut. Le moment où leur ami ramassa et agita le drapeau de la classe fut victorieux et une affirmation qu'ils étaient les étudiants du Département de génie industriel de la Faculté d'ingénierie.
Vint ensuite la cérémonie cruciale d'accueil des nouveaux : Bai Sri Sukwan(1) ou "l'appel de l'âme", cérémonie au cours de laquelle les seniors nouaient un fil blanc sacré autour des poignets des nouveaux pour leur souhaiter la bienvenue dans la famille.
Le fil blanc était transmis aux étudiants les plus âgés de toutes les sections tandis que les nouveaux étudiants faisaient la queue pour recevoir le cadeau de bienvenue. Les bizuteurs semblaient être les plus populaires maintenant qu'ils avaient enlevé leur masque démoniaque. Comme tout le monde semblait plus détendu, les bizuteurs étaient maintenant faciles à approcher... sauf un type qui avait disparu sans laisser de trace et ne s'était pas joint à ce rituel.
Kongpob essaya de chercher Arthit parmi les bizuteurs, inquiet. Après que le chef bizuteur soit parti, il ne l'avait pas revu depuis. Il n'avait aucune idée s'ils avaient eu un conflit. P'Arthit leur avait dit non, mais plus tard, P'Knot les avait autorisés à prendre le drapeau. Il n'était pas sûr de savoir comment ils avaient réglé la question.
… Il savait qu'il avait un rôle dans la disparition de l'autre homme. Il avait mis Arthit en colère et il voulait faire amende honorable pour gagner le pardon du chef bizuteur.
Kongpob ne s'aligna pas pour recevoir le fil comme ses pairs. Il s'éloigna du terrain pour chercher l'homme mais tomba sur Fang à la place.
— Hé, Kongpob. Viens ici. Je vais attacher le fil autour de ton poignet.
Il s'arrêta donc et lui tendit sa main droite au lieu de la gauche qui portait une montre-bracelet. Fang commença à nouer le fil autour de son poignet et à lui donner sa bénédiction.
— Puisses-tu tirer le meilleur parti de ces quatre années. Puisses-tu ne trouver que de bonnes choses dans les études et l'amour.
— Merci.
Kongpob leva la main en guise de wai, reconnaissant pour ses bonnes paroles. Avec de si bons seniors, il était vraiment heureux d'être un étudiant en ingénierie, comme il l'avait dit à quelqu'un. Mais l'homme n'était pas là pour voir qu'il le pensait vraiment, alors il décida de demander à la jeune femme.
— Um, P'Fang, tu as vu P'Arthit ?
— Arthit ? Il est probablement derrière les tribunes.
Fang répondit avec une expression étrange, comme si elle réprimait son rire. Elle lui tendit un fil.
— Eh bien, puisque tu l'as demandé, pourquoi ne laisses-tu pas Arthit te lier le poignet ?
Fang sourit et s'éloigna vers le terrain, le laissant seul avec un fil à la main. Il se dirigea vers l'arrière de la tribune où tout était obscurci. Il repéra tout de même la silhouette d'un personnage familier dont le dos était tourné vers lui.
— P'Arthit.
L'homme sursauta et se retourna pour voir qui avait prononcé son nom. Kongpob fut surpris par l'expression de l'autre homme. Il n'y avait aucune colère inscrite sur ce visage, seulement des traces humides et des yeux rougis. Il prit la parole, inquiet.
— Est-ce que tu vas bien ?
— Bien ! Je vais bien. Il faisait chaud, alors je me suis lavé le visage. Pourquoi ? T'as un problème ?!
L'expression d'Arthit reprit sa sévérité alors qu'il balayait rapidement la question du jeune homme après avoir été pris au dépourvu. Son rejet donnait à Kongpob un indice de ce qui s'était réellement passé mais il choisit de jouer le jeu.
— Rien.
— Si tu n'as rien à me dire, retourne sur le terrain. Il y a une cérémonie de Bai Sri en cours. Tu n'aurais pas dû partir !
Le chef bizuteur congédia le jeune homme, frustré, et s'en alla vers le terrain. Il fut arrêté.
— Attends, P'Arthit. Peux-tu mettre ce fil autour de mon poignet ?
Kongpob tendit le fil blanc à l'homme stupéfait. Il n'avait aucune idée de l'endroit où l'étudiant de première année avait obtenu le fil blanc. En tant qu'élève plus âgé, il devait prendre le fil et faire ce que le plus jeune lui demandait.
Arthit attendit que le grand garçon tende sa main droite, mais le petit nouveau changea soudainement d'avis.
— Celui-là est mieux.
L'homme qui se comportait comme s'il avait changé d'avis commença à retirer sa montre-bracelet alors qu'Arthit l'injuriait, agacé.
— Snob.
Malgré tout, Arthit mit le fil sur le poignet gauche de Kongpob et commença à le lier tout en donnant une autre instruction importante.
— Prends soin du drapeau de la classe pour moi.
Même si la phrase était courte, le sens était précieux. C'était la preuve que le chef bizuteur l'avait finalement accepté comme faisant partie de la faculté d'ingénierie - son frère de département.
— Je m'en occuperai de tout mon cœur.
Kongpob répondit avec un sourire. Il était plus exaspérant que jamais pour le bizuteur en chef et il attacha négligemment la ficelle au poignet du plus jeune homme.
— Ok. C'est fait !
— Merci, P'Arthit.
— Je sais.
Avec une réponse brusque, Arthit pensait qu'il pouvait enfin partir. Pourtant, il fut retenu dès qu'il fit un geste pour se retourner.
— Attends…
— Quoi encore ?!
Arthit aboya sur le plus jeune homme, irrité d'être retenu une fois de plus. Il se retourna et regarda Kongpob, qui avait un léger sourire entendu sur le visage. Le jeune homme prononça les mots qui lui firent écarquiller les yeux.
— Si tu as l'intention de pleurer à nouveau, dis-le moi. Mais surtout, ne t'éclipse pas pour pleurer tout seul. Je serai là pour sécher tes larmes.
— Kongpob !!
Le jeune homme entendit un juron derrière lui, mais il était trop tard. Il avait déjà dévié vers le terrain. P'Arthit était définitivement en colère contre lui cette fois-ci, mais il ne savait pas pourquoi il ne pouvait pas s'empêcher de provoquer son aîné. D'ailleurs, il n'y avait plus le sentiment de doute comme la dernière fois qu'ils s'étaient disputés.
… Peut-être était-ce parce qu'il savait que son cœur s'était finalement rapproché du cœur de cette personne. Notes :1/ Originaire de la région de Sipsong Panna, le Bai Sri Sukwan est utilisé pour célébrer des événements et des occasions importants, comme les naissances et les mariages, mais aussi l'entrée dans le monde religieux, le départ, le retour, le début d'une nouvelle année, l'accueil d'une candidature, etc. Le rituel du Bai Sri consiste à attacher des cordes autour du poignet d'une personne pour préserver la chance, et est devenu une coutume nationale dans toute la Thaïlande. Laisser Un Commentaire »»————- ★ ————-«« | | Messages : 942
Date d'inscription : 19/06/2024
| Néphély Sam 7 Sep 2024 - 17:49 Règle n°17 Ne vous Méprenez pas sur le Bizuteur ...Comme le dit le proverbe... Derrière un homme capable, il y a toujours d'autres hommes capables. Au-delà de la reconnaissance de leur pairs, il y avait une chose appelée ‘examens de mi-trimestre’.
Il ne restait qu'une semaine avant les partiels. Les étudiants de première année avaient l'impression qu'ils venaient juste de commencer le semestre, encore tout excités par la vie du campus. Après avoir traversé le rituel d'initiation et la cérémonie de reconnaissance de leurs pairs, les étudiants de première année voulaient juste profiter de la vie un peu plus longtemps, mais la réalité les avait pris par le cou.
Ce n'était pas seulement une réalité. Pour certains, c'était un enfer.
Les étudiants de première année qui étaient encore nouveaux dans la vie du campus avaient un sentiment de crainte plus fort que les étudiants plus âgés. Ils étaient conscients que c'était différent des examens du lycée où les choses étaient prises moins au sérieux. Si leurs notes baissaient, ils pouvaient être contraints de repasser les épreuves. S'ils échouaient trop souvent, ils pouvaient être renvoyés de l'école. Leurs professeurs ou qui que ce soit ne pourraient pas les sauver.
Certaines matières n'étaient ouvertes à l'admission qu'une fois par an, en tant que classes préparatoires. Les élèves de première année avaient besoin de ces cours pour passer à d'autres cours pertinents, sinon, ils devaient repasser les épreuves avant de passer à autre chose. Ils risquaient de devoir attendre l'année suivante pour rejoindre le cours, ce qui faisait que beaucoup d'entre eux devenaient les "grands-pères" de la faculté - ceux qui restaient après que les jeunes générations aient obtenu leur diplôme.
Le professeur de calcul I était réputé pour faire passer les examens les plus difficiles par rapport aux autres universités. Beaucoup étaient recalés, obtenant un F sur les relevés de notes. Si vous réussissiez l'examen, vous étiez considéré comme un bienheureux. Si vous obteniez un A, c'était un miracle. Nombreux étaient les étudiants qui demandaient de l'aide aux grands esprits, promettant de plaire aux dieux, aux anges et à tous ceux qui les écoutaient s'ils réussissaient à suivre le cours.
Au fond, ils savaient qu'ils devaient faire le travail, compter sur leur cerveau et leurs mains pour réussir l'examen. Ils demandaient tout de même l'aide de seniors expérimentés pour leur donner des cours particuliers.
Heureusement, le département d'ingéniérie industrielle comptait de nombreux seniors compétents. Une séance de tutorat avait été mise en place et près de cinquante étudiants de première année s'y étaient présentés après en avoir entendu parler par leurs amis. Certains avaient dû s'asseoir par terre pour étudier tandis que les seniors utilisaient un tableau blanc mobile pour leur apprendre comment s'étaient déroulés les examens des années précédentes.
Malgré cette aide, les questions restaient difficiles et provoquaient des migraines. Kongpob entendit à côté de lui le soupir fatigué de M qui essayait de résoudre un problème d'équation différentielle et qui se plaignait.
— Je pensais que l'examen d'admission était difficile. Je peux retourner au jardin d'enfants ?
— Prends sur toi. Quand tu auras fini l'examen, tu pourras sortir et t'amuser.
Tew, assis au premier rang, se retourna et encouragea ses amis. Mais la dernière partie de sa phrase rendit M curieux.
— Quel amusement ?
— Oh, tu ne savais pas ? Après l'examen, les seniors vont nous emmener en excursion.
La réponse poussa Kongpob à lever les yeux de son manuel.
L'excursion était une tradition organisée chaque année par le département d'ingénierie industrielle, avec des seniors de toutes les années. La question de la sécurité était écartée car les professeurs se joignaient à eux pour les superviser. Ainsi, les étudiants de première année pouvaient se sentir en sécurité, sachant que ce ne serait pas aussi dur que le bizutage.
— Vous savez où on va ?
Kongpob rejoignit la conversation, mais Tew secoua la tête.
— Je ne suis pas sûr, mais mon mentor de code a dit que ce sera un bord de mer.
En ce qui concerne la mer la plus proche... ce serait Rayong, Hua Hin, ou Cha-am. N'importe où convenait à Kongpob puisqu'il n'était pas allé à la mer depuis longtemps. Ce serait bien de faire une petite pause. Mais la voix de M brisa son rêve.
— Attendez une seconde. Vous êtes sûrs qu'on va vraiment s'amuser ? Je pense que les bizuteurs cherchent une autre excuse pour nous embêter. On a toujours le gear du département à gagner, vous vous souvenez ?
C'était vrai. Ils avaient gagné la reconnaissance de leur pairs mais il y avait encore le gear du département à gagner. La prochaine session serait définitivement l’occasion pour eux de saisir ces gears et ils n'avaient aucune idée à quel point ce serait difficile. La reconnaissance de leur pairs avait été épuisante et chaque niveau avait été un véritable casse-tête. Leur destin reposait uniquement entre les mains des 'bizuteurs'.
Puis, les personnes auxquelles ils pensaient se matérialisèrent de nulle part.
Ils avaient entendu le bavardage d'un petit groupe de troisième année. Les juniors venaient de terminer leur cours du soir et passaient devant les étudiants de première année. Les plus jeunes arrêtèrent leur tutorat et levèrent les mains en signe de wai, encore intimidés. Il y avait beaucoup de visages inconnus dans le groupe - à la fois les juniors normaux, les bizuteurs, et le chef des bizuteurs Arthit. Il s'arrêta et s'adressa à l'homme qui tenait un marqueur sur le tableau blanc.
— Qu'est-ce que tu fais, On ?
— J'enseigne le calcul aux étudiants de première année. Puisque vous êtes là, vous pouvez partager avec eux comment s'est passé l'examen quand vous l'avez passé ?
Le sophomore à lunettes saisit rapidement l'occasion pour inviter les bizuteurs à se joindre à eux, mais le chef des bizuteurs secoua la tête et lui coupa la parole.
— Ça fait deux ans. Je ne me souviens de rien. Mais la seule chose dont je me souviens, c'est qu'il n'y avait que cinq d'entre nous qui ont eu un A alors que près de la moitié de la classe a eu un F.
Fidèle à son habitude, le chef bizuteur a non seulement refusé d'aider les étudiants de première année, mais il leur a également fait peur. Knot intervint.
— Je me souviens de ça ! Il restait un peu de temps. J'ai écrit un petit mot à la fin de la feuille de réponses pour que le professeur ait pitié de moi. J'ai eu un C. Ma note a dû fonctionner à merveille.
Tous les étudiants de première année prirent note de cette remarque. Mais un étudiant de troisième année à l'allure chinoise intervint.
— Ha, tu es pathétique. J'ai dessiné le portrait du professeur sur ma feuille pour qu'il sache que j'avais assisté à tous les cours et que son visage était gravé dans ma mémoire.
La vantardise fit frémir d'excitation tous les étudiants de première année. Arthit posa une question à son ami.
— Et tu as eu quoi comme note ?
— ...Un F. C'est quoi ce bordel. Pourquoi il n'a pas eu de sympathie pour moi ? Le dessin est plus difficile que l'écriture ! Ce n'était pas juste !
Les hurlements et les taquineries fusèrent de la part du groupe de bizuteurs tandis que les étudiants de première année les regardaient, déçus des conseils qu'ils avaient reçus. Certains ricanaient des blagues avant que le chef des bizuteurs n'intervienne enfin.
— Lisez les notes. Si vous n'y arrivez pas, vous rejoindrez la classe des nouveaux l'année prochaine.
— Allez, ne les découragez pas comme ça. Donnons-leur quelques bénédictions.
Là-dessus, le tuteur intervint pour aider les élèves de première année. En entendant la bénédiction à venir, tous les étudiants de première année levèrent rapidement leurs mains et joignirent leurs paumes, en attendant. C'est Knot qui fut poussé en avant pour effectuer le rituel.
— Très bien, jeunes gens, écoutez attentivement !
Knot se racla la gorge, demandant à haute voix l'attention avant de prononcer les mots sacrés...
— Vivez longtemps et soyez prospère ! (1)
— Sadhul ! (2)
— Bordel ! Ce n'est pas la bénédiction pour les examens !
Le même Chinois protesta. Knot avait l'air penaud.
— Tu sais comment bénir quelqu'un ?
— Eh bien, j'ai redoublé. Comment je suis censé bénir quelqu'un ?
— Essaie avec quelque chose de mieux. Hé ! Arthit, à toi !
C'était le moment pour le héros d'entrer en scène. Arthit s'avança devant les étudiants de première année, croisa les bras, prit un air sévère et parla d'un ton sérieux.
— Si vous n'y arrivez pas et échouez aux examens, cela signifie que vous êtes incompétents. Vous n'aurez aucun avenir une fois que vous serez diplômés.
... C'était la réalité. Ce n'était pas une bénédiction mais une déclaration cynique digne du chef des bizuts. De nombreux étudiants de première année pâlirent alors que l'espoir les quittait. Le chef des bizuteurs continua .
— … Qui vous engagera ? Vous ne pourrez pas sortir avec une fille et vous vous noierez dans l'alcool pour vous sentir mieux, finissant par avoir la gueule de bois et par vous endormir en classe jusqu'à ce que le professeur vous gronde. Vous ne pourrez même pas payer la dette que vous aurez contractée auprès de vos amis. Vous vivrez toujours comme un pique-assiette. Qui voudrait être votre ami si vous finissez par être comme ça ?
Cette dernière phrase était tellement étrange que le camarade d'apparence chinoise à côté d'Arthit le coupa.
— Woah, attends une minute. C'est à moi que tu t'en prends, connard !
Il était trop tard pour réaliser qu'il s'était fait piéger par le gars au visage impassible. Les autres juniors éclatèrent de rire et les étudiants de première année qui écoutaient se joignirent à eux. Cela permit à tout le monde de se détendre après avoir été si stressé pendant la séance de tutorat sur les calculs.
— Ne vous inquiétez pas, le test n'était pas si difficile. Vous pouvez le faire. Je crois en vous.
De tels mots gentils étaient rares de la part du chef bizuteur. Ce qui était plus rare et laissait tout le monde sans voix, ce fut le sourire.
... Un léger sourire était apparu sur le visage stoïque. Les yeux intenses et perçants s'adoucirent, ils n'étaient plus aussi sévères qu'avant. C'était charmant et fascinant.
— Allons-y. Je suis affamé.
Knot interrogea sa bande, les juniors quittèrent donc le bâtiment de la faculté, laissant les étudiants de première année étudier. Beaucoup étaient encore en train de parler de ce qui venait de se passer, de la façon dont les bizuteurs se comportaient aujourd'hui. Tew prit la parole, déconcerté.
— Je ne savais pas que les bizuteurs étaient vraiment comme ça.
— Pas vrai ? Une fois le bizutage terminé, ils ont changé. Ils étaient un peu fous et drôles, pas vrai, Kong ?
M hocha la tête en signe de confirmation et demanda à son pote une seconde opinion.
— Ouais.
Kongpob répondit brusquement, ses yeux regardant toujours dans la direction où une certaine personne venait de s'éloigner. Il entendit les mots du dernier rang qui commentaient ce sujet.
— Quand P'Arthit sourit, il n'a pas du tout l'air intimidant.
— Je sais, hein ? Il a l'air beaucoup mieux que lorsqu'il se comportait de façon brutale.
— Mais je préférais quand il faisait cette tête effrayante. Il avait l'air génial.
— Ahem ! Arrêtez de parler, les premières années. Nous reprenons l'étude maintenant. Regardez la question douze.
L'avertissement du tuteur fit que tout le monde se tût, reportant immédiatement son attention sur la leçon. Kongpob dut tirer ses yeux pour regarder la feuille de calcul.
...Il ne savait pas pourquoi, mais étrangement, tout au long de la seconde moitié de la révision, son cerveau n'avait pas du tout enregistré les chiffres inscrits sur le tableau blanc. Peut-être que la leçon était aussi difficile que M le disait, ou bien il y avait d'autres raisons inconnues. Même s'il comprenait à peine le tuteur, il resta jusqu'à la fin de la séance. Il était alors presque vingt heures.
Il se sépara de ses amis et retourna en moto jusqu'au dortoir, sans oublier de s'arrêter pour acheter quelque chose à manger. La nuit allait être longue avant qu'il puisse finir de réviser ses cours. Il ne s'était pas arrêté aux tentes de nourriture mais s'était garé devant le 7-Eleven près du dortoir pour acheter du café en boîte et quelques repas rapides à réchauffer au micro-ondes.
Kongpob franchit la porte coulissante et se dirigea vers le congélateur qui se trouvait au fond du magasin. Il fut surpris d'y trouver un homme qui choisissait un thé vert comme s'il ne savait pas lequel prendre. C'était la deuxième fois qu'ils se rencontraient dans la journée. Devant la réserve du senior, il ne put s'empêcher de le saluer.
— Tu n'achètes pas de lait rose aujourd'hui ? P'Arthit.
La main qui tenait une bouteille de thé se figea alors que le chef bizuteur levait les yeux vers l'homme qui avait osé le questionner. Dès qu'il vit qui c'était, Arthit afficha un visage sévère et frustré à l'égard du nouveau venu. Néanmoins, il répondit sèchement.
— La boutique est fermée.
Kongpob fit un signe de tête pour montrer qu'il avait compris.. Après un moment de silence, il posa une autre question.
— Quelqu'un sait que tu aimes le lait rose ?
Cette phrase faillit lui faire lâcher la bouteille des mains. Arthit se retourna et grogna.
— Pourquoi tu me demandes ça ? Tu vas le dire à tes amis ?
Kongpob secoua rapidement la tête et expliqua.
— Non, je ne le ferai pas. Je suis juste curieux. Donc, tu n'as dit à personne que tu aimais le lait rose ?
— Non, je ne l'ai pas fait !
Le chef bizuteur laissa échapper un autre grognement. Certains de ses amis connaissaient ce secret, mais ils n'allaient pas en parler aux gens qui voulaient lui faire perdre son sang-froid. Pourquoi 0062 voulait-il savoir, ou bien essayait-il encore de l'énerver ?
Comme il s'y attendait, l'autre homme n'arrêtait pas ces questionnements.
— Alors, est-ce que quelqu'un sait que tu es sorti en douce pour pleurer après la fin de la fête ?
Les mots lui rappelèrent ce moment embarrassant, aussi vif que lorsqu'il s'était produit. Le visage du chef bizuteur devint chaud et il s'empressa de nier.
— Personne !
— Est-ce que quelqu'un d'autre sait que ton surnom est I-Oon ?
Merde. Ce gars essayait vraiment de lui taper sur les nerfs !!!
— Kongpob !! Si tu le dis à tes amis, tu vas avoir des problèmes !
Le cri fort fit que tout le monde dans la supérette les regarda. L'homme plus âgé qui avait perdu son sang-froid s'arrêta et jeta un regard à son ennemi juré qui lui répondit par une affirmation.
— Je ne dirais rien à personne.
Kongpob n'était pas sûr que sa promesse atténuerait la colère du plus âgé. Arthit ne disait toujours rien, il attrapa une bouteille de thé vert et alla directement à la caisse, l'ignorant. L'homme qui venait d'être ignoré fit de même, se sentant coupable d'avoir posé la question de cette façon.
— P'Arthit, le truc c'est que...
— Quand est ton examen de calcul ?
Avant qu'il ne puisse s'excuser, c'est le chef des bizuteurs qui prit la parole en premier.
— Mercredi prochain.
Il lui indiqua l'horaire. Arthit resta silencieux pendant un moment et il pensait être réprimandé comme tout à l'heure. Mais ce qui vint ensuite fut le contraire.
— Le professeur aime utiliser les problèmes sur l'aire sous les graphiques (3). Révise bien ce sujet."
....Pas un sarcasme, pas un juron, mais une déclaration inattendue sur l'examen.
— Je le ferai.
Kongpob répondit brièvement. En entendant ces mots, Arthit se retourna et quitta le magasin. Même s'il voulait demander au sénior de rester, il était trop confus pour agir.
C'était un étrange soulagement mêlé à de nombreuses questions qu'il aurait voulu poser à cette seule personne. Mais c'était les questions qu'il devait garder pour lui, n'ayant pas assez de courage pour les poser même s'il mourrait d'envie de savoir si...
...si quelqu'un se rendait compte à quel point P'Arthit était "adorable"... ?
...si quelqu'un se rendait compte que P'Arthit était "gentil"... ?
...Si quelqu'un d'autre que lui s'en est rendu compte ?
Serait-ce mal de dire à P'Arthit qu'il souhaitait être la seule âme à connaître toutes ces choses ? Notes :1/ Littéralement 'a-yu, wanno, sukhan, palang' ou 'âge, bon teint, bonheur et santé', les mots pali sont utilisés par les moines pour donner des bénédictions aux citoyens. 2/ Un équivalent de 'amen'. C'est un mot pali qui signifie "c'est bon". 3/ Graphiques vitesse-temps ou v-T en physique. Laisser Un Commentaire »»————- ★ ————-«« | | Messages : 87
Date d'inscription : 01/07/2024
| amelyma Sam 7 Sep 2024 - 17:50 Règle n°18 Ne Stressez Pas Le Bizuteur — Kong et M, vous êtes dans le groupe orange. Prenez un badge et attendez le bus numéro 3.
Kongpob prit le badge auprès de P'Fang avec son ami au point d'enregistrement devant la Faculté d'ingénierie, où les étudiants de première année attendaient depuis 6 heures du matin. Ils étaient là depuis 5h30, en partie parce qu'on les avait prévenus que s'ils n'arrivaient pas à l'heure, le bus les laisserait sur place. Et aussi parce qu'ils étaient ravis d'aller à la mer à Rayong pour 2 jours et 1 nuit.
Les étudiants de première année n'avaient pas eu à sortir d'argent de leur poche puisque les seniors leur faisaient un cadeau-- tout était gratuit. Ils n'avaient qu'à se présenter avec un sac de vêtements et ils étaient prêts. Mais au fond, tout le monde savait que rien n'était gratuit. Donc cette expédition à la mer ne serait pas une excursion touristique ordinaire.
...Bien sûr, ce n'était pas juste un voyage pour s'amuser. Ce voyage avait un but.
— P'Fang, le bizutage va-t-il être rude cette fois ?
Kongpob entendit M demander, avec angoisse.
C'est vrai. Le but de cette sortie en mer était connu pour faire subir aux premières années le " bizutage en plein air ". Les scandales qui avaient fait la une des journaux n'avaient pas aidé à redorer cette activité. Il était donc tout à fait normal que les élèves de première année soient tendus, ne sachant pas ce qui les attendait. La lutte pour leur dignité était en jeu. Ils devaient se livrer au rituel de l'engrenage du département et ils étaient extrêmement paranoïaques. Pourtant, l'un des organisateurs s'empressa de nier et les taquina en ricanant.
— Eh bien, ça ne va pas être si dur. On cherchait une excuse pour sortir après les examens de mi-trimestre. Ne soyez pas trop stressés et profitez du voyage.
En entendant les mots de Fang, l'atmosphère pouvait sembler légère, car tout le monde était détendu comme s'il s'agissait d'un voyage de séminaire décontracté. Le panneau à l'avant du bus indiquait "Voyage de conservation du département industriel" à Rayong, une escroquerie totale que tous les étudiants de première année avaient bien compris.
Bien que le voyage ne soit pas obligatoire, la plupart d'entre eux étaient venus pour le grand événement de ce département. Il y avait des étudiants de toutes les années, ainsi que des anciens élèves, et des professeurs pour superviser le voyage.
En tout, il y avait près de 300 personnes qui avaient nécessité cinq bus, chaque bus pour chaque classe, avec l'équipe d'animation accompagnant les étudiants de première année pour les guider dans les activités. Les étudiants plus âgés conduisaient leurs voitures personnelles, en restant derrière, pour intervenir en cas d'urgence.
Le moment venu, les bus commencèrent leur voyage, en direction du district Est. Mais avant d'atteindre leur destination, ils avaient fait une halte au centre d'apprentissage du jardin d'herbes aromatiques pour faire de ce voyage du véritable "tourisme de préservation".
Les élèves de première année avaient été regroupés avec des badges nominatifs de différentes couleurs. Ils s'étaient assis et avaient écouté le conférencier leur parler des herbes aromatiques, pour rendre les choses plus crédibles. Puis ils avaient eu du temps libre pour profiter de la flore et de la faune, en se relaxant. La plupart d'entre eux prenaient des photos et les postaient sur les médias sociaux, en s'amusant. Certains ne se prenaient pas seulement eux-mêmes en photo, mais aussi avec d'autres camarades. Étonnamment, les personnes qui étaient les plus populaires étaient celles dont ils avaient peur.
— P'Arthit ! On peut prendre une photo avec toi ?
— Oui, bien sûr.
Le chef des bizuteurs, Arthit, fit un sourire charmeur aux filles qui se pressaient autour de lui pour des photos. Peut-être avaient-elles été impressionnées par les bizuteurs ou avaient-elles apprécié leurs tenues après que tout le groupe de bizuteurs se soit débarrassé de leur look de "durs à cuire" - ne portant que des shorts et des t-shirts noirs pendant le bizutage. Maintenant, ils portaient des chemises à motifs floraux par-dessus un maillot de corps, des shorts cargo et des tongs, avec des accessoires tels que des chapeaux de paille et des lunettes de soleil, tout à fait prêts pour le bord de mer.
Sans compter que les bizuteurs riaient et se taquinaient entre eux, au lieu d'avoir l'air endormi et sans expression comme ils l'avaient été. Par conséquent, les filles étaient attirées par eux comme s'il s'agissait de célébrités, ce qui faisait frémir d'envie les hommes de première année négligés.
— Regardez les filles. Avant, elles avaient peur des bizuteurs et maintenant elles se jettent dessus.
— Attendez qu'on arrive à la mer. Je vais enlever ma chemise et leur montrer mes tablettes de chocolat !
— Un pack de six ou un seul ? Je ne vois qu'un ventre ! Hé, Kong. Tu dois te joindre à nous. Enlevons nos t-shirts et allons dans l'eau pour montrer aux filles ce que nous avons !
Kongpob, qui était resté assis tranquillement à écouter ses amis du groupe orange depuis un petit moment, détourna son regard du bizuteur qui prenait des photos non loin de là après avoir entendu son nom. Il secoua la tête, disant non d'un ton neutre.
— Désolé, je n'aime pas nager dans la mer.
Il leur dit la vérité. Aller à la mer et nager dedans, ce n'était pas la même chose. Il avait arrêté de nager dans la mer depuis l'école primaire. Il n'aimait pas la sensation collante de l'eau et sa teneur en sel. Chaque fois qu'il allait à la mer, il s'asseyait sur la plage, laissant son esprit se détendre et profiter de la vue.
— Pourquoi pas ? On est à la mer après tout ! Allez, viens. Aide-nous à attirer l'attention des filles et à nous éloigner des bizuteurs.
Beaucoup de supplications suivirent de la part de ses pairs du groupe orange. Comme Kongpob était le roi de l'université, ils espéraient qu'il gagnerait en popularité auprès des filles. Il y avait peu d'étudiantes dans le département et ils ne voulaient pas que les bizuteurs les attrapent.
— Pensez-y. Quand les filles vont dans l'eau, elles sont sexy. Tu vas laisser les bizuteurs en profiter ? Nager dans la mer ensemble... ça va être peau contre peau ! Ohhhh, putain. Je suis déjà en train de bouillonner !
Ces sous-entendus suscitèrent un soutien bruyant de la part de tout le groupe. Avant que Kongpob ne puisse dire quoi que ce soit, une voix derrière lui prit la parole pour poser une question.
— On dirait que vous voulez vraiment nager dans la mer, n'est-ce pas ?
Tous sursautèrent, surpris, en se retournant et en regardant l'homme au visage sévère, à l'opposé de la chemise à fleurs bleu vif qu'il portait - la tenue de code des bizuteurs. Et ils étaient en train de regarder celui qui était au sommet.
Ils ne savaient pas depuis combien de temps le chef bizuteur Arthit écoutait, mais il était là depuis assez longtemps pour entendre les ragots de près. Il leur donna même une confirmation.
— Ne vous inquiétez pas. Je vais arranger les choses pour qu'elles soient comme vous le souhaitez.
Les mots semblaient gentils mais pour les étudiants de première année, ils leur donnaient l'impression d'être des prisonniers avec un panneau au-dessus de leur tête, attendant d'être punis. Puis, le chef bizuteur se retourna et s'en alla, laissant les hommes du groupe orange déglutir bruyamment, attendant leur sort.
— C'est vous avec votre grande gueule !
M gronda ses amis. Ils savaient qu'ils allaient aller dans la mer pour de bon, comme ils l'avaient souhaité et comme le chef des bizuteurs l'avait promis. Kongpob poussa un gros soupir, réalisant qu'il devait aller dans l'eau même s'il n'aimait pas ça. Mais même s'il s'était débarrassé de cette inquiétude, quelque chose pesait encore sur son coeur.
...Pour quelle raison, il ne le comprenait pas. Mais à sa grande surprise, il ne pouvait pas y faire face comme il l'aurait fait normalement.
L'homme qui aimait trop réfléchir chassa les pensées parasites et retourna au bus pour reprendre le voyage. Le département de génie industriel passa encore quelques heures sur la route jusqu'à midi avant que le bus n'arrive enfin à une station balnéaire paisible sur la plage.
Kongpob descendit du bus tandis que les étudiants prenaient leurs bagages et rejoignaient d'autres amis. Ils balayèrent des yeux les environs composés de petits bungalows, d'un terrain de loisirs, d'une salle de réunion, d’arbres verdoyants, bordés de cocotiers, le tout agrémenté du bruit des vagues et de l'odeur de la mer.
Une fois que tout le monde fut descendu du véhicule, on demanda aux étudiants de première année de se rassembler dans la grande cour de la station pour entendre les règles et le règlement de ce camping. Même s'ils étaient hors du campus, ils devaient se conformer aux règles qui étaient plus strictes pour leur sécurité, car le bien-être des étudiants de première année était la priorité absolue des étudiants plus âgés.
Ensuite, on leur remit les clés pour accéder au bungalow - un pour 20 étudiants. Ils rangèrent leurs affaires et prirent le déjeuner, emmagasinant l'énergie nécessaire aux activités de l'après-midi. Ils se lançaient à corps perdu dans le bizutage. Il y avait huit groupes de première année, séparés par des couleurs qui faisaient les jeux à chaque base.
Mais le moment venu, les activités n'avaient rien de difficile. La plupart étaient des jeux de base comme avoir les yeux bandés et mettre les mains dans un bocal, sans savoir ce qu'il y avait dedans, ou se mettre de la poudre sur le visage. Il n'y avait pas d'activités inappropriées ou obscènes et le but principal était de s'amuser, comme l'avait dit Fang.
Pas même la base la plus proche de la mer. Il s'agissait de la base du bizuteur, dirigée par Arthit, et même celle-ci était joyeuse. Le chef des bizuteurs était allongé nonchalamment sur sa chaise de plage, chantant avec la guitare de Knot. Dès qu'il aperçut le nouveau groupe d'étudiants de première année, il se leva pour leur souhaiter la bienvenue.
— Mesdemoiselles, s'il vous plaît, mettez-vous à l'ombre juste ici. Nous allons jouer un peu de musique pour vous.
Le chef bizuteur les invita cordialement tandis que les étudiantes se mirent à l'abri du soleil. Elles étaient heureuses de ne pas avoir à attraper de coups de soleil. Puis le troisième année tourna son attention vers les hommes qu'il avait pris pour cible depuis le matin.
— Vous voulez vous baigner dans la mer ? Vous avez ma permission de vous éclater. Tout le monde, enlevez vos t-shirts !
Donc, chef bizuteur un jour, chef bizuteur toujours.
Malgré son air détendu et adouci, son ordre resta sans appel. Les hommes enlevèrent leurs t-shirts et les posèrent sur le sable, dévoilant leurs corps et s'attirant ricanements et cris de la part des filles ainsi que des élèves plus âgés venus les surveiller.
On leur ordonna de s'asseoir et de se relever au bord de l'eau - aussi difficile que l'entraînement d'une nouvelle recrue. Ensuite, ils devaient ramper dans le sable, s'accroupir, rouler leur corps dans le sable et ressembler à du porc pané frit. Ils devaient s'asseoir dans la mer et remonter sur la plage pour répéter toutes les étapes.
Une fois que les bizuteurs avaient donné les ordres, ils étaient retournés chanter et jouer de la musique avec les filles, laissant les hommes dans l'eau, roulant dans les vagues, les ignorant. Les étudiants de première année réalisèrent qu'ils avaient été piégés et ils partagèrent tous la même pensée.
— Merde. Ils voulaient flirter avec les filles ! Et ils se sont débarrassés de nous ! C'est deux poids deux mesures !
Kongpob entendit un ami se plaindre. Plus il voyait comment l'homme sur la plage était imperturbable face à leurs misères, plus il était frustré. C'est peut-être pour cela qu'il se leva soudainement.
— Puis-je parler ? !
Tous les regards se tournèrent vers l'homme qui avait pris la parole, y compris celui du chef bizuteur qui avait cessé de parler aux filles. Il ne fut pas surpris de voir que c'était encore ce type avec le complexe du héros. Mais ce qui était particulier, c'était son allure : il avait l'air de quelqu'un qui avait craqué. Il se leva et se dirigea vers la plage, et demanda d'une voix grave.
— Qu'est-ce qui ne va pas ?
— Je pense que c'est injuste que tu t'assoies avec les filles et que tu chantes alors que tu nous as dit d’aller nous plonger dans la mer.
Les yeux d'Arthit s'élargirent en entendant la protestation. Bien que 0062 se soit déjà disputé avec lui auparavant, cette fois-ci, il pouvait dire que le gars était vraiment contrarié, indigné. Malgré tout, il afficha un visage sinistre et parla d'une voix ferme.
— Si tu ne peux pas supporter cette simple tâche, que vas-tu faire d'autre à l'avenir ? !
— Je peux tout faire ! J'ai admis que certaines de vos activités étaient bonnes. Mais celle-ci est peu créative et je n'en vois pas l'intérêt. Je pense que c'est injuste pour nous !
...Comme une gifle dans le visage. L'étudiant qui avait un statut hiérarchique supérieur se mit en colère en entendant la protestation et le rejet de son autorité.
— Si tu peux faire quelque chose. Je vais te donner l'ordre de rester seul dans la mer. Ça te rafraîchira les idées, n'est-ce pas ? Est-ce une raison suffisante pour toi ? !
Le cri rendit toute la plage silencieuse. Tous les regards étaient tournés vers l'homme à qui l'on avait ordonné de rester immobile, silencieux, avant de se retourner et de marcher vers la mer, acceptant sa punition.
Kongpob se dirigea plus loin dans l'eau. Chaque pas était lourd. Non seulement son corps se sentait lourd... mais son coeur aussi.
Il ne savait pas pourquoi il s'opposait à Arthit comme ça. Cela n'avait aucun sens. Les plaintes de son ami l'avaient tellement frustré qu'il ne pouvait plus le supporter. Il avait entendu les pleurnicheries tout le temps quand ils avaient été punis à l'époque. Mais cette fois, il avait été trop émotif et avait laissé les mots s'échapper de sa bouche.
...Et ça finissait comme d'habitude.
Il provoquait Arthit et il était puni encore et encore. Il voulait vraiment lui parler gentiment car il l'avait vu rire et plaisanter avec d'autres, mais il n'en avait pas eu l'occasion. Il ne pouvait blâmer personne d'autre que lui-même car c'était lui qui avait tout gâché.
...Arthit le détesterait-il à cause de cela ?
Cette question cloua Kongpob sur place, regardant sans but les vagues de la mer qui roulaient à hauteur de sa poitrine. Il savait comment nager, donc il n'avait pas peur. Ou peut-être... il devrait se rafraîchir la tête comme Arthit l'avait dit.
Une fois son esprit commandé, son corps suivit. Kongpob décida de fermer les yeux et plongea dans l'eau, laissant sa fraîcheur apaiser sa frustration. Il souffla un peu d'air, créant des bulles à la surface jusqu'à ce qu'elles disparaissent presque, et nagea à nouveau vers la surface. Tout d'un coup, il sentit un violent coup sec, le tirant vers le haut, et quelqu'un cria fort son nom.
— Kongpob ! Tiens bon ! Reste avec moi !
La première chose qu'il vit après avoir émergé de l'eau fut le regard terrifié d'Arthit, ses yeux remplis de peur. Il ne savait pas ce que l'homme plus âgé faisait ici. Mais avant qu'il ne puisse ouvrir la bouche pour demander, Arthit le saisit fermement et le tira vers le rivage. Il avalait de l'eau de mer mais l'autre homme ne s'arrêtait pas, le traînant et le tirant vers la plage. Kongpob recracha l'eau salée qu'il avait avalée et cela effraya Arthit qui lui tenait la tête.
— Kongpob ! Tu vas bien ? Tu peux respirer ? Tu as des crampes ?! Une méduse t'a piqué ? SECOURS ! Où sont les secours ? Venez ici !!
Le chef bizuteur cria frénétiquement, appelant les secouristes. Une voix douce le fit s'arrêter
— P'Arthit... hum... Je vais... Bien.
Le nouveau venu se mit en position assise comme si rien ne s'était passé, mais Arthit ne recula pas,
— Comment peux-tu aller bien ? Je t'ai vu te noyer !
— J'ai piqué une tête.
— Quoi ! Pourquoi diable as-tu fait ça ? !!
— Tu m'as dit de me rafraîchir la tête et c'est ce que j'ai fait.
...L'explication laissa toute la plage sans voix.
Arthit cligna des yeux alors qu'il reconstituait le scénario. Donc, il s'était donné du mal pour aider ce type et c'était juste lui qui paniquait ? Il était vrai qu'il avait dit au jeune homme de se calmer, mais qui aurait cru qu'il allait plonger dans l'eau ?
... Est-il fou ? Comment peut-il faire ça ? !
L'inquiétude se transforma en colère, le corps du bizuteur trembla, il serra les poings et cria.
— Tu as perdu la tête ? Si je te dis de te tuer, tu vas le faire aussi ? Utilise ton propre jugement, bordel !
Ce grognement portait beaucoup d'émotions - une fureur si palpable que Kongpob n'avait jamais vu chez Arthit auparavant. Le hurlement fut interrompu par les secouristes, dirigés par Fang, qui coururent vers la scène.
— Qui est blessé ?
— Personne. Assez ! Annulez toutes les activités !
Arthit annula toutes les activités des bases et traversa la foule confuse, s'éloignant à grands pas, furieux. Kongpob, toujours assis sur la plage, était aussi déconcerté jusqu'à ce que M le tire par la main pour se lever, l'air inquiet.
— Hé ! Comment tu te sens, mec ? Tu vas bien ?
— Ouais, je vais bien.
— J'ai eu une peur bleue, mec. Je pensais que tu t'étais noyé ! C'est P'Arthit qui a plongé ! Je ne savais pas que tu avais disparu dans l'eau.
L'explication de ce qui s'était passé pendant qu'il était sous l'eau commençait à lui paraître claire.
...Oui, il ne savait pas ce qui se passait. Il ne savait pas à quel point P'Arthit était inquiet pour lui. Mais au moins il en fut convaincu... parce qu'il le sentait à travers les actions et la voix de l'homme plus âgé.
...Et aussi par les émotions dans ses yeux. | | Messages : 553
Date d'inscription : 13/07/2024
| Johanne Sam 7 Sep 2024 - 17:50 Règle n°19 Vous Devez Chérir le Gear que le Bizuteur Vous A Donné — Alors, voilà comment on va faire. Kongpob... Kongpob, tu m'écoutes ?
Kongpob reporta son attention sur la conversation. Il se trouvait dans un bungalow en bord de mer où ses amis s'étaient réunis pour imaginer un spectacle pour la représentation des nouveaux élèves de ce soir. Il avait été appelé pour être l'un des interprètes et faire une répétition comme ils l'avaient décidé. Tout le monde le regardait, attendant sa réponse.
— Oui, j'écoute. On peut faire comme May a dit.
Après avoir entendu son accord, elle mit fin à la réunion, sans savoir ce qui se passait réellement dans la tête de Kongpob. Il était mentalement loin. Son esprit s'attardait encore sur l'incident de l'après-midi qui l'avait affecté, lui et l'autre personne.
P'Arthit était en colère contre lui. Pas seulement en colère... mais furieux... plus que jamais.
Il n'était pas surpris de la raison. Une fois qu'il s'était calmé et qu'il avait réfléchi, il avait vraiment eu envie de se frapper... fort. C'était un acte irréfléchi, fou. Il savait seulement qu'il voulait étouffer sa frustration, alors il avait plongé dans la mer pour la faire disparaître. Il s'est avéré que cela avait effrayé les gens, surtout celui qui lui avait donné l'ordre… qui était aussi le premier homme à être venu à son secours ?
Arthit avait peur... sa voix tremblait d'inquiétude... ses yeux étaient terrifiés. Kongpob savait combien ces émotions étaient authentiques.
Mais dès que le senior avait réalisé que l'incident n'était qu'un acte irréfléchi, il avait dû avoir l'impression d'être giflé alors que son inquiétude devenait une blague. L'incident a dû blesser ses sentiments, en tant que chef du bizutage.
Kongpob voulait s'excuser. Il n'avait pas d'autre explication qu'un seul mot. Mais même s'il avait cherché Arthit, il ne l'avait trouvé nulle part dans la station. Quand son ami lui avait demandé de discuter de la performance, il avait dû arrêter ses recherches. Son esprit était encore agité, accablé par la culpabilité.
L'homme qui réfléchissait trop soupira, essayant d'évacuer sa frustration dans l'air.
C'est bon. Ce soir, après la représentation, la bataille du gear du département commencerait. Arthit superviserait l'événement en tant que chef bizuteur. Ce serait la bataille la plus difficile parce que c'était le dernier rituel pour prouver leur valeur en tant que premières années. Il était certain qu'il ferait tout ce qu'il pourrait pour gagner leur acceptation en tant que membre du département.
Par-dessus tout, il souhaitait qu'Arthit l'écoute pour une fois...
19 heures.
Après que les étudiants de première année aient été nourris par un buffet, ils furent invités à se rassembler sur le lieu de la réunion. Il y avait une scène prête à accueillir les performances de toutes les années, de la plus ancienne à la plus jeune.
Le spectacle commença avec la performance des quatrièmes années menée par P'Deer et ses amis. Ils chantaient avec une guitare, un spectacle d'ouverture pour les années inférieures. Avec un numéro aussi simple, ils récoltèrent tout de même de nombreux sifflets et cris. Puis, des acclamations et des rires plus forts suivirent lorsqu'ils firent un spectacle de parodies de séries télévisées, de films et de publicités qui avaient été arrangé par l'équipe récréative de deuxième année.
Ils faisaient ce spectacle parce que celui des troisièmes années n'était pas prêt. Mais quand le spectacle des deuxièmes années se termina, les troisièmes années n'étaient pas encore prêts, donc les premières années devaient être les suivants.
Kongpob alla dans les coulisses. Il jouait son rôle, ce qui était facile car l'histoire que May avait concoctée était basée sur la vie des étudiants de première année en ingénierie, alors qu'ils se faisaient de nouveaux amis, traversaient le bizutage et rencontraient leurs mentors de code.
Il n'était pas l'acteur principal, mais l'un des acteurs de première année, et avait rarement un dialogue. Il n'avait qu'une scène ou deux puis s'éclipsait pour attendre près de la scène. Cela lui donna le temps d'explorer la cour, et ses yeux s'arrêtèrent sur un groupe de troisième année qui marchait derrière les lignes des étudiants de première année. L'un d'eux était celui qu'il avait cherché toute la journée.
Kongpob observa le chef bizuteur Arthit avec les bizuteurs qui regardaient le spectacle sur la scène, soulagé que l'autre homme soit arrivé comme il l'avait prévu. Cette fois, il ne manquerait pas l'occasion.
Il avait cet objectif en tête. Mais il sursauta quand quelqu'un sur la scène commença à crier.
— Vous voyez ce gear ? C'est la fierté de la faculté d'ingénierie. Si je ne le donne pas à ta classe, que vas-tu faire ?!
— Je vais te l'arracher !
Kongpob regarda rapidement la scène sous le choc. C'était le même dialogue qu'il avait dit pendant la première session de bizutage. Cette même phrase provocatrice avait fait de lui une cible pour le chef du bizutage parce qu'il avait défié son autorité. Il ne savait pas que cela allait se retrouver dans la représentation d'aujourd'hui, et il se tourna vers le directeur du spectacle à côté de lui.
— C'est quoi cette scène, May ?
— Je t'ai demandé si on pouvait recréer cette scène pour le spectacle et tu as dit que c'était ok.
La réponse lui disait quelque chose. Ça devait être quand il était devenu distrait et n'avait pas prêté attention à la réunion. Sois maudit, Kong ! Il n'aurait pas dû dire oui. Ça ne le touchait pas, mais ça gênerait l'homme qui avait été interpellé et humilié. Pire, c'était en train de se rejouer dans ce spectacle.
— Qu'est-ce que tu viens de dire ? Comment tu vas m'arracher le gear ?!
— Je vais faire de toi ma femme ! On dit que les affaires d'un petit ami sont comme les nôtres. Si je fais de toi ma femme, ton gear sera aussi le mien !
On pouvait entendre des sifflements et des huées dans toute la cour, car le public était heureux de la chute dramatique idiote qui était devenue la légende de la classe. Mais cette scène, d'un autre côté, lui rappelait des souvenirs.
En y réfléchissant, depuis le début, il avait toujours exaspéré P'Arthit. Si c'était d'autres personnes, elles auraient été tellement en colère qu'elles auraient pu le frapper après avoir été taquinées et insultées de la sorte. Ou bien il aurait été évincé par tout le groupe des élèves plus âgés pour avoir été insolent et irrespectueux.
Mais Arthit ne lui avait jamais fait ça. Même s'il lui avait donné une punition sévère, ce qu'il ressentait toujours de la part de l'homme plus âgé, c'était de la "gentillesse". Cela lui donnait envie de se rapprocher de lui, et cela le rendait aussi "possessif" de cette gentillesse.
Chaque fois qu'il voyait Arthit agir amicalement avec quelqu'un d'autre, il était aussi frustré qu'un garçon qui ne veut pas partager son jouet. Une des raisons était qu'il savait que lui et Arthit n'avaient jamais eu une bonne conversation, pas même une fois.
S'il recommençait à partir d'aujourd'hui, serait-il encore trop tard ? S'il voulait recommencer, s'il voulait arrêter de le mettre en colère et s'il s'excusait pour tout le tort qu'il avait causé à l'autre homme, Arthit le laisserait-il entrer et l'accepterait-il davantage ?
... Pour qu'un jour, ils puissent se rapprocher encore plus.
Mais il semblait qu'il était en effet trop tard. L'autre homme ne comprenait pas ce qui se passait et il était encore plus en colère lorsqu'il monta sur la scène et rugit.
— Vous trouvez ça drôle ? Pour moi, ça ne l'est pas ! Vous avez osé monter un spectacle comme celui-ci, alors vous ne voulez plus du gear du département, n'est-ce pas ? Descendez tous et mettez-vous à terre ! Je vais tous vous punir !
Les artistes se précipitèrent hors de la scène, suivant l'ordre, paniqués. Mais celle qui fut la plus touchée et qui eut le cœur brisé fut May, la créatrice du spectacle. En fait, elle voulait montrer comment l'insolent première année commençait à comprendre les actions des bizuteurs au fur et à mesure que l'histoire avançait, mais le spectacle avait été interrompu avant qu'ils n'arrivent au point culminant. Pire, la classe entière recevait les reproches de son spectacle.
— Ne me regardez pas ! Fermez les yeux et baissez la tête ! Faites-le !
Les élèves de première année gardèrent la tête basse, le menton touchant presque leur poitrine. Comme la lumière dans la cour s'était assombrie, ils avaient peur de ne pas avoir le gear. Ou même si les seniors leur donnaient les engrenages, ils savaient qu'ils devraient subir une punition sévère comme la dernière fois pendant les rituels de la journée de reconnaissance et des engrenages de la faculté.
Pendant le long moment de silence, les étudiants de première année étaient encore plus stressés par la situation. Tout d'un coup, une seconde du chant de la faculté retentit, non pas de la part des gens dans la cour, mais de la part des gens sur l'écran du projecteur sur la scène.
… Un écran qui montrait l'entraînement au chant des juniors.
Les scènes étaient celles où les troisièmes années pratiquaient le bizutage... comment l'équipe récréative pratiquait son chant. Les scènes où les médecins travaillaient tard dans la nuit. Les scènes du premier jour du bizutage. Les scènes de réunion des bizuteurs après chaque séance de bizutage. Des étudiants de première année apprenant à chanter. Les matchs des Freshmen Games. Des étudiants de première année pendant le rituel du gear de la faculté. Du moment où ils se sont levés pour prendre le drapeau... et de la cérémonie du Bai Sri à la fin où ils attachent des ficelles blanches aux poignets.
Chaque mouvement, chaque scène, portait les souvenirs qu'ils avaient créés ensemble pendant ces jours et ces nuits. L'amitié, le sacrifice, l'esprit et l'unité furent transmis dans ce film de dix minutes. C'était un film rempli de sentiments et d'émotions bouleversants, plus grands que ce que mille mots pourraient décrire.
… Les images sur l'écran s'arrêtèrent soudainement avant de se transformer en une scène où l'on voyait les bizuteurs en arrière-plan, assis ensemble à une table en marbre près de la faculté. La scène montrait l'air perplexe d'Arthit, pris au dépourvu par celui qui tenait la caméra.
— Est-ce que la caméra tourne ?
— J'enregistre. Tu peux parler maintenant.
— De quoi je suis censé parler ?
— Ce que tu veux, mec.
L'homme qui était devenu la star devant la caméra était déconcerté mais finit par se tourner vers la caméra qui zoomait pour se concentrer sur le visage du chef bizuteur. L'homme s'éclaircit la gorge et commença à parler.
— Ahem ! Les nouveaux. Vous savez tous bien que ceci a été un jeu d'acteur. C'était un long show de trois mois que nous avons fait pour que vous puissiez être unis. Donc... si nous vous avons offensés ou contrariés, nous nous excusons sincèrement. Enfin, si vous aviez un imprévu, vous deviez d'abord avoir ma permission. Mais il y a une chose pour laquelle je veux demander... votre permission...
Les yeux aiguisés d'Arthit regardaient directement la caméra comme s'il regardait tous les étudiants de première année qui attendaient d'entendre les prochains mots...
— … Je peux avoir votre permission d'être votre 'frère' ?
Cette phrase laissa tout le monde sans voix. Il était clair comme de l'eau de roche pour les élèves de première année que la fraternité et la sororité ne pouvaient pas naître par la force ou la répression ou qu'elles devaient suivre strictement le système d'ancienneté.
Mais qu'elle était créée par une "acceptation mutuelle".
— Si vous êtes d'accord, allez à la plage. Nous vous y attendons.
Le dernier message s'arrêta alors que l'écran devenait noir. Le spectacle des troisièmes années était terminé. Bien sûr, les première année ne refusèrent pas la demande. Ils se levèrent rapidement et se dirigèrent vers la plage non loin de là. Ils furent alors surpris par la vue panoramique décorée de petites coupes en verre contenant des bougies à l'intérieur qui étaient alignées sur la plage avec les troisièmes années les entourant. Il y avait un homme, cependant, qui se tenait sur leur chemin.
Le chef du bizutage se tenait en position de repos, l'air déterminé, balayant du regard les élèves de première année et disant d'une voix sérieuse.
— Les nouveaux ! Derrière moi se trouvent les "gears du département" que vous allez recevoir. J'accomplirai mon dernier devoir en vous envoyant réclamer ce qui vous appartient !
En terminant sa phrase, le chef bizuteur Arthit se laissa tomber sur le sable, accroupi, alors que tous les membres de l'équipe récréative attendaient. Puis, ils commencèrent à relier leurs bras les uns aux autres, créant ainsi un pont.
... Il était appelé 'Star Bridge' afin que les étudiants de première année puissent marcher vers leur destination et obtenir le symbole de leur fierté.
L'hymne du département accompagnait le rituel, le rendant plus sacré et plus chaleureux alors que les étudiants de première année regardaient leurs pas sur le pont étoilé créé par les bras de leurs aînés. Il faisait environ cinq mètres de long, mais ils ne pouvaient s'empêcher de s'inquiéter de mettre leur poids sur les bras des étudiants plus âgés. Ils savaient que cet acte symbolisait la façon dont les plus âgés feraient n'importe quoi pour leurs petits frères et sœurs, en particulier pour le premier qui avait servi de fondation à plus de cent étudiants de première année. Il avait le fardeau le plus lourd de tous.
— Je suis désolé, P'Arthit.
Kongpob murmura doucement à l'intention du chef bizuteur. Arthit lui lança un regard pendant une seconde avant de l'ignorer, laissant ses excuses se volatiliser dans l'air. Il admettait que cela faisait mal. Il voulait s'amender auprès de l'homme plus âgé mais ce n'était pas le moment pour cela.
Alors, l'homme grand décida d'emprunter le pont en étoile, les aînés lui tenant les mains des deux côtés pendant qu'il traversait. Enfin, il atteignit sa destination, un chemin qui s'étirait vers la personne qui attendait de leur remettre les engrenages. Il ne pouvait s'agir que du plus ancien d'entre eux, le président de la classe de quatrième année.
Deer tenait un engrenage en argent gravé du nom du département et de l'année de la classe. En voyant celui qui venait en prendre un, il demanda avant de lui remettre l'engin.
— C'est quoi ton nom déjà ?
— Kongpob.
— J'ai entendu dire que c'était toi qui avait mis au point un plan pour remercier Arthit pendant le rituel du drapeau.
Bien que perplexe face à ce sujet sorti de nulle part, il hocha la tête.
— Oui, c'était moi.
— Eh bien, c'était une idée brillante. Dis-moi... tu veux devenir un chef bizuteur ?
La deuxième partie de la déclaration le sidéra encore davantage au point de le faire sursauter. Il dut demander, incrédule.
— Moi ?
— Oui, réfléchis-y. Mais disons... que je t'ai réservé le poste.
Deer parlait de façon décontractée avec un sourire amical. Contrairement à Kongpob qui ne comprenait toujours pas pourquoi on lui avait proposé le poste de chef bizuteur. Mais avant qu'il puisse demander, l'autre homme lui tendit le gear.
— Tiens, prends le gear. Garde-le bien. Et au fait, l'engrenage a beaucoup de signification.
Il écouta attentivement Deer lui expliquer la signification de l'engrenage, sachant qu'il s'agissait de mots transmis d'une génération à l'autre. Il remercia Deer d'un wai, puis s'éclipsa pour s'asseoir avec les autres dans la file, afin que ses amis puissent passer après lui.
Alors que tous les élèves de première année avaient enfin reçu leur engrenage, tout le monde, toutes années confondues, commença à entonner l'hymne qui marquait la fin de la cérémonie de remise du gear du département et qui mettait fin au bizutage qui avait duré près de trois mois.
... Après cette cérémonie mémorable, la célébration d'accueil des nouveaux membres du département suivit. Les boissons alcoolisées étaient prêtes. Le système de sonorisation était installé. Et la fête pour unir les frères et les sœurs commença.
Kongpob fut entraîné dans la beuverie par ses amis, mais il essaya de s'éclipser. Il avait quelque chose de plus important à faire : se réconcilier avec quelqu'un. Mais il ne put le trouver.
… Il avait gardé les yeux sur cette personne pendant toute la cérémonie. Mais une fois les gens dispersés, il l'avait perdu. Même s'il avait marché pour chercher Arthit à la table des bizuteurs, il ne l'avait pas trouvé là. Il le chercha le long de la plage, devenant agité en ne voyant pas l'homme plus âgé.
C'était nul qu'il n'ait pas le numéro d'Arthit. S'il l'avait eu, il aurait été plus facile d'appeler et de demander où il était. Ou peut-être devrait-il retourner en arrière et demander le numéro d'Arthit aux troisièmes années.
Kongpob décida de faire demi-tour, mais il aperçut un homme qui marchait à grands pas sur la plage depuis l'un des bungalows. Plus il s'approchait, plus il voyait que quelque chose n'allait pas avec l'autre homme, puis il réalisa pourquoi le chef bizuteur avait disparu.
Le bras gauche d'Arthit était bandé - le même bras qui avait supporté le poids d'une centaine d'étudiants de première année. Il n'était pas surprenant que son bras ait été meurtri et que la douleur l'ait poussé à chercher le baume. Pourtant, le bizuteur en chef avait gardé cela pour lui, ne montrant pas sa faiblesse, et il garda son expression naturelle en passant devant Kongpob. L'autre homme ne le regarda même pas ; il dut accélérer le pas et le contourna pour passer devant lui.
— P'Arthit. J'ai besoin de te parler.
Le chef bizuteur qui s'était fait bloquer s'arrêta de marcher mais il n'y eut aucune réaction de sa part. Il resta là, laissant Kongpob s'exprimer alors que le plus jeune allait droit au but.
— Je veux dire que je suis désolé, P'Arthit.
Il prononça le seul mot qu'il avait voulu dire. Il voulait désespérément qu'Arthit sache ce qu'il ressentait à l'intérieur et souhaitait avoir une seconde chance de s'amender.
Kongpob regarda l'autre homme avec espoir, mais la première réponse du chef bizuteur fut une réplique froide.
— Désolé pour quoi ?
— Pour tout et pour toutes les fois où je t'ai mis en colère.
— Si tu savais que ce que tu faisais allait me mettre en colère, pourquoi tu l'as fait ?
… Cette question courte et nette le blessa profondément. Kongpob resta silencieux, stupéfait, incapable de trouver une quelconque explication. Il ne pouvait même pas répondre lui-même à la question de savoir pourquoi il avait fait tout ce qu'il avait fait.
… Il y avait réfléchi et s'était demandé plusieurs fois pourquoi il aimait embêter Arthit ou pourquoi il aimait le provoquer. Parce qu'au final, c'était lui qui était inquiet et qui avait essayé de s'excuser auprès de l'autre homme.
— Eh bien, je…
L'homme qui bégayait essaya de trouver ses mots mais l'autre homme se contenta de lâcher un gros soupir, perdant patience.
— Ça suffit. J'en ai fini de me battre avec toi.
Arthit le coupa et s'éloigna vers la table où se trouvaient les bizuteurs, laissant Kongpob tout seul... sur la plage alors qu'une froideur engourdissante envahissait son cœur.
C'était fini. Plus aucune chance pour lui.
Il le méritait. Il avait mis Arthit tellement en colère, pas seulement une fois, mais trop de fois, qu'Arthit en avait finalement eu assez et ne voulait plus rien avoir à faire avec lui.
Cette prise de conscience fit couler son coeur... comme du plomb. C'était incroyable qu'une seule personne puisse affecter son coeur à ce point... Il avait rencontré cet homme seulement trois mois auparavant, mais il se souvenait de tout ce qui s'était passé entre eux.
L'homme qui était devenu sa force motrice pour faire et accomplir beaucoup de choses.
L'homme qui le faisait sourire et rire pour les plus petites choses.
Quelqu'un qu'il voulait connaître plus profondément et dont il voulait se rapprocher.
Arthit était tout cela et le premier qui lui faisait ressentir ces sentiments.
Ces choses.... il ne les aurait plus jamais à partir de maintenant. Si P'Arthit ne voulait pas avoir affaire à lui, alors il sortirait de sa vie pour le bien de l'autre.
Kongpob refoula cette idée, se retourna, se préparant à marcher dans l'autre direction. Mais avant qu'il ne fasse un pas, quelque chose toucha la base de son cou et le fit sursauter. En se retournant, ses yeux s'écarquillèrent pour voir l'homme qui l'avait ignoré l'instant d'avant lui tendre une canette de bière, lui demandant brusquement.
— Tu en veux ?
Kongpob prit la canette de bière glacée, sidéré une fois de plus ; ses yeux se rivèrent sur la personne qui, pensait-il, ne voulait plus le voir. L'homme se laissa tomber sur le sable, ouvrant la canette et la portant à ses lèvres, sirotant, l'air détendu. Il ne put s'empêcher de demander.
— Je pensais que tu ne voulais plus me parler.
— Eh bien, je t'ai dit que j'en avais fini de me battre avec toi. Mais si tu veux me parler gentiment, assieds-toi et on va discuter, sauf si tu ne veux pas.
— Si, je le veux.
Kongpob répondit avec empressement, en se couchant à côté d'Arthit. Il ne savait pas ce qu'Arthit avait en tête, mais d'après son attitude, il semblait ne plus être en colère contre lui. Le chef bizuteur lui avait même offert une bière.
… Une fois de plus… il était le bénéficiaire de la bonté d'Arthit... comme bien des fois avant ce soir.
Kongpob ouvrit la canette et la souleva pour prendre une gorgée, en regardant la mer dans la nuit. Le croissant de lune et les étoiles étaient plus beaux que d'habitude. La brise marine les touchait légèrement, et les vagues roulaient contre le rivage. La sérénité lui donnait envie de se laisser aller, alors il trouva un sujet de conversation avec la seule question qui l'intriguait.
— P'Arthit, pourquoi es-tu devenu un chef bizuteur ?
— Quelqu'un m'a forcé à le faire.
C'était une réponse tranchante et honnête qui lui fit presque lâcher la canette. L'autre homme continua.
— P'Tum était mon mentor de code. Il était le chef bizuteur de troisième année quand j'étais en première année. Et donc il m'a fait en devenir un comme lui.
… Tum… le co-mentor de code qui allait épouser P'Fon, son vrai mentor, dans les deux semaines à venir. Il se souvenait du gars à la fête du porc grillé, mais ne savait pas que Tum était le chef bizuteur de la classe d'Arthit.
— En fait, je ne voulais pas en être un. Le chef bizuteur a trop de responsabilités. Ça ne me ressemble pas du tout. Je suis une tête brûlée. Quand je t'ai agrippé le col le premier jour du bizutage, j'ai presque été renvoyé de mon poste parce que j'avais enfreint les règles. J'ai même utilisé des gros mots avec toi et posé mes mains sur toi. Mais mes amis ont demandé une autre chance. Personne n'avait essayé d'intervenir à l'époque, alors chacun de nous était responsable de ses actes. P'Deer a considéré qu'il s'agissait de la première infraction, alors il nous a donné une marge de manœuvre, et nous a punis avec 20 tours de piste.
Cette histoire de coulisses déclencha quelque chose en Kongpob. C'était la première fois qu'il voyait les choses à travers les yeux d'Arthit. Pas étonnant que l'autre homme n'ait jamais glissé un mauvais mot pendant le bizutage après ça. Il lui parlait même de manière raisonnée, même si Kongpob était celui qui avait commencé les ennuis.
Accablé par la culpabilité, il garda le silence, ne voulant pas se disputer. Et il dit quelque chose qu'il avait déjà dit l'instant d'avant.
— Je suis désolé.
— Ce n'est pas grave. Laisse le passé au passé. Je t'ai déjà puni.
Arthit haussa les épaules, levant la bière pour en boire une gorgée. Son attitude était toujours détendue, comme s'il n'était pas du tout dérangé, comme il l'avait dit. Ses yeux erraient vers la vaste mer. Puis, une question vint à l'esprit de l'homme assis à côté de lui.
— P'Arthit, tu te souviens quand nous avons parié sur le concours de la Lune et de l'Etoile ?
Les mots lui rappelèrent la situation qui avait presque échappé à son esprit. Comme il était un homme qui tenait parole, il hocha la tête.
— Oui, je m'en souviens. Maintenant tu sais ce que tu veux me demander ?
— Oui. Tu es disponible samedi prochain ?
— Eh bien, je pense que oui.
— … Je veux aller faire du shopping. Je peux demander à P'Arthit de m'accompagner ?
— C'est ça ta demande ?
— Oui.
Arthit se retourna pour regarder le jeune homme avec un froncement de sourcils, perplexe. Le type avait gardé la demande pendant deux mois. Il avait pensé que ce serait quelque chose de plus important ou une vengeance pour l'humilier. Il s'avéra que c'était une simple demande.
— Oui, je peux y aller avec toi.
En entendant la réponse, le visage de Kongpob s'éclaira d'un grand sourire.
— Alors, je peux avoir ton numéro ? Nous allons fixer l'heure et la date.
Arthit regarda l'autre sortir rapidement un iPhone de sa poche et taper les dix chiffres qu'il lui indiquait. Puis, ses yeux captèrent quelque chose.
— Quand est-ce que tu vas enlever ce truc ?
Kongpob s'arrêta, levant les yeux du téléphone... Cette chose... comme l'indiquaient les yeux d'Arthit... était quelque chose sur son poignet gauche.
Le poignet qui portait un seul fil sacré.
— Pourquoi je l'aurais fait ? J'ai pensé que c'était bien d'avoir ça sur mon poignet. Je ne l'enlèverai pas.
L'affirmation s'accompagna d'un léger sourire tandis que les yeux du jeune homme fixaient Arthit. Les scintillements qu'ils contenaient parlaient de quelque chose dont Arthit n'avait aucune idée. Ils lui donnaient juste des sensations si bizarres qu'il devait détourner des yeux. Avant que quelqu'un ne puisse dire quoi que ce soit, une voix lointaine appela.
— Arthit ! Arthit mec ! Où es-tu, bon sang ? Ramène ton cul par ici !
Un ami du groupe des bizuteurs cherchait le chef des bizuteurs car ils voulaient qu'il revienne à la table. Arthit se leva, balayant le sable, se préparant à faire demi-tour et à partir.
— Très bien, j’y vais.
— Attends, P'Arthit.
Kongpob se leva rapidement et l'arrêta dans son mouvement.
— J'ai quelque chose pour toi.
— Quoi ?
— Donne-moi ta main, s'il te plaît.
L'homme plus âgé commençait à être frustré d'être retenu par le jeune homme maladroit. Mais il lui donna la main libre qui ne tenait pas la canette de bière. Il regarda Kongpob mettre sa main dans sa poche, et poser quelque chose sur sa paume... l'objet en argent en forme d'engrenage qu'il venait de donner à une centaine d'étudiants de première année.
… Le gear du département.
— Pourquoi tu me le rends ?!
Arthit cria, sa colère s'enflammant à nouveau. Il avait cru qu'ils avaient fini par se parler comme deux personnes normales, mais le type déclenchait une nouvelle dispute. Rendre le gear que le chef bizuteur avait donné signifiait lui manquer de respect. Mais le jeune homme s'expliqua rapidement.
— Non, je ne le rends pas. Je veux juste que tu le gardes pour moi.
— Pourquoi tu fais ça ?!
Kongpob ne répondit pas, surpris…
— Oh, tu ne sais pas ? Je pensais que tu savais ce que ça voulait dire. Tu peux demander à P'Deer ce qu'il en est.
La réponse était vague et confuse. Quelle était la signification de l'engrenage ? Pourquoi devrait-il demander à P'Deer ? C'était le chef des bizuteurs. Bien sûr, il savait ce que cela signifiait.
Arthit était sur le point d'ouvrir la bouche pour gronder le jeune homme mais son ami l'appela et lui demanda de se dépêcher.
— Hé ! Arthit, toute la table t'attend. Viens !
Le regard du chef bizuteur rencontra celui de Kongpob qui ne dit rien. Le jeune homme se contenta de bouger et de lui permettre de retourner à la table. Il prit donc l'engrenage et le fourra dans sa poche avant de s'éloigner de la plage pour rejoindre ses amis qui buvaient avec les anciens élèves et les quatrièmes années.
Par chance, l'un d'entre eux connaissait le secret qu'on lui avait demandé de découvrir.
— P'Deer, quelle est la signification du gear de la classe ?
Le président des seniors se tourna vers le junior qui était le chef bizuteur comme il l'avait été autrefois, déconcerté, alors que l'homme s'asseyait près de lui.
— Hmm. C'est quoi cette question bizarre ? Tu es ivre ou quoi ? L'engrenage... ça veut dire unité et c'est important pour nous, ingénieurs, parce que c'est durement gagné.
En entendant ces mots, il était remonté et frustré. Tu vois, tu es un voyou de première. Quelles autres significations cela pourrait-il avoir ? Ce 0062 avait dû penser que ça l'énerverait. Il n'aurait pas dû être gentil avec lui !
Arthit engloutit la bière pour repousser sa colère qui couvait tandis que Deer continuait comme si quelque chose venait de lui passer par la tête.
— Oh, et parce que c'est important, l'engrenage représente le cœur d'un ingénieur. Un homme sage a dit que l'engrenage est dans ton cœur ; ton cœur est dans l'engrenage. Donc, si tu donnes l'engrenage à quelqu'un, cela signifie que tu donnes ton cœur à cette personne.
Il faillit recracher sa bière. Arthit s'étouffait et toussait, et Deer dut lui donner une tape sur l'épaule.
— Doucement, mon pote. Tu es tout rouge. Ne me dis pas que tu t'es fait éclater par une seule bière ?
Deer taquinait son junior, mais pour Arthit, ce n'était pas drôle. Il acquiesça sans discuter.
— Oui, je suis ivre.
Oui, il devait être ivre car il ressentait ce frisson étrange dans son cœur alors que son visage brûlait. Ce n'était pas à cause du vent, du ciel, de la mer ou de la canette de bière... mais du "gear".
... Le gear que quelqu'un venait de lui donner. | | Messages : 942
Date d'inscription : 19/06/2024
| Néphély Sam 7 Sep 2024 - 17:51 Règle n°20 N'obligez pas le Hazer à trop réfléchir. — Les première année, s'il vous plaît, veillez sur vos amis ! Si quelqu'un est oublié, on ne reviendra pas le chercher !
La voix de l'équipe récréative de deuxième année rappela aux étudiants de première année du bus n°3 qu'ils s'apprêtaient à quitter la station balnéaire de Rayong après la fin de la cérémonie de bienvenue des étudiants de première année et la fête endiablée jusqu'à l'aube. Bien que l'heure de départ soit proche de 11 heures, beaucoup étaient encore somnolents et avaient la gueule de bois. Leurs camarades devaient les soutenir jusqu'au bus pour ne laisser personne derrière.
Kongpob était assis à côté de M, comme la fois précédente. La nuit dernière, après avoir fini de parler avec Arthit, il était retourné au bungalow pour discuter avec ses camarades de première année. Ils ne s'étaient pas couchés trop tard, donc ils avaient encore de l'énergie pour profiter des activités récréatives dans le bus, que ce soit chanter un karaoké, danser ou jouer à des jeux. Ils s'étaient également arrêtés dans des boutiques de souvenirs de la province avant de s'embarquer pour le long voyage qui allait durer des heures avant d'atteindre le campus.
...Ce voyage aurait été mémorable s'il n'y avait pas eu la panne du bus.
— Kongpob, c'est quoi cette odeur de brûlé ?
Kongpob retira ses écouteurs qui étaient connectés à son iPhone alors que son ami à côté de lui le questionnait. Il leva les yeux vers la bouche d'aération, fronçant les sourcils en percevant l'odeur.
— C’est vrai, d'où vient cette odeur ?
Il n'eut pas à attendre trop longtemps pour le découvrir. Le véhicule qui tremblait leur fournit la réponse, alors que le conducteur ralentissait et se garait sur le bord de la route, avant de couper le moteur. Les étudiants de première année du bus n°3 furent surpris jusqu'à ce que les étudiants de deuxième année qui surveillaient le bus s'approchent du conducteur pour lui demander ce qui se passait. Il répondit que la jauge indiquait que le moteur était en train de surchauffer et que le bus ne pouvait pas continuer. Ils devaient vérifier le moteur et trouver ce qui n'allait pas.
Certains étudiants quittèrent le bus pour voir ce qui se passait. En effet, même s'ils restaient dans le bus, l'air conditionné ne fonctionnait plus et ils ne pouvaient pas respirer.
Heureusement, le bus s'était arrêté sur le bord d'une route bordée de grands arbres qui leur donnaient de l'ombre. Malheureusement, ils se trouvaient dans une région reculée, loin de la ville, et il n'y avait donc aucune maison en vue. Si le bus tombait en panne, il faudrait attendre longtemps pour trouver des pièces de rechange dans un garage.
Et il semblait que Dieu n'était pas de leur côté. Dès que le chauffeur ouvrit le capot pour vérifier le moteur, une bouffée de vapeur chaude s'échappa et se transforma en fumée, indiquant que le moteur surchauffait.
— Eh bien, je suppose que le radiateur a eu une fuite. Il faut attendre que le moteur refroidisse pour vérifier à nouveau.
Le conducteur, un oncle d'une quarantaine d'années, marmonna, fatigué.
...Eh bien, c'était un cas de force majeure et on ne pouvait blâmer personne. Si le radiateur ne fuyait pas trop, ils pourraient peut-être le réparer et le remplir d'eau pour que le bus puisse continuer à rouler. Il n'était pas sûr, cependant, de savoir jusqu'où le bus pourrait aller. Ils n'étaient qu'à mi-chemin du campus et il faudrait des heures pour y arriver.
Alors qu'ils essayaient encore de trouver une solution, une aide arriva quand le bus suivant s'arrêta, c'était le bus n°4, avec les juniors comme passagers. Arthit faisait partie du groupe qui descendit pour vérifier ce qui n'allait pas.
— Qu'est-ce qui ne va pas ?
— Le radiateur doit avoir une fuite, répondit une étudiante de deuxième année de l'équipe récréative, lui donnant ainsi la raison possible.
Arthit parcourut des yeux le moteur, et hocha la tête en signe de confirmation. Il se tourna vers ses amis derrière lui.
— Fang... Fang. Appelle les bus no°1 et 2 pour qu'ils ralentissent. Je ne veux pas qu'ils s'éloignent trop.
Arthit s'occupait du problème immédiat afin que le cortège de bus réalise la situation et ralentisse. Il ne serait pas bon qu'ils s'arrêtent tous, cela rendrait le voyage encore plus long.
La jeune femme appela le bus n° 1 où se trouvaient les élèves de deuxième année, puis le n° 2 qui transportait un autre groupe d'élèves de première année, puis le n° 5 avec les aînés et les anciens élèves, y compris les professeurs. Ils s'arrêtèrent non loin de là.
Les responsables des loisirs de deuxième année se précipitèrent pour leur annoncer la nouvelle. Dès qu'ils apprirent l'accident, le professeur du département descendit de son bus pour vérifier le moteur. Quelques minutes plus tard, il annonça la cause.
— Ce n'était pas le radiateur. Le joint d'étanchéité est cassé. La compression a fui dans le système de refroidissement, provoquant la surchauffe du moteur. Nous ne pouvons pas le réparer nous-mêmes. Il faut l'envoyer au garage.
C'était un gros problème. Ils pensaient pouvoir le réparer, mais leurs espoirs venaient d'être anéantis. S'ils devaient attendre un nouveau bus, il était trop loin de tout. Le trajet était foutu.
— Que faut-il faire pour les étudiants de première année, professeur ? demanda Arthit, tendu.
La chose la plus importante de la fête de bienvenue des nouveaux était de les ramener chez eux sains et saufs. Chacun d'entre eux. Il observa le professeur froncer les sourcils en essayant de trouver une solution avant de lui en proposer une.
— Eh bien, on va les répartir dans ces deux bus. Ils devront se serrer pour avoir de la place, mais une fois que nous serons arrivés à l'aire de repos, ils pourront changer de bus.
....Ils n'avaient que cette option pour le moment.
Tout le monde suivit donc les consignes. Les étudiants de première année sortirent leurs affaires du bus et montèrent dans les bus n°4 et 5.
Normalement, un bus compte 50 places. Une fois que les passagers eurent doublé, il n'y avait plus de place dans le véhicule car il était encombré de passagers et de sacs, de caisses de rangement pour les loisirs et de bouteilles d'eau. Certains d'entre eux devaient être debout.
Cette tâche fut inévitablement confiée au groupe de bizuteurs qui montrèrent leur bonne volonté en cédant leurs sièges aux étudiantes qui étaient installées à trois sur un seul siège. Ils ont également laissé les sièges aux étudiants masculins comme de grands frères devraient le faire. Cependant, il y avait trop d'affaires et pas assez d'espace pour les poser.
Arthit, en tant que responsable du bizutage, était chargé de porter une caisse de matériel. Il avait été chassé pour rester à l'arrière du bus, alors qu'il portait la caisse comme son bébé et s'accrochait comme il pouvait à quelque chose quand le bus se déplaçait sur la route. Une voix s'éleva à côté de lui, celle du samaritain.
— Laisse-moi t'aider.
Il se figea et leva les yeux vers Kongpob qui était assis à côté d'un autre étudiant de première année. Le gars portait son sac à dos avec un pack d'eau à ses pieds, rendant la position assise plutôt difficile. Pourtant, il prit quand même la caisse des mains du bizuteur et la posa sur ses genoux. Il réussit même à se déplacer, pour laisser une place à l'aîné.
— P'Arthit, tu peux t'asseoir. Je vais te faire une place.
— C'est bon. Je suis bien debout.
Ce refus viril fit cesser les propositions de Kongpob. Il regarda la personne qui s'était retournée pour regarder ailleurs et qui s'agrippait à un poteau pour ne pas tomber alors que le bus recommençait à rouler.
Le convoi d'étudiants qui était surchargé ne pouvait pas se déplacer rapidement. Ils se traînaient sur la route comme une tortue et cela prit beaucoup de temps avant qu'ils n’arrivent à une nouvelle aire de repos. Ceux qui étaient debout avaient supporté plus d'une heure de trajet avant que le bus ne s'arrête pour que les passagers puissent en descendre et s'étirer.
— Bien, répartissez vous dans les bus ici, les amis. Certains d'entre vous peuvent descendre leurs affaires et monter dans le nouveau bus. N'oubliez pas de donner votre nom au responsable du bus !
Fang donna les instructions aux nouveaux avant que tout le monde ne commence à sortir du bus, y compris Kongpob comme M le lui demanda.
— Qu'est-ce qu'on fait maintenant ? Tew et la bande sont dans le bus n°2. On échange ?
Les noms de ses copains firent réfléchir Kongpob. S'il changeait de bus, il serait avec ses camarades de première année et ce serait plus amusant que de rester avec les seniors. Mais...
— Les gars, prenez vos affaires et mettez l'équipement ici.
L'ordre d'Arthit mit fin à la discussion. Il souleva la boîte des genoux de Kongpob et s'écarta pour que l'homme sur le siège près de la fenêtre puisse partir.
...Eh bien... ils n'avaient pas le choix, alors.
Kongpob prit son sac à dos et entraîna M dans le bus, rejoignant les autres. Arthit posa la boîte sur le siège et attendit que le dernier étudiant de première année ait quitté le bus avant de se laisser tomber sur le siège et de laisser échapper un lourd soupir, totalement épuisé.
...Ses jambes étaient comme de la pierre. Il voulait s'asseoir et se détendre, et il n'était pas d'humeur à aller chercher des snacks ou de la nourriture. Il avait à peine dormi la nuit dernière, restant debout et buvant avec les aînés tout en discutant, car cela faisait longtemps qu'ils ne s'étaient pas retrouvés. L'instant d'après, le soleil se levait à l'horizon. Il avait prévu de faire une sieste dans le bus mais rien ne s'est passé comme prévu. Pire, l'homme qu'il ne voulait pas voir se trouvait trop près.
...La personne qui lui avait donné son gear et maintenant il savait ce que cela signifiait.
En fait, il gardait le gear dans son portefeuille. Il le conservait au cas où il pourrait le rendre à ce type. Mais à cause de l'accident, il n'arrivait pas à trouver ses mots. Il voulait être en colère parce qu'il pensait que le jeune homme lui faisait une farce. Mais en fin de compte, il s'était contenté de rester sans rien dire avant de pousser le gars hors du bus pour qu'ils ne se retrouvent pas face à face. Mais s'il l'évitait, quand pourrait-il lui rendre le gear ???!
Arthit passa ses doigts dans ses cheveux, les ébouriffant. Plus il y pensait, plus il avait mal à la tête. Ce n'était pas dans sa nature de trop réfléchir aux choses. Il ferma donc les yeux et laissa la poussière s'installer dans sa tête. Il avait l'intention de faire une sieste pour se déstresser. Mais avant qu'il ne puisse le faire, une voix vint l'interrompre.
— Tu dors ?
Il ouvrit les yeux et regarda. Tout sommeil le quitta en quelques secondes et il se leva d'un bond, voyant Kongpob ici avec son sac à dos et un sac du 7-Eleven. Il se tenait près du siège comme pour le récupérer.
— Pourquoi tu es revenu ? Tu as oublié quelque chose ici ?
— Non. Je vais prendre ce bus.
Cela étonna Arthit. Il avait dit qu'il prendrait le bus n°2 avec les autres étudiants de première année. Pourquoi était-il ici tout seul, la question lui échappa involontairement.
— Et pour ton ami ?
— Il est allé avec les autres gars dans l'autre bus. Le professeur a dit qu'on devait se séparer alors je suis revenu ici. Tu me laisseras m'asseoir avec toi ?
Kongpob demanda sa permission parce qu'il y avait une caisse de matériel sur le siège. Le chef bizuteur ne voulait pas la soulever, il hésitait.
Qu'est-ce que je fais maintenant ? Arthit essayait d'éviter le jeune homme. Peut-être qu'il devrait donner les sièges au gars pour qu'il s'assoie seul et que lui rejoigne ses amis. Oui, ça résoudrait le problème. En même temps, Knot était en train de s'énerver !
L'homme qui avait vu comment s'en sortir s'apprêtait à ouvrir la bouche pour parler à son pote mais l'autre prit la parole en premier.
— Arthit, bordel, pourquoi tu laisses le gars sur le chemin ? Enlève la boîte du siège pour que les gens puissent monter !
...Il n'était d'aucune aide et pire, il le grondait. Les étudiants qui étaient dans le bus attendaient que Kongpob prenne le siège.
Finalement, il ne put s'y opposer et il enleva la boîte pour la poser sur le sol devant lui, sans avoir le choix. Il regarda par la fenêtre pendant que le jeune homme enlevait son sac à dos et le déposait sur le siège à côté de lui. Il entendit des bruits de fouilles alors que le jeune homme cherchait quelque chose dans le sac en plastique. Puis il demanda.
— P'Arthit, tu veux un encas ?
Il se retourna et regarda Kongpob qui lui tendait un sachet de snacks de poisson, d'algues frites et de chips, parmi lesquels il pouvait choisir. Bien qu'il ait un peu faim, sa dignité de bizuteur lui fit dire non.
— Non. Je n'en veux pas.
Le Samaritain ne cessa de farfouiller dans son sac, à la recherche d'autre chose.
— Et à boire ? Je suis descendu et j'ai trouvé ça. Alors je l'ai prise pour toi.
Le mot "ça" poussa Arthit à le regarder à nouveau. Cette fois, ses yeux s'agrandirent quand il vit la "chose" dans la main du jeune homme.
...Une bouteille de lait rose.
— Tu te moques de moi ?! s’écria Arthit à l'autre homme avec colère.
Pourquoi lui avait-il acheté du lait rose ? Il voulait l'embarrasser ? Il pensait qu'il détenait son secret et qu'il pouvait le défier comme ça ?
Mais le jeune homme accusé secoua rapidement la tête et s'expliqua.
— Non, pas du tout. Tu avais l'air fatigué, alors je t'ai acheté quelque chose de froid et quelques snacks. Je ne savais pas ce que tu aimais, alors j'en ai acheté plusieurs pour que tu puisses choisir. Quant au lait rose, je sais que tu l'aimes, alors je l'ai acheté pour toi. Mais si tu n'en veux pas, j'ai toujours du thé vert. Le chemin est encore long jusqu'au campus. Je voulais juste que tu manges quelque chose pour que tu ne tombes pas malade.
La longue explication permit à Arthit de faire une pause en regardant les yeux de l'autre homme. Sa voix... son regard... ils parlaient des vrais sentiments de quelqu'un, pas de quelque chose qu'il venait d'inventer. En plus...
... Il sentit la sympathie derrière ces mots.
Le chef bizuteur hésita un moment, regardant le sac que tenait le jeune homme. Il décida de prendre le lait rose et d'y enfoncer la paille pour le boire avant de se détourner pour regarder par la fenêtre alors que le bus se remettait en route.
Le goût sucré du lait rose le rafraîchit mais n'aida pas à éteindre le feu dans son esprit.
Il ne savait pas si ce complexe du héros qui poussait l'autre homme à se soucier du bien-être des autres était la vraie nature de Kongpob ou pas. Il n'était pas sûr de ce que cela signifiait quand le plus jeune homme plaisantait à un moment et agissait sérieusement le moment suivant.
D'ailleurs, il n'était pas sûr si Kongpob traitait tout le monde de la même façon...ou si c'était juste pour lui...
Parce que même s'il essayait de ne pas faire attention, il avait remarqué quelque chose dans les actions de Kongpob. En dehors de la "douceur" dans ces yeux, il y avait aussi une "délicatesse" qui le faisait anticiper ses pensées.
Il y avait ce Gear de leur département qui mettait en évidence ces mots cachés. Il n'était pas stupide au point de ne pas voir ce que Kongpob cachait, mais ce n'était jamais clair pour lui. Kongpob aimait s'amuser avec lui, le provoquant et s'excusant plus tard quand il inversait ses actions. Il avait envie de demander pourquoi, mais ce serait bizarre d'en parler maintenant.
Arthit essaya de se débarrasser de ses sentiments confus et termina son lait rose. Il jeta la bouteille vide dans le sac poubelle et regarda le paysage extérieur, ignorant l'homme à côté de lui qui restait silencieux. Kongpob, de son côté, avait tant de questions en tête.
Il n'osait pas demander si Arthit savait ce que signifiait le Gear.
Il supposa que non. S'il l'avait su, le bizuteur lui aurait crié dessus. Au lieu de cela, Arthit était calme et avait accepté avec docilité sa générosité. Même s'il avait l'air un peu offensé, il semblait plus serein que les autres fois.
Il n'oubliait pas le fait qu'Arthit était un homme, et qu'il en était aussi un. S'il posait simplement la question, il craignait qu'Arthit ne soit encore plus en colère. Le fait qu'il ait donné le Gear au plus âgé était un acte téméraire. Pire, il l'avait fait même s'il ne comprenait pas complètement ses propres sentiments.
Il ne savait pas si c'était la mer ou le fait que c'était la première fois qu'ils avaient eu une conversation agréable qui l'avait poussé à le faire. Il ne pouvait pas le mettre uniquement sur le compte de la fougue du moment, cependant. Il y avait quelque chose dans son esprit qui avait toujours été clair.
Il aimait simplement regarder Arthit et voulait être avec lui. Il voulait prendre soin d'Arthit - ces sentiments, il en était sûr. Et pourtant, il y avait quelque chose de plus.
Il n'arrivait toujours pas à savoir quoi.
Son esprit vacilla quand une lourdeur s'abattit sur son épaule. Quelqu'un avait posé sa tête contre lui. Kongpob regarda l'homme qui dormait paisiblement, souriant à lui-même, alors qu'une chose devenait claire.
Même s'il ne parvenait pas à savoir ce qu'il ressentait vraiment en ce moment, il savait qu'Arthit était spécial pour lui... plus que quiconque ne le serait jamais.
Il l'était tout simplement.
Le bus continua de rouler pendant plusieurs heures jusqu'à ce que finalement, la destination soit proche. Tout le monde commença à bouger, vérifiant leurs affaires. Un homme était toujours endormi, inconscient de ce qui l'entourait, et Kongpob dut le réveiller d'un doux murmure.
— P'Arthit... P'Arthit... Réveille-toi. On arrive presque au campus.
L'homme réveillé ouvrit les yeux et la première chose qu'il vit fut une image inclinée du siège, suivie d'une douleur au cou malgré la présence d'un oreiller.
Attendez... depuis quand avait-il un oreiller ?
Arthit bondit rapidement loin de l'oreiller de fortune qu'était l'épaule de l'homme à côté de lui. Il n'avait aucune idée depuis quand il s'était appuyé contre lui et il voulait se frapper pour cela, s'inquiétant de s'être embarrassé devant l'autre homme. Cependant, Kongpob ne riait pas et n'agissait pas comme s'il avait vu quelque chose de drôle.
Le chef bizuteur se frotta le visage, se réveillant, et fit comme si rien ne s'était passé. Une fois que le bus se fut complètement arrêté sur le campus, arrivant avec deux heures de retard sur l'horaire initial de 18 heures à cause de l'incident, tous ceux qui en descendaient avaient l'air impatients de rentrer chez eux et de dormir un peu. Ils s'empressèrent donc de descendre les sacs et autres effets personnels afin de les ranger à leur place.
Arthit se leva et prit la boîte de matériel. Il repéra deux packs de bouteilles d'eau sous son siège et se pencha pour les sortir. Il ne pouvait pas les mettre dans la boîte alors, il lui faudrait deux voyages pour tout récupérer. Une fois qu'il réussit, une main se tendit et lui prit la boîte.
— Donne-la-moi.
Kongpob offrait son aide alors il acquiesça, laissant l'homme descendre du bus alors que lui transportait l'eau, en se dirigeant vers le bâtiment des services.
— P'Arthit, où tu veux que je la dépose ?
— Près des tambours, là-bas
Le responsable des bizuteurs désigna les piles de tambours de loisirs à proximité, et Kongpob fit ce qui lui avait été demandé. Ensuite, il se dirigea vers ses amis qui l'attendaient à l'autre bus, mais il fut retenu par un appel venant de derrière.
— Attends
— Oui.
Kongpob s'arrêta, se tournant pour regarder l'homme qui semblait hésitant, comme s'il voulait demander quelque chose. Puis, il dit brusquement.
— Non, rien. Merci pour ton aide.
— De rien. Le plaisir est pour moi.
La phrase fut prononcée avec un sourire et des yeux sincères alors que Kongpob le regardait. Puis il se dirigea vers son groupe d'amis qui l'appelaient, laissant Arthit réfléchir à la question non posée.
...La question était... as-tu des sentiments pour moi ?
Il n'avait pas peur de la réponse. Il avait peur de ne pas savoir quoi dire s'il obtenait la réponse.
Si Kongpob disait 'Oui.', alors quoi ? Que devrait-il faire ou comment devrait-il agir par la suite ?
Mais si Kongpob disait, 'Non'. Alors, il n'avait qu'une seule chose à dire à l'autre homme.
.... S'il te plaît ne sois plus si gentil avec moi. | | Messages : 87
Date d'inscription : 01/07/2024
| amelyma Sam 7 Sep 2024 - 17:51 Règle n°21 Le Bizuteur a le droit de choisir Kongpob pensait qu’il avait l’air comme tous les autres jours.
Il portait un T-shirt fin et clair avec une veste sombre par-dessus, une paire de jeans noirs et des baskets en cuir. Il redressa un peu sa main et y aspergea un tout petit peu d’Armani Aqua Di Gio parce qu’il aimait son parfum. C’était tout. Aucune raison de s’habiller plus que ça.
Ok, il l’admettait. Aujourd’hui n’était pas un jour comme les autres.
Il faisait très attention à sa toilette mais pas seulement. Il se sentait très agité intérieurement alors qu’il attendait cette personne dans le centre commercial où ils avaient convenu de se retrouver, même si le but de la journée était de faire de simples achats.
Kongpob secoua la tête devant sa propre folie. Il réagissait peut-être de manière excessive en étant excité comme s’il était en rendez-vous, mais c’était la première fois qu’il était seul avec Arthit. Il voulait donc être gentil et ne pas contrarier encore une fois l’autre homme. Pourtant, son plan ne sembla pas fonctionner, car il n’avait pas attendu longtemps avant que le bizuteur n’arrive à l’heure. Quand Arthit s’aperçut que le jeune homme l’avait attendu, il accéléra le pas vers lui, les sourcils froncés, il grommela.
— Désolé, combien de temps as-tu attendu ? Le rendez-vous était si tôt.
… Il était onze heures. Ce n’était pas tôt, P’Arthit.
Kongpob voulut s’expliquer mais il retint ses mots lorsqu’il observa l’autre homme dont la garde-robe était à l’opposé de la sienne.
Arthit portait un T-shirt avec une image de Che Guevara, un jean délavé, des baskets et un sac en bandoulière. Il avait l’air plutôt bohème mais pour le jeune homme, c’était un look naturel qui correspondait à la personnalité d’Arthit. Son regard s’attarda si longtemps sur l’autre homme qu’Arthit prit la parole.
— Dis-moi, que veux-tu acheter ?
Kongpob ramena son esprit à la tâche à accomplir et répondit.
— Quelques bricoles. Je veux que tu m’aides à choisir.
Le nouveau sourit légèrement comme s’il détenait un secret avec cette information ambiguë avant de s’éloigner, laissant Arthit qui grimaçait derrière lui en le suivant. Il était en partie agacé par le comportement timide du jeune homme, et en partie parce que le gamin de la lignée 0062 semblait plus radieux que d’habitude.
Oui… Je sais que tu es beau. Pourquoi devait-il se pomponner comme s’il sortait d’un magazine de mode ? Avait-il peur de ne pas être repéré par certaines agences de talent ? Debout à côté de lui, Arthit avait l’impression qu’ils étaient un prince et un pauvre… ou qu’il était un majordome qui venait aider son maître à transporter les marchandises ?
Bien que contrarié, Arthit savait que le loto de la génétique était un coup de chance. Il dut suivre le jeune homme dans le centre commercial, empruntant l’escalator vers l’étage supérieur jusqu’à ce qu’ils atteignent le département des jouets où des babioles créatives étaient proposées comme cadeaux parfaits.
Kongpob les ignora et alla droit devant lui vers le rayon des peluches et choisit un ours en peluche brun dans une robe en dentelle rose, et un ours en peluche blanc dans une jolie robe en dentelle bleue. Il les souleva pour qu’Arthit puisse les voir avant de se retourner pour demander.
— Lequel est le plus mignon ? Je veux en acheter un mais je ne sais pas lequel choisir.
Arthit cligna des yeux, regardant l’étudiant de première année qui était le roi de l’université tenir deux ours en peluche, déconcerté. Une idée étrange lui vint à l’esprit et il essaya de trouver les mots justes pour éviter d’être offensant. Mais il ne pouvait pas s’empêcher d’être troublé.
— Eh bien, je ne savais pas que tu aimais ce genre de choses, dit-il
Celui qui avait été totalement mal jugé sursauta, secouant la tête, et bafouilla une explication.
— Non, non. Demain, c’est l’anniversaire de ma nièce, alors je veux lui offrir un cadeau.
Entendant la clarification, Arthit acquiesça.
— Bien. Quel âge a ta nièce ?
— Elle a trois ans, c’est la fille de ma sœur.
— Tu as une sœur ?
— Oui, j’en ai deux, qui ont presque dix ans de plus que moi. Je suis le fils cadet non prévu. Et toi P’Arthit ? Des frères et des sœurs ?
— Non. Je suis fils unique.
… En tant qu’enfant unique, il avait l’habitude d’assumer de nombreuses responsabilités et de les tenir lui-même, contrairement à Kongpob qui était le plus jeune.
Arthit venait d’apprendre que Kongpob avait deux sœurs beaucoup plus âgées que lui. En étant élevé dans cet environnement, en étant choyé, c’est probablement la raison pour laquelle Kongpob était devenu une personne têtue et capricieuse, tout comme la façon dont il avait demandé à Arthit de l’aider à choisir un cadeau pour une petite fille. Il n’avait même pas réalisé qu’Arthit ne cadrait pas avec ces peluches et poupées féminines et mignonnes.
Le bizuteur soupira, résigné, tout en balayant du regard les autres étagères où de nouveaux types de jouets étaient disponibles comme cadeaux parfaits et fit une suggestion.
— Vas-tu vraiment acheter une peluche à ta nièce ? Il y a beaucoup d’autres jouets éducatifs et d’éveil. J’en ai vu sur Internet, comme la pâte à modeler et les Lego où l’on peut construire quelque chose de plus vrai que nature. La meilleure chose qui existait à mon époque était un pistolet laser, contrairement à votre époque… vous avez tellement de meilleurs choix.
Le gars qui avait tout juste 21 ans grommelait comme un vieil homme en partageant sa nostalgie avec le nouveau. Les étudiants de première année n’étaient pas de sa génération et avaient donc une vision différente du monde. Il en avait souvent assez de leur façon de penser et d’agir. Mais les mots de l’étudiant de première année le firent réfléchir.
— Mais toi et moi n’avons que deux ans d’écart.
Ce constat fit réfléchir Arthit car il venait de réaliser alors que cette différence de deux ans n’était pas si importante. Ils étaient, en fait, de la même génération. Il avait oublié sa propre personne et s’était plaint à lui comme si Kongpob avait dix ans de moins. En d’autres termes, il s’était ridiculisé mais il ne voulait pas reculer.
— Et alors ? Je suis né avant toi. Je suis ton aîné.
— Alors quand vas-tu arrêter avec tes formalités ? Faisons comme si nous étions frères, d’accord ?
Les revendications le touchèrent en plein cœur. Il savait que le bizutage était terminé et qu’il n’y avait pas besoin de formalités. Mais il n’y était pas habitué et se sentait gêné de devoir se désigner comme un “grand frère” et Kongpob comme un “petit frère”. Ce serait idiot, cependant, de se donner la peine de l’expliquer. Alors il utilisa la colère pour dissimuler son embarras.
— J’en ai le droit. Tu as un problème avec ça ?!
— Non…
Kongpobop leva un drapeau blanc mais ses yeux pétillaient d’amusement quand Arthit grogna sur un nouveau sujet.
— Donne-moi les peluches !
Arthit se faufila et saisit les deux ours en peluche tandis que Kongpob s’écartait de son chemin. Il jeta un coup d’œil furtif sur l’homme qui avait une expression déterminée alors qu’il examinait les ours en peluche brun et blanc. Le contraste était évident, mais il trouvait étrangement mignon que les ours semblent aller parfaitement avec Arthit. Peut-être se rendait-il compte que l’homme plus âgé voulait vraiment l’aider à choisir le cadeau.
… P’Arthit était un homme qui prenait toujours les choses au sérieux, peu importe ce qu’il faisait.
Même s’il avait toujours observé le bizuteur, il n’avait vu que son personnage. Il n’avait jamais su ce qu’il y avait vraiment dans la tête d’Arthit. Il voulait savoir ce qu’Arthit pensait, comment il voyait le monde. Il souriait souvent lorsque l’homme laissait tomber son masque et sa garde et révélait sa vraie nature.
Et même si Arthit était plus âgé, il n’était pas étrange d’admettre qu’il n’avait jamais vu Arthit comme un simple “senior”. Il considérait Arthit comme une personne, et bien souvent, il faisait des choses en oubliant son statut de personne inférieure. Il se rappelait souvent à lui-même son statut pour ne pas irriter davantage Arthit.
Pourtant, au fond de lui, il savait que cela ne marchait jamais.
Les pensées de Kongpob furent interrompues lorsque l’autre poussa une peluche devant lui, lui demandant son avis.
— Je pense que le marron est mieux. Le blanc se tache facilement. Qu’en penses-tu ?
— Comme tu le sens.
Il répondit de manière complaisante mais cela rendit le plus vieux frustré.
— Pourquoi ferais-tu ce que je trouve adéquat ? ! C’est un cadeau pour ta nièce. Choisis quelque chose pour elle avec ton cœur !
La réprimande rendit Kongpob silencieux. Ces ours en peluche n’étaient qu’une excuse pour passer du temps avec Arthit. Mais Arthit était très impliqué dans sa tâche, alors il devait y réfléchir sérieusement.
— Je prends le marron. La robe rose est parfaite pour les filles, aussi.
En entendant cette réponse et ces arguments, la personne qui était là pour l’aider acquiesça. Celui qui avait la décision finale était l’oncle de cet enfant, de toute façon.
— Je vais aller le payer.
Kongpob ramassa l’ours en peluche et se dirigea vers la caisse à proximité qui offrait également des services d’emballage de cadeaux. Arthit eut quelques instants pour regarder les jouets, principalement des kits de DIY sympas ou des cadeaux pour des fêtes. Il y avait aussi des cartes pour diverses occasions, comme les anniversaires, les remises de diplômes et les mariages.
Oui, c’est vrai. La semaine prochaine, il y aura la cérémonie de mariage de P’Tum et P’Fon. Il ne leur avait pas préparé de cadeau. Mettre de l’argent dans une enveloppe serait trop banal. Le grand frère l’avait beaucoup aidé durant la première année. Pourtant, il ne savait pas quel cadeau leur offrir.
Alors qu’il réfléchissait, il regardait de haut en bas les nombreux choix possibles, incapable de trouver le bon. Kongpob avait payé et portait un sac avec le paquet cadeau, se dirigeant vers lui.
— Que cherches-tu ?
— Le cadeau de mariage de P’Tum. Je veux lui acheter quelque chose, expliqua Arthit en ramassant un cadre photo avec un motif de mariage.
Il se disait qu’il y aurait beaucoup de photos après le mariage. S’il donnait au marié un cadre photo, ce serait utile. Ou devrait-il prendre un album photo ?
Comme il était indécis, Kongpob intervint.
— Je pense que juste une carte serait bien.
— C’est un peu trop superficiel, tu ne crois pas ?
Il critiqua le gars qui aimait facilement faire preuve de sarcasme. Kongpob choisit la facilité tout comme il avait choisi l’ours en peluche. Mais l’autre homme secoua la tête.
— Non, ça ne l’est pas. Le cadeau n’est pas la carte, mais le message à l’intérieur. Si P’Arthit met tout son cœur à écrire ses vœux, je pense que c’est suffisant pour rendre P’Tum heureux. C’est romantique, en plus.
Le premier point était logique, mais le second lui semblait carrément bizarre, il devait protester.
— Je vais le donner à notre grand frère. Qu’est-ce qu’il y a de romantique là-dedans ? Je n’écris pas une lettre d’amour !
— Alors tu peux en écrire une pour moi.
Cela ressemblait à une blague mais ce fut assez convaincant pour laisser Arthit sans voix.
Les hommes ont-ils l’habitude de plaisanter comme ça ? Il ne savait pas… Ce dont il était certain, c’est qu’un homme ne regarderait pas un autre homme avec une telle intention, des yeux pétillants comme s’il demandait une lueur d’espoir.
Une fois de plus, il ressentit cette question non formulée, comme lorsqu’ils étaient rentrés du voyage.
… le fait de savoir si Kongpob avait des sentiments pour lui.
Peut-être qu’il devrait le dire maintenant et clarifier les choses. Il ne savait pas quelle serait la réponse mais c’était mieux que cette frustration alors qu’il essayait de comprendre l’autre homme par lui-même.
Arthit prit une profonde inspiration et était sur le point d’ouvrir la bouche pour laisser échapper la question à un million de dollars, mais une douce voix l’interrompit.
— … Oon… C’est toi ?
Le bizuteur se retourna pour regarder la personne qui avait prononcé son nom et un prénom lui échappa avec une surprise en voyant un visage familier.
— Namtan ?
La jeune femme afficha un large sourire en s’approchant de son ami et en examinant son apparence.
— C’est vraiment toi. Tu gardes la moustache et maintenant tu as les cheveux longs, je pensais m’être trompé de type. Qu’est-ce que tu fais ici, Oon ?
— Je suis ici pour aider un étudiant de première année à acheter un cadeau. Eh bien, voici Kongpob de mon département. C’est mon ami, Namtan, du département des sciences.
Kongpob leva ses mains en un wai pour saluer l’étudiante plus âgée. Elle accepta gracieusement son salut avec un sourire amical. Namtan n’attirait pas l’attention mais elle était jolie, elle paraissait correcte et facile à vivre. Elle arborait des fossettes de chaque côté de ses joues, ce qui lui ajoutait du charme. L’étudiant de première année se recula pour laisser aux deux amis un moment pour parler.
— Et toi ? Que fais-tu ici ?
— Je fais du lèche-vitrine pour voir si je peux trouver un cadeau d’anniversaire pour Jay.
— Eh bien, ça fait trois ans. Je suis envieux.
— Oh, arrête. C’est toi qui n’a laissé personne entrer.
— Eh bien, je me languis toujours de toi.
— Toujours un beau parleur. Appelle-moi de temps en temps, Oon ? On n’a pas beaucoup parlé ces derniers temps.
— Non. Je ne veux pas que Jay vienne me frapper.
— Il ne le ferait pas ! On est amis ! S’il te frappe, on aura une discussion.
— Quelle discussion ? Comme si… tu allais le larguer pour moi ?
— Oh, mon Dieu. J’arrête de te parler. Toujours en train de flirter. Bon… je ne vais pas te faire perdre ton temps ici. S’il te plaît, retourne à ton shopping avec lui. Je dois voir un film avec Jay, je ne veux pas qu’il attende.
Arthit hocha la tête et la conversation prit fin. Namtan lui rappela encore une fois de l’appeler avant de s’éloigner. Maintenant, il n’y avait plus que Kongpob et lui. Tout à coup, l’homme qui était resté silencieux pendant un long moment prit la parole.
— C’est ton amie ?
Il pensait l’avoir déjà dit à Kongpob quand il les avait présentés. Mais d’accord, il pouvait développer.
— Oui, c’était mon amie du lycée. Nous étions dans la même classe.
Arthit expliqua en choisissant quelques cartes pour les retourner et les lire. Pourtant, l’autre homme n’arrêtait pas de poser des questions.
— Vous vous connaissez depuis longtemps, non ?
— Je l’ai rencontrée au collège. Donc ça fait sept ou huit ans.
— Elle a un beau sourire.
— Oui, c’est vrai.
— P’Arthit l’aime bien ?
Arthit fit une pause et leva les yeux vers le jeune homme qui avait un air expectatif sur son visage… comme s’il attendait la réponse avec impatience. Il ne savait pas pourquoi il demandait… à cause de leur taquinerie amicale avec Namtan, ou était-ce autre chose ? Cela le rendit silencieux pendant un moment mais il décida de dire la vérité.
— Ouais.
… Une courte phrase qui tira une corde dans le cœur du jeune homme au point de le faire trembler.
Kongpob était sans voix et regarda la façon dont Arthit laissa échapper un soupir.
— Mais ça s’est terminé il y a longtemps. Mon ami me l’a enlevée. J’ai même souhaité qu’ils se séparent en un rien de temps, mais ils sont toujours ensemble après trois ans.
L’homme, nostalgique, rigola. Le petit ami de Namtam n’était autre que son camarade de classe, Jay. Ils se connaissaient, s’étaient battus ensemble, avaient déjeuné ensemble, copié leurs devoirs l’un sur l’autre. Lui, d’une manière ou d’une autre, n’avait aucune idée du moment où son copain avait commencé à courir après Namtan pour la conquérir. Il avait découvert ça quand ils s’étaient tenus la main à la cérémonie de remise des diplômes du lycée. Et pour couronner le tout, ils avaient même fréquenté la même université et le hantaient, ajoutant une nouvelle blessure à la blessure…
— Mais… la vérité est que… Je ne peux pas lui en vouloir. Je ne lui ai jamais dit ce que je ressentais pour elle et je ne sais pas pourquoi je l’ai gardé pour moi.
Arthit marmonna résigné. C’était un amour adolescent. Il flirtait toujours avec elle, lui donnant des mots doux et la taquinant depuis le début des cours. Peut-être la jeune fille pensait-elle qu’il plaisantait et l’embêtait par habitude, sans savoir qu’il y avait une part de vérité derrière ses paroles. Il avait eu peur de lui dire la vérité, sachant très bien qu’il aurait dû le faire avant que son ami n’intervienne. Peut-être avait-il été trop jeune pour comprendre.
— Je comprends.
La voix de l’homme à côté de lui fit se tourner Arthit vers lui, fronçant les sourcils.
— Comprendre quoi ?
— Je comprends pourquoi tu ne pouvais pas lui dire.
C’était ambigu, mais Arthit savait ce que l’autre homme voulait lui faire comprendre.
Étonnamment, cela le mettait mal à l’aise. Il avait essayé de lancer cette conversation un instant plus tôt, comment les deux histoires avaient un secret enfoui semblable mais aussi différent. Mais cette fois, celui qui avait lancé la conversation n’était pas lui.
— Balivernes.
Arthit mit fin à la conversation sans attendre d’entendre ce qui allait suivre. Il prit une carte de vœux de mariage et se dirigea vers la caisse, laissant un Kongpob perplexe qui le regardait, soupirant.
En jetant un coup d’œil aux cartes de vœux de mariage sur lesquelles figuraient les dessins des mariés, il savait parfaitement ce qui était évident mais non dit.
Oui, il comprenait pourquoi Arthit n’avait pas osé faire un pas de plus. C’était probablement la même raison pour laquelle il ne voulait pas se rapprocher d’Arthit.
C’était ce seul sentiment qui retenait tout.
… la peur de perdre ce qu’ils avaient l’un pour l’autre en ce moment. | | Messages : 553
Date d'inscription : 13/07/2024
| Johanne Sam 7 Sep 2024 - 17:52 Règle n°22 Ne Regardez Pas dans les Yeux du Bizuteur — … 0062… 0062…
… Le numéro que vous demandez est indisponible.
Les sourcils d’Arthit s’agitèrent alors que sa main se tendait et frappait durement le dos de l’autre homme en criant son nom.
— Kongpob !!
— Oyyy !
Ce fut à ce moment-là que l’homme distrait se réveilla et se retourna, l’air hébété, et demanda à son agresseur, déconcerté.
— Qu’est-ce qui ne va pas, P’Arthit ?
… Regardez-le… Il a le culot de demander. Depuis qu’il avait fini d’acheter la carte de vœux et qu’il avait rejoint le jeune homme, celui-ci était resté silencieux et avait l’air de porter le poids du monde sur ses épaules. Il l’avait appelé plusieurs fois, et Kongpob faisait semblant de ne pas entendre. Il ne savait pas si c’était à cause de lui ou de quelqu’un d’autre, mais c’était bizarre. Poursuivre la journée devenait frustrant. Ils feraient mieux de se séparer ici plutôt que de perdre tous les deux leur temps comme ça.
— Si tu as fini et que tu veux rentrer chez toi, alors fais-le. Tu n’as pas besoin d’avoir l’air si parano en marchant à côté de moi.
La plainte honnête d’Arthit tira en quelque sorte l’autre homme de sa rêverie.
Kongpob reconnaissait qu’il était devenu distrait, pensant à trop de choses, notamment à ce qui venait de se passer un instant plus tôt alors qu’ils faisaient des courses et qu’ils étaient tombés sur Namtan. C’était la fille pour laquelle Arthit avait des sentiments, même si Arthit disait que c’était fini depuis longtemps. Pourtant, cela le dérangeait, se mêlant aux sentiments ambigus qui le rendaient confus.
S’il lui disait la vérité, non seulement Arthit s’en irait mais il l’ignorerait aussi comme la fois précédente. Il serait encore plus en colère et les choses ne feraient qu’empirer. Il ne voulait plus se battre avec P’Arthit, alors il décida de mentir.
— Non, je ne veux pas encore rentrer à la maison. Le truc, c’est que… J’ai juste… faim.
Cela fonctionna car Arthit marqua une pause et jeta un coup d’œil à sa montre. Les aiguilles indiquaient 12h30. Il avait imaginé pire, en voyant l’air renfrogné sur le visage de 0062. Il avait juste “faim”. Cela rassura l’homme plus âgé qui lui demanda :
— Pourquoi tu ne me l’as pas dit. Qu’est-ce que tu veux manger ?
— N’importe quoi. Et toi, qu’est-ce que tu veux manger ?
La question incita Arthit à balayer du regard la zone des restaurants du centre commercial, dont la moitié était occupée par des restaurants japonais. Il y avait également des plats cuisinés et des fast-foods ordinaires. Aucun d’entre eux n’était intéressant et trop cher par rapport au goût, contrairement à certains des stands en bord de route. Après avoir fait le calcul dans sa tête, une idée lui vint.
— Eh bien, je connais un délicieux magasin de nouilles, mais nous devons prendre un bus depuis le centre commercial. Tu veux y aller ?
— Allons-y.
Kongpob hocha la tête sans réfléchir. N’importe quel magasin lui conviendrait parce qu’il n’avait pas si faim que ça. Mais Arthit lui avait demandé, alors il était plus que disposé à y aller. Il était fatigué de la nourriture du centre commercial, de toute façon.
Il suivit Arthit, le sac cadeau à la main, qui le conduisit hors du centre commercial jusqu’à l’arrêt de bus. Bientôt, le bus non climatisé arriva. Ils montèrent tous les deux et parcoururent quelques arrêts de bus pour atteindre leur destination. Ils marchèrent dans une petite rue et s’arrêtèrent devant un petit stand de nouilles. Il était plein à craquer avec une file de clients qui attendaient - une garantie que c’était aussi bon qu’Arthit l’avait annoncé. Heureusement, ils purent se serrer à une table.
Kongpob jeta un coup d’œil au menu - un panneau sur le mur - et vit une variété de nouilles et de nouilles aux œufs, avec des tailles normales et extras disponibles, avec les prix. Un serveur s’approcha d’eux pour prendre les commandes et Arthit énonça rapidement la sienne.
— P’, je voudrais un bol extra de nouilles Tom Yum au porc épicé. Et toi ?
— Je vais prendre les nouilles fines avec des boulettes de viande dans une soupe claire.
Il ne savait pas s’il l’imaginait mais Arthit haussa un sourcil comme s’il était amusé en entendant la commande ou qu’il réprimait un rire. L’homme plus âgé commanda deux verres d’eau avant que le serveur ne s’éloigne et ils attendirent leurs nouilles. Cela ne prit pas longtemps.
Kongpob prit les baguettes et la cuillère et se prépara à déguster la soupe de nouilles fines aromatiques et cuites à la vapeur avec des boulettes de viande, mais avant que sa cuillère ne touche la soupe, l’autre homme intervint.
— Attends. Ton bol est ici.
L’homme qui l’avait arrêté retira son bol de nouilles et poussa ses nouilles épicées vers le jeune homme. Kongpob leva rapidement les yeux, voyant que son bol avait été remplacé et protesta.
— P’Arthit m’a encore fait une blague ? demanda-t-il parce que cela s’était déjà produit auparavant lorsque le chef bizuteur avait remplacé son riz ordinaire avec une omelette et du porc haché par un Pad Krapao extra épicé plein de piments rouges et l’avait forcé à tout manger pour montrer sa gratitude envers le riz.
Il avait eu les lèvres totalement gonflées et brûlées.
Il était donc naturel qu’il soit paranoïaque et méfiant, craignant que l’histoire ne se répète. Il espérait qu’Arthit ne lui dirait pas de réciter les prières d’avant repas au milieu du stand de nouilles.
L’autre homme s’empressa de démentir.
— Je ne te fais pas de blague. Je veux juste que tu essaies. Le Tom Yum au porc mijoté de ce stand est délicieux, tu ne me croies pas ?
Ce défi partiel poussa Kongpob à mettre fin à la discussion. Il baissa les yeux sur le bol de nouilles Tom Yum avec du chili flottant sur le dessus et était certain qu’Arthit savait qu’il ne mangeait pas de nourriture épicée. Mais ce qu’il ne savait pas, c’était ce que l’autre homme pensait.
Pourtant, il finit par céder, prenant une cuillère de soupe et la mettant dans sa bouche, retenant sa respiration et se préparant à l’explosion de chaleur et d’épices.
À sa grande surprise, le goût était tout le contraire de l’aspect brûlant de la soupe. C’était doux et il n’y avait pas besoin de rajouter de condiments comme de la sauce de poisson ou du sucre. Les gros morceaux de porc mijotés étaient également aromatiques.
Sa surprise devait être visible pour que l’homme qui l’observait demande.
— Eh bien, c’est bon, non ?
— C’est bon. Pourquoi tu ne me l’as pas dit dès le début ?
— Je voulais juste savoir ce que tu commandes d’habitude. Et regarde. Des nouilles fines dans une soupe claire. Tes goûts en matière de nourriture sont si simples et ennuyeux.
Il gloussa bruyamment, insultant le jeune homme qui avait l’air embarrassé. Alors… le bizuteur l’avait juste piégé pour voir comment il réagirait… une fois de plus. Il avait commandé les nouilles fines dans une soupe claire en partie parce qu’il aimait ça, et en partie parce qu’il voulait évaluer si ce stand était vraiment si bon. On pouvait dire d’après le menu de base si un stand de nouilles était bon ou pas.
Il serait futile de donner une telle explication. Arthit pourrait penser qu’il était puéril. Il repoussa donc le bol, désireux de mettre fin à la discussion et de l’échanger avec l’autre bol. Sa voix sortit assez fatiguée.
— Tu peux prendre ton bol.
— Quoi ? Tu es en colère contre moi ? Non, ça va. Tu peux le manger. Essaie quelque chose de bon pour une fois.
Arthit le taquina, repoussant le bol de soupe épicée vers Kongpob. Il poursuivit avec un sourire et une explication qui rendit l’homme plus jeune sans voix.
— D’ailleurs, j’ai commandé ce bol juste pour toi.
Il commença alors à prendre les fines nouilles avec les baguettes et les mit dans sa bouche sans un mot de plus, laissant le jeune homme assis et regardant ses nouilles Tom Yum. Ce n’était pas juste un simple bol mais un extra plein de viandes et de légumes où l’on pouvait à peine voir les nouilles.
… Encore. P’Arthit lui avait encore fait ça.
Il savait qu’Arthit était cruel par gentillesse. Mais ce qu’il ne comprenait pas, c’est pourquoi Arthit devait être de cette façon, surtout avec lui. Bien qu’il ne l’ait pas dit à voix haute, il avait laissé entendre qu’il avait des sentiments pour l’autre homme. Arthit ne savait pas à quel point il était froid.
Ce que tu as fait… ne t’es-tu pas rendu compte que cela me donnait de l’espoir.
Pire et plus déroutant encore, alors qu’il accueillait la gentillesse d’Arthit à bras ouverts, en même temps il se sentait mal. Chaque jour qui passait, ses sentiments devenaient plus profonds, incapable de les empêcher de se transformer en un énorme crush, alors qu’il s’efforçait de garder leur relation platonique et de ne pas précipiter les choses.
Pourtant, le mur dans son cœur commençait à s’effriter alors que ses sentiments devenaient de plus en plus forts.
— 0062… 0062…
Il n’y avait pas de réponse de l’autre côté jusqu’à ce que l’autre homme doive taper les baguettes contre le bol.
— Hé ! Kongpob ! Concentre-toi ! Si tu ne manges pas les nouilles, elles seront ramollies !
L’homme distrait mit son esprit en pause et vit comment Arthit prenait les épices dans le récipient et les mettait dans ses nouilles, fronçant les sourcils et grognant contre lui, frustré. Alors il tourna rapidement son esprit vers la tâche, prenant les nouilles Tom Yum dans sa bouche, laissant sa confusion s’évanouir dans l’air alors que les nouilles savoureuses soulageaient le fardeau dans son cœur.
Lorsqu’il eut terminé le bol, l’estomac rempli, les deux hommes payèrent l’addition et sortirent du stand vers 13 heures. Le soleil était toujours impitoyable dans le ciel, brûlant la peau. Arthit plissa les yeux, regardant le soleil lorsque le plus jeune prit la parole.
— P’Arthit, tu veux aller quelque part ensuite ?
— Il fait une chaleur torride ici, où est-ce que je voudrais aller ?
— On va au cinéma ? On peut s’asseoir et il y a l’air conditionné, suggéra Kongpob.
Même s’ils devaient reprendre le bus pour trois arrêts, c’était mieux que de marcher sous le soleil et de finir trempé de sueur. Il hocha la tête en signe d’accord.
— Ouais, d’accord.
Ils sortirent donc de l’allée et attendirent le bus pour retourner au centre commercial. Cette fois, leur destination était au dernier étage où le cinéma occupait plus de la moitié de l’espace. Ils lirent le panneau d’affichage avec les listes de films et les horaires des séances.
— P’Arthit, tu veux voir un film en particulier ?
— Aucune idée. Je ne me tiens pas au courant de ce qui se passe dans le showbiz.
Arthit haussa les épaules, disant la vérité. La saison du bizutage l’avait privé de son temps pour suivre les affaires du monde. Une fois que ça s’était fini, il y avait eu les examens de mi-trimestre à surmonter. Récemment, il avait trouvé du temps libre pour lui. Pourtant, il allait rarement au cinéma. Si certains films étaient populaires et devenaient à la mode, il les téléchargeait pour les regarder ou empruntait le DVD à un ami. La plupart du temps, il préférait passer du temps à lire des mangas, à jouer à des jeux vidéo et à Dota.
C’était tout le contraire de l’étudiant de première année à côté de lui qui répondit d’une voix ferme avec les informations qu’il avait retenues.
— Alors, que penses-tu de celui-là ? Le budget était de plus de cent millions de dollars. Il est en tête du box-office depuis deux semaines. Les critiques sur le net sont assez bonnes aussi.
Les yeux d’Arthit suivirent la main de Kongpob qui faisait un geste vers une affiche de film d’action dont la bande-annonce se trouvait par hasard sur l’écran. Il ne savait pas qu’il était si populaire. Il n’avait jamais entendu parler du titre. Mais voyant combien le jeune homme était enthousiaste, il accepta.
— Comme tu veux.
— Alors attends ici, je vais nous chercher les tickets.
Kongpob se porta volontaire et rejoignit la file d’attente pour acheter les billets pendant qu’Arthit s’éloignait pour regarder les alentours. Il observa les autres personnes. La plupart d’entre eux étaient venus en couple, se tenant la main et chuchotant comme s’ils étaient en rendez-vous. Il était envieux, voulant vivre ce moment lui aussi.
Il se rendit compte que traîner seul avec Kongpob n’était pas si mal. Au début, il avait pensé que le jeune homme trouverait une occasion de se venger de lui. Mais maintenant, il réalisait que c’était juste une simple balade dans un centre commercial, faire du shopping, manger et regarder un film, eh bien, ça ressemblait à un rendez-vous. WOAH. Qu’est-ce qui n’allait pas chez lui ? Il avait fait ça pour tenir sa parole qu’il accompagnerait l’homme faire du shopping. Ce n’était pas du tout un rendez-vous !!
Arthit secoua la tête, chassant ces pensées stupides. Peut-être que c’était quelque chose que Kongpob avait fait qui lui avait donné cette idée. Il n’avait pas le courage de demander ce qui se passait réellement entre lui et Kongpob.
Jusqu’à présent, il savait que Kongpob était un emmerdeur, mais dans l’ensemble, c’était un étudiant de première année responsable. P’Deer avait discuté avec lui du fait qu’il voyait Kongpob comme le prochain chef bizuteur, et Arthit avait admis voir ce potentiel chez le jeune homme. Il avait pensé que si Kongpob arrêtait de se chamailler avec lui, et s’ils pouvaient s’asseoir et parler gentiment, alors c’était quelqu’un à qui il pouvait faire confiance pour cette tâche.
Mais plus ils parlaient, plus il commençait à découvrir quelque chose de différent. Toutes les actions de Kongpob étaient teintées de quelque chose de plus que fraternel. Plusieurs fois, il avait voulu lui demander, mais il avait choisi de couper court et de laisser les choses aller comme si rien ne s’était passé.
Parce qu’il savait. Certaines choses avaient besoin de temps. Si c’était trop rapide ou trop lent… cela pouvait mettre en péril la relation.
Arthit arrêta le cours de ses pensées quand il vit Kongpob revenir avec les billets. Ils avaient réussi à en obtenir pour la séance sur le point de commencer.
Ils se précipitèrent donc tous deux dans la salle et se laissèrent aller à profiter des 180 minutes d’écran. Le film était aussi bon que les gens l’avaient vanté, car même s’ils sortaient du cinéma, Arthit n’arrêtait pas de parler du film.
— La scène de l’explosion était géniale ! Mais je ne comprends pas la fin. Tu crois que ce type est mort ? J’étais perdu.
— Je ne pense pas. Pense à l’indice au début du film. La réponse était là. Ce réalisateur aime laisser une fin ouverte. J’ai entendu dire qu’il allait faire une suite, alors il a rendu la fin ambiguë, comme un puzzle. J’ai adoré les effets spéciaux dans la scène de l’explosion - vraiment bien. Mais ce que j’ai aimé encore plus, c’est la bande-son. Elle va avec le thème, je pense que celle-ci va arracher un Oscar ou deux.
La longue critique fit que celui qui avait regardé le film pour s’amuser et non parce qu’il était un geek de cinéma qui analysait les films glissa un commentaire.
— Tu en sais beaucoup sur les films.
— J’adore regarder des films. Qu’est-ce que tu aimes faire ? Quelque chose de spécial ?
— Eh bien, rien de particulier.
L’homme à qui on avait posé la question secoua la tête en réfléchissant à son style de vie. C’était un type ordinaire avec un look ordinaire. En regardant le reflet des deux qui marchaient côte à côte, il commença à remarquer que son apparence pouvait être qualifiée d’hideuse, car il était éclipsé par le rayonnement de la Lune de l’université.
… Comment avait-il pu se laisser aller et devenir aussi négligé ?
— Tu rentres maintenant ?
La question incita Kongpob à le regarder, et il demanda en retour, effaré.
— Pourquoi, tu rentres ?
— Non, je pensais aller me faire couper les cheveux. Tu peux rentrer chez toi. Pas besoin de rester dans le coin.
Le jeune homme de première année soupira, soulagé en entendant la réponse. Il avait pensé qu’Arthit en avait marre de lui et que, donc, il voulait partir. Il voulait rester et parler à Arthit un peu plus longtemps. Il n’était que 16 heures. Si P’Arthit allait se faire couper les cheveux, cela prendrait une heure tout au plus.
— Je peux attendre. P’Arthit peut trouver un coiffeur ici.
Ce conseil fit réfléchir Arthit. Les prix dans le centre commercial étaient plus élevés que d’habitude, mais il ne voudrait pas perdre son temps à chercher d’autres salons de coiffure. Le bizutage n’était plus une obligation et le samedi suivant serait le jour du mariage de P’Tum. Il avait besoin de se faire beau pour honorer la cérémonie.
Donc Arthit fit comme Kongpob l’avait suggéré. Il choisit un salon au hasard, en jugeant du nombre de clients et de la crédibilité de l’endroit. Il fut accueilli et invité à attendre son tour lorsque l’employé lui donna un catalogue pour choisir. Il le feuilleta nonchalamment et demanda avec désinvolture un avis.
— Quel style je devrais avoir ? Pourquoi pas un skinhead ? Les cheveux longs me gonflent. Je veux une coupe au rasoir.
Kongpob jeta un coup d’œil au regard déterminé d’Arthit qui marmonnait ses options. Il voulait demander… tu penses qu’un skinhead te correspond ? Ça ne correspond pas du tout à ta personnalité. Avant qu’il ne puisse répondre, un membre du personnel vint leur parler.
— Qui est là pour la coupe de cheveux ? S’il vous plaît, venez avec moi.
— Tu peux aller faire un tour. Pas besoin de rester ici.
Arthit dit en se levant et en suivant l’employé vers le fauteuil pour laver les cheveux au fond du salon de coiffure. Kongpob ne suivit pas cet ordre mais resta sur place, attendant. Il n’avait aucune idée de ce qu’il pouvait encore regarder ou acheter puisqu’il avait déjà le cadeau d’anniversaire de sa nièce qu’il était venu chercher ce matin.
Kongpob prit un magazine que le coiffeur avait mis à la disposition des clients pour qu’ils puissent le lire afin de tuer le temps, en attendant qu’Arthit se fasse couper les cheveux. Une demi-heure plus tard, il entendit son nom.
— Kongpob.
C’était son nom, et non le code 0062 qu’il entendait souvent. Il leva la tête vers l’autre homme, les yeux rivés sur le spectacle qui s’offrait à lui, et son souffle se bloqua dans sa gorge pendant quelques millisecondes.
Les longs cheveux d’Arthit étaient coupés court, révélant sa nuque. Le devant était taillé depuis les sourcils jusqu’à l’endroit où les cheveux touchaient les oreilles, révélant celles-ci et un visage bien défini. Plus important encore, la moustache qui ornait le visage de l’homme avait été rasée, révélant un jeune homme rasé de près. Avec ses vêtements, le bizuteur paraissait beaucoup plus jeune au point qu’il n’arrivait pas à croire qu’il était plus âgé que lui.
L’homme relooké avait l’air penaud, touchant sa nouvelle coupe de cheveux et lui demandant son avis.
— Tu penses que c’est trop long ? Je voulais que ça soit plus court, mais le coiffeur a dit que ça ne me convenait pas.
Arthit fit un signe de tête en direction d’une femme transgenre pétualnte qui était la coiffeuse alors qu’elle venait lui rendre sa monnaie. Elle le gronda quand elle remarqua ce qu’il faisait.
— OMG. Ne ruine pas tes cheveux, chéri ! Je les ai bien arrangés pour toi. C’est un style très populaire dans la K-pop. Tu es déjà très bien comme tu es. Si tu ne me fais pas confiance, demande à ton petit ami.
La première phrase était bonne, mais la dernière le fit sursauter et protester.
— Non, non ! C’est mon junior à l’université.
— Oups. Désolé, je pensais que vous étiez en couple. Il a attendu ici et t’a reluqué.
Les excuses n’aidèrent pas. Ça rendit même les choses encore plus bizarres. Arthit regarda Kongpob mais l’autre homme fit semblant de regarder ailleurs. Avant que quelqu’un puisse parler davantage, une voix se fit entendre.
— Nanni, un client attend !
— Oui, oui, je sais. Je dois y aller, mais voici ta carte de membre. Pensez à moi pour votre prochaine coupe de cheveux, tous les deux. Je ferai de mon mieux pour de beaux garçons comme vous.
Nanni tendit la carte de membre à Arthit, en le regardant gentiment, et partit s’occuper du nouveau client. Ils quittèrent la boutique et Arhtit ne put s’empêcher de toucher ses cheveux, inquiet.
Il savait qu’il était beau, quelle que soit sa coiffure, mais il pensait que ses cheveux étaient trop longs pour lui. Il avait demandé à la coiffeuse de lui raser les côtés de la tête pour avoir l’air d’un dur, mais elle n’avait pas voulu. Elle l’avait même rasé. Ça ne le dérangeait pas de perdre sa moustache, il avait hâte de s’en débarrasser. Mais cette coiffure n’était pas celle qu’il voulait et ça l’agaçait.
— Je pense toujours que c’est trop long. Qu’est-ce que tu en penses ?
Arthit ne pouvait s’empêcher de râler. L’homme à côté de lui essaya de le consoler comme la coiffeuse Nanni lui avait dit.
— Je pense que c’est bien.
— N’enjolive pas les choses. Je veux savoir la vérité.
Arthit arrêta de marcher et se tourna pour demander d’un ton sérieux, et Kongpob s’arrêta. Il balaya du regard l’homme à côté de lui et laissa échapper un lourd soupir.
— Je pense que c’est mauvais.
— Huh ?! C’est si grave que ça ?
L’homme plus âgé haussa la voix, surpris. Il n’aimait pas cette coupe de cheveux, mais il ne pensait pas que c’était si mauvais. Pourtant, Kongpob secoua la tête et continua.
— Non, non. Pas la coupe de cheveux. La coupe de cheveux est mauvaise pour moi.
À ce moment-là, Arthit réalisa ce que la coiffeuse Nanni avait dit de Kongpob.
Il se retourna et s’éloigna, ne voulant pas poser d’autres questions sur sa coupe de cheveux. Il regarda le sol et accéléra le pas alors qu’une étrange chaleur commençait à l’envelopper et qu’il entendait la voix dans le côté gauche de sa poitrine.
Il savait… que certains mots pouvaient mettre en péril une relation.
Mais il venait de réaliser qu’une vérité cachée dans les yeux pouvait mettre en danger… le cœur. | | Messages : 942
Date d'inscription : 19/06/2024
| Néphély Sam 7 Sep 2024 - 17:52 Règle n°23 Dis la vérité au Bizuteur et rien que la vérité … Partir. Maintenant, la seule chose à faire était de partir.
— Tu ne veux rien acheter, P’Arthit ?
Le senior se retourna, faisant face à Kongpob derrière lui qui semblait imperturbable bien qu’un peu confus.
C’était exaspérant. Kongpob l’avait embrouillé après qu’ils aient quitté le coiffeur et Arthit s’était précipité vers l’arrêt de bus à l’extérieur, voulant quitter le centre commercial.
Il ne savait pas ce qui n’allait pas. Quand le coiffeur trans lui avait fait un compliment, il n’avait rien ressenti. Mais quand il avait vu comment Kongpob le regardait, il s’était soudainement senti troublé. Même si c’était le compliment d’un autre homme, ces mots lui faisaient quelque chose de plus en plus chaque jour qui passait. Pire encore, on aurait dit qu’ils avaient un rendez-vous galant… S’il restait, les choses allaient s’envenimer. Il ferait mieux de garder une certaine distance entre eux.
— Je retourne à mon dortoir.
Ils avaient fait toutes leurs courses et il était presque 17 heures. Il était temps de prendre des chemins séparés. Mais Kongpob s’approcha de lui.
— Alors je vais rentrer aussi.
… C’est vrai. Il ne pouvait pas l’éviter car ils allaient dans la même direction.
Arthit l’avait supporté et attendu le bus. Ils firent le trajet à travers un gros embouteillage jusqu’à ce qu’ils atteignent l’arrêt de bus devant le campus, et Arthit descendit sans dire au revoir à l’homme avec qui il avait partagé le trajet. Il se dirigea vers son dortoir non loin de là. Mais alors qu’il marchait, il sentait encore l’ombre qui suivait ses pas. Il se retourna et grogna.
— Tu n’as pas à m’accompagner jusqu'au dortoir, je peux y aller tout seul et je ne suis pas une fille !
— Non. Je ne te suis pas. Je suis sur le chemin de mon dortoir. C’est le dortoir Chaiyapruek.
Cette révélation fit réfléchir Arthit. Le dortoir Chaiyapruek… Quoi ? Le gamin vivait juste en face de son Dortoir Romruedee ? Pas étonnant qu’il l’ait croisé si souvent dans les magasins d’alimentation du quartier. Pourquoi ne pas lui avoir dit et l’avoir laissé se ridiculiser ? Ou peut-être n’avait-il pas voulu lui dire la vérité ? En jetant un coup d’œil au plus jeune, il vit que Kongpob souriait, amusé par le malentendu. Le jeune homme répliqua même par une question taquine.
— Alors… tu pensais que je te raccompagnais chez toi, c’est ça ?
— Non. Pas du tout !
— Mais si tu veux que je t’accompagne jusqu’au dortoir, j’aimerais beaucoup.
En plus de ces lueurs dans ses yeux, il y avait cette ambiguïté dans ses mots qui était problématique. Le sens caché ne faisait que s’intensifier. A ce moment-là, il n’était pas d’humeur à clarifier les choses entre eux et choisit de tout stopper pour se diriger vers son logement.
S’il voulait marcher à ce point, qu’il en soit ainsi. Il ne le suivrait pas jusqu’à sa chambre de toute façon. Une fois arrivé chez lui, cette folie prendrait enfin fin !
Arthit accéléra le pas pour atteindre sa destination. Mais avant qu’il ne puisse atteindre son havre de paix, une tante joufflue lui bloqua le passage dès qu’il posa le pied sur les marches de l’entrée.
— Arthit, mon cher ! Tu es enfin rentré. J’allais t’appeler !
— Qu’est-ce qui ne va pas, tante Phom ? demanda-t-il rapidement à la responsable du dortoir qui avait une quarantaine d’années.
Elle était gentille et prenait soin des résidents qui étaient pour la plupart des étudiants universitaires comme s’ils étaient sa propre famille. Maintenant, elle avait l’air paniquée et bafouillait.
— Quelqu’un m’a signalé qu’il y avait de l’eau dans le couloir du sixième étage. Cela venait de la chambre 618… ta chambre. S’il te plaît, dépêche-toi de jeter un coup d’œil. J’ai peur qu’un tuyau n’ait éclaté et qu’il y ait de l’eau dans ta chambre.
— Quoi !? Un tuyau s’est cassé ?! cria Arthit, les yeux écarquillés, choqué, et il se précipita vers l’ascenseur.
Il appuya sur le bouton du sixième étage et une fois arrivé à son étage il se pressa d'en sortir. En arrivant à sa porte, son cœur s’effondra en voyant que l’étage était inondé et que l’eau sortait de sa chambre.
Le propriétaire de la chambre chercha frénétiquement la clé dans sa poche et la tourna dans la serrure. Lorsque la porte s’ouvrit, l’eau de l’intérieur s’était écoulée jusqu’à atteindre ses chevilles. Chaque centimètre de la pièce était envahi d’eau et celle-ci continuait à monter.
Arthit se précipita à l’intérieur pour trouver la source du problème. Ce ne fut pas difficile à repérer puisqu’une fontaine jaillissait d’un tuyau d’arrivée du lavabo. Il s’était détaché et inondait la pièce. Il ferma la vanne d’eau reliée au conduit en PVC, puis scruta les dégâts. Cela semblait plus grave que ce qu’il aurait pu réparer. La seule solution était de changer l’ensemble du dispositif.
— Tante, pourriez-vous appeler un plombier pour moi ? demanda Arthit à la responsable du dortoir qui l’avait suivi pour vérifier l’accident mais elle avait l’air troublée.
— Je l’ai fait, mais ils ne sont pas disponibles. Il est déjà tard et tous les magasins de plomberie sont fermés. Je dois attendre demain matin pour qu’un plombier vienne réparer. Tu peux rester avec ton ami pour la nuit ?
La tante fit un geste vers l’homme derrière lui. Arthit réalisa que Kongpob l’avait suivi dans sa chambre. Il avait peut-être entendu parler de l’accident et était venu offrir son aide. L’étudiant de première année prit la parole, l’air préoccupé.
— Je suis d’accord. Tu peux rester avec moi ce soir. C’est juste en face d’ici. Demain matin, tu pourras venir vérifier la chambre.
Arthit acquiesça. Il prendrait toute l’aide qu’il pouvait obtenir maintenant parce que, pour être honnête, il n’avait plus d’énergie pour comprendre les choses. Plus il regardait l’état de la chambre, plus il était stressé.
Il la gardait rarement en ordre. Maintenant que la pièce était inondée, elle était doublement catastrophique. Certaines de ses affaires étaient complètement ruinées, il n’était pas nécessaire de les enlever. Certains livres baignaient dans l’eau parce qu’il les avait posés près du lit, ainsi que son matériel d’étude, les bandes dessinées du magasin de location et les livres qu’il avait empruntés à la bibliothèque.
Il y avait aussi le câble de chargement et son ordinateur portable qu’il avait laissé branché sur la prise de courant. Heureusement qu’il n’était pas relié à l’électricité sinon il aurait court-circuité et aurait fait brûler la chambre. Son ventilateur de sol, son sac à dos, ses chaussures, le panier dans lequel il avait mis ses vêtements secs récupérés ce matin pour être repassés… et tant de choses… tout était endommagé par l’eau.
Lentement, il ramassa ses affaires pour les poser sur le bureau et balaya l’eau vers le siphon de la salle de bain et du balcon. Il nettoya également le couloir et dut s’excuser auprès de ses voisins au sujet de l’inondation. La plupart d’entre eux se montrèrent sympathiques, comprenant qu’il s’agissait d’un accident et que cela ne leur avait rien causé. Le pire fut le grand nettoyage dans sa chambre avec l’aide de Kongpob.
— P’Arthit, je fais quoi avec ce panier ? Je dois le descendre et remettre les vêtements dans la machine à laver ?
— Pas besoin. Je viens de les laver. On va sécher ceux qui sont mouillés et les relaver.
— Je vais repasser ceux qui sont secs.
Kongpob ramassa le fer à repasser et le posa agilement sur une planche à repasser comme s’il l’avait fait un million de fois. Ce n’était pas la première fois que Kongpob utilisait le fer à repasser dans sa chambre, et il n’avait jamais pensé se retrouver dans cette situation à nouveau.
Arthit le laissa faire et ramassa quelques vêtements détrempés pour les suspendre sur le balcon. Ensuite, il retourna s’occuper des livres trempés qu’il avait mis à sécher. Il avait une envie folle de grimacer dès qu’il vit leur état.
Il pouvait demander de nouvelles copies des documents d’étude. Pour les bandes dessinées, il devrait s’adresser au magasin de location. Mais les livres qu’il avait empruntés à la bibliothèque pour ses devoirs ? Le bibliothécaire l’engueulerait certainement et il paierait l’amende. Mais qui d’autre pouvait-il blâmer ? C’est lui qui avait empilé les livres sur le sol à côté du lit parce qu’il n’y avait plus de place sur son bureau. Son attitude désordonnée lui causait finalement des problèmes, tout comme sa mère s’en plaignait.
Pire encore, il allait devoir payer pour tout cela alors que la fin du mois approchait !
… Arthit poussa un gros soupir, résigné à sa situation difficile, et réfléchit à la façon de parler au bibliothécaire demain matin. Soudain, Kongpob, qui venait de terminer le repassage et rangeait les vêtements dans l’armoire, fit une suggestion.
— J’ai entendu dire que si on met un livre mouillé dans le congélateur, il se redressera. Les pages ne seront pas gonflées ou froissées.
— Vraiment ? demanda Arthit qui vit là, une petite lueur d’espoir et Kongpob hocha la tête.
Mais quand il se retourna pour ouvrir le réfrigérateur, cette petite lueur disparut.
… Il avait oublié que son réfrigérateur était minuscule. Les bouteilles d’eau prenaient presque tout l’espace et il était rempli d’encas et de desserts. Comment pourrait-il y mettre les livres ?
— Tu peux mettre les livres dans mon frigo. Tu vas passer la nuit chez moi de toute façon. Ou tu veux y aller maintenant et je vais prendre les affaires pour toi.
Une nouvelle suggestion fut émise et cela rappela à Arthit qu’il avait accepté que l’homme l’aide. Il serait maladroit s’il agissait comme un mufle maintenant. Et puis, s’il refusait son offre et appelait ses amis à l’aide, il ne savait pas s’ils seraient capables de donner un coup de main. La veille, il avait vu que Knot avait posté sur Facebook qu’il était rentré chez lui. Et le dortoir de Prem était trop loin d’ici.
Finalement, Arthit capitula et mit ses vêtements dans un sac à dos pour aller dormir dans le dortoir voisin. Kongpob l’aida en portant les livres mouillés et ouvrit la voie vers l’ascenseur du sixième étage. Puis, une fois arrivés devant la chambre 608, le type déverrouilla la porte pour son invité.
Bien que la taille de la chambre ne soit pas très différente, la décoration était complètement à l’opposé. Tout était propre et bien rangé, montrant la personnalité de son habitant qui était en train d’allumer l’air conditionné, puis se tourna pour parler à l’homme qui s’était arrêté à la porte.
— P’Arthit, fais comme chez toi. Je vais descendre une seconde, dit Kongpob avant d’ouvrir la porte et de partir, laissant son invité désemparé et seul dans ce nouvel environnement.
Mais puisque le propriétaire des lieux lui avait donné le feu vert, il porta son attention sur les livres détrempés, cherchant le réfrigérateur pour les mettre comme on lui avait suggéré. Il découvrit que le réfrigérateur était beaucoup plus grand que le sien. Mais une fois ouvert, il ne vit que trois bouteilles d’eau à l’intérieur, et un espace vide comme s’il n’était branché que pour consommer de l’électricité.
Arthit venait de réaliser que leurs modes de vie étaient très différents. Plus il en savait sur l’autre homme, plus il le voyait sous un nouveau jour.
… Et étonnamment… chaque fois qu’il essayait de prendre ses distances, il se retrouvait de nouveau avec Kongpob. Pourtant, il était celui qui se rapprochait de plus en plus du jeune homme.
Arthit essaya de se défaire de ces pensées stupides. Il ne devrait pas penser à des choses absurdes et rangea rapidement ses livres dans le réfrigérateur. Bientôt, la porte s’ouvrit et il vit pourquoi Kongpob était parti.
— J’ai ça pour toi, P’Arthit.
Kongpob lui tendit un sac contenant du riz parfumé dans une boîte, ce qui fit grogner son estomac. Il venait de réaliser qu’il était affamé. Après les nouilles du déjeuner, il n’avait rien pris jusqu’à maintenant, il était vingt heures.
— Je ne savais pas ce que tu aimais, alors j’ai commandé ce que j’aimais.
Kongpob lui tendit la boîte. En l’ouvrant, il fronça les sourcils devant la nourriture. C’était l’omelette préférée de Kongpob posée sur du riz.
— Tu as acheté du riz avec une omelette au porc haché ? Tu aurais pu commander quelque chose de plus élaboré puisque tu es allé au restaurant. Tu ne peux pas simplement cuisiner une omelette au porc haché toi-même ?
— Je ne peux pas la faire aussi bien que le restaurant. Je brûle toujours les omelettes.
— Hein ? Tu es un adulte et tu brûles encore les œufs ? Tu es un petit maître sorti d’un livre d’histoire ou quoi ? Je ne peux pas y croire, taquina Arthit, en riant à gorge déployée.
Peut-être venait-il de découvrir pourquoi le réfrigérateur était vide parce que le propriétaire de la chambre ne savait pas cuisiner malgré son statut d’adulte. L’homme qui s’était fait taquiner ne se plaignit pas et tendit quelque chose vers le bizuteur.
— Mais ça… Je sais que tu aimes ça.
… Un verre de lait rose de la boutique dont Arthit était un habitué.
Avant, il aurait pensé que Kongpob avait acheté ce lait rose pour le contrarier. Maintenant il ne le pensait plus. Kongpob s’était toujours montré gentil.
Même aujourd’hui, il ne se rendait pas compte que le stress lié à l’inondation de la chambre avait disparu. Le fait d’avoir quelqu’un à ses côtés pour résoudre le problème l’avait soulagé de ce poids et l’avait aidé à rire à nouveau des petites choses.
— Merci, marmonna Arthit en prenant le verre de lait rose, et il commença à manger la nourriture pour se débarrasser de sa faim.
Kongpob se dirigea vers la télévision et l’alluma pour trouver un feuilleton du soir, puis revint s’asseoir et manger à côté de lui.
Malgré le son de la télévision, l’absence de conversation entre eux fit qu’Arthit se demanda pourquoi il était subitement devenu anxieux et il mangea son riz à toute vitesse. Il finit ainsi par terminer son assiette plus tôt que Kongpob et rangea les boîtes et le gobelet dans le sac en plastique avant de poser une question au propriétaire de la chambre.
— Où est ta poubelle ?
— Sur le balcon.
Arthit se leva et fit glisser la porte vitrée derrière le rideau, à la recherche de la poubelle.
Le ciel extérieur était sombre. Les lumières de l’autre côté du dortoir éclairaient l’espace sur le balcon… Il devina qu’il s’agissait du dortoir Romruedy tout proche. Mais en y regardant de plus près, il remarqua que la distance entre les deux bâtiments n’était pas si importante, et en y regardant de plus près encore, il vit les vêtements suspendus sur le balcon opposé.
… Attendez une minute. Pourquoi ces vêtements étaient-ils si familiers ? Ils ressemblaient aux vêtements qu’il venait de suspendre un moment plus tôt. Les affaires qu’il voyait étaient aussi similaires à celles de sa chambre.
… C’est ça. Pourquoi il n’avait pas réalisé que la chambre de Kongpob était au sixième étage ?
— Kongpob, tu sais où se trouve ma chambre, pas vrai ?
Arthit se retourna et demanda à son interlocuteur qui haussa un sourcil en réponse, l’air perplexe. Kongpob se leva, refermant le couvercle de la boîte de riz une fois qu’il l’eut terminée.
— Bien sûr, je suis au courant. J’y étais justement ce soir.
— Non ! Tu savais déjà que nos balcons se trouvent l’un en face de l’autre, n’est-ce pas ?
La main sur la boîte de riz fit une pause tandis que Kongpob levait les yeux et regardait l’autre homme. Puis, il répondit d’un ton neutre.
… Enfin, le secret qu’il gardait depuis longtemps était brisé.
Il aurait pu mentir et dire que non, il ne savait pas, mais il n’y avait pas de secret dans le monde. Tôt ou tard, la vérité restait la vérité. Alors il hocha la tête, l’admettant.
— Oui.
— Depuis combien de temps ?
—Depuis les deux premières semaines de cours.
— Comment tu l’as découvert ?
— Je t’ai vu quand tu mettais ton linge à sécher sur ton balcon, et d’autres fois…
Arthit sentit une montée de colère en entendant la réponse.
… Presque trois mois, depuis qu’il était le chef bizuteur. Combien de choses les étudiants de première année avaient-ils vu quand il n’était pas prudent ? Qu’est-ce que ce gars savait ou avait-il découvert ? Est-ce qu’il voulait faire ça depuis le début ?
— Pourquoi tu ne m’as rien dit ?
— Je ne voulais pas que tu le saches.
— Pourquoi tu ne voulais pas que je sache ?! Oh, pour que tu puisses te moquer de moi avec tes amis derrière mon dos, c’est ça ?!
— Non, c’est pas ça. Je ne l’ai jamais dit à personne.
— Alors pourquoi, putain ? !
— Parce que je ne voulais pas que quelqu’un d’autre soit plus proche de toi que moi, Phi !
… Et juste comme ça, tout devint silencieux.
La colère d’Arthit se transforma en un silence stupéfait, tout comme Kongpob, qui fut également décontenancé par ses propres paroles. Pourtant, ce qui avait été dit ne pouvait être retiré, et cela rendait plus évidentes les questions au fond de leurs esprits, en particulier celle qu’Arthit voulait poser depuis longtemps.
… Il avait choisi de l’ignorer à plusieurs reprises, mais maintenant il savait que s’il ne clarifiait pas les choses, leur relation deviendrait encore plus confuse.
Arthit prit une profonde inspiration, essayant de composer une phrase qui résumerait tous ses sentiments.
— Kongpob, laisse-moi être franc. Tout ce que tu as fait pour moi jusqu’à présent… c’était parce que tu as des sentiments pour moi ?
… Cette seule phrase qui atteignit le cœur du jeune homme, brisant les murs entre eux.
L’air était tendu, comprimé, lourd. Aucune réponse ne sortit au milieu de ce silence étourdissant. Les deux hommes se contentaient de se fixer, plongeant leur regard dans celui de l’autre, voulant trouver la vérité cachée et voir qui céderait le premier.
Mais Kongpob bougea et détourna son regard de celui d’Arthit en marmonnant .
— Qu’est-ce que tu veux dire ?
… Ce n’était pas une réponse. C’était une dérobade.
Il avait fait le premier pas, mais Kongpob choisissait de tout arrêter, les laissant tous deux dans cette ambiguïté…
— C’est pas grave. Je vais prendre une douche.
Il était inutile de se parler maintenant. Arthit se dégagea et s’éloigna du balcon en direction de son sac à dos. Il l’attrapa et se dirigea directement vers la salle de bain, laissant Kongpob seul, enraciné sur place.
… L’endroit où il venait de ruiner sa propre chance.
Kongpob soupira, marcha jusqu’à ouvrir le tiroir, prit une Marlboro et un briquet. Il fit glisser la porte du balcon pour allumer sa cigarette à l’extérieur et laissa sa frustration s’évanouir dans la fumée.
Il savait qu’Arthit avait été conscient de ses allusions… plusieurs fois. Peu importe à quel point il avait essayé, ses yeux et ses actions ne pouvaient pas cacher ses sentiments qui révélaient combien Arthit était spécial pour lui. Cela aurait pu mettre Arthit dans une position difficile quand il lui avait finalement demandé. Mais il avait choisi de tout arrêter.
Oui, en tant qu’homme, cela pouvait sembler pathétique… et lâche. Il avait peut-être eu tort de ne pas aller plus loin. Il avait peut-être tort de ne pas vouloir être rejeté.
… Avait-il aussi tort d’avoir peur de perdre ce qui importait le plus pour lui ?
Le bruit de la porte de la salle de bains qui s’ouvre en claquant lui fit comprendre que l’autre homme avait terminé sa douche. Kongpob fit glisser la porte vitrée, ne sachant pas comment Arthit se sentait. Il était probablement en colère contre lui puisqu’il avait l’air indifférent, l’ignorant. Tout à coup, le senior se retourna et demanda.
— Tu fumes ?
— Oui.
Il hocha la tête. Arthit devait l’avoir senti et il était sur le point de sortir son paquet de cigarettes pensant que l’autre homme pourrait en vouloir une. Mais ce qui arriva ensuite était un ordre inattendu.
— Arrête ça. Tu devrais penser à tes parents. Ils te donnent de l’argent pour ton éducation, pas pour te brûler les poumons.
Arthit était toujours le même Arthit. Il n’avait jamais vraiment été en colère, était toujours aussi gentil et agissait comme si rien ne s’était passé.
— D’accord, je vais arrêter de fumer.
Kongpob lui donna sa parole en écrasant le reste du paquet de cigarettes et en le jetant à la poubelle. Il prit sa serviette et ses vêtements, se dirigeant vers la salle de bain, espérant que l’eau étoufferait son esprit en feu et calmerait les doutes dans son cœur.
Mais malgré le fait qu’il y ait passé près de quinze minutes enfermé, cela n’avait pas fonctionné. Il sortit enfin et vit Arthit en t-shirt et en short sur le lit, changeant de chaîne avec la télécommande sans but. Puis, il l’éteignit, n’ayant rien à regarder.
— Tu vas te coucher maintenant ? demanda Kongpob.
— Ouais.
Heureusement, son lit était assez grand pour que deux personnes puissent dormir confortablement. Il avait également des oreillers de rechange sur le lit. Arthit se laissa tomber et tourna le dos au plus jeune homme, prenant l’espace sur la gauche. Kongpob marcha pour éteindre la lumière pour que toute la pièce tombe dans l’obscurité et monta doucement sur le lit. La pièce n’était remplie que d’un silence écrasant.
… L’autre homme était à portée de main, l’espace entre eux était minime mais c’était comme s’ils étaient très éloignés.
Chaque minute qui passait lui faisait perdre la notion du temps. Pourtant, Kongpob ne pouvait pas dormir. Il jeta un coup d’œil au dos d’Arthit et demanda dans un léger murmure.
— P’Arthit… tu dors ?
Aucune réponse ni réaction, si ce n’est le mouvement rythmique de ses épaules. Arthit devait s’être endormi depuis un bon moment, et il était seul dans ses pensées excessives. Il regarda le plafond et commença à dire ce qu’il avait en tête.
— Ce que tu m’as demandé… je ne savais pas ce que tu voulais dire par là. Mais si tu voulais dire la même chose que moi…
Il quitta le plafond des yeux et fixa l’homme à côté de lui. Il rassembla toute sa force et la concentra dans ses prochains mots.
— Oui… c’est le cas. Depuis un certain temps.
Les mots étaient à peine audibles, mais ils contenaient tous les sentiments accablants que Kongpob avait cachés à l’intérieur, n’ayant pas le courage de dire la vérité à l’homme à côté de lui. Il savait qu’Arthit ne pouvait pas l’entendre, mais il était soulagé de le laisser sortir. Il se tourna sur le côté et essaya de fermer les yeux et de dormir.
… Arthit, de son côté, ouvrit les yeux dans le noir.
Il ne dormait pas du tout, et il avait entendu chaque mot. C’était la réponse la plus franche qui lui faisait peur, si bien qu’il avait fait semblant de dormir.
Il savait… que peu importe à quel point il essayait de dormir, ça ne marcherait pas.
Parce que cette nuit, il était incapable de forcer son cœur à rester calme pour s’endormir. | | Messages : 942
Date d'inscription : 19/06/2024
| Néphély Sam 7 Sep 2024 - 17:52 Règle n°24 La dynamique dépend du Bizuteur Arthit cligna des yeux puis les ouvrit.
La première chose qu’il vit fut un plafond inconnu. Le premier son qu’il entendit fut celui d’une personne sous la douche. Il bougea, se leva avec ses cheveux en bataille et ses yeux tombèrent sur le lit. La lumière se faufilait à travers les rideaux, lui indiquant que c’était le matin, mais son cerveau était encore éteint, pas prêt pour une nouvelle journée. Il était sur le point de s’écraser à nouveau contre le lit quand Kongpob ouvrit la porte de la salle de bain.
— Tu es réveillé ?
L’homme somnolent hocha la tête, bailla et demanda en somnolant.
— Il est quelle heure ?
— 8:30.
En entendant l’heure, il fronça les sourcils. Il se réveillait habituellement vers midi les dimanches, mais il avait été réveillé par le bruit d’une douche. L’homme endormi était sur le point de se recoucher, en grommelant.
— Il n’est que 8 h 30. Il est encore tôt. Pourquoi est-ce que tu t’es levé si tôt ?
— Je vais à la fête d’anniversaire de ma nièce aujourd’hui.
L’explication fit réfléchir Arthit. Il récupéra lentement ses cellules cérébrales et se rappela ce qui s’était passé.
… Maintenant il se rappelait. Hier, il avait accompagné Kongpob pour acheter un cadeau d’anniversaire, puis il était rentré chez lui pour trouver sa chambre inondée parce que le lavabo était cassé. Ce qui expliquait pourquoi il avait fini par dormir dans la chambre de l’autre homme. Il avait aussi découvert que cette chambre était juste en face de la sienne, leurs balcons se faisant face. Il avait donc décidé de poser “cette” question et avait entendu certains mots.
… Des mots qui avaient ébranlé son cœur au plus haut point.
Il avait essayé de dormir, arrêtant le cours de ses pensées, mais c’était presque le matin quand il s’était finalement endormi. Cela le rendit tout de même fonctionnel, bien que somnolent. Mais les choses commencèrent à lui revenir - ses souvenirs et aussi certains des sentiments qui remontaient.
… Le sentiment de savoir exactement ce que l’autre homme pensait de lui.
Rien qu’en se rappelant cela, la confusion s’empara de son cœur jusqu’à ce qu’il se sente mal à l’aise et incapable de croiser le regard du jeune homme. Mais Kongpob comprit qu’il était encore endormi et lui dit gentiment.
— P’Arthit, tu n’as pas besoin de te presser. Je vais te laisser le double de la clé. Tu peux te rendormir.
L’homme sursauta et refusa rapidement.
— Ce n’est pas la peine. Je vais prendre une douche et je retourne à mon dortoir.
Sur ce, il se leva rapidement du lit, attrapa sa serviette, et fila dans la salle de bain. Il tourna le robinet, s’aspergea le visage d’eau et se regarda dans le miroir. Il avait l’air épuisé par le manque de sommeil et pourtant, il essayait de se reprendre du mieux qu’il pouvait.
… Tout allait bien. Il suffisait d’agir normalement et tout irait bien. Une fois la douche terminée, il pourrait enfin retourner dans sa chambre et attendre que le plombier répare le tuyau… Il serait enfin sorti de cette situation embarrassante.
L’homme qui se fixait prit une grande inspiration et termina rapidement sa toilette. Mais une fois qu’il sortit de la salle de bain, Kongpob, qui s’habillait, demanda :
— Tu as faim ? Je t’ai apporté du pain frit et du lait de soja ce matin. Tu peux manger avant de partir.
Il vit le lait de soja chaud et le pain sur la table. Il savait que Kongpob était sous la douche quand il s’était réveillé, donc cela signifiait que le gars les avait achetés encore plus tôt. En d’autres termes, le type avait dû se lever très tôt pour avoir assez de temps pour aller au marché. Il voulait partir tout de suite, mais s’il ne prenait pas le petit-déjeuner, cela blesserait son hôte qui s’était donné beaucoup de mal pour lui. Il aurait l’air bizarre, en plus.
… De toute façon… Ce n’était qu’un repas léger. Ne t’en fais pas pour ça.
Alors Arthit changea d’avis et s’avança pour prendre le sachet de lait de soja chaud aromatisé et chercha quelque chose.
— Où se trouvent les verres ?
— Sur l’étagère près du frigo. Je vais en chercher un pour toi.
Kongpob se porta volontaire, marchant et prenant un verre sur l’étagère, et le tendit à l’homme qui enlevait l’élastique du sac.
— Voilà, P’Arthit.
Alors qu’il tendait la main vers le verre, Kongpob tendit aussi la sienne pour le lui donner et ainsi leurs mains entrèrent en contact.
… Avec juste un petit toucher, Arthit sursauta et laissa tomber ce qu’ils tenaient. Kongpob tenait toujours le verre mais le sac de lait de soja dans sa main droite tomba sur le sol et se rompit.
— Merde ! Je suis désolé. Je vais nettoyer le sol.
Prit de panique, Arthit bafouilla ses excuses. Heureusement, le lait chaud n’avait pas taché la chemise de Kongpob mais il avait quand même fait de gros dégâts sur le sol. Pourtant, le jeune homme secoua la tête et dit calmement.
— Ce n’est pas grave. Tu peux ouvrir un nouveau sac, dit Kongpob avec désinvolture avant de se diriger vers le balcon pour prendre une serpillère et essuyer le sol.
Arthit ne pouvait que rester là et le regarder, sentant son trouble à l’intérieur parce qu’il venait juste de réaliser que peu importe combien il essayait…
Son cœur et son corps n’allaient pas bien.
TRRRRRRRR
Une sonnerie de téléphone rompit le silence. C’était l’iPhone de Kongpob, il arrêta de nettoyer le sol pour aller le chercher dans sa poche et répondit à l’appel, voyant un nom familier sur l’écran.
— Allô, maman ? Oh, oui. Je suis sur le point de partir. Je t’appellerai quand je serai là.
— Je vais y aller, maintenant.
Avant que Kongpob ait pu terminer sa conversation téléphonique, Arthit l'interrompit en prenant son sac et en se dirigeant vers la porte qu’il ouvrit sans attendre que l’autre personne ne lui dise au revoir. Kongpob l’appela mais c’était trop tard. Après avoir raccroché le téléphone et ouvert la porte pour regarder dans le couloir, il n’y avait plus aucune trace de l’autre homme.
Resté seul, il rentra dans la chambre et ferma la porte. Il aperçut le pain à côté du lait de soja, l’air solitaire car il n’avait pas été touché. Il s’était levé tôt pour les acheter pour Arthit mais son but n’avait pas été atteint.
La vérité était qu’il avait à peine dormi la nuit dernière. Son esprit revenait sans cesse sur ce qui n’avait pas été dit, ce qui n’avait pas été demandé, car il n’avait pas osé le dire à Arthit, de peur de perdre ce qu’il y avait entre eux. Bien qu’il l’ait chuchoté à l’autre homme pour se soulager, il avait eu du mal à se retenir lorsqu’il avait vu l’homme allongé à côté de lui.
… Certains sentiments, bien qu’évidents, étaient encore ambigus. Mais dans cette ambiguïté se cachait une certaine clarté.
C’était une clarté qui lui disait qu’Arthit était spécial pour lui. Mais il ne savait pas ce que ce quelqu’un de spécial avait à l’esprit depuis qu’il était parti sans un mot. Ou peut-être avait-il encore fait quelque chose qui avait contrarié Arthit.
Kongpob soupira, confus de la réponse à sa question. Il rassembla les sachets de lait de soja et de pain et alla les mettre au frigo pour le moment. Mais lorsqu’il ouvrit la porte, il trouva quelque chose qui avait été oublié.
… P’Arthit n’avait pas sorti les livres du frigo. S’il appelait maintenant, peut-être qu’Arthit serait encore en route vers son dortoir et qu’il pourrait revenir les chercher.
Une fois décidé, il saisit son téléphone et composa le numéro du type qu’il avait mis dans son répertoire. Mais après un long moment, même lorsque le signal fut coupé, il n’y eut aucune réponse. Il fronça les sourcils et essaya à nouveau mais obtint le même résultat. Il ne savait pas si le signal était mauvais ou si Arthit n’avait pas son téléphone sur lui, mais il n’eut pas beaucoup de temps pour y penser. Il devait assister à la fête d’anniversaire de sa nièce et il se dit qu'il les rendrait à Arthit le lundi.
Kongpob sortit donc les livres secs et les posa sur son bureau, heurtant le paquet cadeau. Il ne put s’empêcher d’esquisser un petit sourire en pensant à l’homme qui l’avait accompagné à contrecœur dans sa virée shopping.
… C’était bien. Les mots qu’il avait prononcés hier soir, disant ce qu’il ressentait pour Arthit, il ne pouvait pas les dire à voix haute maintenant. Mais il espérait qu’un jour, il pourrait dire exactement ce qu’il ressentait.
Un jour…
Malheureusement, les choses ne s’étaient pas passées ainsi.
Lorsque Kongpob essaya d’appeler Arthit le lundi matin, il n’eut aucune réponse. D’ailleurs le gars ne l’avait même pas rappelé, comme s’il avait complètement coupé le contact.
Est-ce qu’il allait bien ? Pourquoi Arthit était-il si silencieux ? Ou avait-il vraiment contrarié le senior cette fois-ci ? Mais à quel sujet ? Le fait qu’il ne lui ait pas dit que leurs chambres étaient en face l’une de l’autre, ou la question à laquelle il n’avait pas répondu ?
Bip ! Bip !
Kongpob sursauta au son de son iPhone qui vibrait. Il décrocha, espérant que ce serait la personne qu’il attendait, mais en fait, c’était un message Line de M.
— T’es où, bordel ?
— À la dernière table dans le bâtiment de la faculté.
Il tapa la réponse et balaya l’écran pour vérifier l’application Line qu’il utilisait rarement. Puis, ses yeux accrochèrent un nom dans la case “demande d’ami”.
Il ne savait pas si Arthit utilisait cette application de messagerie mais au moins, c’était un autre moyen qu’il pouvait utiliser pour le joindre. Il accepta donc rapidement la demande et saisit un message.
“P’Arthit, c’est Kongpob. Tu as laissé tes livres chez moi. Tu as du temps libre aujourd’hui pour que je puisse passer et te les donner ?”
Il appuya sur “Envoyer”, espérant que l’autre homme verrait son message. Puis, il leva les yeux, en entendant la voix de son ami qui le cherchait.
— Hé, qu’est-ce que tu fais ici, Kong !? Je te cherchais. Je peux copier tes devoirs de chimie ? Je ne les ai pas faits. La nuit dernière, j’ai été attaqué à Dota ! J’en ai tellement marre ! grommela M comme le ferait tout joueur et il était habitué à ce comportement depuis leurs années de lycée.
Alors, il sortit son devoir de chimie et le posa sur la table pendant que M continuait à parler des mises à jour du matin.
— Au fait, je suis tombé sur P’Arthit. Je ne l’ai pas reconnu au début. Il était beau avec une nouvelle coupe de cheveux et les filles de l’équipe de May le reluquaient.
Kongpob se figea alors qu’il rerangeait le devoir de chimie. Il leva les yeux et demanda rapidement.
— Où est-ce que tu l’as vu ?
— Devant le parking des motos de la faculté.
— Je reviens tout de suite.
Kongpob se leva d’un bond, ignorant le regard confus de son ami. Il se dirigea vers l’avant du bâtiment de la faculté qui servait de parking pour les motos des étudiants. Regardant à gauche et à droite, il repéra un groupe de camarades du même département, discutant entre eux. Mais il ne vit pas l’homme qu’il cherchait. Alors qu’il s’approchait d’eux, une fille à lunettes leva les yeux et le vit. Elle salua son ami qui était étrangement en sueur et pressé.
— Pourquoi tu cours, Kong ? Il est encore tôt et tu es essoufflé.
— May, où est P’Arthit ?
— P’Arthit ? Il a dit qu’il avait un cours donc il est parti et est entré dans le bâtiment.
Il l’avait manqué de quelques minutes. Mais s’il suivait l’autre homme maintenant, il pourrait peut-être le rattraper. Il ne savait simplement pas dans quelle classe Arthit était et à quel étage.
Kongpob décida de prendre son iPhone pour passer un appel. La ligne ne cessa de sonner, sans réponse, comme la fois précédente. Il raccrocha et fit glisser l’écran vers l’application Line à laquelle il avait envoyé un message à Arthit.
L’état indiquait “Lu” et c’était tout.
Kongpob s’accrocha à son téléphone alors que l’émotion l’envahissait et le frappait en pleine poitrine.
Qu’est-ce que cela signifiait ? Arthit l’ignorait-il délibérément ? Il ne savait même pas pourquoi et pour quelles raisons. Il ne voulait pas que les choses se passent ainsi avant qu’il n’obtienne une explication sur la raison pour laquelle Arthit l’évitait.
La cantine était remplie d’étudiants pendant la pause déjeuner, mais la majorité d’entre eux étaient des étudiants en ingénierie, les plus nombreux sur le campus. On aurait presque pu l’appeler la cantine de la faculté d’ingénierie, occupée par ses étudiants, dont les bruyants bizuteurs de troisième année. Ils venaient de terminer leur cours et discutaient joyeusement en entrant dans la cantine. L’un d’entre eux avait l’air tellement sinistre que son copain dut prendre la parole.
— Arthit, Arthit ! Putain, tu m’entends ?
— Hein ?! Quoi ?
L’homme distrait sursauta et regarda son ami qui fronçait les sourcils.
— Mais qu’est-ce qui ne va pas chez toi ? Tu es bien silencieux depuis ce matin.
Knot voulait poser la question depuis qu’il avait remarqué l’air étrange de son ami lorsqu’il avait reçu un appel entrant. Au lieu de décrocher, Arthit avait coupé le son et utilisé le mode vibreur, laissant l’appel se terminer tout seul. Ensuite, il était resté assis là, l’air hébété et apathique, ne parlant pas du tout pendant tout le cours. Il savait que quelque chose n’allait pas chez son ami, mais ce dernier ne voulait pas parler de ses problèmes. Comme maintenant, il essayait d’éviter la question.
— Eh bien, je suis fatigué… Je suis resté debout trop tard pour regarder un match de football…
— Quel match ? Il n’y a pas eu de match en direct hier soir.
Knot le taquina en voyant comment Arthit, qui s’était fait prendre en flagrant délit, avait l’air louche, ses globes oculaires dardant à gauche et à droite avant qu’il ne balaie la question d’un revers de main.
— Ce ne sont pas tes affaires. Je suis affamé. Qu’est-ce qu’on a ici ?
Arthit s’avança, fit semblant de chercher un magasin de nourriture pour dissimuler ses mensonges.
… Il avait sommeil, c’était vrai, mais pas parce qu’il était resté debout pour un match de football. C’était parce qu’il n’avait pas pu dormir correctement pendant deux nuits consécutives.
Il était retourné dans son dortoir la veille parce que le plombier avait déjà réparé le lavabo depuis 10 heures. Mais il avait réalisé qu’il avait laissé ses livres dans le réfrigérateur de la chambre de Kongpob. Il avait voulu se frapper pour cette négligence qui le mettait chaque fois dans le collimateur de Kongpob, incapable d’échapper à ce type. Comme il s’y était attendu, Kongpob l’avait appelé le soir. Il n’avait pas répondu à son téléphone, pour des raisons inconnues, même de lui. Ce dont il était certain, c’est qu’il n’était pas prêt à affronter l’autre homme maintenant.
Arthit soupira, essayant de chasser de son esprit ces lourds sentiments. Mais il s’arrêta lorsqu’il leva les yeux et vit une silhouette familière s’approcher de lui au loin.
Kongpob repéra le groupe d’étudiants de troisième année en chemise d’atelier de l’autre côté de la cantine et pensa qu’il avait également vu celui qu’il cherchait. Il n’en était pas sûr, mais il se dirigea tout de même vers le groupe. La distance et la foule lui firent cependant perdre Arthit alors, il se dirigea vers l’un des bizuteurs et le salua d’un wai.
— Bonjour, P’Knot. As-tu vu P’Arthit ?
— Il est juste derrière moi. Woah. Où est-il allé ? Vous avez vu Arthit ? Il était juste ici avec moi.
Knot était déconcerté. Il regarda autour de lui pour trouver son ami mais ne le trouva pas. Pourtant, Kongpob ne fut pas surpris. Il eut l’air de se sentir défié avant que son regard ne s’adoucisse et qu’il ne change de sujet.
— Tu as d’autres cours aujourd’hui ?
— Je vais avoir un atelier à 18 heures.
— Très bien, merci.
Sur ce, Kongpob partit, laissant Knot déconcerté par le comportement de son ami et celui de l’étudiant de première année. Pourtant, il commençait à rassembler des éléments.
Peut-être venait-il de comprendre pourquoi Arthit avait agi si bizarrement pendant toute la journée.
— Ok, étudiants. La classe est terminée.
Le professeur prononça les mots que tout le monde attendait. Arthit rangea ses papiers et son matériel et les fourra dans son sac quand il entendit son ami parler.
— Tu veux manger avec nous ?
— Je rentre à la maison. Je meurs d’envie de dormir.
Il donna une courte réponse à son ami. Il avait eu du mal à se concentrer sur les cours, aujourd’hui, ses yeux se fermaient et il avait failli se cogner la tête contre le bureau. Il n’avait pas envie de traîner et ne voulait que s’écrouler pour se débarrasser de ce sentiment de malaise écrasant.
Knot avait dû remarquer qu’il était mal en point, car il ne chercha pas à en savoir plus. Il sortit de la classe mais se retourna soudainement et dit quelque chose à son ami qui le suivait.
— Arthit, quelqu’un est là pour te voir.
Knot s’éloigna, laissant la place à l’homme qui avait un visiteur. À ce moment précis, Arthit voulut retourner dans la salle de classe, mais c’était trop tard. Celui qu’il avait évité toute la journée se matérialisa devant lui comme s’il attendait son aîné.
— P’Arthit.
Kongpob l’appela par son nom avec le même ton poli qu’à son habitude, mais Arthit ne savait pas pourquoi l’air était tendu, grave, surtout ces yeux qui le fixaient intensément avec une certaine lueur. Arthit fit semblant de détourner le regard, ne rencontrant pas les yeux de Kongpob, essayant d’agir normalement, et choisit des mots qui mettraient une distance entre eux.
— Pourquoi tu veux me voir ?
— Je suis ici pour te rendre tes livres.
Kongpob sortit de son sac les livres de la bibliothèque, le matériel d’étude et les bandes dessinées. Ils étaient tous complètement secs et ne présentaient aucun signe de gonflement. Arthit tendit la main pour les prendre et en finir. Mais une fois que sa main attrapa les livres, Kongpob ne les lâcha pas. Alors, il gronda.
— Lâche-les.
— Je vais te les donner, mais je dois d’abord te parler de quelque chose.
— Je n’ai rien à te dire.
Pas seulement le ton, mais même son geste était froid car Arthit ne voulait pas croiser son regard. Kongpob tremblait intérieurement, mais il essaya d’insister en utilisant un ton plus doux.
— P’Arthit…
— Si tu ne me les rends pas, je ne les prendrai pas.
Arthit craqua, perdant patience, et mit fin à la conversation. Il lâcha les livres et se retourna, ignorant le plus jeune homme, pour se diriger vers son ami.
Knot s’approcha, regardant le jeune homme de première année qui était figé sur place et il ne put s’empêcher de lui demander.
— Tu t’es battu avec ce type ?
— Non.
Ce ton dédaigneux était tout à fait à l’opposé de ce que Knot venait de voir et il laissa échapper un soupir résigné.
— Ouais, tu crois que je vais gober ça ? L’étudiant de première année te cherche depuis ce matin. Je vois bien qu’il a quelque chose à te dire. Alors pourquoi tu l’évites ?
La question le frappa en plein cœur. Il voulait répliquer à son ami mais il ne trouvait pas de réponse.
… C’était vrai. Chaque fois qu’il regardait Kongpob dans les yeux, il réalisait de plus en plus qu’il ne pouvait pas se comporter normalement. C’était étouffant alors il devait l’éviter et rester loin de lui autant que possible. C’était de Kongpob qu’il essayait de s’éloigner, et aussi des tremblements dans son cœur.
— Knot, tu voulais aller où ? Je viens avec toi.
Arthit changea soudainement d’avis, voyant la façon dont son ami le regardait sans rien dire.
Alors, il eut un long dîner avec Knot. Ils tombèrent sur Prem et décidèrent de se retrouver dans un autre endroit. Pas dans un bar mais dans un café où ils reluquèrent les filles et discutèrent de tout et de rien. C’est lorsque la pluie commença à tomber qu’ils se séparèrent.
Arthit roula en moto avec Knot sous la pluie et rentra à son dortoir à vingt-et-une heures. L’homme trempé boitilla jusqu’à sa chambre, épuisé, voulant prendre une douche pour chasser le froid. Il était sur le point de faire glisser la porte du balcon quand il se figea, en voyant une silhouette sur le balcon opposé à travers le rideau de pluie.
Arthit regarda à travers les rideaux. Il avait pensé que la personne qui se tenait de l’autre côté fumait, mais le jeune homme semblait perdu dans ses propres pensées, les yeux fixés sur la pluie, et il ne savait pas ce que Kongpob avait en tête.
… Il observa cette scène, ne sachant pas quoi faire alors que des sensations sans nom commençaient à s’installer dans son cœur.
P’Arthit devait être de retour.
Kongpob ne bougea pas d’un pouce, restant sur place et regardant le balcon éclairé en face de lui. Il ne savait pas quelle heure il était, ni ce qu’il devait faire ensuite. Son esprit tournait toujours autour de la même pensée qu’il ne voulait pas admettre.
… La peur de perdre P’Arthit.
Pourquoi n’avait-il pas remarqué que ce n’était pas seulement aujourd’hui ? C’était depuis dimanche, quand Arthit ne l’avait pas regardé et l’avait évité. Ou peut-être était-ce depuis samedi soir quand Arthit lui avait posé une question et qu’il n’avait pas répondu.
Peut-être qu’Arthit avait deviné la réponse et qu’il s’était énervé parce qu’il ne voulait pas reconnaître ses sentiments. Mais s’il se fâchait pour cette raison, il valait peut-être mieux lui avouer ses sentiments que de les garder à l’intérieur. Il ne pourrait pas supporter qu’Arthit continue de l’éviter comme ça alors qu’il n’avait toujours pas de réponse.
Le stress lui donna envie d’allumer une cigarette et de tirer une taffe, mais il se rappela avoir jeté le paquet. Il avait donné sa parole qu’il n’y toucherait plus. C’est pour cela qu’il agissait comme un acteur dans un clip vidéo sur ce balcon… à seulement 15 mètres de l’autre homme. Cela semblait si loin dans son esprit.
Kongpob soupira, détourna son regard de la lumière du balcon en face de lui.
Il devrait aller se laver. Peut-être qu’une douche froide lui ferait oublier son anxiété. Il se retourna vers sa chambre quand son iPhone dans sa poche vibra. Dès qu’il vit le nom sur l’écran, ses yeux s’écarquillèrent, incrédules, et il appuya rapidement sur le bouton pour décrocher et prononcer le nom de l’homme qui l’avait évité toute la journée.
— P’Arthit..
— Tu peux rendre les livres à la bibliothèque pour moi ? Tu peux garder les bandes dessinées. Je vais payer l’amende. C’est tout.
L’ordre était bref et Kongpob parla rapidement avant que l’autre homme ne raccroche.
— Attends ! Tu es en colère contre moi ?
— Non.
— Dans ce cas, pourquoi tu ne m’as pas parlé ? Tu es en colère contre moi parce que ce jour-là je n’ai pas répondu à ta question ?
Ces questions directes restèrent sans réponse, seul le bruit de la pluie frappant le sol. La tension régnait à nouveau entre eux. Il savait qu’il était sur le point de mettre leur relation en péril, mais à cet instant précis, il ne s’en souciait plus.
— Si tu veux vraiment connaître la réponse, je vais te la dire.
Kongpob regarda droit vers l’autre côté, espérant que ses mots atteindraient cette personne.
— Je ne sais pas quand ça a commencé, je ne sais pas comment ça a commencé. Tu es un homme et je suis un homme. Mais je ne peux pas arrêter mes sentiments.
Tout se figea, tout comme son souffle. Puis, il prononça les mots qui décrivaient le mieux ses sentiments.
— P’Arthit… Je voulais te dire depuis longtemps… que je…
Clic.
Le signal sonore interrompit le message incomplet. Kongpob regarda son iPhone et essaya d’appeler à nouveau, mais il entendit le signal et il fut à nouveau coupé. Il passa un autre appel, mais cette fois, il tomba directement sur la messagerie. L’autre homme avait éteint son téléphone.
… Il s’agissait d’un rejet froid… avant même qu’il ait pu avouer ses sentiments.
Alors, c’était fini entre Arthit et lui ?
Kongpob leva les yeux vers le balcon de l’autre côté de la rue dans la pluie trouble. C’était le reflet du vide dans sa poitrine.
La peur qu’il avait toujours eue était devenue vraie en une seconde. Il était en train de perdre Arthit.
Ce que Kongpob ne savait pas, c’était que la pluie qui se déversait sur le sol n’était pas très différente du torrent d’émotions qui déferlait dans le cœur d’Arthit.
Derrière le balcon de l’autre côté, Arthit s’était effondré sur le sol, complètement vidé, laissant le téléphone qu’il avait éteint sur le côté.
Il savait ce que Kongpob était sur le point de dire, mais il ne voulait pas l’entendre maintenant. Pas quand il n’était pas prêt à affronter le jeune homme et surtout quand il ne pouvait pas répondre à lui-même si…
S’il avait aussi des sentiments pour Kongpob. | | Messages : 553
Date d'inscription : 13/07/2024
| Johanne Sam 7 Sep 2024 - 17:53 Règle n°25 Gardez la Distance Entre Vous et le Bizuteur TRRRRRRR !!
— Kongpob…
TRRRRRRR !!
— Kongpob !
TRRRRRR !!
— Ce putain de téléphone, Kongpob !
… Ce n’était pas seulement son ami qui le fixait mais tous les yeux étaient sur Kongpob. Ils étaient assis dans une bibliothèque tranquille où personne ne parlait mais le téléphone brisait le silence en sonnant sans cesse. Pire encore, le propriétaire du téléphone était assis là, perdu dans ses pensées, et M lui donna un coup de coude.
Kongpob chercha rapidement son téléphone dans son sac à dos. Une fois qu’il l’eut trouvé, le téléphone se tut, l’autre personne ayant raccroché. Il soupira, se leva et dit à son ami.
— Je vais passer un appel.
— Ouais, fais ça. T’es sûr que ça va, mec ? demanda M, inquiet.
À en juger par l’état de fatigue de la Lune de l’université, il semblait avoir été privé de sommeil. Peut-être qu’il avait été possédé et qu’il s’était porté volontaire pour toutes les missions de groupe - toute la paperasse et la présentation PowerPoint. C’était bien pour eux, mais le travail d’un groupe de sept n’était pas une mince affaire. Ils ne voulaient pas laisser le gars travailler seul pendant qu’ils profitaient de sa générosité, alors il avait traîné ses autres amis pour l’aider dans ses recherches. Pourtant, l’homme qui se jetait dans le travail semblait hébété et confus. Il n’était même pas conscient lorsque le téléphone avait sonné.
— Au fait, tu peux descendre prendre un café. Ça ne nous dérange pas.
— Je vais y aller avec lui.
— Non non, Tew. Tu restes ici. Tu as fini ta partie ?
Kongpob entendit M se plaindre à leur ami qui pleurnichait. Il quitta la table, sur laquelle se trouvaient de grandes piles de livres, après avoir passé presque deux heures avec eux, de 15h à 17h.
Il avait été très occupé ces derniers temps. En d’autres termes, il s’était plongé dans le travail pour ne plus penser à l’incident d’il y a trois jours. Pourtant, il lui semblait que cela faisait trois mois depuis ce jour où Arthit lui avait raccroché au nez avant qu’il n’ait pu exprimer ses sentiments. Même l’homme le plus stupide aurait su ce que ce geste signifiait.
P’Arthit ne voulait plus rien avoir à faire avec lui.
Ce n’était pas une surprise. Arthit était un homme, et c’était un homme qui ne penserait jamais à s’écarter de la norme. Mais après avoir rencontré Arthit, quelque chose de spécial s’était produit, se formant à l’intérieur et le rendant confus. Une chose dont il était certain, c’est que… le lien qu’il ressentait pour Arthit était plus que fraternel.
… Il voyait Arthit plus que comme un frère. C’était plus que ça et plus que ce qu’il avait ressenti pour quiconque.
Il voulait être près de l’autre, il voulait prendre soin de lui. Il était toujours amusé de voir comment Arthit était si naturel, sans prétention. Et ça l'avait profondément blessé de voir la façon dont Arthit l’évitait. C’était comme maintenant… quand il s’était dit que tout allait bien, mais en fait, il n’avait pas dormi de la nuit. Il avait l’air tellement mal en point que même son ami avait remarqué.
Bien qu’il essayait de s’empêcher de trop penser, une fois qu’il se perdait dans ses pensées, ses yeux erraient toujours de l’autre côté du balcon. Cela lui donnait envie de ne pas revenir dans sa chambre. Chaque fois qu’il regardait son téléphone, son cœur se serrait et il devait le jeter dans son sac à dos. C’était la raison pour laquelle il n’avait pas pu répondre au téléphone à temps.
Kongpob prit son téléphone et fit défiler la liste des noms. Il ne sortit pas mais s’arrêta dans les escaliers. Il trouva la liste du dernier appel entrant et vit le nom de P’Ple, son mentor de code de deuxième année. Il ne fallut pas longtemps pour qu’elle décroche le téléphone.
— Bonjour. P’Ple. Je suis désolé de ne pas avoir répondu à ton appel.
— C’est pas grave. J’appelle juste pour demander quelque chose. Le truc c’est… tu viens avec moi au mariage de P’Tum et P’Fon ce dimanche ? Je viendrai te chercher sur le campus. Il y aura P’Noomnoon, O’Paak, P’Touch, et Nong Lin, aussi.
En entendant le nombre de passagers, Kongpob se demanda s’il y aurait assez de place dans la voiture. Mais il avait l’intention de venir à la cérémonie de mariage bien que n’ayant aucun détail, alors il accepta simplement.
— Si ce n’est pas un problème. Je vais faire le trajet avec toi.
— Je viendrai te chercher à 17 heures. Tu habites où ?
— Dortoir Chaiyapruek.
— Ok, on se voit dimanche.
Il raccrocha et se souvint qu’il ne s’était pas préparé pour le mariage. Il avait été occupé par le devoir et maintenant il y avait une chose de plus dont il devait s’occuper. C’était épuisant.
Kongpob se frotta le visage pour se débarrasser de la fatigue. Peut-être allait-il prendre une tasse de café à la cafétéria en bas, comme M l’avait suggéré. Avant qu’il ne puisse le faire, il aperçut quelqu’un qui descendait les escaliers du quatrième étage et le salua d’un wai.
— P’Knot, bonsoir.
— Bonsoir.
Knot avait l’habitude de faire un autre wai en réponse lorsqu’on le saluait. Il était occupé à regarder les noms des livres qu’il portait. Quand il réalisa que c’était le première année qu’il connaissait bien, il ne dit rien de plus mais se prépara à partir. Mais Kongpob l’arrêta.
— Attends, P’Knot. J’ai besoin de ton aide pour quelque chose, si tu veux bien. Tu peux attendre ici une seconde ?
Il ne dit pas oui mais le jeune homme de première année courut dans les escaliers menant au troisième étage de la bibliothèque. Un moment plus tard, il revint avec une pile de papier - des documents de cours - qu’il lui tendit avec une demande.
— Tu peux rendre ça à P’Arthit pour moi, s’il te plaît ?
Knot regarda les papiers devant lui. Ils ressemblaient aux documents pour la mécanique que les troisièmes années étudiaient. Il vit des gribouillages familiers dessus. S’il ne se trompait pas, c’était l’écriture de son pote. Il n’avait aucune idée de la façon dont les papiers avaient atterri chez le première année. Bien que ne connaissant pas la raison, il accepta d’aider.
— Très bien, je vais lui rendre.
— Merci.
Kongpob regarda Knot alors qu’il prenait les documents et continuait à descendre les escaliers. Il se retourna vers la bibliothèque pour rejoindre ses amis à la table.
Si Arthit ne voulait rien avoir à faire avec lui, alors il l’éviterait et ne lui parlerait pas non plus. Peut-être qu’Arthit se sentirait mieux. De plus, cela pourrait atténuer la douleur dans son cœur.
… Peut-être.
— Tu as mis combien dans l’enveloppe pour le mariage de P’Tum ? On peut partager ? Je suis un peu fauché à la fin du mois.
— J’ai déjà un cadeau pour lui.
— Woah. Tu as un cadeau pour lui ?! Pas étonnant que tu sois son préféré.
Arthit écoutait la façon dont ses amis discutaient, sans se soucier du fait qu’ils étaient dans la bibliothèque. En fait, on ne pouvait pas vraiment appeler ça une bibliothèque. Ils se trouvaient au coin café du rez-de-chaussée où les étudiants qui étudiaient dur pouvaient prendre un rafraîchissement.
Les troisièmes années étaient venus avec de nombreux livres, se préparant pour leur mini-test. Ils étaient installés à la plus grande table du coin, mais pas pour étudier ou réciter les textes. Ils avaient fini par changer de place pour discuter.
Même Arthit avait juste ouvert son livre et en était resté là. Il posa sa tête sur le livre, fatigué. Les cours étaient difficiles et il y avait une interrogation le lendemain. Il y avait aussi un mariage auquel il devait assister, et il n’arrivait pas à dormir la nuit, il devait rattraper un peu de sommeil pendant la journée.
La raison n’était rien d’autre qu’un problème de cœur non résolu. Même s’il avait essayé de l’ignorer, ça lui revenait sans cesse.
… Ce jour-là. Il se sentait coupable d’avoir soudainement raccroché au nez de Kongpob. Il avait peut-être blessé l’autre homme, mais qu’aurait-il pu faire dans cette situation ? Jusqu’à présent, il ne pouvait toujours pas répondre à la question de savoir s’il avait des sentiments pour Kongpob… quelqu’un qu’il ne connaissait que depuis trois mois.
En y réfléchissant, il réalisa qu’il ne connaissait pas grand-chose de Kongpob… un étudiant de première année de sa faculté qui le mettait toujours au défi, qui l’énervait, qui lui faisait des farces et qui créait toujours des problèmes. Même maintenant, il était la plus grande plaie qui créait le plus grand désordre et rendait Arthit fou !
Arthit cala sa tête entre ses mains. Plus il y pensait, plus il avait mal à la tête. Il la posa donc sur le bureau, voulant faire une autre sieste pour que son cerveau puisse faire une pause, mais quelqu’un lui tapa dessus pour qu’il ouvre les yeux.
— Arthit, prends ça. C’est à toi.
Il vit le gros tas de papier que Knot lui tendait. D’après les lettres qu’il voyait de cet angle, il pouvait dire que c’était les cours de dynamique qui avaient été trempés et mis au réfrigérateur pour sécher. Il les avait laissés là-bas mais maintenant qu’ils se matérialisaient devant ses yeux, il se redressa d’un coup.
— Tu as trouvé ça où ?
Il savait que c’était une question stupide mais il la posa quand même et tendit le bras pour prendre les papiers. Ils avaient l’air bien, sans gonflement. Puis il obtint la réponse qu’il attendait.
— Ça vient de Kongpob. Il m’a demandé de te les rendre. Comment ça se fait qu’il ait tes documents ?
— Rien. Ça n’a pas d’importance, marmonna Arthit, en regardant les papiers dans sa main.
… Oui, ça n’avait pas d’importance qu’il ait laissé ses documents.
Ce qui importait, c’était les actions de quelqu’un qui lui disaient encore comment l’autre homme se sentait.
Bien que Kongpob soit un fauteur de troubles, parfois il pouvait faire naître un sentiment de chaleur chez Arthit, d’une manière particulière… surtout par sa douceur et sa gentillesse qu’il n’avait jamais demandées. Comme ce qui s’était passé la veille. Il était allé payer l’amende au magasin de location de mangas, mais le propriétaire du magasin lui avait dit que quelqu’un avait déjà rapporté les livres et expliqué comment ils avaient été trempés. Donc ce type avait déjà racheté ces livres. Quant aux livres de la bibliothèque, il les avait retrouvés sur les étagères le mardi.
Même s’il essayait de garder ses distances et évitait de rencontrer Kongpob face à face, quelque chose avait poussé le gars dans son entourage. Et la chose la plus frustrante était… quelque chose en lui.
Plus il s’empêchait de penser au jeune homme, plus il réalisait…
Qu’il avait toujours ce type en tête.
Il était 19 heures.
Kongpob s’était séparé de ses amis à la bibliothèque, ayant terminé les recherches pour leur devoir. Ils devaient mémoriser le script et avaient convenu de se retrouver le lendemain matin pour la répétition. Kongpob s’était porté volontaire pour faire la présentation PowerPoint et ce soir, il devait faire quelques ajustements aux données. À en juger par le volume de travail, il devrait passer une nuit blanche.
Avant d’arriver au dortoir, il tourna sa moto pour s’arrêter dans un magasin d’alimentation voisin, espérant trouver quelque chose pour refaire le plein d’énergie, en prévision de sa longue nuit à venir. Il voulait quelque chose qui le rafraîchisse et l’empêche de s’endormir.
Kongpob se dirigea vers le stand de smoothie qu’il fréquentait. Plus il s’approchait, plus il voyait à quel point c’était bondé, plus qu’à n’importe quel autre moment. C’était parce qu’il n’y avait qu’un seul employé qui travaillait aujourd’hui et il ne voyait pas l’assistant qu’il voyait souvent. Pourtant, la vendeuse l’invita à entrer dans sa boutique.
—Toi, qui viens d’arriver, écris ce que tu veux commander. Premier arrivé, premier servi. Cela va prendre du temps mais vous aurez tous vos boissons.
Il y avait des stylos et des papiers devant le kiosque, alors Kongpob en prit un. Il voulait commander un café glacé qu’il n’avait pas eu à midi. S’il l’avait maintenant, cela pourrait l’aider à se requinquer. Il était en train de noter sa commande quand quelque chose lui vint à l’esprit et le fit s’arrêter, hésitant. Il raya le café et écrivit autre chose à la place.
… Il était stupide mais pour lui, cela pouvait être la seule raison qui le ferait tenir pendant cette longue nuit.
Kongpob tendit le papier à la vendeuse qui le rangea parmi les autres commandes. Il s’éloigna du stand de smoothie, voulant trouver autre chose pour se débarrasser de sa faim.
Quelques minutes plus tard, quelqu’un se précipita vers le stand de smoothie. Il s’arrêta, fatigué, voyant que son repaire habituel avait déjà sept à huit personnes dans la file d’attente, comme si le magasin donnait des boissons gratuites. Cela n’allait pas l’arrêter, l’homme nommé Arthit, qui se fraya un chemin à travers les gens vers le propriétaire du stand et dit d’une manière amicale.
— P’Nid, je vais prendre comme d’habitude. Je reviens dans quelques minutes.
Pas besoin de noter la commande sur papier car Arthit était un client VIP. Elle savait ce qu’il prenait dès qu’elle voyait son visage. Il ne commandait qu’une seule et même boisson chaque jour. Ainsi, ils étaient devenus des connaissances, apprenant le nom de l’autre. Il savait même que le stand était bondé parce que son assistante avait pris un jour de congé pour rentrer chez elle dans l’arrière-pays.
Mais malgré son statut de VIP, il savait que P’Nid était inflexible sur son code de conduite “premier arrivé, premier servi”. Il n’était donc pas sûr du temps qu’il lui faudrait pour avoir sa boisson. Il trouverait juste quelque chose à manger à ramener au dortoir. Ce serait sa réserve d’énergie pour la longue lecture de ce soir et l’examen de demain. Bien qu’il ait passé toute la soirée à la bibliothèque, son cerveau avait absorbé si peu de choses.
Arthit s’arrêta à l’étal de Pad Thai, à l’étal de porc grillé avec du riz gluant, à l’étal de fruits frais et prit un sac de goyave. Il avait maintenant une bonne quantité de nourriture, alors il retourna au stand de smoothie, sachant qu’il pourrait être prêt d’une minute à l’autre.
Il y avait moins de clients, juste quelques personnes qui faisaient la queue. Il y alla donc et demanda sa commande.
— P’Nid, est-ce que mon pink milk…
Sa voix se tut quand ses yeux se posèrent sur quelqu’un à côté de lui. C’était celui qu’il avait évité mais voilà qu’ils se croisaient à nouveau… à l’improviste.
Kongpob s’arrêta également, ses yeux vacillèrent en voyant l’autre homme avant de devenir vides d’émotions. Le plus jeune homme regarda de nouveau le vendeur sans dire un mot de plus.
Arthit était silencieux, mal à l’aise. La dernière fois que Kongpob et lui s’étaient croisés, ça avait été plutôt mauvais. Il voulait s’éloigner mais la vendeuse prit la parole.
— Voici le pink milk.
Alors Arthit tendit la main pour prendre sa commande et ainsi pouvoir se sortir de cette situation difficile. Mais avant qu’il puisse prendre le gobelet, la vendeuse qui le tenait secoua rapidement la tête.
— Non, non, c’est pas le vôtre. C’est pour lui. Il était là en premier. J’étais sur le point de vous le dire mais vous étiez déjà parti. Je n’ai plus de sirop rouge et c’est le dernier gobelet. Tu peux prendre du lait glacé nature à la place ?
L’explication le prit de court et il se retourna pour regarder l’homme qui avait commandé sa boisson, incrédule. Kongpob fit comme si de rien n’était et dit à la vendeuse.
— C’est bon. Laissez-le prendre le pink milk. J’en commanderai la prochaine fois. Excusez-moi.
C’était un acte de bonté, donner son pink milk. L’homme se retourna alors et s’en alla, sans commander une autre boisson. Il ne regarda même pas l’homme qu’il laissa derrière lui.
C’est comme ça que Kongpob était, toujours à prendre soin des autres. Mais Arthit ne savait pas pourquoi ça semblait différent cette fois-ci.
… Il était étrangement froid et distant.
— Alors, celui-ci est à vous. C’est 15 bahts.
La voix le fit sursauter. Il tendit le bras pour prendre le gobelet et paya la boisson. Il retourna à son dortoir mais chaque pas lui semblait lourd… tout comme son esprit qui était encombré de tant de confusions.
… Eh bien, n’était-ce pas ce qu’il avait voulu ? N’était-ce pas ce qu’il avait pensé quand il avait voulu garder ses distances avec lui ? Plus de défi, plus de farce. Plus de trouble-fête qui lui tapait toujours sur les nerfs. Plus de sous-entendus qui le rendaient insomniaque la nuit.
… C’était la relation fraternelle entre un étudiant plus âgé et un plus jeune, comme cela aurait dû être.
C’était comme ça que tout était censé être.
Arthit souleva le gobelet de pink milk pour en prendre une gorgée. Le goût sur sa langue était le même que d’habitude, mais étonnamment, il était amer et pas aussi bon qu’avant.
Comment pourrait-il être délicieux quand tout devenait flou devant ses yeux ?
Il venait de réaliser que le pink milk qui contenait des larmes n’était pas du tout sucré. | | Messages : 942
Date d'inscription : 19/06/2024
| Néphély Sam 7 Sep 2024 - 17:53 Règle n°26 Laissez le Bizuteur décider Arthit se regarda dans le miroir.
Un pantalon noir et une chemise blanche. À première vue, on aurait dit qu’il s’habillait pour aller en classe. Mais avec une petite cravate rouge, il avait l’air habillé pour une bonne occasion puisque le code vestimentaire pour la cérémonie de mariage était “rouge”.
Il allait au mariage de Phi Tum et de Phi Fon. C’était un moment de célébration dont il devait être heureux pour eux puisqu’ils étaient tous les deux des aînés qui avaient pris soin de lui et qu’il respectait depuis toutes ces années.
Mais le reflet ne montrait que quelqu’un qui avait l’air épuisé et qui n’était pas prêt pour une fête.
… Il venait de terminer son examen le vendredi et avait passé tout le samedi à chercher une belle tenue pour le mariage. Il n’avait rien de rouge dans son armoire. Finalement, il n’avait qu’une seule cravate rouge mais au moins c’était mieux que rien. Arthit devait se coiffer pour cacher les cernes sous ses yeux et son corps fatigué, ayant trop de problèmes à résoudre au point d’en avoir mal à la tête.
Surtout avec le plus gros problème. Cela ne rendait pas seulement son esprit encombré mais son cœur lourd comme si quelque chose le pesait.
TRRRRRR !!
Le téléphone rompit le silence, incitant le gars à le décrocher. Il appuya sur l’écran pour répondre. C’était Knot qui était à l’autre bout du fil.
— Tu as fini ? Je t’attends en bas.
— Ouais, j’arrive tout de suite, dit Arthit avant de raccrocher et de soupirer, se sentant fatigué.
De toute façon… aujourd’hui était un jour favorable. Il ne devrait pas être déprimé, mais honorer les deux aînés qu’il aimait et respectait.
Il saisit donc sa veste sombre pour parfaire son look et se regarda dans le miroir. Il prit le cadeau, verrouilla la porte et descendit jusqu’à la place où la Camry noire de Knot l’attendait. Le conducteur avait même baissé la vitre pour que les passagers à l’intérieur puissent le siffler.
— Tu en as mis du temps à t’habiller, espèce de snob. Je pensais que tu étais une idole K-Pop de la télé.
— Ouais, si je suis une idole K-Pop, alors tu es un K-poop, crétin. Qu’est-ce qui t’a fait penser qu’une chemise rouge à col mandarin t’irait bien ? Tu ressembles à un foutu serveur.
Il rétorqua à l’homme grossier dans la voiture et aux autres bizuteurs. Ils avaient tous été entraînés à être méchants par Phi Tum. Même si Prem était d’un autre département, ils étaient devenus des amis proches parce qu’ils buvaient souvent avec Tum. Prem était aussi le photographe du jour et il avait trouvé une chemise rouge pour respecter le code vestimentaire. Il essaya de se justifier.
— Je n’ai pas réussi à trouver une chemise à temps ! Celle-ci date du nouvel an chinois.
Arthit haussa un sourcil. Il regarda le teint bronzé du visage de Prem - un look caractéristique d’un Sudiste, sans savoir quelle partie de lui portait un ADN chinois. Il était sur le point de lancer une autre réplique, mais l’homme au volant intervint.
— Combien de temps allez-vous rester là à discuter ? Monte dans la voiture, Arthit, ou on va être en retard.
Knot mit fin à la conversation et Arthit vient se rappela que ce n’était pas le moment de faire un ping-pong verbal.
Ils avaient encore un long chemin à faire, alors il marcha pour ouvrir la porte du côté du passager avant. Puis, la voiture se dirigea sur la route à travers le trafic dense du soir.
La voiture se gara finalement devant un hôtel de luxe près du pont Rama VIII sur le fleuve Chao Phraya alors que le soleil venait de se coucher.
La réception était décorée de roses rouges, conformément au thème, le rouge étant une couleur de bon augure. C’était aussi un véritable mariage de deux ingénieurs puisque de nombreux visages familiers étaient présents. La plupart étaient des anciens élèves et un mélange de différentes promotions du campus. Cela ressemblait presque à une fête de retrouvailles.
Les mariés accueillaient les invités à l’arche d’entrée. Arthit se dirigea vers eux et leur rendit hommage avec un wai.
— Phi. Félicitations !
Le marié, dans un costume blanc avec un nœud papillon rouge, était plus beau que jamais. Et la mariée, qui faisait déjà tourner les têtes, était radieuse et fascinante. Ils étaient encore les Phi des plus jeunes élèves, car dès qu’ils se retournèrent pour voir qui parlait, leurs visages s’illuminèrent d’un grand sourire.
— Hey ! I-0on ! Te voilà ! Viens ici. Vous êtes là aussi, bande de nazes ! Prenons une photo ensemble !
Ainsi, la bande de bizuteurs se rassembla pour poser devant l’appareil photo tandis que Prem appuyait sur l’obturateur. Ils faisaient tellement de clichés qu’un autre invité prit la parole.
— Salut, P’Tum, P’Fon.
— OMG. Mes protégés de code sont là ! s’exclama la mariée avec délectation, quittant l’entrée et se dirigeant vers ses protégés.
Le groupe était mené par Ple et Noomnoon qui portaient de superbes robes. Ensuite, il y avait Paak un quatrième année, Touch un troisième année, et les étudiants de première année à l’arrière, y compris Lin et Kongpob, qui était habillé d’un costume noir sur une chemise rouge et une cravate noire qui correspondait parfaitement au code vestimentaire et au thème. Bien que ressemblant à Arthit ou à d’autres invités, il était toujours aussi remarquable en tant que roi couronné de l’université et attirait l’attention des femmes. Même la mariée semblait fière de lui et demanda à ses juniors de se rassembler autour de l’arche.
— Kongpob, prends une photo avec moi. Tu peux t’éloigner, Tum ? Je vais prendre des photos avec mes protégés de code.
Le marié fut poussé hors du champ et resta en retrait, regardant le jeune homme de première année prendre des photos avec sa femme alors que les bizuteurs les huaient et les acclamaient. Prem prit une série de photos et appela le marié à se joindre à eux pour la dernière photo.
Puis, Tum réalisa quelque chose.
— Nous n’avons pas encore la photo de groupe des co-mentors et de leurs protégés. Venez, code 0062 et 0206. Prenons une photo ensemble.
Tum fit signe à ses protégés de se joindre aux 0062 sous l’arche de fleurs. Arthit, qui ne pouvait pas l’éviter, alla les rejoindre. Mais avec près de dix personnes, le photographe dut faire rentrer tout le monde dans le cadre.
— Tout le monde se rapproche.
Arthit fit un pas en avant et capta l’odeur d’un léger parfum sur sa gauche. Il regarda et fut surpris en voyant qui était à côté de lui. L’autre homme réalisa également la même chose et s’arrêta. Puis, il détourna les yeux et regarda droit devant lui avec une expression vide dès que le photographe prit la parole.
— Prêt ? Faites-moi un grand sourire. Trois… deux… un.
Arthit essaya de sourire à l’appareil photo, mais il ne savait pas pourquoi son sourire semblait forcé. De nombreuses photos plus tard, son visage montrait à quel point il était heureux pour le couple, mais son esprit était tout à fait à l’opposé, car ses sentiments s’éveillaient à nouveau.
… Ce sentiment de distance même s’ils étaient l’un à côté de l’autre.
— Voilà, c’est fait.
Le photographe fit signe que la séance de photos était terminée et Kongpob s’éloigna rapidement, ne laissant qu’un faible parfum lorsqu’il se retourna pour partir. Cela donna un sentiment de vide et de solitude terrible à Arthit.
… Trop difficile à supporter.
— Kongpob.
Avant qu’il ne le réalise, Arthit avait rattrapé le jeune homme, le retenant par l’ourlet de son costume sombre. Mais comme s’il prenait conscience de son action, il lâcha prise rapidement. Mais c’était trop tard car l’autre se retourna et le regarda, surpris.
— Oui ?
L’homme qui avait été pris par surprise faisait maintenant face à Kongpob qui attendait la suite. Il fallait donc qu’il trouve quelque chose.
— Eh bien, euh, est-ce que tu vas bien ? bafouilla-t-il.
C’était la question la plus stupide, même aux oreilles d’Arthit, mais il ne pouvait pas trouver autre chose de mieux à dire ou comment entamer une conversation. Pourtant, l’autre homme hocha la tête
— Oui, ça va.
— Ouais, eh bien, euh … Le truc c’est que … la réception est agréable, pas vrai ?
— Oui, elle l’est.
— Mais, euh, le code vestimentaire rouge était assez difficile, tu ne crois pas ? Je n’ai réussi à trouver qu’une cravate rouge. Hahaha.
Son rire sec sonnait faux, même à ses oreilles. Sa maladresse attira sans doute l’attention de l’autre homme, car Kongpob laissa échapper un léger soupir, réalisant ce qu’Arthit essayait de faire.
— P’Arthit. Je sais que c’est difficile pour toi. Mais si tu veux forcer les choses, s’il te plaît, ne le fais pas.
Ces mots lui firent lever son regard vers Kongpob. Ces yeux le regardaient directement, sans se détourner comme les autres fois. C’était la première fois qu’il voyait clairement les sentiments dans ses yeux.
Ce qu’il y vit n’était pas de l’indifférence…
Ils étaient plutôt remplis de blessures, du sentiment de quelqu’un d’ignoré, et d’une profonde douleur intérieure. Tout comme ce que le gars lui avait dit dans un simple murmure mais qui était trop fort dans son esprit.
— Plus tu fais ça, plus ça me donne de faux espoirs.
La voix de l’autre homme retomba… et il se retourna pour partir alors qu’Arthit n’avait plus rien à lui dire pour le faire rester,
… Il ne voulait pas que Kongpob parte mais il n’avait aucune raison de le retenir. Ce qu’il comprenait maintenant, c’est qu’il n’était pas le seul à le ressentir.
Tout le tourment suffocant des sentiments sans nom entre eux.
— Hé ! Qu’est-ce que tu fous là, Arthit ? Va t’asseoir !
Knot vint chercher l’homme à l’air hébété pour le faire rentrer dans la salle. Kongpob avait disparu, et il se contenta de suivre son ami jusqu’à la table qui leur était réservée non loin de la scène. Après que les plats aient été servis un par un, la cérémonie proprement dite commença.
La vidéo de présentation fut projetée sur l’écran comme un prélude à une histoire d’amour, suivie par la marche des mariés de l’entrée vers la scène. Ensuite, ils reçurent des guirlandes de fleurs de la part de leurs parents et des bénédictions pour une longue vie de couple. Ensuite, un animateur demanda comment ils s’étaient rencontrés et comment ils étaient devenus un couple.
— Vous étiez amis avant, n’est-ce pas ? Comment êtes-vous tombés amoureux ?
— J’étais le chef bizuteur à l’époque. Fon était à la tête du service médical, j’ai dépassé les bornes et des étudiants de première année se sont évanouis. Fon me grondait toujours pour que j’y aille doucement avec eux parce que les médecins ne pouvaient pas suivre. Si je ne faisais pas ce qu’elle disait, elle comptait aller voir le chancelier. Penses-y… Tu es devenue infirmière parce que tu le voulais, mais tu m’as dénoncée. Je ne l’ai pas laissée faire, alors on s’est disputés.
Il y avait de nombreux témoins de l’histoire de Tum. Arthit, qui était en première année quand Tum était le chef du bizutage, se souvenait encore des difficultés qu’ils avaient rencontrées. Quant aux personnes qui s’évanouissaient, il y avait les vrais cas et ceux qui faisaient semblant d’être malades parce qu’ils voulaient faire une pause. En plus, là, ils seraient pris en charge par une belle infirmière.
— Mais, voilà. Finalement, je ne sais pas comment c’est arrivé. L’instant d’après, on ne pouvait plus vivre l’un sans l’autre.
Le marié prononça cette phrase finale en prenant la main de la mariée dans la sienne, rendant l’émotion palpable pour tous ceux qui ressentaient l’amour entre les deux personnes qui, d’amis, étaient devenues amants et partenaires dans la vie.
… C’était une différence frappante par rapport à ce que Kongpob et lui vivaient.
Arthit regarda la scène, se sentant vide à l’intérieur. Il était un chef bizuteur de troisième année. Kongpob était un étudiant de première année et tous deux étaient des hommes. Même s’il voulait lui parler comme avant, en tant que frères de faculté, il était impossible de revenir en arrière.
… Peut-être était-il trop tard maintenant.
— Puis-je inviter tout le monde à porter un toast en l’honneur des mariés !
La voix de l’hôte lui fit cesser sa rêverie. Arthit essaya d’ignorer son propre fardeau et ramena son esprit vers le mariage. Il se leva, leva son verre et se souvint qu’il avait un cadeau pour son mentor de code. Il avait prévu de le donner à son Phi après le mariage.
Il était presque 21 heures lorsque le joyeux mariage se termina enfin. La plupart des invités étaient rentrés chez eux, seuls les étudiants en ingénierie se préparaient au départ.
Ils quittèrent la salle de banquet et se dirigèrent vers l’arche où le couple faisait ses adieux aux invités. Mais il ne vit que la belle mariée sans le marié. Alors il s’approcha pour demander.
— Phi, où est Tum ?
— Il est aux toilettes.
Heureusement, les toilettes n’étaient pas trop loin du lieu de la cérémonie. Il y était donc allé et avait trouvé le marié en train de se laver les mains au lavabo. Une fois que Tum le vit, il se retourna.
— Hey. I-Oon.
— Phi, j’ai quelque chose pour toi, dit Arthit, en tendant une enveloppe rose.
L’autre homme eut l’air perplexe, pensant que c’était une enveloppe d’argent, mais quand il la prit et l’ouvrit, il n’y avait rien à l’intérieur sauf une belle carte avec des bénédictions et des mots de remerciement pour avoir pris soin du jeune homme pendant tout ce temps. Le lecteur savait qu’elle avait été écrite avec le cœur car il ressentait chaque mot de la carte.
— Merci, mais je n’arrive pas à croire que tu m’aies donné une carte.
Le marié ne put s’empêcher de taquiner le jeune homme. Il avait l’air si gentil, ce qui ne convenait pas au caractère de son protégé qu’il connaissait depuis longtemps. Arthit le reconnaissait lui-même.
— Je ne savais pas quoi t’offrir, mais quelqu’un m’a dit qu’une carte serait romantique.
— Hein ?! Romantique ? Quelle nana t’a raconté ça ? Tu sors avec quelqu’un ?
— Non, en fait… je ne sais pas ce qu’il se passe entre nous.
La voix portait une certaine lourdeur et il était évident que le jeune homme était troublé. Avant que Tum ne puisse demander, Arthit prit la parole en premier.
— Je peux te demander quelque chose ? Tu es heureux d’être avec P’Fon ?
— Je le suis vraiment ! Pourquoi cette question ?
— Eh bien. J’ai entendu dire que lorsqu’on est avec la bonne personne, on se sent bien et confortable. Mais si tu es avec quelqu’un et que tu n’es pas à l’aise, que tu as l’impression d’étouffer, alors ce n’est pas le bon, non ?
Cette logique donna un indice à son aîné. Tum laissa échapper un lourd soupir et son ton devint solennel, tout comme lorsqu’il avait attrapé et formé ce type pour qu’il devienne un chef bizuteur. Cette fois, il lui donnait une leçon de vie.
— I-Oon… Écoute attentivement. Quand je suis avec Fon, ce n’est pas seulement du bonheur que je ressens. Nous nous disputons beaucoup. Tu me crois ? Nous nous sommes disputés ce matin à propos du gâteau de mariage. Nous avons traversé des moments difficiles, tous les deux. Frustration, colère, joie, tristesse… Et je sais que nous allons en avoir encore plus à partir de maintenant. Mais j’ai choisi d’être avec elle, tu sais pourquoi ?
Arthit secoua la tête, sans répondre. Tum eut un léger sourire et donna la réponse qui frappa Arthit droit au cœur.
— … Parce que je n’ai jamais ressenti ça pour quelqu’un avant. Fon est la seule personne qui fait ressortir celui que je n’ai jamais été.
“Quelqu’un qui fait ressortir celui que tu n’as jamais été.”
… Quelqu’un qui fait que l’on se sent bien quand on prend soin l’un de l’autre.
… Quelqu’un qui lui a apporté la paix de l’esprit quand il était à côté de lui.
… Quelqu’un qui le mettait mal à l’aise quand il l’ignorait.
… Celui qui le faisait fondre en larmes quand il pensait à la perte de cette personne.
La réponse était évidente.
… Kongpob était cette personne.
Mais même après avoir obtenu sa réponse, quelque chose le dérangeait encore et il devait demander, confus.
— Mais… comment tu peux être si sûr ? … Et si notre relation ne se passe pas comme je le veux ?
— Et maintenant votre relation est comme tu voudrais qu’elle soit ?
La réponse fit complètement taire Arthit.
… Il savait que ce n’était pas le cas. Ce qui s’était passé aujourd’hui était clair : peu importe comment il essayait de revenir à la relation qu’ils avaient au début, elle en était à un point de non-retour. Elle ne pouvait pas revenir à ce qu’elle avait été il y a trois mois. C’était exactement ce que Phi Tum venait de dire.
— Tu sais quoi, I-Oon. Une fois que nous avons des sentiments pour quelqu’un, il est difficile de revenir à un statu quo. La seule chose dont tu as besoin est du temps. Mais tu vas le laisser passer sans rien faire ? Ou tu préfères utiliser ce temps pour faire ce que ton cœur te dit de faire ? Penses-y. Je dois retourner voir les invités. Bonne chance, mon garçon !
Le plus âgé soutenait moralement son protégé et lui tapa dans le dos, s’apprêtant à quitter la salle de bain mais Arthit l’appela à nouveau.
— Attends, Phi.
— Bordel ! Quoi encore ?
Le marié se tourna vers son protégé, frustré par la curiosité du gars car il était pressé. Il resta quand même pour la troisième question.
— Qu’est-ce que je ressens pour l’autre personne ?
— Comment je pourrais le savoir ?! Tu dois le découvrir, mais n’utilise pas ton cerveau ! Utilise ton cœur. Et si tu n’y arrives pas, tant pis. Fais ce que tu veux ! C’est toi le chef bizuteur ! Ne te ridiculise pas !
Le rappel de son statut fit réfléchir le chef des bizuteurs. Le marié partit, et maintenant il était seul face au silence.
… Le silence qui rendait son cœur si fort… comme l’écho de quelqu’un.
Arthit serra le poing et se précipita hors des toilettes. Il courut vers son groupe de copains et Prem, qui le repéra en premier, cria son nom.
— Arthit, tu étais où, bon sang ? On est sur le point de partir et on t’attend !
— Où sont les étudiants de première année ?
— Quels étudiants de première année ??
Prem fronça les sourcils en entendant la question, voyant que son ami avait l’air agité. Knot qui se tenait à proximité répondit, sachant de quoi son ami parlait.
— Si tu veux dire Kongpob, il est parti il y a un moment. Il doit être devant l’hôtel.
— J’ai compris. Merci, mec, répondit brièvement Arthit et il se prépara à sortir en courant.
Prem qui était toujours perdu, ne sachant pas ce qui venait de se passer, demanda à nouveau.
— Alors, on y va ?
— Rentre chez toi. Je m’en vais ! cria l’homme qui s’enfuyait, laissant derrière lui ses amis.
Ce qu’il devait faire maintenant, c’était courir… pour pouvoir le rattraper.
À partir de maintenant, il avait pris sa décision.
… il suivrait son propre cœur. | | Messages : 87
Date d'inscription : 01/07/2024
| amelyma Sam 7 Sep 2024 - 17:53 Règle n°27 Le Bizuteur Sera Toujours Là Pour Toi Arthit ne se souvenait plus de la dernière fois où il avait couru aussi vite qu'il le pouvait.
C'était peut-être il y a deux mois, lorsqu'il avait fait 54 tours du terrain de football sous la pluie après que l'aîné lui ait donné une punition. Il l'avait fait pour prouver sa dignité en tant que chef des bizuteurs à tous les étudiants de première année. Mais aujourd'hui, il courait pour se débarrasser de sa fierté. Tout ça à cause d'un étudiant de première année.
Arthit prit l'ascenseur pour descendre dans le hall et courut vers la porte vitrée qu'un groom ouvrait pour les invités. Il descendit les marches en courant vers le parking devant l'hôtel. Il était 21 heures. Même s'il ne voyait pas bien dans le noir, il ratissait tout de même l’extérieur du regard pour trouver cette personne.
Le parking était vide. Personne ne l'attendait là.
Il se dit qu'il allait trouver Kongpob sur le campus demain matin et mettre les choses au clair. Il avait le numéro de téléphone du type, mais au fond de lui, il avait peur de ne pas avoir d'autre chance. Quelque chose pouvait être endommagé au-delà de toute réparation si vous arriviez une milliseconde trop tard.
Cette pensée le bouleversa. Il resta là, perdu, au milieu du parking, même s'il avait envie de s'asseoir, épuisé par l'effort. Son esprit était également trop vidé de toute énergie pour savoir quoi faire ensuite.
Peut-être que Knot et la bande étaient dans le hall. Il devrait peut-être faire le trajet avec eux plutôt que de prendre un taxi et un bus pour retourner au dortoir par ses propres moyens. Il attrapa son téléphone, se sentant résigné, puis une voix familière s'éleva et fit s'arrêter son cœur.
— P'Arthit, que fais-tu ici ?
L'homme se retourna et regarda le plus jeune ; ses yeux s'agrandirent comme s'il ne pouvait pas croire ce qu'il voyait. L'homme qu'il pensait avoir abandonné était juste devant ses yeux, et il glissa dans un murmure.
— Kongpob, tu es encore là ?
Sa question mit Kongpob mal à l'aise, pensant qu'il contrariait ou agaçait à nouveau Arthit, car ce dernier ne voulait pas de lui ici. Pourtant, il dit la vérité.
— Oui, je ne veux pas rentrer à la maison tout de suite.
Tout de suite, ça voulait dire juste après le mariage. Kongpob était heureux pour les nouveaux mariés. Mais quand il se regardait, il avait un pincement au cœur.
Il savait qu'il était difficile de reconnaître ses sentiments. Sans parler de le dire publiquement, même lui ne savait pas où il en était. Il était quelque part entre les deux, et comment pouvait-il le demander à l'homme à qui il avait donné son cœur ? Mais cesser d'éprouver des sentiments pour lui était tout aussi impossible.
Il avait dit à P'Ple de partir sans lui parce qu'il ne voulait pas retourner au dortoir juste pour regarder le balcon d'en face, en étant seul. Il préférait rentrer à pied pour pouvoir passer du temps avec ses propres pensées.
Mais après avoir laissé P'Ple et ses camarades sur le parking, il avait aperçu Arthit qui sortait de l'hôtel en courant. L'homme regardait à gauche et à droite comme s'il cherchait quelqu'un. Au début, il avait pensé qu'Arthit rentrerait avec P'Knot dans sa voiture, mais l'homme était resté là. Il s'était inquiété et n'avait pas pu s'empêcher de vérifier comment allait son aîné.
Peut-être que cela dérangeait vraiment Arthit. Quand ils s'étaient rencontrés à l'intérieur, l'homme plus âgé semblait tendu quand il lui parlait. Kongpob pourrait l'avoir rebuté. C'était peut-être pour une raison totalement différente. Il ne voulait pas qu'Arthit se sente mal à l'aise en sa présence et soit gentil pour ne pas le blesser.
Ce n'était pas différent maintenant... Il aurait dû réfléchir à deux fois avant de s'approcher pour parler à l'homme plus âgé. Le bizuteur en chef resta là, laissant le silence les envelopper. Réalisant qu'il avait fait une erreur, il ferait mieux de partir.
Kongpob soupira doucement et se retourna pour partir sans dire un mot de plus. Avant qu'il ne bouge, Arthit prit la parole.
— Tu as faim ?
La question qui sortait de nulle part le fit réfléchir.
...Il avait un peu faim. Il n'avait presque rien mangé au banquet chinois du mariage. Ce qu'il ne comprenait pas, c'était pourquoi Arthit demandait. Peut-être que c'était comme quand l'autre homme lui avait demandé s'il allait bien. Il était si désemparé que ses actions... la façon dont il se comportait comme s'il s'en souciait... mettaient plus de feu à la flamme.
Kongpob voulait expliquer à l'autre homme comment cela l'affectait, mais avant qu'il puisse le faire. Arthit ajouta.
— J'ai faim. Tu peux venir avec moi ?
Sur ce, l'homme qui avait dit avoir faim se retourna et quitta le parking, laissant le gars perplexe à ce qu'il venait d'entendre. Cela ne signifiait qu'une chose : l'autre gars l'avait invité à se joindre à lui pour un dîner.
Bien qu'il ne comprenait pas les actions d'Arthit, Kongpob ne put s'empêcher de le suivre. Ils quittèrent la rue où se trouvait l'hôtel pour rejoindre la route principale où quelques voitures circulaient. Il leur fallut un certain temps avant d'atteindre un restaurant de nouilles sur le trottoir, où quelques tables étaient occupées par quelques clients.
Kongpob s'assit avec Arthit à une table. Ils attendirent que le vendeur de nouilles prenne leurs commandes. L'homme qui l'avait invité prit rapidement la parole.
— Pi, je voudrais un bol supplémentaire de nouilles épicées Tom Yum.
— Je prendrais des nouilles fines dans une soupe nature avec des boulettes de viande.
C'était son menu habituel. Il pensa qu'Arthit allait encore se moquer de lui, mais l'autre homme ne dit rien en desserrant sa cravate. Kongpob se souvint qu'ils étaient en costume et qu'ils mangeaient des nouilles sur le bord de la route. Pas étonnant que les gens les regardent bizarrement. Arthit, de son autre côté, n'y prêtait pas attention. Peut-être avait-il faim et avait-il simplement demandé à Kongpob de le rejoindre pour manger.
La confusion embrumait son cerveau, mais il ne savait pas comment l'évoquer. Il se contenta donc de rester assis et d'attendre les deux bols de nouilles que le serveur apportait à leur table.
Un bol de nouilles aux œufs avec des boulettes dans une soupe Tom Yum. Un autre bol de nouilles fines dans une soupe claire. Ce moment lui rappela le moment où il avait mangé pour la première fois des nouilles avec Arthit et où l'homme plus âgé avait échangé leurs bols, disant qu'il voulait que Kongpob expérimente de nouvelles saveurs. Plus important encore, c'était un bol qu'Arthit avait commandé juste pour lui.
...La raison était simple, mais elle avait ébranlé son coeur. Il était devenu encore plus vulnérable à cette personne.
Mais pas de déjà-vu cette fois-ci, car Arthit tira son bol de nouilles Tom Yum, y versa du piment haché et le dévora sans dire un mot.
Kongpob dut donc commencer à manger son propre repas, en prenant la boulette de viande - sa chose préférée dans le plat, avec les baguettes. Certaines personnes les gardaient pour la fin, mais lui aimait les manger avec d'autres ingrédients. La façon dont il mangeait devait attirer l'attention de l'autre homme car il demanda.
— Tu aimes les boulettes de viande ?
— Oui.
Kongpob hocha la tête et s'apprêtait à manger les nouilles quand une paire de baguettes fut projetée devant lui. Elles portaient une boulette de viande et la placèrent dans son bol.
— Voilà.
...Encore une fois. Combien de fois Arthit lui avait-il fait ça ?
Il agissait comme s'il s'en fichait, et Kongpob se disait de l'oublier. Mais alors il changeait de comportement et lui donnait de l'espoir. L'habitude d'Arthit d'être cruel pour être gentil n'était pas prête de disparaître, et il aurait dû s'y habituer. Pourtant, il était le même gars stupide qui imaginait des choses et finissait par être blessé.
... Blessé par ce vague faux espoir.
— P'Arthit, pourquoi me fais-tu ça ?
— Faire quoi ?
— Tu ne sais vraiment pas, ou tu fais semblant de ne pas savoir ?
La main qui tenait les baguettes s'était arrêtée mais avait recommencé à bouger alors qu'Arthit laissait la question s'évanouir dans l'air. Il changea de sujet.
— Si tu ne manges pas tes nouilles, elles vont devenir collantes.
Kongpob regarda l'homme qui esquivait sa question et se concentra sur ses nouilles, laissant Arthit tranquille. Cette action était une réponse en soi.
...P'Arthit savait ce qu'il voulait dire, mais il avait choisi de l'embrouiller. Parfois, Arthit le laissait s'approcher puis le repoussait. Maintenant, il ne savait plus où il en était et il n'y avait qu'une seule personne qui pouvait lui donner la réponse.
Il voulait savoir ce qu'il y avait dans l'esprit d'Arthit.
Il était inutile de le pousser car l'autre homme ne l'écouterait pas de toute façon. Kongpob décida de laisser tomber le sujet et continua de manger. Quand ils furent tous deux rassasiés, ils payèrent leur propre bol. Arthit se leva de table et l'emmena loin du restaurant. Il pensait que le bizuteur prendrait un bus ou un taxi, mais au lieu de cela...
Arthit marchait, et lui le suivait tranquillement. Il ne savait pas combien de temps ils avaient marché, mais la prochaine chose qu'il vit fut le pont Rama VIll, brillamment éclairé dans le ciel sombre de Bangkok.
Arthit continuait à avancer, en marchant sur le pont. À leur gauche se trouvait le fleuve Chao Phraya et à droite, une route où passaient de temps en temps des voitures. Le vent froid touchait leur peau. Heureusement, ils portaient tous les deux des vestes de costume, donc ils ne ressentaient pas trop le froid. Ils avaient marché longtemps avant d'atteindre le quart du pont.
C'était une marche silencieuse, sans paroles, leur donnant un moment pour réfléchir à la question et à ce qu'ils ressentaient vraiment.
Arthit fut le premier à trouver une réponse en s'arrêtant et en se tournant vers l'homme derrière lui... celui qui continuait à le suivre sans s'éloigner.
— N'es-tu pas fatigué ? demanda-t-il simplement.
Cela montrait à quel point l'autre gars s'inquiétait pour lui comme avant. Il secoua la tête.
— Non, je ne le suis pas.
Arthit ne changea pas de sujet cette fois-ci. Il regarda droit dans les yeux de Kongpob, le visage tendu, et demanda une fois de plus sur un ton plus solennel.
— Soyons honnêtes. N'es-tu pas fatigué de me suivre comme ça, de marcher avec moi sans savoir où je vais ni quand je vais m'arrêter ?
Kongpob marqua une pause, comme s'il comprenait que ce n'était pas une question par inquiétude, mais une question qui portait un autre sens. C'était la même chose que celle qu'il s'était posée d'innombrables fois.
...Etait-il prêt à marcher sur ce chemin avec une relation sans destination claire en vue, sans savoir où il finirait ? Un jour, quand il aurait franchi la ligne, serait-il capable de revenir en arrière ? Est-ce que cela pourrait le blesser encore plus et serait-il capable de le supporter ? Serait-il capable d'accepter la vérité si Arthit et lui devenaient un jour des étrangers ?
Ce n'était pas facile de rassembler son courage. Mais ce n'était pas facile non plus de laisser partir quelqu'un qui l'avait ébranlé jusqu'au plus profond de son être.
Leurs regards se croisèrent. Il se décida et dit fermement .
— Même si je ne sais pas dans quoi je m'engage ni jusqu'où cela ira, je veux marcher à tes côtés.
Enfin, il avait dit ce qu'il avait toujours voulu dire. Maintenant, il n'avait plus qu'à attendre que l'autre homme, devenu silencieux, parle. Arthit détourna les yeux et regarda la rivière, demandant une nouvelle fois confirmation.
— Tu sais que je suis un homme, et que tu es un homme, n'est-ce pas ?
— Oui.
— Tu sais que je suis ton aîné, et que tu es un junior.
— Oui.
Ils étaient tous les deux clairs sur leur identité de genre et leur statut. Arthit a toujours dit qu'il était fier de sa virilité et de son statut de chef bizuteur. Il pouvait trouver difficile d'accepter qu'un autre homme - un homme plus jeune - ait des sentiments pour lui. Il ne pouvait pas s'en empêcher, et si Arthit était rebuté et disait non...
...Alors il devrait accepter cette décision.
Le cœur de Kongpob devint lourd, réalisant combien il était loin de son désir. Au moment où il pensait qu'Arthit allait couper les ponts, l'homme plus âgé demanda.
— Tu sais que j'aime le lait rose, n'est-ce pas ?
La dernière phrase insolite fit se lever les yeux de Kongpob tandis que l'autre homme se tournait vers lui et laissait échapper les mots comme s'ils avaient été enfermés en lui.
— Tu sais, parfois je peux être stupide. Je suis une tête brûlée qui aime crier et faire de grandes histoires pour de petites choses. Je me réveille tard, et j'aime ne rien faire. En sachant ça, peux-tu vraiment me prendre comme je suis ?
Kongpob était stupéfait. Il ne s'attendait pas à ce qu'Arthit se soit inquiété de la même chose. Ils voulaient tous deux quelqu'un qui puisse les accepter tels qu'ils étaient. Pour lui, la question ne se posait pas, car il en savait déjà beaucoup sur l'autre personne.
— Oui, je te prendrai comme tu es. Et pour P'Arthit ? Peux-tu me prendre comme je suis ?
Il demanda alors que l'espoir surgissait dans son cœur, mais les mots suivants le firent sombrer à nouveau.
— Je ne te connais même pas si bien que ça.
Pas étonnant qu'Arthit ait été hésitant. Cela ne faisait que trois mois qu'ils se connaissaient, et c'était trop peu. Avant qu'il ne puisse dire quoi que ce soit, Arthit donna la réponse.
— Mais je veux apprendre à mieux te connaître.
Des mots aussi simples étaient assez puissants pour faire écarquiller les yeux de Kongpob, incrédule, il dut demander.
— Que veux-tu dire ?
Tout à coup, Arthit le rapprocha en le tirant par la cravate et planta le plus doux des contacts sur ses lèvres.
...Le plus doux des baisers, mais il était gravé dans sa mémoire.
Cela dura une milliseconde, et l'autre homme recula en marmonnant quelque chose.
— C'est ma réponse.
Sur ce, Arthit s'enfuit vers la sortie du pont, laissant Kongpob qui commençait à comprendre quelque chose avec un grand sourire sur le visage. Il cria :
— Attends, P'Arthit. Je n'ai pas entendu ta réponse. Je peux en avoir une autre ?
— Bon sang, non !
Son cri fut sa seule réponse, mais Kongpob rit en accélérant le pas pour marcher aux côtés de l'autre homme. Il n'y eut pas de mots échangés entre eux alors qu'ils marchaient silencieusement ensemble, et le silence était comme un lien sans mots entre eux.
Au moins, ils savaient tous deux ce qu'ils étaient l'un pour l'autre et où ils en étaient dans cette relation.
... Ils étaient deux hommes qui "avaient l'autre à leurs côtés".
... Et c'était suffisant pour eux deux. | | Messages : 553
Date d'inscription : 13/07/2024
| Johanne Sam 7 Sep 2024 - 17:54 Règle n°28 Le Cœur du Nouveau Appartient au Bizuteur … Les jours passèrent.
Presque une semaine après le mariage de Fon et Tum, les choses commencèrent à revenir à la normale comme elles devraient l'être.
Pour Kongpob, c'était la saison des tests infernaux, des présentations de groupe, des devoirs et autres. Il n'en restait plus que trois avant l'examen final, suivi des vacances du semestre. C'était la moitié de la vie d'un étudiant de première année qui passait trop vite.
Après avoir terminé son déjeuner, Kongpob voulait rendre à la bibliothèque les livres qu'il avait empruntés pour le travail de groupe. Après cela, il voulait aller directement au dortoir, n'ayant pas de cours l'après-midi. Alors que ses amis se levaient pour déposer leurs assiettes sur le comptoir, M qui venait de raccrocher son téléphone se tourna vers lui.
— Kong, Wad vient de m'appeler pour me dire que les résultats des partiels étaient sortis. Ils sont sur le tableau à côté de l'ascenseur à la faculté.
Calcul 1 était connue comme la matière la plus difficile dont les notes sortaient le plus tard. Tous les étudiants de première année retenaient leur souffle pour connaître les résultats, y compris Kongpob. Même s'il avait réussi à terminer plus de la moitié du test, il ne pouvait s'empêcher d'être inquiet. Il n'y avait pas d'activités permettant de gagner des points : 50 % d’entre eux provenaient de l'examen intermédiaire et le reste de l'examen final. Ainsi, les résultats de l'examen intermédiaire détermineraient si un étudiant de première année obtiendrait un F à la fin.
Kongpob changea soudainement ses plans et retourna au bâtiment d'ingénierie avec ses copains. Ils se dirigèrent vers le tableau d'annonces à côté de l'ascenseur. Les gens se pressaient là pour voir les résultats et ils pouvaient à peine se faufiler. Alors, il laissa M, le plus petit, aller lire toutes les notes pour eux pendant qu'il attendait à proximité.
L'espace était exigu. Il ne bloquait pas seulement le chemin mais aussi l'ascenseur, rendant difficile l'entrée et la sortie. Quelqu'un finit par craquer et tonna à travers la foule.
— Que faites-vous ici ?!
Toutes les personnes présentes sursautèrent. En se retournant, ils virent l'homme pour lequel ils avaient dû se séparer alors que le groupe de troisième année en chemise d'atelier passait. Ils dégageaient tous l'énergie brute et impitoyable qui convient aux bizuteurs.
Surtout l'homme devant qui était l'ancien chef des bizuteurs. Bien qu'il soit rasé de près et qu'il ait les cheveux courts, ses yeux perçants imposaient le respect et la soumission… tout comme à l'époque du bizutage. Tous les étudiants de première année étaient intimidés, sauf un.
— Nous regardons les résultats de mi-trimestre en calcul.
Le héros qui portait le numéro 0062 fit un pas en avant, face au chef du bizutage. Pourtant, sa réponse n'aida pas, elle irrita Arthit qui cria encore plus fort.
— Alors pourquoi vous ne restez pas en rang ? Vous avez oublié la discipline que nous vous avons enseignée ? Vous voulez une autre leçon, n'est-ce pas ? Bien ! Les nouveaux, mettez-vous en rang !
Tout le monde fut stupéfait, en écoutant cet ordre inattendu. Même si tous les étudiants en génie industriel avaient pris l'habitude de se mettre en rang, ceux des autres départements étaient confus et échangeaient des regards perplexes. Avant que quelqu'un ne bouge, un homme à côté du chef du bizutage prit la parole et lui donna une tape dans le dos.
— Qu'est-ce que c'est que ça ? Tu as été possédé par le fantôme d'un chef bizuteur ? Regarde, tu les as effrayés.
— Eh bien, je, euh… suis habitué à ça. Je ne sais pas comment je dois leur parler, grommela Arthit à son ami.
Il voulait juste dire aux étudiants de première année de leur céder la place, mais il était encore habitué à son personnage de chef des bizuteurs. Alors, il avait utilisé ce ton de voix, ces mots et ces gestes comme une vieille habitude.
Lorsque les élèves de première année comprirent que ce n'était qu'un coup monté par le troisième année, ils poussèrent un soupir de soulagement. Néanmoins, l'ordre fut maintenu alors que la foule commençait à faire de la place pour d'autres personnes. L'un des étudiants de première année du département s'approcha de Kongpob devant et se plaignit.
— Mon Dieu, P'Arthit vient de nous faire une peur bleue. On a failli tomber à cause de ton ordre.
La taquinerie du nouveau venu fit éclater de rire les bizuteurs brutaux.
… C'était particulier. Si ça avait été au début du semestre, aucun première année n'aurait osé regarder les bizuteurs dans les yeux. Maintenant, ils pouvaient plaisanter et respecter leur séniorité en même temps.
— Alors, comment est votre note de calcul ?
Arthit jeta un coup d'œil au tableau d'annonces et changea de sujet.
— Nous avons le plus faible taux d'échec. Quelqu'un a même obtenu la meilleure note.
M répondit pour son ami après avoir traversé la foule et regardé la liste. La nouvelle suscita une exclamation de satisfaction de la part des étudiants de troisième année.
— Voilà comment vous avez prouvé que vous êtes nos frères et sœurs du département ! Je savais qu'ils passeraient parce que tu les as bien intimidés.
La conclusion de son ami fit froncer les sourcils à Arthit.
— Qu'est-ce que ça a à voir avec le bizutage ?
— Eh bien, s'ils ont réussi à faire face à un bizuteur en chef comme toi, ils pourront survivre à l'enfer après ça. Rien ne pourrait être pire que ce que tu leur as fait subir.
Ça sonnait comme un compliment détourné. Arthit était sur le point de répliquer, mais une autre voix intervint.
— Je pense que je voudrais essayer d'être un bizuteur, aussi.
Les seniors ne furent pas les seuls à être surpris, même ses amis le furent. Personne n'avait imaginé que quelqu'un voudrait occuper ce poste supérieur et impitoyable. Même le chef bizuteur lui-même demanda.
— Tu y as réfléchi ?
L'affirmation était aussi visible dans ces yeux déterminés, ressentie par tous ceux qui étaient là. Le même ami qui avait fait une observation tapota le dos d'Arthit, ému.
— Félicitations, Arthit. Tu as trouvé ton successeur de l'enfer.
Même si c'était une taquinerie, Arthit ne dit rien. C'était vrai. Il était temps de laisser la nouvelle génération prendre sa place. Si c'était Kongpob, il pouvait lui faire confiance pour maintenir la tradition et l'esprit.
Alors que tout le monde était touché par la fraternité et la camaraderie de ce moment-là, l'ambiance fut finalement rompue lorsque Knot, qui était resté silencieux, prit la parole avec un fait.
— Les gars, je viens de voir le professeur Suda entrer dans l'ascenseur.
— Merde ! Allons-y avant qu'elle ne verrouille la salle ! Merde !
La conversation s'interrompit totalement lorsque les bizuteurs se souvinrent qu'ils avaient un cours à suivre l'après-midi. Pas le temps pour l'ascenseur, il y avait de nombreux passagers qui attendaient en ligne. Courir jusqu'au troisième étage leur permettrait d'arriver à l'heure en cours.
Arthit était sur le point de sprinter à la suite de ses amis mais un homme lui tira le bras.
— Attends une seconde. P'Arthit…
L'homme plus âgé se tourna vers Kongpob qui se rapprochait. Il remarqua juste les scintillements dans ces yeux alors que l'homme plus jeune souriait et chuchotait juste pour qu'ils soient les seuls à pouvoir entendre.
— … Sois un bon garçon en classe.
Ce n'était rien d'extraordinaire, ces mots, mais ils firent battre le cœur d'Arthit et il repoussa son bras, le jeune homme le laissa partir facilement et il se dépêcha de suivre ses amis dans les escaliers.
… Ce jour-là, sur le pont Rama VIII, leur avait laissé beaucoup de souvenirs mémorables à tous les deux.
Pourtant, Kongpob et lui avaient maintenu leur statut quo en tant que senior et junior. Ils se donnaient de l'espace, n'envahissaient pas la vie privée de l'autre et ne parlaient pas au monde de leur relation. Ils passaient à peine du temps ensemble car ils étaient occupés par leurs études. De l'extérieur, on aurait dit qu'ils avaient laissé les choses revenir à la normale.
Pourtant, au fond de lui, Arthit savait que les choses changeaient petit à petit. Il n'y avait pas besoin de mettre une étiquette sur leur relation. Parfois, les petites choses ordinaires qui se produisaient…
étaient plus que “spéciales” pour eux.
… Et puis la journée prit fin.
Arthit retourna au dortoir en mode zombie après un long après-midi de cours et d'atelier qui s’était terminé à 18 heures. Son corps avait envie d'un lit douillet. Avant cela, il avait besoin de se nourrir au stand de nourriture qu'il fréquentait. Il alla commander une boisson dans son échoppe préférée, qui était bondée de clients comme d'habitude. Lorsque la vendeuse repéra son client VIP, elle le salua.
— Comme d'habitude pour toi, Arthit ?
— Hmm. Aujourd'hui, je vais prendre un café glacé. Je reviendrai le chercher plus tard, P'Nid.
Il ne savait pas ce qui l'avait inspiré à changer sa boisson habituelle. Peut-être était-ce son corps épuisé ou peut-être parce qu'il avait croisé quelqu'un cet après-midi-là.
Réalisant cela, Arthit secoua la tête pour se débarrasser de cette pensée stupide. Il n'était pas une fille dans un manga Shôjo… Il était sûrement en mauvaise posture, car il venait de réaliser à quel point Kongpob avait un effet sur lui.
Alors Arthit se précipita vers le stand de riz. Il attendit dix bonnes minutes avant que ce soit son tour d'avoir de la nourriture, et il paya pour la boîte de riz avec du poulet kraprao et un œuf frit. En retournant au stand de smoothie, il vit qu'il y avait moins de clients, et il alla demander.
— P'Nid, ma commande est-elle prê… ?
Il s'interrompit, s'arrêtant à mi-mot, alors que son regard accrochait quelqu'un qui attendait une boisson. Le nom lui échappa.
— Kongpob.
Le jeune homme se retourna, et un large sourire se dessina sur son visage. C'était la deuxième fois qu'ils se croisaient, comme si c'était le destin. Il salua rapidement l'autre.
— P'Arthit… tu es venu chercher à manger ?
— Oui.
Arthit acquiesça sèchement, jetant un coup d'œil au sac de nourriture dans la main de l'autre homme. Kongpob était également venu chercher de la nourriture. Et donc il continua la conversation.
— Eh bien, et ta note de calcul ?
— C'était acceptable.
Il dit que c'était acceptable mais en fait, il avait obtenu la deuxième meilleure note. Une partie de son succès venait d'Arthit qui lui avait parlé des examens de l'année précédente qu'il avait partagés avec ses camarades. Mais l'autre homme le prit différemment, car il semblait inquiet.
— Mais si tu sens que tu ne peux pas le faire, change simplement de faculté. Tu as dit que tu voulais faire de l'économie. Je dis que si c'est ton rêve, il n'y a pas de mal à le suivre maintenant.
Le conseil du chef du bizutage était à l'opposé de ce qu'il avait ressenti il y a quelques mois. Rétrospectivement, il comprenait finalement qu'il ne pouvait pas empêcher Kongpob de poursuivre sa passion, s'il voulait étudier une autre discipline, il n'avait pas le droit de retenir le jeune homme. Bien que ce soit dommage que ce ne soit pas l'ingénierie, il devait soutenir le choix de Kongpob, surtout si c'était quelque chose qu'il aimait.
Cependant, Kongpob secoua la tête au lieu d'accepter le conseil.
— Je peux faire de l'économie en master. Pour l'instant, je ne change pas. J'… aime ça ici.
Les mots “aime ça ici” étaient vagues. Mais les étincelles dans les yeux de Kongpob quand il le regardait rendaient le visage d'Arthit brûlant, au point qu'il dut détourner le regard. Les battements de son cœur échappaient à son contrôle et ils devenaient de plus en plus fréquents, il ne savait pas comment réagir. Heureusement, la vendeuse vint à son secours.
— Voilà ton pink milk, Nong Arthit.
La femme lui tendit la boisson pastel mais Arthit protesta.
— Je n'ai pas commandé ça, P'Nid. J'ai demandé un café glacé.
Ce fut au tour de la vendeuse d'être confuse. Elle vit un gobelet de lait rose parmi les commandes et demanda, déconcertée.
— Oh, alors qui a commandé ça ?
— C'est moi.
Kongpob leva la main et révéla son identité. Alors la vendeuse lui tendit le gobelet.
— Désolé, c'est ma faute. Je me suis trompée. D'habitude, vous commandez une boisson différente. Maintenant vous avez échangé les boissons ou quelque chose comme ça.
La taquinerie avec les gloussements fit que Kongpob et Arthit se regardèrent l'un l'autre et ils laissèrent tous deux échapper un rire. C'est vrai, ils avaient échangé les boissons comme la vendeuse l'avait remarqué.
… Ce n'était pas une personne qui affectait l'autre. Les deux s'acceptaient lentement l'un l'autre comme ils étaient.
Arthit attendit que P'Nid lui prépare la boisson tandis que Kongpob se tenait à ses côtés pour qu'ils puissent retourner ensemble au dortoir.
Sous l'éclairage de la rue, dans le ciel sombre, alors que les gens passaient, il ne leur faudrait pas longtemps pour atteindre le dortoir. Soudain, Arthit parla comme s'il venait de se souvenir de quelque chose.
— J'ai quelque chose à te donner. Tiens le gobelet pour moi.
Kongpob prit le gobelet de café d'Arthit tandis que l'autre homme ouvrait son portefeuille. Il prit quelque chose dans sa main, récupéra son café, et donna un ordre.
— Ouvre ta main.
Kongpob tendit sa main vers l'autre homme et un objet tomba dans sa paume.
… Le gear du département.
Le cœur de Kongpob sauta un battement, pensant qu'Arthit venait de rendre le gear qu'il lui avait donné. Mais en regardant de plus près sous la lumière, ce n'était pas son engrenage argenté, mais un engrenage marron. Le numéro de série sur celui-ci indiquait deux ans avant sa classe.
… le gear d'Arthit.
Kongpob leva rapidement le regard vers l'homme qui le fixait dans les yeux, déterminé, et lui confia la tâche la plus importante.
— Occupe-toi de ça pour moi.
Il avait entendu ces mots une fois lors du rituel de reconnaissance lorsqu'ils devaient gagner le drapeau de la classe. Il entendait maintenant ces précieux mots avec la signification la plus proche du cœur et répondit avec un grand sourire en donnant sa promesse.
— Je m'en occuperai de tout mon cœur.
Pendant les jours et les nuits qui allaient suivre…
Ils ne savaient pas ce que l'avenir leur réservait, mais ça allait. C'était bien qu'il n'y ait pas d'étiquette sur leur relation, pas de titre, tant qu'au fond d'eux, ils chérissaient leurs sentiments l'un pour l'autre. Qui se soucie des étiquettes, de toute façon ?
Mais s'il devait y avoir une étiquette, peut-être que leur histoire pourrait être décrite par un seul mot.
SOTUS
Story Of True Love Between US
Et c'était l'histoire d'amour d'un bizuteur et d'un étudiant de première année. | | Messages : 942
Date d'inscription : 19/06/2024
| Néphély Sam 7 Sep 2024 - 17:55 Chapitre Spécial 3 La première rencontre La vie de lycéen était passée en un clin d’œil.
Quand je rouvris à nouveau les yeux, j’étais sur le point de devenir un étudiant à l’université.
— Appelle-moi quand tu auras fini l’entretien, Kongpob.
— Je vais bien, maman. Tu n’es pas débordée à l’usine ?
Je protestais auprès d’elle car l’université dans laquelle je venais d’entrer ne se trouvait pas loin de chez moi. Pourtant, ma mère avait pris la peine de me conduire ici même si c’était complètement inutile. Mais elle avait insisté.
— Allez, je n’aurai pas beaucoup d’occasions de faire ça. Tu restes au dortoir, non ?
— Oui, maman.
Je hochai la tête. Même si j’avais dit que l’université n’était pas loin de chez moi, j’avais demandé à ma mère de vivre seul. Elle avait accepté cette demande, et ce fut le premier pas pour elle de me lâcher la main afin que je puisse faire l’expérience du vaste monde - un oisillon qui s’envole du nid. C’était dans la nature d’une maman oiseau de s’inquiéter, je l’avais parfaitement compris.
— Je t’appellerai quand j’aurai fini.
Je changeais d’avis et sortit de la voiture une fois arrivé à destination. Elle me fit un léger sourire, comme pour me remonter le moral, puis s’en alla tandis que je restais là, à regarder.
… Pour elle, peu importe mon âge, je serai toujours son petit garçon. Peut-être parce que j’étais le plus jeune de la famille, le seul fils qu’elle avait et qui venait d’entrer à l’université alors que mes deux sœurs aînées étaient diplômées. Elle s’occupait toujours de moi malgré son emploi du temps extrêmement chargé à l’usine.
Notre famille était un fabricant et un exportateur de résine plastique. Bien qu’elle n’ait rien d’énorme, elle était stable, avec des commandes qui augmentaient chaque année et un grand potentiel d’expansion future. Il était naturel que quelqu’un prenne la relève et c’est pourquoi j’avais choisi de faire des études d’ingénieur.
Je traversai les bâtiments et me dirigeai vers l’entretien de la faculté d’ingénierie. Une fois que je m’approchai, j’entendis le son de tambours et de chants provenant de sous le bâtiment où je me rendais. Je découvris rapidement la source de ce bruit.
Une douzaine d’étudiants en t-shirts blancs et pantalons de pêcheur rouges étaient rassemblés et chantaient l’hymne de la faculté. Ils ne se contentaient pas de chanter à l’unisson mais dansaient comme des fous, sans se fatiguer, sous le regard des parents. Certains étudiants étaient tirés pour se joindre à eux dans cette “cérémonie d’accueil des nouveaux étudiants” que toutes les universités pratiquaient.
… Je suis neutre par rapport à ces activités. Elles ne sont ni excitantes ni nouvelles pour moi, car j’avais déjà entendu parler de tels événements. Les nouvelles ne donnaient pas non plus une bonne image de cette “tradition”, surtout en ce qui concernait le “bizutage”.
Je n’avais jamais compris le but de “SOTUS”. C’était juste un mot que les seniors utilisaient pour justifier leur abus de pouvoir envers leurs camarades plus jeunes, prétendant que c’était une tradition qu’ils devaient préserver alors que personne n’en connaissait la véritable signification. Parfois, cet exercice du pouvoir devenait excessif et violent. La faculté d’ingénierie était particulièrement connue pour cette pratique, étant la plus impitoyable.
Lorsque je pensais devenir l’une des victimes de ce bizutage, je me sentais mal. Je détournais le regard de l’activité et me dirigeais vers la table d’inscription pour signer ma présence. Dès que je finis d’écrire mon nom, une voix se fit entendre derrière moi.
— Kong !
— M, quoi de neuf ?
M était mon ami du lycée. Nous n’étions pas proches mais nous étions dans le même groupe, donc nous n’étions pas vraiment des étrangers. Il sourit largement, en voyant quelqu’un qu’il connaissait. Pourtant, son sourire changea lorsqu’il se souvint de quelque chose et il demanda, l’air surpris.
— Tu t’es inscrit à ce cursus ? Tay m’a dit que tu allais faire de l’économie.
Ce fut à mon tour d’être surpris et silencieux. Ce n’était pas seulement Tay ou M qui le savaient. Tous les amis de mon groupe savaient que j’aimais les chiffres, à en juger par mes excellentes notes en mathématiques. Bien que je me sois bien débrouillé en chimie, en physique et en biologie, en dépassant les scores moyens, un homme excellerait dans ce qui le passionne. Ainsi, les gens choisissent souvent leur domaine d’études en fonction de leurs préférences. Sauf… quand il y avait d’autres raisons, et c’était mon cas.
— Je dois aider ma famille avec l’entreprise, donc l’ingénierie industrielle serait mieux pour nous.
… La famille était la principale raison dans mon cas.
L’activité de l’usine de granulés de plastique était en plein essor. Je n’étais pas étranger au mécanisme et au système de l’usine, mais ce que je savais ne pouvait pas être comparé aux connaissances sur l’ensemble du système industriel que j’étais sur le point d’apprendre pour pouvoir améliorer l’entreprise familiale. Je voulais aussi alléger leur fardeau quand ils me passeraient le flambeau.
Mais au fond de moi, je ne pouvais pas nier le fait qu’il était difficile de laisser partir mon rêve. Parfois, j’avais encore en tête que je ne savais pas si j’avais fait le bon choix.
M vit l’inquiétude sur mon visage et me tapa sur l’épaule pour me montrer son soutien.
— Il faut que tu réfléchisses bien, mec. Quatre ans, c’est long quand tu fais quelque chose que tu n’aimes pas. Pourquoi tu n’en parles pas à ta mère ? C’est ton avenir.
Le conseil de M me fit sombrer plus profondément dans mes propres pensées.
… Je sais que si je lui disais, elle ne m’arrêterait pas. En premier lieu, elle ne m’avait pas forcé à faire des études d’ingénieur. C’est moi qui avait choisi, lors de la procédure d’admission, aucune des quatre facultés n’incluait l’économie. J’avais peur que si j’étais admis, je n’aie pas assez de cran pour suivre ma résolution. Cette peur pourrait être le témoin flagrant que je ne suis pas prêt à passer quatre ans comme étudiant à la faculté d’ingénierie.
— Ceux d’entre vous qui viennent ici pour un entretien, une fois que vous avez fini de chanter, veuillez aller dans la salle d’attente.
La voix d’une étudiante plus âgée traversa mon esprit alors qu’elle appelait les étudiants sous le bâtiment à se rendre à l’étage supérieur afin qu’ils puissent être interviewés par ordre alphabétique. Mon nom commençait par Kor Kai, la première lettre de l’alphabet thaïlandais, et j’étais donc l’un des premiers à être interrogé. Alors je me retournai pour le dire à M qui se tenait là, à attendre.
— Montes en premier, je vais aux toilettes.
— Ok. Ne sois pas en retard.
M me regarda, inquiet, avant de monter à l’étage. Je m’éloignai du bâtiment, passant devant les élèves pressés de signer le registre de présence, et marchai paresseusement vers les toilettes, gagnant du temps. J’étais confus, debout à la croisée des chemins, ne sachant pas quelle direction prendre.
Les toilettes à l’extérieur du bâtiment de la faculté étaient calmes. Il n’y avait qu’un seul type qui se lavait les mains. J’ouvris donc le robinet du lavabo pour me laver les mains à mon tour, avec l’envie de me passer de l’eau sur le visage, en espérant que cela me permettrait d’y voir plus clair. Je poussais un gros soupir, me sentant toujours accablé, et je m’arrêtai lorsque l’homme à côté de moi me demanda .
— Tu es ici pour un entretien ?
Je me retournai et regardai le type qui venait de fermer le robinet. Il avait un regard perçant et intense, mais son visage rasé de près le faisait ressembler à quelqu’un de mon âge. Pourtant, le tee-shirt rouge et les lettres sur la poitrine, prononçant “We are Engineers”, indiquaient qu’il s’agissait d’une personne plus âgée que moi dans la faculté. Il devait faire partie de l’équipe d’accueil des nouveaux étudiants que j’avais vue un peu plus tôt.
— Oui.
Je répondis et l’autre homme hocha la tête.
— Ne t’en fais pas. Détends-toi et ne prends pas l’entretien trop au sérieux.
L’autre en avait conclu que ma nervosité était due à l’entretien. Je n’étais pas du tout stressé à ce sujet. Avant que je ne puisse lui expliquer, il reprit la parole.
— Quand je l’ai passé, les professeurs m’ont demandé si j’avais un animal de compagnie. Je leur ai dit que j’avais un Golden Retriever. Ils ont demandé le nom de l’animal, alors j’ai dit “Nok Yoong”. J’ai donné ce nom à mon chien lorsqu’il n’était qu’un chiot, parce qu’il avait plongé sa tête dans l’étang et mangé tous nos guppys. Ils ont ri et m’ont dit que j’étais accepté ! Puis ils m’ont dit d’attendre dehors… C’est tout.
Le type qui partageait son expérience s’esclaffa et entreprit de me donner un conseil.
— En fait, si tu as réussi les examens d’admission, tu peux te considérer comme admis. Cet entretien est juste un protocole pour s’assurer que tu vas étudier ici. Ne sois pas trop stressé.
J’étais encore perplexe en écoutant l’histoire que je n’avais pas demandée. J’avais compris qu’il voulait bien faire, qu’il voulait m’aider à me détendre. De l’extérieur, il ressemblait à quelqu’un de sévère, mais il était bien plus gentil que je ne l’avais imaginé au départ. C’était peut-être cette gentillesse qui me poussa à lui demander ce qui me troublait à l’intérieur.
— Euh, je peux te poser une question ? Pourquoi tu étudies l’ingénierie ici ?
— J’ai réussi l’examen donc je suis là.
La réponse franche ressemblait à une farce. Ça me fit changer d’avis. Je n’aurais pas dû attendre d’un étranger une solution à mon problème. Mais ma déception s’arrêta là lorsque l’homme commença les phrases suivantes qui formèrent un autre récit.
— Lorsque j’ai passé les examens, j’ai choisi mes études au hasard. Je ne voulais pas étudier l’ingénierie. Pour moi, c’était pareil, peu importe ce que j’étudiais et où.
Ces mots venaient de quelqu’un qui avait fait face à la même situation difficile que moi, alors, je lui demandai :
— Tu n’aimes pas l’ingénierie ?
L’autre gars secoua la tête et haussa les épaules.
— Pas vraiment. C’était un peu difficile au début. Mais au bout d’un moment, je m’y suis habitué. Je pense que l’environnement m’a aidé.
— L’environnement ?
— Comment sont les choses ici. Le campus. La faculté d’ingénierie. Les amis et les professeurs. Les seniors et les juniors. C’est chaleureux et accueillant. Comment le dire… bien. On se sent comme à la maison.
Cette perspective me fit réfléchir.
… Ça devait être vrai. Maintenant que j’avais décidé de rester dans une résidence universitaire, cet endroit allait devenir ma seconde maison. Quatre ans. C’était aussi court que long. Assez long pour apprendre de nouvelles choses et acquérir de nouvelles expériences.
L’environnement du campus ne me dérangeait pas. Il semblait convivial, peut-être à cause des activités que les étudiants plus âgés faisaient aujourd’hui. Ils s’occupaient de la surveillance et des activités récréatives. Bien que je ne comprenne pas le but de la cérémonie d’accueil des nouveaux étudiants, ce que je ressentais de leur part, c’est qu’ils avaient l’air ravis de nous accueillir au sein de la faculté.
— … mais j’ai ensuite réalisé que ce que l’on choisit d’étudier et l’endroit où on le fait ont de l’importance. Chaque endroit a son propre plus, en fonction de ce que l’on choisit.
La conclusion d’un homme expérimenté - du moins plus que moi - me sembla légitime et ne put être contestée.
… On en gagne et on en perd. Si je choisissais la réalité, je devais renoncer à mon rêve. Peut-être que certaines personnes pouvaient faire les deux en même temps. Cela prendrait du temps et il ne m’en restait plus beaucoup. Maintenant, je devais décider de la direction à prendre.
L’hésitation grandissante me fit peur et je ne pus m’empêcher de demander, confus.
— Donc tu penses que c’est bien si je choisis d’étudier l’ingénierie ici ?
— Eh bien. Je n’en sais rien. Tu pourrais ne pas aimer ça. Qui sait ce que l’avenir te réserve ?
Cette suggestion n’était pas du tout utile. Elle me rendit encore plus confus et hésitant. Mais oui, qui sait ce que l’avenir nous réserve ? Si je marche sur le chemin dont j’ai rêvé, il me mènera au genre de bonheur dont j’ai besoin, n’est-ce pas ?
Je soupirai et commençai à me pencher davantage vers l’économie, mais avant que je ne puisse rayer l’ingénierie de ma liste, l’autre homme poursuivit, et ce qu’il dit me surpris.
— Si je devais choisir à nouveau, je choisirais encore de faire de l’ingénierie ici parce que je m’y plais.
La réponse était simple mais différente, car son ton et ses yeux s’adoucirent, disant à quel point il “aime ça”. Je pouvais sentir qu’il le pensait vraiment sans aucune élaboration.
TRRRRRRR !!
La sonnerie du téléphone détourna son regard de moi alors qu’il décrochait son appel. Il semblait parler à un ami qui voulait le voir quelque part.
— Quoi de neuf, Knot… C’est quoi ce bordel ? Les gars, vous pouvez commencer sans le chef. QUOI ? Phi… Tum est ici ? Ok, je suis en chemin.
Le gars enfonça son téléphone dans sa poche, et fit un tour sur lui-même pour partir en vitesse. Mais je le retins.
— Attends ! Merci.
Je le lui dis pour avoir de bonnes manières, mais je pensais que ce senior était assez gentil pour me donner des conseils, même si on ne se connaissait pas. L’homme qui avait atteint la porte se retourna et haussa les sourcils, l’air déconcerté, avant de dire d’un ton léger.
— Pourquoi tu me remercies ? Tu es déjà mon junior. À plus tard.
Il me sourit avant de quitter les toilettes tandis que je regardais son T-shirt d’ingénieur. Une fois de plus, il avait fait une supposition sans me demander d’abord.
Je laissais échapper un léger soupir. Cette fois, ce n’était pas parce que je m’ennuyais, mais parce que je me sentais soulagé, comme si j’avais lâché quelque chose.
Je sortis donc des toilettes et retournai dans le couloir qui y menait. Je me dirigeais vers le bâtiment où les étudiants attendaient pour leur entretien. Dès que M me vit, il me demanda rapidement, en partie paniqué, en partie soulagé.
— Qu’est-ce qui t’a pris si longtemps ? C’est presque ton tour. Je pensais que tu t’étais enfui.
Je secouai la tête en m’asseyant à côté de lui, et répondis fermement.
— … Je ne fuirai pas. J’ai décidé d’étudier l’ingénierie.
— Ah bon ? Pourquoi ? demanda M, surpris.
Pas seulement lui, même moi j’étais surpris par ma décision rapide. Mais je ne ressentis aucune hésitation ou confusion à cause de la raison que je m’étais donné.
— Je pense… qu’un jour, j’aimerai être ici.
Je ne sais pas si c’était une décision irréfléchie. Mais si la vie sur le campus passait aussi vite que ma vie au lycée, je voulais emprunter ce nouveau chemin.
… Bien sûr, l’économie qui était mon rêve était toujours ma destination. Mais je pouvais peut-être faire un détour par l’ingénierie, ce serait bien. Peut-être que ce détour ne serait pas si mal que ça, alors quelqu’un m’avait déjà donné une réponse.
Malheureusement, j’avais oublié de lui demander son nom. Je n’étais pas sûr que l’on se reconnaîtrait la prochaine fois qu’on se rencontrerait. Il y avait des tonnes de gens sur le campus, mais bientôt je serai un étudiant de première année sur le même chemin qu’il avait emprunté auparavant. Donc j’étais certain qu’un jour nous nous retrouverions quelque part.
… Le sentiment de “bonheur” de se retrouver. | | Messages : 87
Date d'inscription : 01/07/2024
| amelyma Sam 7 Sep 2024 - 17:56 Chapitre Spécial 4.1 L'obtention de la chemise d'atelier, la journée d'appréciation des seniors et le jour où ils ont marché côte à côte — Pourquoi faites-vous du bruit ? Avez-vous oublié les règles des réunions ?!
… On dirait le bon vieux temps.
Même si c'était le deuxième semestre, les étudiants de première année en ingénierie industriel devaient toujours assister à la réunion dans la salle d'activités, comme au premier semestre. Cela semblait encore plus sinistre puisque l'orateur était “l'ancien chef des bizuteurs Arthit”.
Malgré le mot “ancien” et le fait qu'il soit rasé de près, ce qui ne lui donnait pas l'air aussi brutal qu'avant, ses yeux intenses et perçants les intimidaient toujours autant. Ses mots acerbes les firent taire pour qu'Arthit puisse aller à l'essentiel.
— Je ne le répéterai pas deux fois, alors soyez attentifs. Vous savez que dans deux semaines, nous allons avoir les Jeux de l'Ingénierie qui ont lieu tous les ans.
Les “Jeux de l'Ingénierie” étaient un autre nom des “Jeux Unis de l'Ingénierie” - un événement sportif qui renforçait les liens entre les étudiants en ingénierie puisqu'il y avait de nombreux départements dans la Faculté d'Ingénierie. Naturellement, l'événement sportif était un moyen facile de les unir, en particulier parmi les étudiants de première année sous la supervision des étudiants plus âgés. Cela permettait de créer un lien entre les frères et les sœurs du département.
… C'était un objectif sur le papier. La réalité était tout autre.
S'il s'agissait d'une “compétition”, alors la Faculté d'ingénierie était une plaque tournante pour les hyperactifs. Ces Jeux Unis de l'Ingénierie étaient le moyen de montrer leurs prouesses, et ils se créaient souvent plus d'ennemis que d'amis. La dignité du département était aussi importante que celle de la faculté. Personne ne voulait perdre et dans chaque département, les plus anciens utilisaient des tactiques psychologiques pour encourager les plus jeunes, comme le faisait Arthit en ce moment même avec son annonce ferme.
— Vous devez gagner tous les trophées !
… La salle entière tomba dans un silence stupéfait. Cet ordre, c'était plus facile à dire qu'à faire. Les élèves de première année commençaient à pâlir et leur cœur sombrait. Pourtant, le chef des bizuteurs commença à leur donner une motivation.
— Et si vous gagnez, je vous autoriserai à porter une "chemise d'atelier" brodée au nom de votre classe.
Les chemises d'atelier étaient le badge d'honneur des élèves ingénieurs, tout comme les engrenages. Elle est d'autant plus importante qu'ils peuvent la porter comme un uniforme spécial, ce qui leur confère plus de prestige et un côté "cool". Chaque département avait sa propre broderie avec le nom du département. Dans certaines universités, les couleurs des chemises pouvaient varier en fonction du département.
Dans cette université, toutes les chemises d'atelier étaient vert marine, avec l'emblème de l'université sur la poche droite de la poitrine et le nom de l'étudiant sur la gauche. La distinction résidait dans les différentes couleurs de fil, et pour l'ingénierie industrielle, les initiales IE (Industrial Engineering) étaient en bordeaux, suivies du numéro de la classe.
Bien que les uniformes et les chemises d'atelier suivent le règlement de l'université, les professeurs ont été indulgents. Ils ont laissé les étudiants s'occuper du style, car ils pouvaient commander les chemises auprès de la faculté ou trouver leurs propres tailleurs. Ils pouvaient obtenir celles qu'ils souhaitaient exactement, à l'exception du numéro de classe. Les élèves de première année ne l'auraient sur leur chemise qu'après avoir obtenu l'autorisation des élèves de terminale.
Mais l'essentiel n'était pas dans la chemise de l'atelier. L'enjeu était bien plus important.
— Mais si vous perdez, votre droit en tant que junior s'arrête ici.
Arthit lança son ultimatum froidement, tandis que les élèves de première année avaient les poils qui se hérissaient dans le dos, déglutissant bruyamment, sachant qu'il ne s'agissait pas d'une menace en l'air. Leur dignité en tant qu'étudiants du département et leur valeur étaient en jeu.
— J'espère que vous ne me décevrez pas.
Étant sous pression, la dernière phrase les fit sursauter, alors que les anciens bizuteurs de troisième année quittaient le hall. Il n'y avait pas d'équipe récréative pour les aider à se détendre comme avant, mais cela leur suffisait car les étudiants de première année soupiraient, soulagés. Certains commencèrent à parler de la situation, y compris Kongpob, alors que son ami prenait la parole.
— Qui peut bien faire ça ? Gagner la parade, la tribune, les pom-pom girls et tous les sports. Il a cru que j'étais Superman ou quelque chose comme ça ? Pourquoi ne m'a-t-il pas simplement demandé de voler ?
Tew se plaignit, lassé, et M répliqua, tout aussi lassé.
— S'il y avait eu une course de vol, il nous aurait ordonné de la gagner aussi. Le basket a suffi. Nous devons nous mesurer à Wad. Tu te souviens des Freshmen Games, Kong ? Il était très fort.
M se retourna pour demander à Kongpob qui faisait partie de l'équipe de basket et qui avait subi la fureur du capitaine Wad du département de chimie. Il savait que ce type était assez bon pour mener l'équipe d'ingénieurs à une victoire écrasante.
— Oui, je m'en souviens. Mais maintenant, je suis plus préoccupé par la parade, la tribune et les pom-pom girls.
Il n'y avait pas que le sport qui les préoccupait, il y avait aussi les autres compétitions. Bien que le génie industriel comptait le plus grand nombre d'étudiants, cela signifiait aussi plus de problèmes et de pression.
Il fallait trouver le concept de la parade, faire en sorte que la tribune soit unique en son genre, et s'occuper des pom-pom girls qui n'avaient que peu de temps pour s'entraîner. Il y avait aussi d'autres détails mineurs à régler.
— Je vais laisser le vice-président s'en charger.
M lui tapota gentiment l'épaule, mais il ne savait pas si c'était un encouragement ou une consolation.
La position dans laquelle il se trouvait le rendait encore plus troublé.
Kongpob avait été élu président par ses pairs à la fin du premier semestre. Mais il avait évité de le faire et insisté sur le fait que May était la plus compétente, bien qu'elle soit arrivée en deuxième position lors des votes. Elle le méritait, car elle participait toujours à toutes les activités et les aidait. Néanmoins, le titre de vice-président lui avait été attribué en raison de sa performance exceptionnelle lors du bizutage... et de son complexe du héros, comme quelqu'un l'avait mentionné.
Lorsqu'il pensa à ce 'quelqu'un', les yeux vifs et la voix sévère lui revinrent à l'esprit, et il ne put réprimer un sourire. L'image que l'autre homme avait montrée aujourd'hui était bien loin de ce qu'il était réellement....et Kongpob le savait.
… Ou peut-être devrait-il négocier avec lui ?
Arthit attendait son riz krapao accompagné d'un œuf au plat, le plat habituel qu'il mangeait souvent sans se poser de questions. Mais ce qui était différent maintenant, c'est qu'il sirotait le pink milk dans un espace public, sans se cacher de quiconque pourrait le voir.
Après le second semestre, il ne se souciait plus vraiment du regard des autres, comme cela avait été le cas pendant la période de bizutage. En partie parce qu'ils étaient maintenant proches et qu'il se détendait, laissant sa vie quotidienne reprendre son cours normal. Sauf qu'aujourd'hui, il devait remettre le masque de chef des bizuteurs, une tâche qui lui avait été confiée pour juger si les élèves de première année méritaient les chemises de l'atelier.
Il s'était d'abord inquiété que les jeunes ne soient pas intimidés par son avertissement, puisqu'il était rasé de près et qu'il n'avait pas de pilosité faciale pour avoir l'air d'un dur. Il leur avait même révélé à quel point les bizuteurs étaient fous. Heureusement, son ancien personnage de bizutage en chef avait laissé un souvenir impérissable et les avait effrayés. Les étudiants de première année semblaient aussi effrayés qu'au premier jour.
… Enfin pas tous, quand il y pensait.
Il y avait une personne qui n'avait jamais été intimidée par lui depuis le premier jour où ils s'étaient rencontrés jusqu'à aujourd'hui.
— P'Arthit, tu attends ton repas ?
Le plus âgé sursauta en entendant son nom sorti de nulle part. Le type qui l'avait salué était le même que celui qu'il avait en tête.
Kongpob portait encore son uniforme, peut-être venait-il de quitter la classe alors qu'il était près de 19h00. Le grand gaillard ne montrait aucun signe de fatigue - son expression et ses yeux s'illuminaient encore en le voyant. Ces yeux brillaient également d'une lueur particulière qui le poussa à répondre tout en regardant ailleurs.
— Oui, j'attends que la tante le fasse pour moi. Il y a beaucoup de monde.
Ce n'était pas difficile à voir même si Arthit ne l'avait pas précisé. La boutique était bondée et quelques clients attendaient à l'extérieur. Le chef devait être très occupé. Il avait un pink milk à la main et avait déjà fini la moitié de son verre, et il y avait encore quelques personnes devant lui. Un nouveau client qui viendrait d'arriver devrait attendre jusqu'à ce qu'il se transforme en pierre.
… Kongpob était là, il voulait aussi manger.
— Si tu ne commandes pas maintenant, il te faudra une éternité pour l'obtenir.
Arthit avertit le gars qui ne bougeait pas, voulant bien faire, mais l'autre homme secoua la tête.
— Non, j'ai dîné avec mes amis. Je passe juste prendre un café.
— Oh, alors vas-y.
Il acquiesça, mais Kongpob ne le laissa pas tranquille et lui apporta une précision.
— Le magasin de smoothies était plein à craquer. Je ne veux pas faire la queue. Si je dois attendre, je préfère attendre ici.
Cette dernière phrase était une allusion délibérée. Il n'était pas nécessaire d'être un génie pour comprendre sa véritable signification et les émotions qui se cachaient derrière ces mots.
Il savait pourquoi Kongpob n'avait jamais été intimidé par lui, le chef bizuteur. L'élève de première année prenait les choses au sérieux, bien sûr, mais pour des raisons différentes, et la gentillesse qu'il lui témoignait grandissait de jour en jour.
Leur "relation sans étiquette" s'était renforcée grâce à ce lien complexe. Cela ne le dérangeait pas que les choses aillent lentement. Au contraire, les routines quotidiennes qu'ils suivaient et la subtilité de Kongpob faisaient palpiter son cœur mieux que n'importe quel flirt direct.
… Laisser le lien se renforcer naturellement pouvait prendre du temps mais il pensait que chaque pas qu'ils feraient ensemble serait stable.
Arthit laissa donc Kongpob l'accompagner dans la file d'attente devant le restaurant. Une fois qu'il eut obtenu son riz krapao, la voix de Kongpob relança la conversation alors qu'ils marchaient ensemble vers le dortoir.
— P'Arthit, je peux te demander quelque chose ?
— Hmm. Qu'est-ce que c'est ?
Arthit haussa un sourcil en sirotant son pink milk, l'air détendu. L'autre homme qui avait soulevé le sujet sembla hésiter, avant de se décider et de demander.
— Ces Jeux de l'Ingénierie....Je ne pense pas que nous puissions remporter toutes les catégories. Tu ne penses pas que c'est difficile ?
Même si Kongpob et lui entretenaient de bonnes relations, cela ne signifiait pas que le plus jeune avait le droit de tirer sur la corde pour qu'il donne une marge de manœuvre aux nouveaux élèves.
La valeur de la chemise d'atelier n'était pas différente de celle des engrenages. Il fallait traverser des épreuves pour la gagner. Pour sa classe ou toutes celles qui l'ont précédée, il fallait tout donner pour en posséder une. Mais là, Kongpob avait eu le courage de lui demander d'y aller mollo avec eux ? Il portait atteinte à la dignité des élèves ingénieurs.
— Tu crois que ta classe n'est pas capable de le faire ?
L'insulte et le regard dur et froid d'Arthit les replongèrent dans l'époque du bizutage. La situation semblait plus tendue que l'après-midi, car le chef du bizutage était manifestement offensé.
Kongpob savait qu'il avait commis une erreur en provoquant Arthit. Mais il n'était pas surpris par cette réaction puisqu'il s'y attendait. En apprenant à se connaître, il avait découvert que malgré sa gentillesse, Arthit prenait le sujet de la dignité très au sérieux et qu'il ne se pliait jamais à la volonté de quiconque. La négociation avait échoué, mais il avait un plan B, transformant la crise en opportunité.
— On fait un pari ?
Arthit leva les yeux vers le jeune homme dont la démarche était devenue solennelle. Pourtant, ses yeux brillaient toujours d'une lueur étrange. Il comprit enfin ce que cela signifiait lorsque Kongpob poursuivit.
— Si je perds, je ferai une chose que tu me demanderas. Si je gagne, tu devras faire tout ce que je te demande.
C'était la même condition que lors des Freshman Games, rappelant à Arthit qu'il avait déjà perdu par le passé, ce qui donnait l'impression au bizuteur de se faire escroquer. Mais à bien y réfléchir, il n'avait rien à perdre. Ces jeux étaient plus difficiles que les précédents, alors il accepta.
— D'accord, mais vous devez gagner dans “toutes” les catégories.
Si l'autre homme osait évoquer les anciennes conditions, il riposterait avec cette tactique.
Par “toutes”, on entendait les sports, le défilé, le stand et les pom-pom girls. Kongpob avait peut-être remporté la couronne universitaire par pure chance, parce qu'il s'agissait d'un jeu individuel, mais ici, il devait se battre aux côtés de centaines de personnes. De nombreux facteurs entraient en ligne de compte. Les étudiants en ingénierie, quel que soit leur département, étaient tous hyperactifs car ils étaient intimidés par les aînés. Le combat s'annonçait rude.
Pourtant, Kongpob n'avait pas l'air d'être découragé et restait sur ses positions.
— Ne t'inquiète pas. Je gagnerai tout.
Le sourire confiant ramena Arthit à ses vieux souvenirs, se rappelant comment Kongpob avait réussi à tenir ses paroles. Il essayait de le nier mais au fond de lui, il pensait aussi que l'homme réussirait. Il devait admettre qu'il ne pouvait pas sous-estimer le jeune homme qui avait fait ses preuves à maintes reprises.
… Est-ce qu'il encourageait Kongpob ou quelque chose comme ça ? !
L'homme fronça les sourcils, frustré par sa propre indécision. Le coupable se trouvait juste à côté de lui et faisait toujours trembler son cœur de confusion. Il ne fallait pas continuer à parler, alors il accéléra le pas en direction du dortoir, non loin de là. Mais alors qu'il faisait un pas en avant, quelqu'un l'appela par derrière et lui attrapa le poignet.
— Attends. P'Arthit...
— Qu... quoi ?
Arthit se retourna rapidement, interloqué. L'endroit où ils se trouvaient était sombre mais il y avait encore des passants. Si Kongpob lui tenait la main comme ça, ça aurait l'air bizarre. L'autre homme ne le lâchait pas et le fixait intensément, lui demandant d'une voix ferme.
— Tu peux m'encourager ?
Hein ? … L'encourager ? Était-il fou de demander cela à quelqu'un contre qui il pariait ? Qui, sain d'esprit, lui en donnerait !
— Oublie ça. Tu n'entendras rien de ma part.
Arthit éleva la voix vers le gars qui tentait sa chance, essayant de se libérer de la main de fer. Mais l'homme qui avait été rejeté ne voulut pas céder et trouva rapidement une autre solution.
— Alors ne le dis pas.
Sans qu'il ne s'en rende compte, Arthit fut tiré par le poignet vers l'autre corps. Un contact doux se posa sur sa joue pendant une milliseconde avant de se retirer, laissant une légère chaleur sur sa peau. Arthit sentit son visage devenir brûlant lorsqu'il réalisa ce qui venait de se passer.
Kongpob venait de…
Arthit leva rapidement la tête et vit l'éclat de ses yeux et un sourire rusé avant que le jeune homme ne lui lâche la main, disant poliment.
— Merci pour ton soutien.
— Kongpob !!
Le gars qui s'était fait avoir cria, mais l'autre homme avait déjà disparu dans son dortoir, laissant cette grosse bombe à l'ancien chef bizuteur. Il voulut suivre le gars et le réduire en bouillie pour s'être moqué de lui dans un lieu public.
… Mais il ne le fit pas. Outre sa colère, d'autres sentiments faisaient battre son cœur de manière incontrôlée et lui ôtaient l'énergie de se venger de ce farceur.
Arthit soupira doucement, sa main se leva pour caresser sa joue gauche où le contact persistait toujours, s'infiltrant à l'intérieur.
Finalement, Kongpob n'avait jamais peur de lui. Pourtant, il pensait…
Qu'il était bon que Kongpob n'ait pas peur de lui.
— Alors P'Arthit ne sera vraiment pas tendre avec nous ?
May, la présidente de l'Ingénierie industrielle, conclut avec résignation lors de la réunion des premières années, après que Kongpob ait annoncé la mauvaise nouvelle à tout le monde. Personne ne s'attendait à ce que l'impitoyable chef des bizuteurs se transforme en saint une fois le bizutage terminé.
… Ce que Kongpob n'avait pas dit, c'est qu'il se jouait d'Arthit et qu'il le mettait encore plus en colère.
Il pensait arrêter de taquiner Arthit. Mais à chaque fois qu'ils se rencontraient, il ne pouvait pas s'empêcher de le faire. Ses sentiments pour l'autre homme devenaient de plus en plus profonds chaque jour, même s'il n'était pas sûr qu'Arthit ressente la même chose. Il prenait donc tout ce qu'il pouvait pour se rapprocher de lui, et ce souhait serait exaucé s'il gagnait ce pari. Les jeux de l'ingénierie, ce n'était donc pas seulement pour la chemise de l'atelier, mais aussi pour quelque chose d'autre.
Et il ne pouvait pas perdre !
Kongpob se replongea dans la réunion alors que May commençait.
— Le comité a annoncé le concept pour chaque département. Nous avons tous le même sujet.
Les détails de l'événement n'étaient pas différents de ceux du lycée - la parade, le stand ou les pom-pom girls. Chaque département pouvait s'exprimer à travers ces présentations, à moins qu'il n'y ait un thème, de sorte qu'il était plus facile pour le comité de donner des notes et d'être juste. Le concept de cette année sera…
— Jeunesse anti-drogue : L'université blanche unie pour lutter contre la drogue.
En entendant le concept, tout le monde voulut faire la grimace. Cela ressemblait plus à un sujet de dissertation qu'à un thème de jeux sportifs. Ils n'avaient aucune idée de la manière de créer des activités avec un concept aussi abstrait qui les empêchait de gagner, rendant le maillot de l'atelier plus difficile à atteindre.
Bien que la bataille ait été rude, les étudiants en première année en industrie se sont battus jusqu'au bout. Tous avaient réfléchi à la création d'un “thème” : les anges, les Amérindiens, les Mayas, les Égyptiens, le Moyen-Âge, les militaires, la forêt mythique d'Himmapan… Ils avaient discuté de tout et essayé de créer des activités avec un concept aussi abstrait que celui de la chemise d'atelier. Ils avaient discuté de tout et essayé de les intégrer dans le concept d'une “université blanche”.
Près de deux heures plus tard, leurs idées avaient commencé à se concrétiser. Mais la plupart avaient été rejetées par d'autres camarades, comme May qui avait suggéré de transformer une équipe d'encouragement en lettres ou en images.
— Si nous avons beaucoup de monde, cela peut paraître bien. Mais si on n'a pas assez de monde, ça risque de faire un bide.
— C'est vrai. Je crains qu'il n'y ait pas beaucoup de monde. Et maintenant, qu'est-ce qu'on fait ? Devrions-nous les kidnapper pour qu'ils se joignent à l'entraînement ?
Elle n'avait pas tort. Même si le thème était grandiose, mais avec trop peu de personnel, ça ne marcherait pas. Ils ne pouvaient pas forcer leurs amis à participer. Même lors du fameux bizutage, certains d'entre eux l'avaient complètement zappé. Il serait impossible de convaincre les 216 d'entre eux de se joindre à eux.
Pourtant…
— Mais si vous rendez cela amusant, les gens voudront peut-être se joindre à nous.
Tout le monde regarda l'homme qui avait pris la parole. Ce n'était autre que le vice-président qui avait gardé le silence. May se répéta.
— Mais comment ?
— Encourageons-les à nous rejoindre de leur plein gré, pas parce qu'ils y sont forcés. Je pense que cela attirera plus de monde.
— Tu sais comment ?
Les yeux de May semblaient pleins d'espoir sous ses lunettes. Kongpob, lui aussi, était déterminé dans son plan malgré son incertitude.
— Je ne sais pas si ça va marcher, mais il faut essayer.
… Deux semaines plus tard, les “Jeux Unis de l'Ingénierie” commencèrent à 8 heures du matin le samedi.
La parade avait été placée à l'entrée de l'université et devait se rendre sur le terrain de sport. Chaque département était prêt avec ses accessoires et son équipement qu'il avait passé des jours et des nuits à fabriquer à la perfection, en fonction du grand événement de la Faculté d'ingénierie.
Tous les regards étaient tournés vers le département d'ingénierie industrielle. Le bruit courait que les chemises de l'atelier étaient en jeu car les étudiants de première année devaient gagner toutes sortes d'activités sans l'aide de leurs aînés, comme c'est le cas dans d'autres départements. Beaucoup attendaient donc de voir ce que celui qui était censé gagner pourrait faire avec sa parade.
Arthit en faisait partie. Il avait l'autorité pour leur remettre les chemises de l'atelier et il avait attendu la parade dans la cour avec ses amis, car son département était le dernier à défiler.
Le moment venu, les huit départements défilèrent avec leur concept. “Jeunesse anti-drogue : Université blanche unie pour lutter contre la drogue”. Beaucoup d'entre eux avaient mal interprété le concept, mais la splendeur aidant, le public était ravi d'assister à un défilé, d'une danse traditionnelle, d'un Sphinx géant ou d'étudiants qui se poudraient de blanc comme des statues. Ils se donnaient à fond, ne voulant pas perdre l'un contre l'autre.
Les aînés de la tribune applaudissaient à tout rompre lorsque leurs jeunes camarades du département entraient dans la salle. Certains criaient et tapaient dans leurs mains pour encourager les nouveaux. Les applaudissements s'intensifiaient à mesure que le public fredonnait, satisfait de la démonstration très flamboyante de certains départements.
Lorsque la dernière parade arriva, elle était plus importante en raison du plus grand nombre d'étudiants. Pourtant, l'ensemble de la prestation paraissait étonnamment minimaliste. Les membres du cortège étaient sobrement vêtus de chemises et de maillots de sport, et tenaient un carton en forme de bouteille de whisky, des cigarettes et une banderole avec un message anti-drogue, conformément au concept de l'université blanche.
Au milieu du cortège, un grand globe en polystyrène peint de couleurs vives se distinguait. Il était transporté sur une table recouverte d'un tissu, transformée en charrette à bras. Cela semblait si simple comparé à d'autres parades.
— Ton département est fauché ou quelque chose comme ça, Arthit ?
Prem, qui avait levé son appareil photo pour prendre des clichés depuis les coulisses, taquina son meilleur ami. L'autre homme, responsable de l'exposition, répondit en claquant des doigts.
— Non, nous ne le sommes pas ! J'ai vu les étudiants de première année organiser une collecte de fonds, mais je n'avais aucune idée de la raison du résultat.
Arthit fronça les sourcils, frustré, humilié, et fut déçu de voir la parade de son département.
Les étudiants de première année ne réalisaient donc pas ce que les chemises d'atelier représentaient pour eux ? C'est pour cela qu'ils étaient arrivés avec un défilé de paresseux, semblable à un jeu d'enfant. Comment pourraient-ils gagner ? Il ne voulait pas perdre son temps, car il était évident qu'ils étaient vaincus dès le début. Il préférait rentrer chez lui et faire une sieste plutôt que de rester ici.
— Je m'en vais.
Arthit se retourna et se prépara à retourner à son dortoir. Il se souvenait du pari avec quelqu'un. Il était le gagnant à coup sûr. Mais avant qu'il ne parte, un gros bourdonnement retentit et le ramena en arrière alors que le public pointait du doigt le milieu du terrain.
— Regardez ! Qu'est-ce que l'Ingénierie industrielle fait ?
Il se retourna et reprit sa place, fixant le terrain. Ses yeux s'écarquillèrent à la vue de ses camarades.
Ils étaient complètement immobiles.
Aucun d'entre eux ne bougeait, figés dans leurs poses. Certains se baissaient pour lacer leurs chaussures. D'autres parlaient au téléphone. D'autres taquinaient leurs amis, ou pointaient du doigt ici et là, ou encore soulevaient de l'eau pour la boire. Leurs activités étaient normales, mais ils étaient comme des pierres, comme si quelqu'un avait appuyé sur la touche "pause" de la télécommande et les avait arrêtés.
— C'est une... flash mob, marmonna Pre, ravi, tandis que le public restait perplexe
Le mot rappela vaguement quelque chose à Arthit, mais avant qu'il ne puisse demander de quoi il s'agissait, Prem se précipita pour prendre des photos des étudiants de première année qui s'étaient arrêtés net. Heureusement, il avait laissé un indice derrière lui.
Arthit saisit son smartphone et consulta Internet. Le mot "flash mob" apparut sur Wikipédia.
Un "flash mob" est un rassemblement soudain de personnes à un endroit donné pour réaliser une performance inhabituelle qui semble ne pas avoir de but dans un court laps de temps avant de se disperser. Son objectif est souvent le divertissement, la parodie ou l'expression artistique.
En creusant un peu, on s'aperçoit que les flash mobs ont pris des formes diverses dans le monde entier, allant de la danse de groupe sur une chanson populaire à une action stupide, comme une bataille de polochons au milieu d'une ville. L'une des actions préférées des flashmobs est le "freeze" ou l'arrêt soudain dans un espace public pour confondre les passants.
Il avait vu une vidéo de flash mob sur YouTube, mais ne s'attendait pas à en voir un de ses propres yeux au milieu du terrain.
La parade de l'ingénierie industrielle s'était arrêtée pendant près de cinq minutes avant que des mouvements ne se produisent au niveau du globe en polystyrène. De la fumée commença à s'élever avant qu'il ne s'ouvre, révélant une grande bannière à l'intérieur avec un message clair : “Arrêtez avant d'essayer la drogue”.
Les étudiants de première année recommencèrent alors à se déplacer. Ils formèrent une ligne comme si rien ne s'était passé, mais tout le monde savait maintenant que leur action avait un sens, un sens qui correspondait parfaitement au concept de la jeunesse antidrogue. La présentation était captivante, à en juger par les applaudissements nourris des tribunes et les compliments qu'Arthit entendait. Même un ami d'un autre département lui dit, après avoir pris suffisamment de photos.
— Je n'aurais jamais cru que vous aviez gardé le meilleur pour la fin. Qui a eu cette idée ? C'est vraiment génial.
— Je veux savoir moi aussi, dit-il.
Les yeux d'Arthit étaient toujours rivés sur le terrain. Bien qu'il soit occupé par les élèves de première année, il ne put s'empêcher de chercher ce quelqu'un. Cette idée particulière ne pouvait provenir d'aucune autre personne que de cet élève de première année. Il n'en était pas certain, mais il savait qu'ils mettaient tout en œuvre pour obtenir les chemises de l'atelier. Le défilé n'était qu'une entame. Ils avaient peut-être pris un bon départ, mais il leur restait un long chemin à parcourir pour gagner dans toutes les catégories.
Oui, cette bataille ne serait pas facile et il voulait savoir comment l'autre homme s'en sortirait.
Il abandonna l'idée de retourner à son dortoir et resta près du terrain. Ce n'était pas le terrain de l'Ingénierie Industrielle, mais celui du Génie Civil, de l'autre côté. D'ici, il avait une meilleure vue sur la tribune des étudiants de première année, alors il se fondit dans la masse en tant qu'ami de Prem. Personne ne fait attention à lui car les seniors étaient partout, occupant une bonne place pour regarder le spectacle des tribunes après que le recteur ait ouvert la cérémonie en fin de matinée, quand le soleil n'était pas trop fort.
D'après ce qu'il voyait, chaque stand avait le même thème que pour les parades. Le département de chimie avait choisi un thème égyptien avec une pyramide en toile de fond. Le département mécanique avait un thème militaire avec une grande découpe d'avion pour intimider les autres départements. Le département matériaux avait pour thème la Thaïlande traditionnelle, ramenant tout le monde à l'époque d'Ayutthaya.
Quant à l'industriel... Arthit essayait de comprendre le thème, mais n'y parvenait pas. La découpe du stand semblait sans direction et désordonnée, comme si quelqu'un avait simplement jeté de la peinture dessus. En haut, il y avait les lettres I.E lumineuses, tandis qu'en bas, il y avait le long thème en anglais, qui n'était pas très visible de loin.
Arthit était sur le point d'emprunter l'appareil photo de Prem pour zoomer sur les panneaux, mais les étudiants de première année présents sur le terrain commencèrent à marcher sur la tribune et lui bloquèrent la vue. Il attendit donc qu'ils s'assoient. Avec autant d'étudiants, la tribune à dix niveaux semblait petite, et il n'y avait pas assez d'espace pour que tout le monde puisse s'y serrer.
… Attendez un peu. Il savait que son département était le plus grand de la faculté, mais il ne savait pas qu'il était aussi grand. Les stands des autres départements avaient encore assez de place. Alors comment cela se faisait-il ?
— Knot !
Prem interpella son ami qui venait d'arriver. Arthit en profita pour lui faire part de ses interrogations.
— Puisque tu es là, laisse-moi te demander quelque chose. Qu'est-ce que c'est que cette image sur notre tribune ?
— Une main.
— Hein ?
Arthit fronça les sourcils, se demandant s'il avait bien entendu. Mais son ami confirma sa réponse avec une explication qui laissa Arthit sans voix.
— La bannière a été peinte avec l'empreinte de la main de chaque étudiant de première année.
Ses yeux perçants s'écarquillèrent. Il se retourna pour regarder de plus près et vit que les peintures désordonnées sur le panneau avaient été créées par de petites empreintes de mains sur le papier cartonné blanc. De loin, l'œuvre paraissait hideuse, mais en y regardant de plus près, on pouvait voir la détermination des élèves de première année qui avaient travaillé dur pour la réaliser. Le plus choquant, fut le moment où Knot aborda un point.
— Je viens de demander à Fang. Sais-tu combien de nouveaux élèves se sont présentés aujourd'hui ?
— Combien ?
— 216.
… 216. S'il se souvenait bien, c'était le nombre d'étudiants de première année du département d'ingénierie industrielle. Cela signifiait que “tous” les étudiants de première année avaient participé à ces événements sportifs.
— C'est dingue ! Tu te moques de moi ? Ils ne se sont même pas déplacés pendant le bizutage, intervint l'ancien chef du bizutage, incrédule.
— Je n'y ai pas cru au début, alors je suis venu ici pour vérifier. Maintenant, je crois qu'ils sont tous là, répondit Knot sur le même ton.
Arthit se tut, ne protestant plus, alors que l'évidence était sous ses yeux. Les étudiants de première année géraient le stand surpeuplé, n'ayant pas assez de place pour tout le monde, et certains d'entre eux devaient s'asseoir dans la file d'attente du stand. Heureusement, ils pouvaient rester à l'ombre de la sculpture, comme si ceux qui l'avaient fabriquée avaient déjà anticipé ce scénario.
… Qui avait pu mettre au point ce plan, d'ailleurs !
Sa curiosité fut soudain effacée par le grand cri du département électrique qui ouvrit la première représentation des pom-pom girls. Les élèves chantaient en même temps que les tambours, et après de nombreuses chansons, les pom-pom girls habillées en fonction du thème sont apparues pour exécuter une danse gracieuse et étonnante. Les spectateurs présents sur la tribune utilisaient des éventails en papier de différentes couleurs qu'ils faisaient tourner à l'unisson. De loin, les images sur le stand étaient si belles que l'obturateur de Prem s'activait furieusement pour prendre les photos.
Bien que tous les départements aient exprimé leur créativité à l'aide de divers accessoires, les performances étaient pratiquement les mêmes. Le concours allait donc trouver son vainqueur grâce à l'unité du public et des pom-pom girls. Celles qui avaient travaillé dur sur leur performance offraient un meilleur spectacle. Il était évident qu'ils utilisaient bien ce que les aînés leur avaient inculqué lors des séances de bizutage au début du semestre.
Puis vint l'heure du département que tout le monde attendait. Les étudiants chuchotaient, se demandant quels tours de force les gars de l'industrie avaient dans leurs manches. Tout le monde savait que leur bizutage était le plus difficile, mais leur problème maintenant était d'avoir trop de monde. Ils se pressaient pour obtenir de la place sur le stand, ce qui donnait l'impression d'être désordonné. Il serait difficile de donner un bon claquement de mains en harmonie. Sans une pratique rigoureuse, la performance échouerait à coup sûr.
Arthit, lui aussi, était conscient du problème. Ils avaient un grand avantage en termes de volume de chant. Mais le concours de la tribune n'était pas jugé uniquement sur la base du nombre de participants. Il se demandait comment les élèves de première année pourraient résoudre ce problème.
Quelques minutes s'étaient écoulées, mais le département industriel était toujours silencieux. Il n'y avait pas de chants d'encouragement et cela faisait peur à Arthit, qui s'inquiétait de savoir si les étudiants de première année avaient des problèmes qu'ils n'arrivaient pas à régler. Il était sur le point de demander à Knot de passer de l'autre côté et de vérifier ce qu'il en était, mais il y eut du mouvement.
En bas de la tribune, un groupe de personnes commença à se frayer un chemin jusqu'à ce qu'un camarade s'avance. Ce n'était pas quelque chose d'étrange - sauf pour la guitare qu'il tenait à la main.
— Avons-nous le droit d'utiliser une guitare ? demanda Prem, étonné, lui qui ne connaissait pas grand-chose aux règles des chants d'encouragement.
Les deux anciens se regardèrent, incertains. Knot dit ce qu'il en pensait.
— Je pense que oui. Aucune règle ne dit qu'on ne peut pas.
Arthit acquiesça, en accord avec son ami. Il n'y avait aucune règle dans le livre qui disait ce qu'ils pouvaient ou ne pouvaient pas faire. C'était juste quelque chose que peu de gens avaient fait parce qu'en plus de la guitare, les nouveaux étudiants en industrie avaient aussi apporté une basse, une batterie, un clavier, un violon, un saxophone, une trompette... comme s'ils étaient sur le point d'avoir un concert.
Quelques minutes plus tard, les tambours commencèrent leur tempo, ouvrant le spectacle du département industriel. Les chants étaient plus vifs et plus puissants que ceux des autres départements, peut-être grâce aux instruments, ce qui les rendait authentiques et amusants. Les personnes présentes sur le stand dansaient sur leurs pieds et même celles des autres départements ne pouvaient s'empêcher de se joindre à elles. Les étudiants de première année présents sur le stand travaillaient également avec les plaques de lettres qui délivraient un message en anglais :
Arrêtez de vous droguer ! Commencez à faire de la musique et du sport !
Dès que les plaques affichèrent le mot “Sport”, un grand cri retentit pour accueillir les pom-pom girls. En maillot de corps et collant, elles ressemblaient à des instructeurs d'aérobic devant une arène. La pom-pom girl en chef commença à donner des ordres : un, deux, trois, quatre, cinq, six, sept, huit, mimant la véritable chorégraphie d'aérobic que toute la tribune devait suivre sous les rires du public.
Pourtant, le spectacle était étrangement beau car les étudiants de première année dans les tribunes bougeaient avec les mêmes gestes des mains, pas très différents des applaudissements chorégraphiés que les autres départements avaient exécutés. Les pom-pom girls donnèrent une touche finale avec des acrobaties classiques de pom-pom girls, l'air posé et harmonieux, alors qu'elles terminaient l'hymne de leur département que tous les étudiants de première année chantaient à tue-tête. C'est ainsi que se termina le spectacle de pom-pom girls du département industriel.
Des applaudissements retentirent sur tout le terrain. On aurait pu croire que les élèves encourageaient leurs camarades par habitude, mais le geste semblait plus sincère pour le département industriel, dont l'expression créative était une nouveauté qui leur valut d'être appréciés à leur juste valeur.
— Quel est le thème, déjà ? demanda Arthit à la fin de la représentation des élèves de première année. Il était encore plus impressionné lorsque son ami lut le message sur le panneau qui expliquait tout.
— Ne vous droguez pas. Faites quelque chose d'amusant.
… Mieux vaut faire quelque chose d'amusant que de se droguer.
Le défilé, la tribune, les pom-pom girls - ils ne s'étaient pas concentrés sur la grandeur, mais sur l'esprit de joie et avaient maintenu le concept original établi par le comité. Ils avaient exprimé ce concept à travers l'art, la musique et les spots - toutes les activités qui nécessitaient que tout le monde travaille ensemble en harmonie. Il savait maintenant pourquoi les 216 étudiants de première année étaient là.
— Vous étiez tellement extra que vous allez gagner tous les trophées. Est-ce qu'ils sont si désespérés que ça pour les chemises de l'atelier ? Mais qui a eu cette idée ? observa Prem tandis que Knot secouait la tête.
Il n'en avait aucune idée, car c'étaient les élèves de première année qui s'étaient chargés du spectacle cette fois-ci. Mais Arthit, qui regardait toujours le stand, murmura.
— Je crois savoir qui.
— Kongpob !
En entendant cet appel, l'homme qui rangeait les outils et le matériel derrière la tribune des pom-pom girls marqua une pause. Il leva les yeux lorsque M entra pour lui rappeler.
— Les aînés nous ont demandé de nous présenter pour le match de basket.
— Oui, j'arrive tout de suite… May, j'ai mis les assiettes dans les boîtes ici.
Kongpob se tourna vers la présidente qui effectuait son dernier travail et suivit son ami. Il essuya du revers de la main les perles de sueur sur son front, épuisé, et M s'inquiéta.
— Tu vas bien ?
— Oui, ça va.
Il dit qu'il allait bien, mais c'était loin d'être le cas. Ces deux dernières semaines, Kongpob était entièrement dévoué à son rôle de vice-président, restant toujours éveillé tard dans la nuit pour participer aux réunions afin de rendre les spectacles aussi bons que possible.
Il avait suggéré d'utiliser le “fun” comme principal argument de vente et avait adapté le concept à la parade, au stand et aux pom-pom girls. Tout le monde avait trouvé cela intéressant et s'était partagé le travail, tout en faisant la promotion sur Facebook pour que d'autres amis se joignent à eux.
Mais il savait que… Le nombre de personnes ne suffirait pas à les faire gagner. S'ils voulaient être champions dans toutes les catégories, ils devaient convaincre les juges. Ainsi, outre l'esthétique et la créativité, ils obtiendraient également des notes s'ils avaient respecté le concept principal : “Jeunesse Anti-drogue” dans chaque représentation. Ils avaient travaillé d'arrache-pied pour trouver des idées et perfectionner les spectacles.
Ils avaient également consacré beaucoup d'énergie à la fabrication des panneaux de la tribune, trouvé les personnes qui jouaient d'un instrument de musique dans chaque classe, puis créé la chorégraphie pour que les pom-pom girls dirigent le magnifique spectacle de mains. Mais le résultat en valait la peine. Le spectacle “Ne vous droguez pas. Faites quelque chose d'amusant” avait remporté plus de succès qu'ils ne l'avaient espéré et la victoire était à portée de main.
Il ne restait plus qu'une chose à gagner… la dernière épreuve et la plus difficile. La tribune était le fruit d'un travail de groupe, avec l'aide de tous les élèves de première année qui avaient une touche amusante, mais les “événements sportifs” ne concernaient qu'eux.
Bien qu'occupé, Kongpob s'entraînait toujours avec ses coéquipiers le soir. Ils travaillaient dur comme s'ils allaient aux Jeux olympiques, bien que ce ne soit que pour la chemise de l'atelier et pour prouver une fois de plus la valeur des étudiants de première année. En effet, les étudiants de première année qui s'étaient inscrits au football, au volley-ball, au badminton et au ping-pong s'étaient investis à fond dans la compétition.
À l'heure de la compétition, tout le monde se battait avec acharnement. Leurs amis les soutenaient moralement dans chaque catégorie. Il était le joueur central du premier match de basket contre le département de génie civil, et l'équipe qui perdrait serait immédiatement disqualifiée. C'est pourquoi il se battait bec et ongles malgré son corps fatigué.
Au premier tour, leur département avait remporté une victoire facile. Mais au deuxième tour, ils s'étaient retrouvés face au département mécanique, réputé difficile, et ils ont travaillé dur avant de gagner. Néanmoins, ils étaient rassurés de savoir que le génie industriel avait enchaîné les victoires jusqu'à ce qu'ils arrivent en finale. Kongpob ne se sentit pas aussi détendu, sachant qui seraient les prochains qu'il aurait à affronter.
Un joueur de basket-ball du département de chimie est entré sur le terrain, emmené par Wad, qui était le capitaine et le pivot. Il s'avança pour saluer ses camarades de l'industrie qui faisaient un mini entraînement avant le match. Malgré le sourire qu'il arborait, sa voix et ses yeux étaient durs, en particulier lors d'une dernière remarque provocatrice.
— Juste pour que vous sachiez, je ne vais pas me laisser faire.
L'avertissement fit déglutir l'équipe adverse. Il savait que Wad était l'un des redoutables joueurs de terrain de l'université. En dehors du terrain, ils étaient amis. Sur le terrain, pas de pitié. S'ils n'étaient pas assez prudents, ils seraient battus.
Alors que leur moral et leur courage s'amenuisaient, un homme s'avança et répondit d'une voix calme.
— Ne t'inquiète pas. Nous ne nous laissons pas faire non plus.
Il n'y avait aucun signe de peur ou d'intimidation dans les yeux de Kongpob, et sa détermination était évidente. C'était un spectacle rare de la part de ce type, pensèrent ses pairs, mais ils devinrent instantanément courageux, leur esprit combatif s'éveillant.
— Eh bien, l'heure du combat a sonné, dit Wad, satisfait, et retourna à son entraînement.
Et dès le coup de sifflet, le match final entre le génie industriel et le génie chimique commença sous les acclamations de la foule.
Ils s'emparèrent tour à tour de la balle et leurs scores furent presque identiques dans cette bataille acharnée. L'équipe du département chimie semblait plus entraînée sur le terrain et elle avait trois points d'avance sur le département industriel. Kongpob accéléra et lança un tir à trois points pour être au coude à coude avec l'autre équipe. Mais alors qu'il se retournait pour s'éloigner du joueur qui lui barrait la route, le coude de Wad lui percuta violemment les côtes et envoya Kongpob au sol.
— Hé ! Désolé, mec ! Ça va ?!
Wad montra rapidement son esprit d'athlète en aidant son ami à se relever. Kongpob secoua la tête, disant qu'il allait bien. Il n'avait pas fait attention et était déjà épuisé par le travail sur les performances et les entraînements, il avait déjà atteint ses limites dans ce match.
Le département industriel obtint deux pénalités suite à la faute de Wad, et leurs scores n'étaient plus qu'à un point l'un de l'autre. En regardant l'heure, ils se sentirent dépités : il ne restait plus que deux minutes avant la fin du match. Les joueurs de l'équipe de chimie ne leur laissaient aucune chance de marquer plus de points et Kongpob était bloqué par deux joueurs et n'arrivait pas à récupérer le ballon. Puis, dans les quinze dernières secondes, M eut la balle et la lui lança alors qu'il se tenait au plus près du panneau de basket-ball. Kongpob se donna à fond dans son dernier saut pour shooter la balle et celle-ci rebondit sur le rebord.
FWEET !
Le coup de sifflet de la fin du match retentit. Tous les yeux étaient rivés sur le tableau d'affichage qui affichait ‘111-112’
… Le génie industriel avait été vaincu par le génie chimique.
Kongpob était rivé sur place, regardant le ballon s'éloigner du terrain après avoir rebondi sur le bord du cerceau… lors de son tir raté.
— Kongpob.
Il sortit de sa rêverie en entendant son nom, alors que M s'approchait de lui. Il marmonna sa réponse, épuisé.
— Je suis désolé.
M lui tapa sur l'épaule, sans lui en vouloir, et répondit d'une voix insouciante.
— Pourquoi es-tu désolé ? On gagne ou on perd un match. On n'a pas les chemises de l'atelier ? On s'en fout. On peut demander une autre chance.
… Il se tourna vers ses coéquipiers. Ils n'avaient pas l'air déçus, mais soulagés que ce soit enfin terminé. C'était un miracle qu'ils soient passés si près du but en tenant tête aux athlètes de l'université. Wad leur dit même qu'ils étaient géniaux et qu'il avait pensé qu'il ne gagnerait pas. Il demanda même à Kongpob de devenir un athlète universitaire et de relever un autre défi. Cette fois-ci, ils parièrent sur un barbecue de porc et tout le monde se mit à rire et commença à se détendre.
En quittant le terrain, ils apprirent qu'ils avaient également perdu par pénalité au match de football et qu'ils s'étaient encore inclinés au match de badminton. Leur espoir d'inscrire leur année de classe sur les chemises de l'atelier disparut, mais ils attendirent quand même sur la tribune, tous, les résultats des autres catégories avant la cérémonie de clôture. Le résultat fut à la hauteur de leurs espérances.
Ils avaient remporté la parade, la tribune et les pom-pom girls avec une victoire écrasante. C'était le résultat de leur dévouement et de leur préparation minutieuse, et même les autres départements les applaudissaient à tout rompre. En fin de compte, l'objectif des “Relations sportives entre ingénieurs : Jeux d'ingénieurs” était de renforcer les liens et l'amitié entre les départements.
À la fin de l'événement, vers 20 heures, le ciel s'assombrit. Pourtant, les élèves du département industriel reçurent l'ordre d'attendre un autre résultat final. Ils avaient déjà accepté leur sort et gardaient le silence lorsque l'ancien chef bizuteur Arthit s'avança devant la tribune.
— Vous n'avez pas pu gagner toutes les catégories aujourd'hui. Cela signifie que vous n'avez pas le droit de broder l'année de classe sur vos chemises d'atelier et qu'il n'y aura pas de seconde chance !
Ces mots leur transpercèrent le cœur. Il n'y avait plus de chance de gagner les chemises. Et peu importe à quel point ils avaient travaillé, s'ils ne respectaient pas les conditions, ils ne recevaient rien. Les larmes montèrent aux yeux de certains élèves en pensant aux chemises de l'atelier sans le numéro de classe qui soulignait leur manque de dignité. Pourtant, ils ne purent que se résigner et écoutèrent l'ancien chef bizuteur prononcer sa prochaine phrase.
— Mais… aujourd'hui, vous nous avez montré à quel point vous êtes unis.
Ce compliment inattendu leur firent lever les yeux et échanger un regard perplexe. Ils ne savaient pas s'il s'agissait du comportement habituel du chef bizuteur, “être cruel pour être gentil”, ou s'il avait des intentions cachées. Ils devinrent encore plus perplexes lorsque le bizuteur continua.
— D'après ce que j'ai trouvé, il y avait 216 étudiants dans le département d'ingénierie industrielle, pour la classe 35.
Arthit marqua une pause, parcourant des yeux les nouveaux étudiants présents sur la tribune, et prononça le mot de la fin.
— Alors, c'est le numéro 216 qui figurera sur votre chemise d'atelier au lieu de 35 !
Le silence s'installa avant d'être suivi d'un grand cri de joie alors que les élèves de première année saisissaient le sens de ces mots.
‘216’ était le numéro des élèves de première année. Le nombre de personnes qui avaient travaillé dur ensemble et essayé d'accomplir toutes les tâches monumentales qui leur avaient été confiées. Ce chiffre leur donnait de la fierté, tout comme l'année scolaire, parce qu'il représentait quelque chose.
… Cela représentait chaque “ami”… qu'ils avaient dans le département.
Des sourires et des larmes se dessinaient sur leurs visages, heureux, mais Arthit leva la main en signe de protestation, criant des ordres.
— Ça suffit ! Ne vous laissez pas aller ! Nous devons encore décider si nous vous reconnaissons comme nos juniors !
Leur joie fut interrompue. Outre les chemises d'atelier, un autre symbole en jeu était la reconnaissance par les aînés de leur statut de jeunes pairs. Bien qu'ils aient subi une initiation impitoyable, ils étaient encore de petits novices qui dépendaient des aînés pour vivre sur le campus. S'ils n'étaient pas reconnus comme des juniors, cela signifiait également qu'ils ne recevraient aucune aide.
Stressés, les étudiants de première année se turent à nouveau. Tous les yeux de la tribune étaient rivés sur l'homme qui se tenait devant eux.
— Après nos réunions, tout le monde s'est mis d'accord pour dire que…
Arthit resta silencieux pendant un moment - un silence qui fit presque s'arrêter tous les cœurs. Il prit une grande inspiration et rugit sa déclaration.
— Nous serions complètement idiots si nous ne vous acceptions pas comme nos juniors !
Il n'y avait plus aucun doute, les mots étaient clairs. Ils avaient remporté une grande victoire dans leur bataille pour prouver leur valeur !
L'exaltation fut plus grande que la première fois, les cris de joie ayant presque étouffé tous les autres bruits. Ils commencèrent à chanter l'hymne national pour fêter l'événement, tandis que les seniors qui avaient suivi leurs matchs se joignaient à eux. Il était alors temps de mettre fin au spectacle.
— Très bien ! C'est terminé pour aujourd'hui. Vous pouvez tous rentrer chez vous, mais rangez et nettoyez la tribune avant de partir.
Arthit donna à nouveau un ordre et les nouveaux élèves transportèrent le matériel, la batterie, les tasses, les récipients d'eau et d'autres outils, du terrain à la salle de stockage du département. Ils enlèveront la maquette demain matin.
Kongpob, en tant que vice-président du département et détenteur de la clé de la salle de stockage, devait attendre et superviser jusqu'à ce que tout soit terminé. Il était presque 22 heures lorsque tout fut enfin fini. La faculté était silencieuse, presque vide, et il ne restait plus que 6 ou 7 personnes avant qu'il ne puisse fermer la salle à clé.
— Ouf… enfin terminé. Si on allait manger quelque chose pour fêter ça ? demanda May alors qu'ils se dirigeaient vers le parking, se préparant à partir.
Les présidents étaient ceux qui avaient travaillé le plus dur, car ils avaient tout organisé ensemble et devaient quand même gérer un million de choses. Maintenant, ils avaient l'impression d'être débarrassés d'un fardeau et d'avoir accompli leurs tâches. Ils voulaient se détendre après un travail aussi long et difficile.
Kongpob acquiesça, même s'il préférait rentrer chez lui pour se reposer. Il admit qu'il s'était surmené. Il y avait quelque chose dans son esprit qui lui semblait inachevé. Les autres étaient heureux d'avoir réussi l'épreuve finale, mais son pari n'était toujours pas gagné.
Tout à coup, alors qu'il se perdait dans ses pensées, il aperçut, non loin de là, quelqu'un qui se tenait contre une bicyclette. Bien qu'il n'ait vu que la silhouette sous le faible éclairage de la rue, il reconnut la personne à son allure. Il se retourna pour s'adresser à ses amis.
— Désolé. J'ai quelque chose à faire. Je ne peux pas me joindre à vous.
Certains de ses amis semblèrent intrigués par sa décision soudaine. Ils essayèrent de l'inciter à se joindre à eux, mais il insista pour dire qu'il ne pouvait pas. Ils dirent que c'était dommage, mais continuèrent leur chemin, le laissant seul. Il s'approcha donc rapidement de l'homme qui l'attendait toujours.
— P'Arthit.
L'homme releva les yeux de son téléphone, sans paraître surpris, et dit brièvement.
— Tu as fini de ranger ?
— Oui.
Kongpob acquiesça et engagea la conversation.
— J'ai perdu. Tout ce que tu me demanderas de faire, je le ferai.
Il savait pourquoi Arthit l'attendait. Le déjà vu du concours des lunes et étoiles de l'université lui revint en mémoire lorsque Arthit l'avait attendu dans les coulisses. Cette fois-ci, c'était lui qui avait fait une erreur.
… Il se moqua de lui-même pour avoir été si arrogant avant cela. La scène où la balle avait rebondi sur le cerceau le hantait encore. Personne ne le blâmait, mais il savait que le résultat aurait été bien meilleur s'il avait essayé plus fort, et qu'il aurait eu la chance de rester plus près d'Arthit.
La déception s'abattit sur lui comme un brouillard épais et lourd, mais Kongpob garda une expression neutre en attendant les paroles de l'autre homme. Ce qu'il entendit fut inattendu.
— Je te le dirai plus tard.
C'était la même réponse évasive que celle qu'il avait donnée à l'homme plus âgé. Il n'avait pas le droit de dire non à cette requête.
— Oui, bien sûr.
Kongpob marmonna, incapable de croiser le regard de l'autre homme. Il ne savait pas ce qu'Arthit avait en tête. Peut-être de la pitié ? Peut-être de la déception ?
Le silence les enveloppa tous les deux, lui serrant la poitrine. Et puis... un léger contact l'étonna.
… Le plus doux des contacts sur sa tête, Arthit lui caressant les cheveux et lui disant.
— Tu as fait du bon travail aujourd'hui.
L'homme stupéfait leva les yeux et vit qu'il n'y avait pas de reproche ou d'offense dans les yeux d'Arthit, seulement de l'honnêteté alors que sa voix s'adoucissait.
— Tu dois être très fatigué. Rentre chez toi et repose-toi bien. Ne t'inquiète pas pour ça, d'accord ?
… Ces quelques mots dissipèrent toutes les pensées brumeuses...comme une douce brise.
Plus il essayait, plus il portait un fardeau. Et quand les choses ne fonctionnaient pas comme il le souhaitait, il était normal d'être abattu. Mais Arthit voyait clair en lui, même lorsqu'il l'enfouissait. Le plus âgé le réconfortait même et l'aidait à se sentir mieux.
… Il était toujours le même P'Arthit et c'était une chose qui ne changeait pas.
Sans s'en rendre compte, il attira Arthit dans ses bras et l'autre homme sursauta. Bien que surpris par le contact immédiat, il leva la main pour caresser doucement le dos du jeune homme, sachant à quel point Kongpob était fatigué.
Il avait vu le jeune homme lors du match. Il regrettait que leur département puisse gagner, et le dernier tir tomba dans la main de Kongpob… et il échoua. Il savait que Kongpob devait s'en vouloir, car c'était un homme qui se donnait toujours à fond dans une tâche. Il avait craint que quelque chose de grave ne se produise et était resté dans les parages pour attendre. Il avait eu raison en voyant à quel point le jeune homme était déprimé… comme un chiot triste. Il laissa Kongpob le prendre dans ses bras dans l'espoir que le jeune homme se sente mieux. Mais… eh bien… l'étreinte devenait trop forte.
— Kongpob, lâche-moi !
— Je peux rester comme ça une heure ?
… Tu es fou ? !
Le visage d'Arthit rougit en entendant cette demande éhontée. Être enlacé par un autre homme comme ça au milieu de la nuit… était trop bizarre. Pire encore, le fait d'être aussi proche de Kongpob faisait battre son cœur à tout rompre. Il commença à se débattre et grogna.
— Je t'ai dit de me laisser partir ! Si tu ne le fais pas, je vais te pousser avec mon pied !
— Allez… tu ne veux pas me donner une petite récompense ?
— NON !
Le refus bruyant n'effraya pas Kongpob le moins du monde. Il rit en lâchant l'autre homme.
— Alors… rentrons ensemble à la maison aujourd'hui, d'accord ?
Le sourire fut de nouveau éclatant. Arthit regarda le jeune homme et poussa un soupir résigné. Il n'était pas fatigué par la roublardise de Kongpob, mais parce qu'il savait trop bien que même s'il gagnait leur pari…
… Il avait encore succombé à la volonté de ce 0062. | | Messages : 87
Date d'inscription : 01/07/2024
| amelyma Ven 27 Sep 2024 - 17:29 Chapitre Spécial 4.2 L'obtention de la chemise d'atelier, la journée d'appréciation des seniors et le jour où ils ont marché côte à côte Deux semaines s'étaient écoulées depuis la fin des Jeux des ingénieurs. Tous les nouveaux élèves du département industriel portaient sur leur chemise d'atelier le numéro 216 au lieu de leur numéro de classe. Ce n'était pas habituel et les autres étudiants du département en avaient demandé la raison, déconcertés. Une fois qu'ils avaient compris pourquoi, c'était devenu le sujet de conversation de la faculté.
Pourtant, ce n'était que des chiffres. Leur fraternité restait inchangée. Les élèves de première année respectaient toujours les aînés, qui s'occupaient d'eux et les aidaient.
Lors d'un incident survenu un midi, par exemple, Kongpob et ses amis s'apprêtaient à prendre leur repas, mais la cantine était bondée et ils ne trouvaient pas de place pour s'asseoir. Alors qu'ils regardaient à droite et à gauche, un élève de troisième année leur avait fait signe.
— Hé, les gars ! Venez par ici. Nous partons bientôt.
— C'est P'Nu.
M murmura le nom du gentil samaritain qui était son mentor de code en troisième année. Il était avec ses 7-8 copains dont les visages étaient familiers, et leurs assiettes étaient presque vides. Pourtant, beaucoup d'entre eux mangeaient et ne termineraient pas de sitôt. M, qui entraînait ses amis vers le banc, dit, un peu réticent :
— Mais vous n'avez pas encore fini de manger.
— Nous avons fini. Arthit, accélère !
Le type qui avait offert la place prit ses assiettes et dit à son ami qui s'apprêtait à mettre la fine nouille Raadna dans sa bouche de se dépêcher. L'homme qui avait été interrompu grommela.
— Ne me mêle pas à ça, Nu. Si tu veux obtenir un vote de popularité grâce à ça.
L'insinuation de l'homme qui le connaissait bien jaillit alors qu'il était pris en flagrant délit, mais il rejeta rapidement d'une voix aiguë.
— NOON. Quel vote de popularité ? Je n'ai jamais pensé que j'en tirerais quelque chose. Je voulais juste aider les nouveaux.
— Tu crois que je vais gober tes conneries ? Il y aura la fête de remerciement à la fin du mois et je sais que tu espères que les mentorés offriront de beaux cadeaux, n'est-ce pas ?
Ces mots rappelèrent à beaucoup qu'un autre événement majeur était sur le point de se produire.
“La fête de remerciement des seniors” qui était littéralement la “fête de remerciement des mentors du code” se déroulait à la fin du semestre. Elle était similaire à l'initiation, mais c'était au tour des étudiants de première année d'offrir aux seniors un cadeau pour montrer leur gratitude pour l'aide apportée par les mentors tout au long de l'année.
Aucune règle n'imposait que les cadeaux soient coûteux, mais le montant pouvait dépendre de la proximité entre les mentors et les mentorés. Il s'agissait uniquement d'affection. Il n'était pas étonnant que les mentors essaient de gagner plus de faveurs, tout comme P'Nu l'avait fait et s'était fait attraper par Arthit.
— Merde ! Tu as foutu mon plan en l'air, espèce de salaud ! Mais Nong M... n'oublie pas que je voudrais deux grosses boîtes de Ferrero Rocher.
La demande humoristique de l'homme qui n'abandonnait pas fit rire tout le monde. Les troisièmes années se levèrent alors pour débarrasser leurs assiettes afin que les premières années qui attendaient puissent s'asseoir et manger leur repas.
Kongpob fit de la place pour que les plus âgés puissent partir, surtout celui qui buvait goulûment son eau avant de suivre son ami. Il se contenta de regarder Arthit, ne voulant pas le saluer. S'il aimait bien faire des farces à P'Arthit lorsqu'il était en compagnie de l'autre homme, Arthit était toujours furieux lorsqu'ils étaient seuls. S'il le taquinait en public, Arthit lui en voudrait.
Kongpob choisit donc de se taire et de laisser Arthit s'éloigner avec ses amis. Alors qu'il retirait son sac pour le poser sur le siège en guise de réservation, quelque chose l’agrippa et le fit se retourner pour regarder. C'était l'homme qu'il essayait d'ignorer.
— Eh bien… tu es libre ce samedi ?
Arthit garda son expression neutre, comme s'il s'agissait d'une question ordinaire, mais sa voix était presque inaudible. Kongpob acquiesça. Il n'avait rien de prévu ce jour-là,
— Oui, je le suis.
— Le problème, c'est que j'ai quelque chose à acheter. Si tu as un peu de temps libre… peut-être… qu… que tu peux m'accompagner ?
L'expression de son visage était toujours aussi stoïque, mais Arthit butait sur ses mots, indiquant qu'il se sentait mal à l'aise. Kongpob ne put réprimer son sourire et dit oui.
— D'accord.
— Rendez-vous à 11 heures, au même centre commercial.
— Attends…
Ce fut au tour d'Arthit d'être retenu lorsqu'il entendit un murmure sournois à son oreille, ce qui fit chauffer son visage.
— Alors… tu viens de me demander de sortir avec toi ?
— NON, PAS DU TOUT !
Son attitude calme disparut soudainement alors que le plus jeune le taquinait et lui faisait perdre les pédales en criant au milieu de la cantine et que tous les regards étaient braqués sur lui.
Arthit grogna sur l'autre homme, disant qu'il ne s'en sortirait pas comme ça. Il tourna sur lui-même et suivit ses amis qui regardaient d'un air ahuri la querelle entre l'aîné et le cadet que personne ne comprenait. Personne, sauf Kongpob, ne souriait du comportement de l'autre homme.
… Il ne voulait pas faire ça, mais c'était plus fort que lui. Il savait qu'il agissait de façon puérile et qu'Arthit était une fois de plus contrarié. Mais il ne pouvait pas s'empêcher de se rapprocher.
Des petits pas pour se rapprocher. S'il le pouvait, il voudrait passer plus de temps avec P'Arthit.
Kongpob arriva un peu plus tôt que 11 heures le samedi.
Le roi couronné de l'université était à l'image de son titre. Même s'il portait une chemise claire et un jean foncé, il faisait toujours tourner les têtes des filles, qui se demandaient qui était l'heureux élu qui sortirait avec ce beau gosse.
En fait, Kongpob attendait que l'autre personne l’accompagne faire une course, et non pour un rendez-vous, comme Arthit l'avait catégoriquement objecté. Au fond de lui, il était tout de même heureux d'attendre l'arrivée d'Arthit. Cela ne tarda pas, car un peu avant 11h00, quelqu'un s'approcha de lui.
Arthit portait un tee-shirt avec le logo Red Bull… très urbain, avec un jean délavé et déchiré au niveau des genoux et une paire de baskets. Il avait l'air plus rebelle que jamais, même sans le duvet sur son visage, se transformant d'un musicien de rock-country en une pop star indie, séduisante et naturelle… Le type, lui, affichait une mine renfrognée et grommelait.
— Mince… Je pensais être en avance mais tu es déjà là.
— Je suis arrivé il y a quelques minutes. Alors… qu'est-ce que tu veux acheter aujourd'hui ?
Kongpob lui dit la vérité et changea de sujet. Il savait qu'ils avaient attiré l'attention… pas seulement lui, mais aussi la rock star rebelle qui avait attiré les regards des filles. L'homme n'y prêta pas attention, bien sûr, et aboya un bref ordre.
— Suis-moi.
Kongpob s'exécuta et suivit Arthit jusqu'à l'ascenseur. Arthit dit alors,
— Grand frère Tum a appelé et m'a dit que Grande sœur Fon est enceinte de deux mois.
— Vraiment ?
La bonne nouvelle le fit sourire, ravi pour le couple. Trois mois s'étaient écoulés depuis le mariage des deux mentors. Aujourd'hui, la preuve d'amour entre les codes 0062 et 0206 se matérialisait et renforçait encore leur lien. Le bébé était le premier “neveu ou nièce” de leurs codes, il fallait donc organiser une fête de naissance, comme Arthit l'indiquait d'un signe de tête.
— Ouais. Je cherche donc quelque chose à leur offrir.
— Pourquoi pas une carte ?
La même vieille idée était proposée, mais Arthit fit la grimace et contesta l'idée.
— Le frère m'a taquiné à ce sujet lors du mariage.
Le grincheux repensa au jour où il s'était fait avoir et avait donné une carte à son aîné... parce que le plus jeune lui avait dit que c'était romantique. Quelle idée idiote ! Il préférait que la terre s'ouvre et l'engloutisse plutôt que de refaire la même chose. Il ne se laisserait pas faire à nouveau et c'était pour cela qu'il avait besoin d'une nouvelle idée.
— Qu'est-ce que tu en penses si j'achète des jouets ou des vêtements de bébé ? demanda Arthit alors qu'ils entraient dans le rayon enfants.
Il balaya l'espace du regard, à la recherche de l'article idéal, mais ce que Kongpob dit ensuite le fit s'arrêter.
— Attends, tu ne sais pas s'il s'agit d'un petit garçon ou d'une petite fille. Elle n'en est qu'à deux mois… donc ce n'est pas trop tôt pour leur offrir quelque chose ?
La question le fit s'arrêter et réfléchir.
… Oui, il n'avait pas tort. Il faudrait attendre sept mois avant que la grande sœur n'accouche. Il se comportait comme un grand-père impatient qui voulait offrir le premier cadeau à ses petits-enfants.
C'était encore plus embarrassant que de recevoir une carte. Mais que pouvait-il faire maintenant qu'il était là ? S'il partait, il serait encore plus embarrassé.
— Eh bien… c'est censé être un cadeau surprise. Je peux prendre quelque chose de neutre pour les garçons et les filles, non ?
Il essaya de justifier son geste, mais le plus jeune se contenta de sourire légèrement comme s'il savait ce qui se passait. Arthit se sentit gêné et changea de sujet.
— Tu as une nièce. Des suggestions ?
Arthit se souvenait de la dernière fois qu'ils étaient allés faire du shopping, Kongpob lui avait demandé de chercher un cadeau pour sa nièce de trois ans, et il pensait que cela pourrait être la même chose. Kongpob prit un moment pour réfléchir et dit.
— C'est une fille, alors j'ai pensé que quelque chose de mignon lui conviendrait, comme des peluches. Mais il faut que ce soit autre chose pour les garçons. En fait, si j'ai un enfant, je voudrais un fils.
… Un enfant ?
A ces mots, Arthit marqua une pause et regarda l'homme à côté de lui comme s'il le voyait pour la première fois
Pourquoi venait-il de réaliser que Kongpob était un homme... un homme dont l'apparence, le statut et l'éducation étaient parfaits. Même s'il pouvait être parfois casse-pieds et têtu, c'était un bon gars et un bon ami. Pas étonnant que beaucoup de filles veuillent être avec lui. Un homme comme Kongpob n'aurait aucun mal à trouver la bonne compagne. Plus tard, il aurait une famille aimante avec des enfants adorables... un ou deux… pour compléter sa vie, tout comme Grand Frère Tum et Grande Soeur Fon.
Même si Arthit n'était pas parfait, il avait rêvé d'économiser de l'argent lorsqu'il commencerait à travailler, de s'installer, d'avoir une belle famille et de voir ses enfants et petits-enfants grandir jusqu'à un âge avancé.
… C'était une idée avant que Kongpob et lui ne choisissent de s'engager dans cette voie.
La relation entre “un homme” et “un autre homme” comporte de nombreuses limites… il ne pouvait s'empêcher de se demander si c'était bon pour eux. Même s'ils se sentaient liés l'un à l'autre, était-ce une bonne chose qu'ils s'engagent dans cette voie ? En fin de compte, leur avenir pourrait diverger et la relation entre Kongpob et lui devrait prendre fin.
… Tôt ou tard.
— P'Arthit, qu'en penses-tu ? P'Arthit ? … P'Arthit ?
La voix le sortit de sa rêverie et Arthit se rendit compte qu'ils s'étaient arrêtés de marcher et ne prêta pas attention à l'homme à côté de lui. Kongpob le regardait comme s'il attendait une réponse.
— Qu'est-ce que tu as dit ?
— J'ai pensé qu'il valait mieux acheter de la nourriture nutritive pour P'Fon. Elle devrait recevoir beaucoup de nutriments pour que le bébé soit en bonne santé. Qu'en penses-tu ?
— Umm… c'est bien.
Il acquiesça mais son cœur n'était pas impliqué dans l'idée, ce qui était inhabituel pour Arthit. Kongpob était déconcerté par son comportement mais il ne chercha pas à en savoir plus et continua ses achats.
— Alors… en ce qui concerne les nutriments, nous pouvons les acheter près des dortoirs pour ne pas avoir à les ramener d'ici.
— D'accord, oui.
Arthit fut d'accord avec cette idée cette fois-ci. Il serait plus utile pour la future maman de lui donner des nutriments comme du lait, ou des fruits comme des oranges, des bananes, des mangues... disposés dans un panier cadeau. La mission se termina en moins d'une demi-heure et ils n'avaient plus rien à faire.
— Eh bien, puisque nous avons un peu de temps, veux-tu aller voir un film ? Il devrait y avoir des séances de cinéma, demanda Kongpob en consultant sa montre.
Il était trop tôt pour déjeuner, mais il serait dommage de rentrer à la maison maintenant. Son compagnon ne répondit pas mais fixait ses yeux sur quelque chose.
— Ce fil… enlève-le. Il est sale.
Le jeune homme baissa les yeux sur le fil accroché à son poignet, au-dessus de la montre-bracelet.
Le fil blanc était devenu gris alors qu'il le portait depuis le jour de la saisie du drapeau, il y a plusieurs mois. Malgré les soins qu'il y avait apportés, la couleur s'était assombrie avec le temps. Il n'avait pas l'intention de l'enlever, cependant, parce que…
— C'est toi qui me l'as mis, alors je veux le garder ainsi.
… C'est le lien qui les unit.
Arthit ne savait pas ce qu'il devait ressentir… gêné, heureux, ou ému par les actions de Kongpob qui montraient qu'il prenait leur relation de plus en plus au sérieux chaque jour. L'homme confus choisit de se taire et accepta de regarder un film.
Ils prirent l'ascenseur pour se rendre au cinéma situé au dernier étage. Ils avaient le choix entre de nombreuses affiches et bandes-annonces, jusqu'à ce que le grand homme demande à nouveau l'avis de son compagnon.
— Y a-t-il quelque chose que P'Arthit veut voir en particulier ?
— Tu peux choisir quelque chose.
Il savait que Kongpob était un passionné de cinéma et qu'il en savait plus que lui. Kongpob acquiesça.
— Alors… attends-moi ici, s'il te plaît.
Kongpob se comporta encore une fois en gentleman et se dirigea vers la file d'attente du guichet pour prendre les billets. Il regarda les bandes-annonces, en quête de quelque chose. Il n'avait pas eu l'occasion de passer autant de temps seul avec Arthit et il ne savait pas si c'était stupide. Mais pour lui…
Il voulait avoir P'Arthit pour lui seul, ne serait-ce qu'une heure de plus.
Kongpob choisit donc un film qui, selon lui, plairait à Arthit et choisit leurs sièges avec soin. Lorsqu'il revint vers le plus âgé, Arthit était en train de fouiller dans sa poche et demanda :
— Combien ?
— C'est pour moi.
L'homme généreux sourit légèrement, mais en tant qu'aîné, il était hors de question qu'Arthit accepte l'offre. Il sortit un billet de cent bahts de son portefeuille et le glissa dans la main de Kongpob.
— Non, tu n'es pas obligé de faire ça. C'est combien ?
— Fais-moi plaisir. Nous sommes en rendez-vous.
La raison le laissa sans voix. Avant qu'il ne puisse dire quoi que ce soit, une voix douce les interrompit.
— Kongpob.
Tous deux se retournèrent et regardèrent la jeune fille vêtue d'une robe pastel.
Sa crinière de belles boucles brun doré encadrait son joli visage, digne du titre de reine de l'université. Alors que Praepailin s'avançait pour parler à Kongpob, ils avaient l'air d'un prince et d'une princesse rayonnants, éclipsant beaucoup de monde autour d'eux....y compris Arthit. C'est alors que la jeune fille le remarqua.
— Oh, Sawaddee ka, P'Arthit.
La jeune fille de première année leva la main pour rendre hommage à l'aîné, toujours intimidé par son image de bizuteur impitoyable. Elle se souvenait encore de la farce qu'il lui avait faite en lui ordonnant de crier qu'elle l'aimait bien. Mais le moment de tension disparut dès que Kongpob prit la parole d'un ton léger.
— Tu es là pour un film ?
Elle acquiesça et sourit à son ami.
— Oui, je suis ici avec mes amis. Qu'est-ce que vous allez voir ?
Kongpob prononça un titre dont Arthit n'avait jamais entendu parler, mais les yeux de Praepailin s'illuminèrent d'excitation lorsqu'elle l'entendit et exprima son approbation.
— Oh, je vais aussi voir celui-là. Je voulais le voir dès sa sortie. J'aime bien l'actrice et j'ai regardé tous ses films. Elle est vraiment douée.
— C'est vrai. J'aime quand elle joue des scènes intenses. Ses yeux expriment des émotions fortes et sont très puissants.
— Je sais, n'est-ce pas ?! Et le film est basé sur un livre. C'est un gros livre et j'ai mis du temps à le lire. Mais c'est un livre qui se lit d'une traite !
— J'ai lu ce livre aussi.
La conversation sur le sujet qu'il ne connaissait pas se poursuivit tandis qu'il regardait les deux cinéphiles parler avec enthousiasme l'un à l'autre. Praepailin demanda alors comme si elle venait de comprendre.
— Tu es seul ici ? Ou regardes-tu le film avec P'Arthit ? demanda-t-elle, curieuse, en jetant un coup d'œil à l'aîné.
Kongpob s'apprêtait à acquiescer mais l'autre homme intervint.
— Non, je suis là tout seul mais je l'ai croisé.
Kongpob se tourna vers l'homme à côté de lui. L'expression d'Arthit était neutre et rien ne permettait de dire qu'il mentait comme un arracheur de dents et Praepailin ne se méfiait pas.
— Je vois, le monde est petit. Bon… il faut que j'aille là-bas pour prendre les billets. Mes amies m'appellent. À bientôt, Kongpob. Et au revoir, P'Arthit.
La reine de l'université fit ses adieux et rendit hommage à l'ancien bizuteur par un wai avant de partir rejoindre ses amies. Les deux hommes se retrouvèrent à nouveau seuls, mais le silence était présent.
Arthit fit volte-face et se dirigea vers la salle indiquée sur le billet, Kongpob le suivant en gardant une certaine distance entre eux. Ils entrèrent quelques minutes avant le début du film et se laissèrent absorber par l'histoire. Malgré les scènes palpitantes avec beaucoup d'images de synthèse, Kongpob n'arrivait pas à se concentrer sur le film parce que ses yeux ne cessaient de regarder l'autre homme qui avait écarté la remarque de Praepailin, ce qui signifiait…
“Ils n'étaient pas ensemble.”
Il comprenait pourquoi P'Arthit avait menti à la jeune fille. Ils ne pouvaient pas révéler leur statut maintenant... parce qu'il n'y avait peut-être pas de statut, mais seulement lui qui se laissait emporter par ses propres suppositions. Il était heureux quand Arthit était là et ne lui demandait jamais s'il ressentait la même chose.
… Peut-être qu'il allait trop vite en besogne.
Deux heures et demie s'étaient écoulées en un clin d'œil. Le film était terminé et les lumières s'étaient allumées tandis que les gens commençaient à quitter le cinéma. Kongpob regarda sa montre qui indiquait près de 14 heures. L'heure du déjeuner étant passée, il demanda à son voisin :
— As-tu faim, P'Arthit ?
— Un peu.
— Devrions-nous aller dans le même restaurant de nouilles ?
— D'accord.
La conversation semblait stagner, et Kongpob sentit la résignation dans la voix de l'autre homme, mais n'en dit rien. Il se contenta de suivre Arthit jusqu'à l'arrêt de bus, et ils prirent trois autres arrêts avant de descendre et de marcher dans la même rue que celle où ils avaient été. La boutique de nouilles n'avait pas beaucoup de clients, ils trouvèrent donc une table pour s'asseoir et appelèrent le serveur.
Kongpob ne commanda pas la même soupe claire avec des nouilles fines que la fois précédente, mais un grand bol de nouilles Tom Yum au ragoût de porc. C'était le plat fétiche de quelqu'un qui l'avait taquiné en échangeant leur nourriture et Arthit s'était moqué de lui pour son choix de nourriture fade. Cette fois-ci, lorsque les nouilles arrivèrent enfin, l'autre homme ne dit rien. Il prit le bol et commença à manger sans dire un mot. Kongpob le regarda un moment, remarquant qu'il agissait différemment, avant de lui demander.
— Tu ne te sens pas bien ?
— Non, je vais bien.
— Alors, tu n'as pas aimé le film que j'ai choisi ?
— C'était bien.
Le plus vieux était si économe de ses mots qu'il n'invitait à aucune autre discussion. Il pensa qu'Arthit était peut-être fatigué et qu'il n'était pas d'humeur à discuter, alors il commença à manger ses nouilles tranquillement. Il n'avait terminé que la moitié du bol lorsque l'autre homme prit la parole.
— Tu trouves que Prae est mignonne ?
Les baguettes de Kongpob s'arrêtèrent devant cette question soudaine. Il commença à se demander pourquoi P'Arthit lui posait cette question singulière. Mais il répondit quand même.
— Oui, c'est la reine élue.
Le regard acéré de P'Arthit vacilla un peu, mais reprit son intensité normale avant que Kongpob ne s'en aperçoive.
— Oui, elle est adorable et je me demande si elle a un petit ami.
— Mes gars m'ont dit que non.
— Vraiment ? J'ai son numéro de téléphone. Je l'ai eu quand elle m'a demandé ma signature.
Ce qu'il entendit lui fit chavirer le cœur, tombant à ses pieds.
Oui, Prae était une fille gentille et aimable, une fille parfaite de la faculté, et une petite amie désirable pour beaucoup de gars. Il n'avait jamais réalisé qu'Arthit était l'un d'entre eux. De quel droit pouvait-il se plaindre puisqu'il ne pouvait pas forcer les sentiments de l'autre ?
Si Arthit avait des sentiments pour quelqu'un, il devait le reconnaître.
— Ah oui ? C'est bien.
— Mmm.
Arthit acquiesça sèchement… et la conversation s'arrêta là, tandis qu'ils retournaient tous deux à leurs nouilles. Kongpob trouvait que le ragoût de porc n'était pas aussi bon que la première fois qu'il l'avait mangé, mais il l'engloutit jusqu'à ce qu'il soit rassasié. Après avoir payé leur repas, ils partirent et se promenèrent sans but précis.
— P'Arthit, tu veux aller quelque part ?
— Plus maintenant.
— On rentre à la maison ?
— Mmm.
Dans le bus, Arthit regardait par la fenêtre et Kongpob avait un million de questions en tête. Il ne savait pas par où commencer et se contenta de les laisser glisser en silence.
Ils arrivèrent au campus où se trouvait l'arrêt de bus. Kongpob raccompagna Arthit chez lui, car ils habitaient l'un en face de l'autre. Dans la rue où ils s'apprêtaient à tourner, une moto roulait sur la voie qui se dirigeait droit sur eux, doublant une voiture et manquant de percuter les piétons qui n'avaient pas fait attention.
— P'Arthit, attention !
Le grand homme tira la main d'Arthit pour qu'il s'engage sur le trottoir, échappant de peu à la collision. Il examina rapidement le corps de l'autre pour y déceler le moindre signe de blessure.
— Tu vas bien ?
— Je vais bien. Tu n'avais pas à t'inquiéter pour moi.
L'homme qui avait failli être percuté murmura et retira sa main comme s'il ne voulait pas être touché. Il continua à marcher sur la route, ignorant le jeune homme derrière lui.
...Il savait qu'Arthit n'aimait pas être touché et se mettait en colère chaque fois qu'il essayait de l'approcher. Cette fois-ci, c'était différent... comme s'il y avait une grande distance entre eux.
Peut-être qu'Arthit en avait assez de son comportement enfantin et de la façon dont il repoussait les limites de son aîné. Peut-être qu'Arthit était trop gentil pour lui dire non en face.
Les yeux de Kongpob suivirent l'autre homme qui s'éloignait et regardèrent le vieux fil terne sur son poignet gauche.
Peut-être que quelqu'un voulait qu'il l'enlève, mais il était trop têtu pour le faire. Au fond de lui, il était si effrayé et incapable de demander si...
… L'autre homme voulait aussi récupérer son engrenage.
La cantine était toujours aussi bondée.
Aujourd'hui, la chance était du côté des étudiants de première année, car le professeur avait terminé son cours plus tôt. Ils avaient pris une grande table avant les autres cours et se détendaient pour savourer les repas. Ils continuèrent à grignoter jusqu'à être rassasiés, laissant une assiette vide avec plus de dix bâtonnets de boulettes de viande en guise de preuve.
— Maintenant, il faut partager. Ne crois pas que je vais payer tout seul.
M fit un geste de la main pour demander l'argent alors que tout le groupe dévorait les boulettes de viande qu'il avait achetées. Certains d'entre eux essayaient encore de s'enfuir en donnant une excuse.
— Allez… sois gentil, mec. La fête de remerciement approche et je n'aurai pas assez d'argent pour leur offrir des cadeaux.
Tew essaya de rendre son ami compatissant, en parlant du festival des cadeaux qui était sur le point d'arriver. Mais M répliqua.
— C'est toi qui devrais être gentil, mec ! P'Nu m'a demandé de lui offrir deux boîtes de Ferrero Rocher. Je vais être fauché ! Mais ce n'est pas aussi grave que ton cas, n'est-ce pas, Kong ? Tu dois aussi donner quelque chose à tes co-mentors, non ?
La question n'attira pas seulement l'attention de Kongpob mais aussi celle de Tew qui demanda, déconcerté.
— Vous avez des co-mentors ?
— Le mentor qui a obtenu son diplôme s'est marié avec un autre code, nous sommes donc liés comme le veut la tradition.
Les hommes acquiescèrent. Les cadeaux de remerciement n'incluaient pas seulement les mentors directs, mais aussi les mentors de soins et les mentors de l'école. Les cadeaux pouvaient être petits ou grands, car l'objectif de la fête de remerciement des seniors était de renforcer les liens entre les pairs du département.
Kongpob devait préparer quelque chose pour ses mentors de code. Même s'il n'était pas très proche d'eux, ils l'aidaient toujours. P'Ple lui donnait toujours à manger, P'Noomnoon et P'Paak le saluaient et lui demandaient toujours comment il s'en sortait à l'école. Quant aux co-mentors, il ne connaissait que le deuxième et le troisième année. Mais en ce qui concerne la troisième année du code 0206, il y avait quelque chose de plus.
Il devrait trouver quelque chose à donner à P'Arthit pour le remercier, mais il ne savait pas ce que l'autre homme voulait. Autrement dit, Arthit ne lui avait jamais parlé de lui.
Ce qu'il aimait. Ce qu'il était. Kongpob l'avait découvert en l'observant. Bien que leur relation ait fait un pas en avant, il avait toujours l'impression de courir après l'autre sans voir la ligne d'arrivée. Lorsque lui revint à l'esprit ce qui s'était passé récemment, il se sentit encore plus ébranlé.
Il ne cherchait jamais à montrer ses sentiments à Arthit, mais au fond de lui... il admettait que parfois…
… il était fatigué.
Plus il y pensait, plus cela le touchait profondément et le faisait souffrir. Alors il essaya de se changer les idées et se concentra sur M qui prenait de l'argent aux gars pour les boulettes de viande. Il se leva et chercha à tâtons l'argent dans son pantalon d'uniforme. Mais quelqu'un pensa qu'il partait et demanda .
— Excuse-moi, est-ce que la table est déjà prise ?
Kongpob se tourna vers la personne derrière lui et fut surpris de voir un visage familier.
— Prae.
— Oh, c'est toi. Je ne t'avais pas reconnu de dos.
Praepailin sourit lorsqu'ils se croisèrent à nouveau et jeta un coup d'œil à la table, demandant .
— Alors, vous avez fini ? Je peux prendre la table ?
— Nous partons.
M s'empressa d'intervenir.
Ils étaient des gentlemen d'ingénierie qui ne diraient pas non à la demande d'une belle fille. Ils s'empressèrent donc de prendre les assiettes et les tasses vides, nettoyant la table pour montrer leur générosité tandis que Kongpob s'écartait.
— Tu peux t'asseoir maintenant, Prae.
— Merci. J'attends que mon ami prenne son repas.
Elle jeta un coup d'œil vers le stand de nourriture où s'étirait une longue file d'attente de clients. D'autres personnes continuaient d'arriver à la cantine.
… Y compris le groupe d'étudiants de troisième année qui venait d'arriver. Mais dès qu'ils virent la foule, ils voulurent partir.
— Je t'avais dit qu'on ferait mieux d'aller manger ailleurs.
Arthit grommela en marchant avec ses amis. On aurait dit qu'il y avait un jeu de chaises musicales dans la cantine et c'était exaspérant.
Pourtant, il faut nourrir son homme donc il fallait faire le plein d'énergie avant de poursuivre l'importante mission de l'après-midi.
— Tiens, Arthit, ton stylo.
Knot lui tendit le stylo qu'il avait emprunté pour noter les détails et lui fit part des dernières nouvelles.
— J'ai appelé l'usine d'Amphawa.
La mission consistait à contrôler une usine industrielle dans le cadre des cours obligatoires destinés à mettre les étudiants en situation réelle pendant les deux mois de vacances d'été. Cela ressemblait à un stage, sauf qu'avant de pouvoir commencer, ils devaient obtenir l'approbation du professeur. Ils avaient choisi une usine à Amphawa parce qu'elle n'était pas trop éloignée du campus. La famille de Knot dirigeait également un centre de villégiature dans la région, ce qui leur a permis de bénéficier d'un hébergement gratuit et d'avoir la possibilité de prendre des vacances. C'était faire d'une pierre deux coups.
— A quelle heure est le rendez-vous ?
— Samedi prochain, à huit heures.
L'horaire fit grimacer Arthit. Il voulait retirer ce qu'il avait dit en disant que c'était un projet facile. Pourquoi Knot prendrait-il un rendez-vous si tôt ? Il préférait passer une journée de farniente à la maison et se lever tard plutôt que de se lever si tôt, comme le samedi précédent où il avait rendez-vous avec Kongpob.
Le nom qui lui venait à l'esprit le mettait mal à l'aise, car les souvenirs surgissaient, refusant de quitter son esprit en paix, même s'il essayait de s'en débarrasser.
La fois où Praepailin et Kongpob avaient eu une conversation palpitante l'un avec l'autre.
Il ne s'était pas senti mal à l'aise d'avoir été exclu de la conversation. Il pensait qu'ils allaient bien ensemble, qu'ils allaient bien ensemble. Mais au fond de lui, il y avait un malaise dans ses tripes.
— Tu prépares les questions afin que nous puissions obtenir suffisamment de données pour la mission.
Knot lui rappela le projet et Arthit demanda.
— Au fait, j'ai quelque chose à demander.
— Qu'est-ce que c'est ?
— Si tu sais que deux personnes sont parfaites l'une pour l'autre, mais que tu es quand même contrarié de les voir ensemble... est-ce que c'est de l’envie ?
L'autre homme fut déconcerté par la question de son ami. Elle était loin d'être liée à leur mission et ressemblait davantage à une question posée lors de l'émission Club Friday. Bien qu'il ne soit pas un gourou de l'amour, il pouvait voir dans l'attitude de son ami que ce n'était pas seulement de l’envie... mais plutôt quelqu'un qui l'était.
— Hé, là-bas. Les mentorés de code s'en vont.
Nu dit et s'approcha du groupe de nouveaux élèves qui avaient porté les sacs et pris les assiettes pour les ranger. L'un d'entre eux était la belle pierre précieuse.
— C'est la reine de l'université. Elle est super mignonne.
Arthit regarda la fille et remarqua qu'il n'y avait pas que la reine. Le roi était également présent et parlait avec animation à la belle. Il voulut faire demi-tour et partir en disant à Nu de trouver d'autres tables, mais il était trop tard. Son ami se dirigeait lui aussi vers son protégé.
— M, vous avez fini ? Alors levez-vous ! Et toi, ma belle, tu as déjà mangé ? Tu veux t'asseoir avec moi ?
L'intention cachée et flagrante du dragueur de troisième année fit huer les gens, surtout M qui se fit chasser, se plaignant que leur lien de code soit si facilement rompu à cause d'une fille. Nu fit claquer sa langue
— Il n'y a pas d'autre choix que d'aller voir ailleurs. Tu peux me donner un seul Ferrero Rocher. Laisse-moi une chance. Alors… qu'en dis-tu, ma belle ?
La dernière phrase était adressée à Praepailin qui semblait mal à l'aise alors qu'elle essayait de trouver une explication.
— Le fait est que… euh…
— Prae a demandé cette table pour elle et ses amis. Si vous vous joignez à nous, je crains qu'il n'y ait pas assez de places.
Arthit regarda Kongpob qui prit la parole. Debout à côté de Praepailin, il avait l'air d'un héros de roman qui protégeait sa femme et Nu avait dû reculer, perdant face à l'éclat du vrai protagoniste. Mais il ne se laisserait pas vaincre sans rien dire.
— Alors, tu la protèges. Il y a quelque chose entre vous ? D'accord, alors. Nong Prae peut prendre toute la table. Je vais en chercher une autre.
Le dragueur se transforma en martyr et se retira avec ses amis, comme le feraient de vrais hommes. Alors que la troisième année s'en allait, Kongpob remarqua que quelque chose était tombé de la poche de quelqu'un. Il se pencha pour le ramasser et tendit automatiquement la main à l'autre homme.
— Attends, P'Arthit.
— Ne me touche pas !
Arthit cria et retira son bras, ce qui fit lâcher prise à Kongpob qui regarda l'autre homme. Le troisième année avait l'air choqué alors il s'empressa de donner une explication.
— Tu as fait tomber ton stylo et je voulais juste te le rendre.
— Merci.
Le garçon marmonna et prit le stylo. Il se retourna et suivit rapidement ses amis sous le regard des gens, surpris par sa réaction.
— Qu'est-ce qui ne va pas avec P'Arthit ? Il n'était pas obligé de te crier dessus comme ça.
Praepailin évoqua la réaction excessive du troisième année et les autres camarades se joignirent à elle. Tout le monde y voyait un acte injustifiable, mais pour Kongpob, c'était logique.
Le rejet évident d'Arthit lui indiquait qu'il ne s'agissait pas seulement de ne pas vouloir être touché ou de ne pas vouloir que Praepailin le voie, et cela le secouait au plus profond de lui-même, laissant une profonde entaille dans son cœur.
Il avait entendu dire qu'aimer quelqu'un n'était qu'un début. Ceux qui tombaient amoureux devaient supporter les nombreuses émotions qui suivaient. Plus ils se rapprochaient de l'être aimé, plus ils étaient facilement ébranlés par les paroles de l'autre. Et certains mots pouvaient provoquer une rupture.
Plus il essayait de s'emparer de lui, plus il s'éloignait…
Peut-être avait-il oublié que… tous deux suivaient un chemin parallèle… comme le Soleil et la Lune dans le même ciel mais jamais en même temps.
Un chemin qui ne se croiserait peut-être jamais pour qu'ils puissent marcher ensemble.
Le vendredi soir à Amphawa était aussi charmant qu'un marché flottant devrait l'être.
De nombreux magasins étaient ouverts : magasins d'alimentation, vêtements et accessoires, bibelots créatifs et souvenirs. De nombreux clients étaient en train de faire du shopping et il y avait beaucoup de jolies filles sur lesquelles les ingénieurs célibataires pouvaient se pâmer et bavarder pour agrémenter leur voyage. Pourtant, quelqu'un se comportait comme s'il ne s'amusait pas du tout.
— Hé, Arthit ! Tu as laissé ta bouche à la maison ?
Knot taquina son ami silencieux comme s'il avait peur de parler. Il avait même l'air malheureux pendant tout le voyage, ignorant toutes les lumières et tous les sons et agissant comme s'il avait le cœur brisé.
— Tu t'es disputé avec ta copine ?
L'hypothèse le fit sursauter et reprendre la parole.
— Bien sûr que non ! Je ne suis pas en couple !
Il ne savait pas pourquoi cette réponse lui faisait mal au cœur.
… C'était vrai, n'est-ce pas ? Ce qu'il y avait entre Kongpob et lui, il n'en avait aucune idée, et surtout ce qu'il avait fait avait rendu les choses encore plus confuses.
Lorsqu'il avait retiré son bras du jeune homme, ce n'était pas par répulsion, mais sous l'effet de la chaleur du moment. Il n'arrivait pas à cerner son trouble lorsqu'il avait vu Kongpob avec Praepailin. Plus il essayait de trouver une raison, plus cela le laissait perplexe.
— … J'ai juste mal à la tête.
Arthit éluda la question. Peut-être que les gars eurent pitié de lui ou qu'ils furent satisfaits de la balade, ils décidèrent de retourner à l'hôtel de Knot. Il s'agissait d'une maison-jardin au bord d'une rivière avec une vue pittoresque. Avec ce type de paysage, ils devaient boire avec la lune jusqu'à ce qu'ils soient un peu étourdis, sans se soucier du fait qu'ils devaient travailler tôt à l'usine.
Arthit n'était pas d'humeur à boire et à parler. Après s'être assis avec eux et avoir écouté la conversation, il s'excusa pour se rendre à la salle de bain et se promena dans la station. Repérant un petit pavillon au bord de la rivière, il s'y dirigea pour s'asseoir et se détendre, profitant de ce moment pour réfléchir. C'est alors qu'une voix se fit entendre derrière lui.
— Tu as toujours mal à la tête ? Je t'ai apporté des médicaments.
Arthit regarda son ami qui l'aidait. C'était le même gars qui l'avait taquiné. Il n'avait pas de médicaments dans la main, mais une canette de bière fraîche. Il sourit, pensant que son ami le connaissait trop bien, et lui prit la bière. L'alcool est l'un des meilleurs remontant pour se débarrasser des soucis.
Ils ouvrirent les deux canettes et sirotèrent la bière en regardant la rivière sombre dans la nuit. Knot finit par rompre le silence.
— Tu peux tout me dire.
Ils étaient amis depuis longtemps, suffisamment longtemps pour savoir comment était l'autre. Arthit savait que son ami s'inquiétait pour lui. Il valait peut-être mieux qu'il se confie à quelqu'un. Peut-être trouverait-il une solution qu'il n'obtiendrait pas en boudant seul.
— Ne ris pas quand tu l'entendras.
Arthit raconta tout à son ami, depuis qu'il avait découvert les sentiments qu'il éprouvait pour Kongpob et qui s'étaient transformés en quelque chose d'autre qu'un lien fraternel. Et de tout ce qui s'était passé entre eux.
Knot ne sembla pas surpris, comme si cela sortait de la norme ou n'était pas naturel. Il restait assis, écoutant sans donner son avis. Vers la fin de son histoire, il demanda.
— J'ai essayé de ne pas trop penser, mais je n'ai pas pu m'en empêcher. Il y a des limites entre deux hommes - les familles, la société et les enfants. Je ne vois pas où notre relation pourrait mener. Alors, je ferais mieux de le laisser avec la bonne personne maintenant… quelqu'un de mieux que moi, n'est-ce pas ?
C'était comme arracher un bandage et c'était la bonne chose à faire. Ils seraient peut-être heureux pour un temps, mais dans les années à venir, les choses changeraient. Il préférait laisser Kongpob rencontrer la bonne fille et ne pas se priver d'une bonne occasion de trouver la bonne personne, avant que leurs sentiments n'atteignent un point de non-retour.
Knot porta la bière à ses lèvres, essayant d'assimiler toute l'histoire, et demanda.
— Alors… regrettes-tu d'être avec lui ?
Arthit leva les yeux vers son confident et secoua la tête.
— Non. J'ai peur qu'il regrette d'être avec moi.
— Tu lui en as parlé ?
… Non, il n'avait pas demandé à Kongpob. Il n'aurait pas eu le courage d'exprimer franchement ses sentiments, et comme il ne le pouvait pas, il avait dû y réfléchir, ce qui ne lui ressemblait pas du tout.
— Alors… tu ne lui as pas demandé. Qu'est-ce que tu es ? Un médium ? Comment as-tu pu savoir ce qu'il avait en tête et projeter tes propres pensées ?
— Ce n'est pas ça. Je m'inquiète juste pour son avenir.
— Alors, tu t'inquiètes plus de l'avenir que tu ne peux pas voir que de la personne que tu peux voir juste en face de toi ?
Les mots lui transpercèrent le cœur et Knot regarda son ami qui devint silencieux, perdu dans ses pensées.
… Arthit n'avait pas tort d'être troublé. Quand on s'intéresse à quelqu'un, il est naturel d'être obsédé par cette personne. Plus la personne est importante pour vous, plus vous vous attachez à elle, même si vous ne vous en rendez pas compte. Parfois, il est préférable de défaire les nœuds et de prendre du recul pour examiner le problème. On y voit alors plus clair et on trouve un moyen de s'en sortir. Malgré tout, Knot devait encourager son ami à continuer.
— Au fait… la frustration que tu ressentais quand tu le voyais avec la fille n'était pas due à l'envie. Le terme technique est “jalousie”.
Les yeux d'Arthit s'écarquillèrent de stupéfaction et il s'écria.
— Espèce de salaud ! Je ne suis pas jaloux !
L'autre homme redevint lui-même, le type irrité qu'il avait toujours été, et Knot rit.
— Peu importe, mec. Mais tu peux lui dire ce qui te tracasse. Vous ne vous comprendrez pas si tu ne lui dis pas ce que tu ressens.
Le gourou des relations souligna et se leva, s'apprêtant à quitter le pavillon.
— Je vais chercher d'autres bières.
— Je viens avec toi.
— Attends ici. Je vais les chercher.
— Je ne vais pas chercher la bière. Je vais au marché.
Knot marqua une pause. Son ami avait l'air d'un zombie lorsqu'ils étaient au marché. Maintenant, il demandait à y aller. Il regarda sa montre qui indiquait qu'il était minuit passé et objecta.
— Il est tard. Le marché est fermé.
— Mais je veux y aller.
L'autre homme insista, ses yeux brillaient de détermination et d'intention. Knot ne put dire non et laissa échapper un léger soupir en cédant.
— D'accord… je t'y conduis.
— Merci.
Knot acquiesça aux paroles de son ami. Il n'avait aucune idée de la raison pour laquelle Arthit voulait aller au marché maintenant, mais peut-être qu'il avait finalement choisi.
… La seule chose qui comptait vraiment pour lui.
La soirée de remerciement du génie industriel se tenait à 18 heures le samedi soir.
La réception était chaleureuse car tous les mentors et mentorés de toutes les années étaient présents pour discuter, rire et prendre des photos ensemble. Les étudiants de première année avaient offert de petits cadeaux pour montrer leur gratitude envers leurs mentors qui avaient pris soin d'eux toute l'année. Certains mentors avaient apporté des cadeaux à leurs mentorés en guise d'échange de bons procédés.
… Tout le code 0062 était là. Kongpob avait préparé un cadeau pour chaque mentor. Ils n'étaient pas chers, mais ils avaient été soigneusement choisis pour la personne. Il reçut des collations de la part de ses trois mentors et prit le temps de saluer ses co-mentors 0206 qui étaient également présents. Ils formaient un grand groupe, à l'exception d'un homme qui ne s'était pas montré alors que l'événement avait commencé il y a une demi-heure. P'Ple le remarqua et demanda, surpris.
— P'Arthit n'est pas là ?
— Il m'a appelé pour me dire qu'il devait participer à une excursion à Amphawa jusqu'à tard. Il ne viendra pas aujourd'hui.
Lin, l'élève du code 0206, annonça la nouvelle à tout le monde. Kongpob ne l'apprenait que maintenant, comme les autres. Il avait préparé un cadeau pour Arthit, mais cet effort était vain car il ne parviendrait jamais à l'autre homme.
… Tout comme son cœur.
Peu importe où il allait, ou avec qui, Arthit ne le lui avait jamais dit. La dernière fois qu'ils s'étaient rencontrés, Kongpob avait même douté de l'importance qu'il avait encore pour Arthit.
Leur relation n'avait pas d'étiquette. Elle faisait palpiter son cœur et lui donnait parfois des fourmis dans les jambes. C'était une arme à double tranchant qui nuisait à leur relation à cause de l'incertitude. Ils ne pouvaient jamais vraiment savoir ce que l'autre avait en tête.
Si cela continuait ainsi, Arthit ferait mieux de le lui dire en face. S'il ne voyait aucun espoir dans leur relation, Kongpob l'accepterait. Tout ce qu'il demandait, c'était qu'Arthit ne soit pas distant et ne lui inflige pas un traitement silencieux comme ça. Au moins, le plus âgé pouvait lui donner une réponse à la question qui s'était gravée dans son esprit…
… Alors, qu'étions-nous l'un pour l'autre ?
— P'Arthit est là.
L'exclamation de P'Ple fit s'arrêter Kongpob qui leva la tête alors que l'homme entrait dans la salle avec son groupe d'amis. Ils n'étaient pas les seuls à être surpris car P'Ple demanda à ses protégés 0062 et 0206 de s'approcher d'eux. C'est alors qu'il entendit l'un des amis d'Arthit prendre la parole.
— Tu avais dit que tu ne viendrais pas.
Nu taquina son ami, sachant qu'il serait tard lorsque ses amis auraient fini le travail. D'après les calculs, s'ils venaient en voiture, ils arriveraient à destination alors que l'événement serait presque terminé. Knot, qui était le chauffeur, dit, fatigué.
— Je ne serais pas venu mais Arthit m'a dit d'accélérer. Nous avons failli être arrêtés par la police.
— Hein ? Tu es si désespéré d'obtenir les cadeaux des élèves de première année ?
La supposition moqueuse fit que le gars taquiné lança un regard noir à son ami en protestant.
— Tais-toi, Nu ! J'ai apporté quelque chose pour mes élèves ! dit Arthit à l'arrivée de ses protégés. Il souleva le sac de souvenirs et en sortit les cadeaux qu'il leur donna.
— Voici vos souvenirs.
C'était un porte-clés avec de petites lucioles, le symbole d'Amphawa. Il en mit un dans la main de chaque mentoré, y compris dans celle du co-code avec Kongpob, qui était le dernier de la file d'attente. Ses yeux rencontrent brièvement ceux d'Arthit. Alors que l'homme plus âgé se retournait pour partir, Kongpob l'arrêta.
— Attends, P'Arthit. J'ai quelque chose pour toi.
Le plus âgé se retourna et vit Kongpob prendre quelque chose dans sa besace. Il s'agissait d'une simple carte blanche, comme une carte de vœux classique. C'était un cadeau pour la fête de remerciement, Arthit la saisit et l'ouvrit pour lire le message qui exprimait une myriade d'émotions.
Chaque mot de la carte fit palpiter son cœur.
P'Arthit,
P'Arthit… Je t'ai dit que je voulais que tu m'écrives une lettre d'amour, mais aujourd'hui c'est moi qui l'écris. J'espère que tu ne m'en voudras pas.
J'ai tellement de choses à te dire, mais j'ai peur qu'il n'y ait pas assez de place sur une page. Je ne trouve pas les mots pour décrire mes sentiments car les mots ne peuvent pas exprimer la gratitude que j'ai envers toi.
Je veux te remercier pour tes enseignements tout au long du bizutage qui m'ont fait comprendre des choses que je ne savais pas.
Je veux te remercier pour ta gentillesse, pour avoir pris soin de moi et pour avoir fait tant de choses pour moi.
Je veux te remercier pour ton sourire. Ton rire a transformé mes journées ordinaires en journées spéciales...
Et je veux te remercier… de m'avoir permis de t'aimer.
Chaque fois que nous sommes proches, tu réalises à quel point je suis heureux ? Je suis probablement en train de me comporter comme un idiot, d'être si têtu, de te taquiner et d'être indulgent que tu es finalement fatigué de moi.
Alors, je ne vais pas te demander de m'aimer. Mais quoi qu'il arrive, la seule chose qui compte pour moi, c'est toi, P'Arthit. Tu es mon seul Soleil, et je te promets que tu seras toujours le seul pour moi.
Kongpob
Arthit se souvint que Kongpob avait dit qu'offrir une carte à quelqu'un était romantique parce que la carte elle-même n'était pas porteuse de sens, mais que le texte l'était. Il comprenait maintenant pourquoi.
Il ressentait chaque mot, chaque phrase, et les sentiments profonds que Kongpob éprouvait pour lui. C'était à son tour de lui dire la vérité.
— Donne-moi ta main.
L'ordre soudain déconcerta Kongpob, mais il s'exécuta en tendant la main droite.
— L'autre.
Il ne savait toujours pas pourquoi il avait donné à Arthit la main gauche portant le fil sacré. Ce qu'Arthit fit ensuite lui fit écarquiller les yeux et sombrer le cœur : le plus âgé dénoua le fil et le retira de son poignet... comme s'il rompait les liens qui les unissaient.
… C'était la réponse de P'Arthit ?
L'autre homme continua en tirant de sa poche deux simples ficelles brunes. Elles avaient l'air classiques mais solides, et le troisième année commença à les attacher au poignet du jeune homme. Il lui donna l'autre corde avec un dernier ordre.
— Mets-le-moi.
Le cœur de Kongpob se remit à battre à ce moment précis lorsqu'il réalisa que la réponse d'Arthit n'était pas qu'il voulait se couper de lui.
… mais créer un lien plus fort entre eux.
Il attacha avec précaution la corde au poignet gauche d'Arthit. Cela n'échappa pas à l'œil de lynx de quelqu'un.
— Oh, vous vous attachez l'un à l'autre comme deux petits amis.
Les deux hommes s'arrêtèrent, entendant les mots de Nu qui attiraient l'attention sur eux sous le regard des gens dans la salle. Kongpob cherchait une excuse, craignant qu'Arthit ne s'énerve à nouveau. Mais c'est le plus âgé qui prit la parole en premier.
— Oui, nous sommes ensemble ! Et alors ?!
… Toute la salle se tut - tous les mentors et mentorés du code, les étudiants de première année comme ceux de dernière année.
Personne ne dit un mot. Puis, une forte acclamation éclata autour des deux hommes qui affichaient leur relation au grand jour. Il y eut des murmures, disant que la chance avec le roi de l'université venait de s'évanouir. Certains demandèrent quand ils avaient commencé à avoir des sentiments l'un pour l'autre, ou même la question de leur vie privée, à savoir si l'impitoyable chef bizuteur était réellement gay.
Arthit ne prêtait pas attention aux bavardages. Il entraîna Kongpob, coupant à travers la foule, pour sortir derrière le bâtiment de la faculté. C'était calme et ils étaient enfin seuls. Il lâcha la main du jeune homme et se tourna vers lui pour la première fois.
— Tu te souviens que je ne t'ai toujours pas parlé de notre pari ?
Le pari qu'ils avaient fait… lorsque Kongpob avait perdu lors des Jeux d’Ingénierie Games et qu'il devait encore son dû à Arthit. Il ne pouvait pas l'oublier.
— Oui, je me souviens. Que vas-tu me demander de faire ?
Arthit resta silencieux un moment, comme s'il calculait. Puis il releva la tête et dit.
— Je ne sais pas ce que l'avenir nous réserve à tous les deux, mais je voudrais te demander une chose…
Les yeux vifs d'Arthit fixèrent ceux de Kongpob alors qu'il s'apprêtait à dire quelque chose du fond de son cœur.
— Ce que je veux maintenant, c'est que tu saches que tu es la seule personne pour laquelle j'ai des sentiments. Tu es la seule que j'aime.
… Aime.
Ce mot d'une seule syllabe… lui disait tout. Il témoignait de leur relation, claire comme de l'eau de roche et plus forte que tout. Il chassa tous ses soucis et les remplaça par un immense sentiment de gratitude.
Kongpob attira Arthit dans ses bras, l'enlaçant, sans craindre que l'autre ne le repousse. Même si Arthit s'enfuyait, il n'hésiterait pas à le rattraper pour une raison bien précise.
— Oui, je sais. Je veux que tu saches que tu es le seul que j'aime aussi.
Le murmure à son oreille le fit trembler.
Arthit ne recula pas. Il se rendit compte que même si leur histoire se terminait dans le futur, il voulait profiter de ce moment aussi longtemps qu'il le pouvait. C'était un bon souvenir que d'avoir enfin choisi d'être avec la personne à laquelle il tenait le plus.
… Et cette personne était Kongpob.
Un souffle chaud effleura son visage et Arthit plongea son regard dans les yeux du jeune homme. Ils brillaient comme des étoiles. Il ferma lentement les yeux et leva le menton pour accueillir le plus doux des baisers de tout son cœur.
… Leur deuxième baiser était né de l'amour.
La forte étreinte libéra finalement Arthit, et l'homme plus âgé réalisa qu'il s'était oublié et avait fait quelque chose en public derrière le bâtiment de la faculté. Et si quelqu'un passait par là et les voyait ? Malgré son annonce, il connaissait la honte et ne voulait pas devenir l'objet de moqueries.
… L'embarras l'envahit et son visage rougit, ne sachant que faire. C'est alors que Kongpob prit la parole.
— J'ai une autre chose à te demander.
— Qu… quoi ?
— P'Arthit, aimes-tu Prae ?
Arthit regarda son compagnon, interloqué par la question, et rejeta rapidement.
— Quoi ? Je ne l'aime pas ! Mais tu l'aimes bien, n'est-ce pas ?
Arthit renvoya la question au plus jeune. Il savait que les deux étaient proches, trop proches, mais le grand homme secoua la tête et expliqua.
— Comment pourrais-je l'aimer ? Elle aime les femmes.
— Quoi ?
La révélation frappa Arthit à la tête mais l'autre homme continua.
— Elle me l'a dit lors du concours du roi et de la reine.
— Pourquoi tu ne me l'as pas dit ?!
— Eh bien, elle m'a demandé de garder le secret, alors je ne t'ai rien dit. Mais pourquoi as-tu demandé ? Ou… es-tu jaloux ?
— Je ne suis pas jaloux !!
Arthit hurla sur l'allégation qu'il entendait pour la deuxième fois, et se tourna pour partir, frustré comme toujours. Cette fois, Kongpob commençait à comprendre. Il avait cherché à comprendre pourquoi, parfois, P'Arthit ne voulait pas de lui. En fait, P'Arthit était juste… en train de bouder.
Bien sûr, il était de son devoir de s'amender. Il s'apprêtait à suivre Arthit mais l'autre homme s'arrêta et se retourna comme si quelque chose venait de lui tomber dessus.
— Es-tu libre samedi prochain ?
Surpris par cette question soudaine, il acquiesça tout de même.
— Oui. Tu veux encore faire du shopping ?
Il devina. L'autre homme secoua la tête et lui donna une réponse qui laissa Kongpob sans voix.
— Non, j'allais t'inviter à sortir.
Pour la première fois depuis de nombreux jours, Kongpob afficha un grand sourire.
Demain… peu importe ce qui se passerait, ce que les gens diraient d'eux ou ce que l'avenir leur réservait, cela n'avait pas d'importance tant que la Lune et le Soleil restaient ensemble dans le ciel. Ils chériront tous deux les jours passés ensemble et laisseront quelque chose les guider.
Une chose que Kongpob et Arthit connaissaient de tout leur cœur.
… Quelque chose qui s'appelle l'amour. | | Messages : 553
Date d'inscription : 13/07/2024
| Johanne Ven 27 Sep 2024 - 17:34 Chapitre Spécial 5 Quand Arthit était un première année Arthit Rojanaphat était un étudiant de première année typique.
Il avait une apparence typique. C'était un gars typiquement amical. Il avait une vie heureuse et typique sur le campus. Et son bizutage était…
… typiquement normal.
— Votre classe est vraiment nulle !
Un cri fort au milieu de la salle d'activité était un événement typique pour les étudiants en ingénierie, en particulier le département d'ingénierie qui était connu pour être le plus féroce. Cela se voyait à la façon dont un étudiant de troisième année à l'allure chinoise et portant des lunettes mettait les étudiants de première année sous pression.
Ils l'appelaient “P'Tum”, alias “le grand frère de l'enfer”… pour ne pas dire plus. Ce surnom lui venait de son espièglerie et de son langage grossier que les étudiants de première année devaient supporter tous les jours.
— Je n'ai jamais vu une classe comme celle-ci ! Hier, vous êtes passés devant mes amis et avez refusé de leur faire un wai. Vous ne nous avez pas considérés comme vos seniors, n'est-ce pas ?
Les élèves de première année gardaient la tête baissée, ne voulant pas répondre, en partie parce qu'ils se faisaient souvent gronder alors que l'initiation avait commencé deux semaines plus tôt. C'était toujours la même chose pour eux, comme un disque rayé. Cela commençait toujours par les bizuteurs qui les blâmaient pour quelque chose, les intimidaient et leur donnaient une punition injustifiée. Si quelqu'un les défiait en ne participant pas au bizutage, les bizuteurs le mépriseraient. Ils essayaient donc de s'en accommoder pour en finir.
Arthit était l'un d'entre eux. Il surmontait ce type de rituels d'initiation difficiles, à l'exception d'une chose qui lui causait de gros ennuis : la salle d'activités était infestée de “moustiques”.
Ces gros moustiques(1) étaient gros, rapides et donnaient des piqûres vicieuses. Ils tournaient autour du buffet d'élèves de première année qui devaient s'asseoir les jambes croisées selon les poses des cheerleaders, les deux mains sur les genoux, et n'avaient pas le droit de bouger. Ils ne pouvaient pas rester là à faire des dons de sang aux moustiques. Arthit, qui n'aimait pas tellement les animaux, fit bouger ses orteils dans l'espoir de se débarrasser des moustiques qui s'étaient posés sur son pouce… Ce mouvement n'échappa pas au regard du chef bizuteur.
— Pourquoi tu bouges ?!
Arthit sursauta au moment où il se retrouva dans le radar.
Il essayait de se fondre dans la masse car il ne voulait pas être le centre d'attention, mais maintenant tout le monde dans la pièce le regardait. Il se leva donc et donna sa réponse en bégayant.
— Eh bien, j'essaie de me débarrasser des moustiques.
— Ce sont les moustiques de mon campus ! Tu n'as pas le droit de les toucher !
Comme si c'était de ma faute… pensa-t-il.
Le Grand Frère de l'enfer donna la raison la plus ridicule qui soit. Pire, il leur donna même la punition la plus absurde.
— J'étais en train de parler, alors apprenez à respecter vos aînés quand ils sont en train de parler ! Ou bien vous ne connaissez pas du tout le mot “manière” ? D'accord, je vais vous apprendre ce à quoi correspondent les bonnes manières. Vous irez à l'arbre Banyan devant la faculté et vous y resterez pour lui rendre hommage, ainsi vous comprendrez ce que signifie le mot “manière” !
Ce n'est pas seulement Arthit qui fut surpris, mais toute la salle qui devint silencieuse en entendant cette leçon des plus stupides… alors qu'ils devaient rester debout pendant trois heures pour rendre hommage à un arbre. Il savait que le chef du bizutage s'amusait avec les étudiants de première année et voulut s'y opposer. C'est alors que quelqu'un exprima sa pensée à haute voix.
— Tu crois que les étudiants de première année veulent vraiment rendre hommage à quelqu'un d'aussi ridicule ?
Un type à côté de lui, avec un badge autour du cou portant l'inscription “Knot”, protesta à voix haute depuis l'une des rangées. Le chef bizuteur le regarda et lui demanda d'un air sinistre.
— Qu'est-ce que tu as dit ?
— Eh bien… vous vous demandez pourquoi nous n'avons pas fait preuve de respect à votre égard. Nous sommes ici pour étudier, pas pour être des esclaves et recevoir des ordres ! Le SOTUS n'est qu'un système pour les bourreaux, n'est-ce pas ?
L'explication rendit l'air tendu alors que personne n'osait parler, regardant le bizuteur en chef s'approcher pour faire face à l'étudiant de première année défiant.
— Tu sais respecter tes aînés ? Je suis ton aîné et tu es mon cadet. Tu devrais me respecter. Tu ne peux pas être ici uniquement pour étudier et ne pas te faire d'amis ou faire partie d'un groupe. Tu crois que tu vas réussir à voler de tes propres ailes ?
— Ce n'est pas ton problème de savoir si je vais réussir ou non.
— C'est vrai ! Chaque endroit a ses propres règles. Si tu ne peux pas suivre les nôtres, pars !
— D'accord, je vais partir !
Knot se leva d'un bond, s'apprêtant à quitter la salle comme il avait insisté. Mais alors qu'il avançait un pied, un mot faible sortit de la bouche du chef des bizuteurs.
— Quelle mauviette !
Le mot “mauviette” fut prononcé par les bizuteurs qui se tenaient autour des élèves de première année, comme s'ils avaient pratiqué cet exercice, destiné à humilier l'élève de première année qui s'apprêtait à partir et à l'arrêter dans son élan. Knot se retourna et regarda le coupable qui haussa les sourcils pour se moquer de lui.
— Alors, pourquoi tu t'es arrêté ? Ou bien tu ne peux plus voler ? Tu n'as même pas quitté le hall que tu tombes par terre… mort.
L'humiliation coupa comme un couteau et fit craquer le jeune homme. Knot fonça sur le senior, tirant son bras en arrière, s'apprêtant à donner un coup de poing à celui qui s'était moqué de lui. Arthit, qui se tenait debout, l'attrapa, le retint et cria.
— Doucement, Knot !
— Je ne peux pas ! Tu n'as pas entendu ce qu'il a dit ?!
Knot explosa, furieux, même si c'était un gars tranquille. Mais si vous le titilliez sur sa dignité ou son amitié, il se battrait bec et ongles contre vous. Arthit le connaissait bien et tenta d'arrêter son ami.
— Il se moquait de toi. Si tu exploses, ce sera exactement ce qu'il voulait !
— Mais…
— Tu as dit que tu voulais étudier, alors ne te mets pas dans le pétrin. Reste avec nous et étudie, d'accord ?
Un plaidoyer sincère avec des yeux intenses calma l'homme en colère. Arthit n'avait pas tort. S'il se battait avec les bizuteurs, il serait sévèrement puni. Il pourrait être banni ou suspendu. Plus il insisterait, plus cela deviendrait une mission suicide. Il dut donc céder, bien qu'à contrecœur.
— D'accord.
Tout redevint normal. Le chef bizuteur Tum, qui observait silencieusement la situation, s'en aperçut lui aussi.
… C'était étrange. Il pensait qu'il allait être attaqué et s'était préparé à une situation d'urgence. Il avait fait son exercice habituel, attisant leur colère selon le scénario des bizuteurs. Soudain, un type s'était interposé et avait perturbé le plan.
… Un étudiant de première année ordinaire qui avait calmé son ami en quelques mots, connaissant les faiblesses de ce dernier. Il fallait donc qu'il essaie à nouveau de les perturber.
— Ne retiens pas ton ami. Comme je l'ai dit… si quelqu'un ne peut pas accepter nos règles, il doit partir.
Cette fois, celui qui avait empêché son ami de se battre se leva pour faire face au bizuter.
— Si je le fais, nous pouvons rester, n'est-ce pas ?
Son ton et sa démarche étaient peut-être respectueux, mais ces yeux aiguisés cachaient quelque chose de plus intense et évoquaient quelqu'un qui ne voulait pas reculer. Il avait mal jugé le garçon… et se sentit même mis au défi lorsqu'il acquiesça.
— Oui.
— Très bien, dit Arthit.
Il fit volte-face et quitta le hall, ignorant le chef bizuteur qui l'engueulait.
— Où tu vas ?!
— Je vais rendre hommage à l'arbre Banyan comme vous nous l'avez demandé ! N'était-ce pas notre punition ?
En entendant l'explication, Tum s'arrêta. Il avait oublié la punition qu'il avait infligée aux élèves de première année, et il ignorait si le garçon avait obéi par pure malice. Au moins, les élèves de première année auraient un exemple des conséquences de leur défiance. Il autorisa donc le jeune homme à partir.
— Eh bien, tu peux y aller ! Quant aux autres, ils seront tous punis. 100 squats, faites-les maintenant !
La malchance s'abattit à nouveau sur les élèves de première année. Heureusement, les choses ne dégénèrent pas cette fois-ci. Le pire était la punition des squats jusqu'à ce que les bizuteurs soient satisfaits. Il était presque 19 heures lorsque la séance de bizutage se termina enfin.
Mais alors qu'ils repartaient chacun de leur côté, le chef des bizuteurs n'avait pas encore fini son travail. Il devait convoquer une réunion pour résumer les résultats de la journée. Ce que personne ne savait, c'est que le chef des bizuteurs, Tum, craint par tous les étudiants de première année, était devenu l'objet de réprimandes, en particulier de la part de Fon, la cheffe de l'équipe médicale, qui lui reprochait d'avoir dépassé les bornes.
— Tu as perdu la tête ! Qu'est-ce qui va se passer si tu ne peux pas les contrôler ? Tu sais qui va avoir des problèmes ? Pas les élèves de première année, mais vous ! Si ça se reproduit, je vais voir le recteur !
— Oy, arrête de faire des histoires, Fon. Tu es une belle fille, mais qui va t'épouser si tu es si grincheuse !
— Tum ! Tu es comme ça et c'est pour ça qu'ils ne te respectent pas ! Tu es fier qu'ils te donnent un wai parce qu'ils ne veulent pas être punis ?!
Les mots tranchants le firent réfléchir. Au fond, il avait ses raisons.
… Il considérait le wai comme une tradition thaïlandaise qui devait être préservée. Elle apprenait aux jeunes élèves à être humbles et les élèves plus âgés étaient gentils avec eux, les reconnaissant comme leurs cadets. S'ils avaient des ennuis, les plus âgés les aidaient. C'était un bon moyen de créer de bonnes relations et des liens au sein du département. Il ne voulait pas qu'ils soient coincés et ignorent les aînés. Faire un wai ne causait pas grand-chose, mais l'effet était grand, bénéfique. Alors pourquoi s'y opposer ?
Mais il n'avait pas envie de discuter, alors il lui fit une promesse, maintenant qu'elle remuait le couteau dans la plaie. La question étant réglée, ils terminèrent la réunion à près de 21 heures.
Tum soupira, fatigué. Il voulait retourner à son dortoir pour prendre une douche et bien dormir. Il traversa donc les bâtiments et se dirigea vers le parking devant la faculté pour prendre sa moto. Le ciel était sombre et la brise caressait les feuilles, créant une atmosphère inquiétante. Il sortit la clé de sa poche et les pièces tombèrent au sol. Elles roulèrent vers l'arbre Banyan et il dut aller les chercher, ne voulant pas perdre l'argent. Mais lorsqu'il leva les yeux, il aperçut une silhouette près de l'arbre qui le fit sursauter.
— Bon sang, qu'est-ce que tu fais là ? Tu m'as fait peur !
Tum déplaça ses lunettes, essayant de regarder de plus près. Il vit alors que la silhouette était en fait un être humain… et son cadet.
— Grand fr… P'Tum, Sawaddee Krub.
Le surnom de Grand Frère de l'Enfer qu'on lui avait donné échappa presque à Arthit. Il lui fit un wai comme il l'avait déjà fait à l'arbre et l'autre homme s'en souvint.
— Ne me dis pas que ça fait trois heures que tu es là à rendre hommage à l'arbre ! s'écria le chef des bizuteurs, incrédule.
Il pensait qu'une fois le bizutage terminé, les étudiants de première année se précipiteraient chez eux, y compris celui qui avait été puni. Personne ne serait assez idiot pour rester debout pendant des heures. Mais lorsqu'il vit les piqûres de moustiques sur la peau de l'autre, ainsi que les mains tremblantes sur son torse, comme si le jeune homme était sur le point de s'effondrer, il comprit qu'il y avait un idiot qui se soumettrait à ce calvaire. Il répondit même.
— Vous m'avez dit que si je voulais rester, je devais suivre vos ordres.
Tum avait envie de faire une grimace. Il ne savait pas si ce type était fou ou simplement stupide et lui demanda.
— Eh bien, oui, je l'ai fait. Mais tu n'es pas fatigué ?
— Si, je le suis. Mais j'ai fait ça parce qu'on m'y a forcé, pas parce que j'en avais envie.
Cette réponse le fit réfléchir… car les mots de Fon revinrent le hanter.
… Les forcer à respecter les aînés n'était pas différent de les forcer à respecter un arbre. Plus il les poussait, plus ils le feraient, mais pas avec le cœur, et cela n'aurait aucun sens.
— De plus, je vous ai donné ma parole, alors je devais le faire.
La conviction du type fit que Tum le regarda d'un œil nouveau. Il remarqua alors le badge avec le numéro de code au cou du jeune homme.
Tum réfléchit à quelque chose et poussa un soupir résigné. Il posa une question d'une voix neutre.
— Quel est ton putain de nom ?
— Je m'appelle Arthit, répondit-il, déconcerté par le juron que le bizuteur utilisait comme s'ils étaient amis.
Son nom était inscrit sur le badge, mais le type lui posait quand même la question.
— Tu as un surnom ?
— I-Oon, monsieur.
Le vrai nom et le surnom avaient les mêmes syllabes. Ce n'était pas très viril, mais c'était plus facile à utiliser qu'Arthit. Tum l'inscrivit dans sa mémoire et abrégea la conversation.
— Très bien. Tu peux y aller maintenant. Trouve un baume pour tes piqûres. La prochaine fois, tu pourras m'appeler Grand Frère, ça ne me dérange pas.
Les yeux d'Arthit s'écarquillèrent de surprise en entendant les mots qui témoignaient de la gentillesse de l'autre homme, contrairement à l'impitoyable chasseur de têtes de l'enfer. Il ne savait pas ce qui était arrivé à l'autre homme pour qu'il change si soudainement, mais il acquiesça rapidement.
— Merci, Grand Frère, j'y vais. Bonne nuit.
Arthit leva la main pour saluer son aîné et s'éloigna à grands pas, les jambes raides et douloureuses d'être restés trop longtemps debout, laissant derrière lui un troisième année contemplatif dont le regard était toujours posé sur lui.
… Il ne savait pas pourquoi il lui était facile de se défaire de son image de dur à cuire avec ce type. Peut-être voulait-il qu'Arthit le respecte du fond du cœur. Il devrait commencer par laisser tomber les plaisanteries, et lui donner des conseils et de l'attention comme un bon senior devrait le faire, en particulier à l'élève de première année dont le potentiel était évident.
Dignité, responsabilité et dévouement, ce type avait tout pour lui. De plus, plus il le connaissait, plus il découvrait l'“extraordinaire dans l'ordinaire” qui était unique et charmant.
— Je suppose que le code 0206 a trouvé son futur chef des bizuteurs, murmura-t-il avec un léger sourire.
Il ne pouvait pas prédire l'avenir, mais si ce qu'il espérait se réalisait…
… Alors, le “chef des bizuteurs Arthit” ferait un grand homme. | | Messages : 942
Date d'inscription : 19/06/2024
| Néphély Ven 27 Sep 2024 - 17:35 Chapitre Spécial 5 Quand Kongpob est devenu un bizuteur Le terme “Bizuteur” désignait quelqu'un qui devait toujours afficher une mine renfrognée, jouer les durs, crier et hurler d'une voix ferme, être doué pour le sarcasme, s'en prendre aux erreurs des autres, trouver la bonne punition à appliquer et apprendre aux élèves de première année à s'unir à leurs camarades de classe.
… Telles étaient les caractéristiques fondamentales des bizuteurs. Les élèves de première année avaient entendu parler d'une réputation totalement opposée à celle de l'homme qui se trouvait devant eux.
Ce grand gaillard vêtu d'une chemise d'atelier était à des années-lumière d'être qualifié de “sauvage”. Il mesurait 1m80, ce qui le distinguait des autres. Sa beauté le rendait populaire et charmant. Ils avaient entendu dire qu'il avait été couronné roi de l'université et que ses notes pourraient lui valoir un honneur. En plus, il était le vice-président de la classe. Toutes ces qualités réunies en une seule personne.
… Le chef bizuteur Kongpob.
L'homme parfait qui détenait le pouvoir au sommet de la chaîne d'initiation. Il n'était pas étonnant que les filles soient fascinées et se pâment devant lui, et qu'il attirait de nombreuses étudiantes à participer au bizutage.
Pourtant, un bizuteur en chef restait un bizuteur, et sa tâche principale était de maintenir le système SOTUS qui était transmis depuis des générations. Aucune indulgence n'était accordée à qui que ce soit pour préserver la dignité des ingénieurs.
Par conséquent, après avoir entendu l'hymne de la faculté, Kongpob laissa échapper un doux soupir et leur donna son verdict.
— Je dois dire non.
Près de deux cents étudiants de première année du département d'ingénierie industrielle pâlirent. Ils n'avaient pas réussi le test en chantant l'hymne de la faculté - ils n'avaient eu que trois jours pour s'entraîner - parce que leur performance ne correspondait pas aux attentes des bizuteurs, comme le chef des bizuteurs, Kongpob, venait de leur dire. Au lieu de les décourager, le chef des bizuteurs choisit de leur donner quelques conseils pour leur remonter le moral.
— Je ne vous blâme pas. Peut-être que chanter en groupe n'était pas bon pour vous. Que diriez-vous d'une autre option ? Le test consiste à ce que chacun d'entre vous chante l'hymne seul. Peut-être y arriverez-vous cette fois-ci ? Quelqu'un a une idée ?
La question était posée avec un ton amical… Cela contrastait avec le bizutage impitoyable dont ils avaient fait l'objet. Mais pour les bizuths, la politesse les stressait plus que les cris purs si bien que personne n'osait donner des suggestions. Kongpob en profita pour conclure.
— Si personne n'est contre l'idée, alors tout le monde est d'accord. Commençons par toi.
Il désigna un homme au premier rang. Celui-ci se leva à contrecœur et s'avança pour se placer devant la troupe et chanta l'hymne… afin que les bizuteurs puissent le juger sur sa performance en solo. Une fois qu'il eut terminé, le chef des bizuteurs lui donna un verdict sévère.
— Ta voix était trop faible, les aînés à l'arrière ne t'entendaient pas. Tu peux chanter à nouveau, mais plus fort ?
Le commentaire incita le jeune homme à suivre l'ordre et il commença à chanter pour la deuxième fois. Mais cela ne plaisait toujours pas au bizuteur, qui lui fit une nouvelle critique.
— Ton tempo était trop rapide. Tu peux aller un peu plus lentement cette fois-ci ? Recommence à chanter, s'il te plaît.
Certains élèves de première année commencèrent à se rendre compte que l'option proposée par le bizuteur en chef Kongpob n'était pas une solution de facilité. Cette épreuve de chant en solo était plus brutale que celle de The Star ou de Thailand's Got Talent. Mais comme ils ne pouvaient pas demander d'être exemptés, ils devaient supporter que leurs pairs chantent sous une forte pression. Bien sûr, le jeune homme n'avait toujours pas réussi à se qualifier à sa troisième tentative en raison des critères impossibles à respecter imposés par le juge.
— Tu as chanté faux à la fin. Attention à l'aigu. Recommence.
Malgré sa gorge irritée d'avoir chanté fort pour la quatrième fois, le jeune homme dû suivre l'ordre jusqu'à ce qu'il réussisse enfin le test, sa gorge était alors desséchée. Mais Kongpob, le chef des bizuteurs, ne semblait pas perturbé. Il jugeait toujours la performance d'un air indifférent.
— Tu n'as pas bien prononcé le “r”. Recommence, s'il te plaît.
Le chanteur n'était pas le seul à pâlir, ses camarades de première année commencèrent eux aussi à s'agiter, inquiets pour leur ami dont la voix était presque inaudible. L'élève de première année continua à chanter d'une voix rauque, jusqu'à ce que plusieurs de ses camarades n'en puissent plus et se mettent à chanter dans les rangs.
Quelques instants plus tard, tous les élèves de première année présents dans la salle d'activités chantaient à l'unisson jusqu'à ce qu'ils atteignent le dernier couplet. Tous les yeux étaient rivés sur le chef des bizuteurs, Kongpob, en attendant son verdict. Et le résultat fut le suivant.
— Vous avez réussi.
Une forte acclamation éclata dans la salle et les étudiants de première année sourirent largement, heureux d'avoir finalement réussi à passer l'épreuve de l'hymne de la faculté ensemble. Kongpob observa leur succès, car son plan avait fonctionné.
… Il avait tout organisé pour mesurer leur esprit et leur unité. C'était l'une des activités destinées à renforcer leurs liens, conformément aux principes du SOTUS. Toutes ces activités avaient pour but d'aider les étudiants de première année à tirer le meilleur parti de leur vie sur le campus.
Une fois l'objectif atteint, Kongpob mit fin à la journée pour que les étudiants de première année puissent rentrer chez eux vers 19h. En tant que chef des bizuteurs, il avait choisi d'éviter les cris et l'intimidation et d'opter pour une approche plus efficace qui les touchait plus profondément… tout comme il avait été bizuté, et avait vu son badge déchiré lorsqu'il était en première année.
Il se remémora le bon vieux temps. Il avait agi en héros, essayant de protéger ses amis, jusqu'à ce qu'il reçoive toutes sortes de punitions. Il supposait qu'il était devenu la cible de la colère des bizuteurs, un exutoire qui leur permettait de se défouler. Maintenant, qu'il était à leur place, il voyait les élèves de première année à travers les yeux d'un chef bizuteur. Il comprenait enfin le but de chaque action, et aussi des paroles d'une certaine personne.
— Comment ça se passe ? Tu es fatigué ?
Une voix le tira de sa rêverie. Kongpob leva les yeux, surpris, en voyant l'homme qui entra dans la salle d'activité.
— P'Arthit. Pourquoi tu ne m'as pas dit que tu venais, je serais venu te chercher ?
Il s'approcha de l'homme habillé d'une chemise et d'un pantalon, ressemblant à s'y méprendre à un employé de bureau, débarrassé de son look rebelle de bizuteur ingénieur. Il avait encore l'air jeune et pouvait se fondre dans la masse des étudiants, même s'il était déjà diplômé depuis six mois.
— Je suis ici pour obtenir mon relevé de notes. Je vais bientôt partir.
Arthit n'aurait jamais pensé trouver un emploi de bureau. En tant que diplômé en ingénierie industrielle, il y avait une myriade de choses qu'il pouvait faire, et il avait obtenu un emploi dans le département des achats d'une grande entreprise d'électricité. Il avait également décroché un emploi avant tous les autres élèves de la classe, si bien qu'il avait dû utiliser un relevé de notes ne comportant pas les notes du dernier semestre. À présent, au terme de la période d'essai de trois mois, il devait remettre la copie originale pour être considéré comme un diplômé et un employé à part entière.
Après le travail, il s'était empressé de revenir ici pour récupérer la copie et s'était arrêté pour saluer ses professeurs et quelques étudiants. Ensuite, ses pieds l'avaient conduit jusqu'à la salle d'activités. En tant qu'ancien responsable du bizutage, il n'avait pu s'empêcher de vérifier les activités de bizutage et avait constaté que le responsable cette année faisait du bon travail.
Kongpob avait mis en place sa propre méthode de bizutage, ne se concentrant pas sur une approche agressive mais mariant tout de même les leçons de morale que les étudiants de première année pouvaient facilement comprendre. Il avait entendu dire que P'Deer l'avait choisi pour devenir le chef des bizuteurs en raison de sa créativité, sachant qu'il trouverait des idées novatrices qui inciteraient les nouveaux venus à participer davantage aux activités de la faculté. D'après ce qu'il avait vu aujourd'hui, il pouvait enfin se dire que quelqu'un reprenait bien le flambeau.
— Tu as une réunion, n'est-ce pas ? demanda Arthit, sachant qu'après chaque session de bizutage, les bizuteurs devaient se réunir pour élaborer une tactique pour la journée à venir.
Son travail ici était fait et il n'y avait aucune raison de s'attarder.
— Tu devrais y aller maintenant. Je repars.
Il se retourna pour partir mais l'homme lui saisit le poignet, le retenant.
— Tu pars vraiment, P'Arthit ?
Cela ressemblait à une question, mais c'était plutôt une supplication… une rareté qu'aucun élève de première année n'avait vue de la part du bizuteur en chef Kongpob. Pourtant, le redoutable bizuteur s'était transformé en un grand chiot aux yeux pétillants auquel il était trop difficile de résister.
— Le fait est que… je ne suis pas pressé. Je peux rester un peu plus longtemps.
Arthit changea soudainement d'avis et un grand sourire s'alluma sur le visage de Kongpob. Lui aussi changea de plan.
— Alors, tu peux m'attendre ici ? Je vais le dire aux autres.
— Attends ! Tu ne peux pas ! C'est toi qui es le chef du bizutage et tu dois participer à la réunion, lui rappela Arthit car c'est ce qui comptait vraiment.
En tant que chef du bizutage, la responsabilité des tâches est la priorité numéro un. Mais Kongpob s'y opposa pour une raison bien précise.
— J'ai beau être le chef , je dois aussi m'acquitter de mon devoir de “petit ami”, P'Arthit.
… Qui aurait pu s'opposer à cela ?
Après sa déclaration au milieu de la fête de remerciement des seniors, ils avaient été bombardés de questions par leurs amis et une étrange rumeur s'était répandue dans toute la faculté. Ils avaient gardé leur routine, ne faisant rien de flagrant. Si quelqu'un demandait, il recevait un regard noir d'Arthit et ne cherchait pas à en savoir plus. Kongpob leur répondait par un sourire. Heureusement, leurs amis comprenaient leur relation homosexuelle, et ils avaient donc poursuivi leur vie sur le campus comme deux hommes, tout en préservant leur relation.
Arthit attendait son “petit ami” à l'extérieur de la faculté pour lui faire plaisir. Un peu plus tard, Kongpob arriva.
— Je suis désolé de t'avoir fait attendre. Tu as faim ?
Il avait dit à ses amis que quelque chose d'important était survenu et nécessitait son attention. Il était presque 19 heures à sa montre. D'après les habitudes d'Arthit, il savait qu'il n'avait pas mangé depuis la fin de l'après-midi. Mais au lieu de répondre, Arthit lui posa une question.
— Eh bien, demandes-toi plutôt. Tu as mangé quelque chose ? Tu as l'air d'avoir perdu du poids.
Arthit promena son regard aiguisé sur le corps de l'autre homme. Il savait à quel point le métier de bizuteur était éprouvant et exigeait beaucoup d'entraînement. Ils étaient tous les deux très occupés et n'avaient pas beaucoup d'occasions de se voir. C'était la première fois en deux mois qu'ils se retrouvaient. Pourtant, Kongpob ne pouvait s'empêcher de le taquiner.
— Tu t'inquiètes pour moi, P'Arthit ?
Ces mots firent chauffer le visage d'Arthit, qui se détourna en faisant mine d'être offensé.
— Ne change pas de sujet. Alors, qu'est-ce que tu veux manger ?
— Du riz avec une omelette au porc haché.
Kongpob réclama son plat préféré et simple. Arthit n'y trouva aucune objection. Il aimait aussi manger des plats simples comme le poulet krapao avec un œuf au plat. Il n'y avait qu'un seul restaurant qui proposait ces deux menus, alors il monta sur la moto de Kongpob pour s'y rendre. Ils n'oublièrent pas de s'arrêter pour prendre un verre de café glacé et un de lait rose avant de prendre leur repas tout en discutant comme au bon vieux temps.
— Tu as eu des problèmes pendant le bizutage ?
— Aucun. Les étudiants de première année ont été très dociles cette année. Ils participent presque tous aux séances.
Le bon fonctionnement sous le règne de Kongpob irritait Arthit. Il savait qu'ils étaient tous là à cause du look du chef. Lorsqu'il était en activité, près d'une cinquantaine de nouveaux ne venaient pas au bizutage malgré ses punitions sévères. Il avait également été contesté et ses plans de bizutage avaient été perturbés. Il ne put s'empêcher de se plaindre.
— Eh bien… j'ai pensé que tu aurais peut-être un emmerdeur comme moi à mon époque.
Inutile de préciser qui était le fauteur de troubles. Il n'y avait qu'un seul homme qui s'était dressé contre l'impitoyable chef bizuteur à l'époque de la première année de Kongpob. Le jeune homme fit comme s'il ne comprenait pas ce que disait Arthit et demanda.
— Quel genre d'emmerdeur ? Le genre à vouloir faire de moi sa femme dès le premier jour du bizutage ?
— KONGPOB !
Le cri attira l'attention des autres clients du magasin. Arthit dut se ressaisir et retourna à sa nourriture pour cacher son embarras et aussi les battements de son cœur.
… Deux ans s'étaient écoulés depuis le jour où il avait entendu cette déclaration. Il avait été furieux que le jeune homme l'ait insulté. Aujourd'hui, leur relation avait franchi une nouvelle étape. Lorsqu'ils étaient ensemble, ils devenaient intimes, en particulier parce qu'ils étaient tous les deux des hommes. Il aurait pensé que Kongpob suivrait ses paroles, mais il devait jouer le jeu. Au moins, c'était le fruit de l'amour et non de la luxure.
Enfin, ils finirent de manger le riz avec une omelette et le poulet krapao avec un œuf au plat. Il était temps pour Arthit de partir car son bureau était assez éloigné du campus. Il lui faudrait plus de temps pour rejoindre son appartement, alors Kongpob le raccompagna jusqu'à l'arrêt de bus. Puis il prit la parole, inquiet.
— Prends bien soin de toi, P'Arthit.
— Toi aussi. Prends du repos si les choses se gâtent, l'avertit Arthit.
Ils avaient beaucoup de travail en troisième année, et Kongpob était aussi bizuteur en chef. Même s'il ne se plaignait pas, la fatigue se lisait sur son visage. Mais le jeune homme sourit et lui demanda de manière taquine.
— Si tu dis que je te manque, je ne serai plus fatigué.
… Encore une fois. Kongpob trouvait toujours une occasion de flirter avec lui et cela s'aggravait de jour en jour, comme si le jeune homme avait enfin découvert son point faible. Mais pire encore… Arthit tombait dans le piège, incapable de se détacher.
— Pas question que je dise ça !
Kongpob s'était encore fait gronder après avoir énervé son homme. Il connaissait déjà le résultat, mais il l'avait quand même fait parce qu'il voulait voir l'expression nerveuse sur le visage d'Arthtit qu'il trouvait indescriptiblement charmant. Il ne pouvait pas s'en empêcher, tout en sachant que c'était puéril.
HONK !
Le son provenait du bus qui s'arrêtait pour prendre des passagers. C'était la ligne qu'Arthit attendait pour se rendre à son appartement. Son compagnon s'écarta, s'apprêtant à regagner son dortoir sur sa moto. C'est alors que l'autre homme tira sur l'ourlet de sa chemise.
— Attends…
Kongpob se retourna, surpris. Il fut d'autant plus déconcerté quand il lui fit signe avec un doigt de s'approcher, et il se pencha. Arthit leva la main et l'approcha de son oreille en chuchotant.
— Tu me manques, Kong.
… Les mots les plus doux résonnèrent très fort dans son cœur.
Ses yeux s'écarquillèrent, il n'arrivait pas à croire que son souhait s'était enfin réalisé. Ces mots avaient le pouvoir de chasser son épuisement et de remplir son cœur de chaleur.
— J'y vais maintenant.
Arthit recula d'un pas et s'apprêta à monter dans le bus. Kongpob lui saisit la main, essayant de le faire rester.
— Attends. Ne pars pas tout de suite.
— Non, je dois aller tôt au travail !
— Je pourrai te déposer demain matin. Tu seras à l'heure, promis. Mais s'il te plaît, reste avec moi… ce soir. S'il te plaît ?
La demande avec ces yeux scintillants… fit hésiter Arthit qui n'était pas monté dans le bus. Le conducteur lui cria dessus.
— Tu montes dans le bus ou pas, Nong ? !
Arthit finit par céder, lâchant le bus qu'il attendait. Il se retourna vers le coupable.
— Si je suis en retard demain, tu devras faire cent pompes devant tes élèves de première année !
L'ordre qui convenait à l'ancien responsable du bizutage ne l'effraya pas le moins du monde. Le jeune homme se mit même à rire à gorge déployée.
— Je pourrais faire cent tours de piste pour ça.
Kongpob était certain qu'aussi longtemps qu'il serait le chef des bizuteurs, il n'aurait pas peur de ce qui se trouverait sur son chemin. Car il savait qu'il aurait toujours un homme à ses côtés.
Il comprit enfin ce qu'Arthit lui avait dit il y a longtemps, à savoir que peu importe le nombre d'années qui passaient…
… c'était toujours le “chef des bizuteurs” qui se souciait le plus de l'élève de première année. | | | |
| |